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Clarisse d'Aquitaine
HUMAINE - DUCHESSE

inventaire

Inventaire : Ceci est votre inventaire. Un objet autorisé pour le début de l'aventure.
Espèce : Humaine
Emploi : Courtisane (fille du Duc d'Aquitaine)
Pièces : 2548

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Clarisse d'Aquitaine
Inventaire : Ceci est votre inventaire. Un objet autorisé pour le début de l'aventure.
Espèce : Humaine
Emploi : Courtisane (fille du Duc d'Aquitaine)
Pièces : 2548
Mer 17 Nov - 22:40
Soulever les montagnes auvergnates.



RP du point de vue de Mathilde,
la Duchesse d'Aquitaine

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C’est d’un pas ferme que la duchesse descend de la calèche qui l’a amenée jusque sur le parvis du château du Duc. Elle connaît plutôt bien l’endroit, ayant grandi sous l’égide de l’ancien Duc. Sa venue ici n’a aucunement été annoncée, bien entendu.

Deux ou trois fois par an elle se fait des retraites dans ses terres natales, à Forez, auprès de son frère désormais Marquis de Boisy qui n’a jamais su lui refuser quoi que ce soit. Et certainement pas l’hospitalité. Qu’elle l’admette ou non, Mathilde d’Aquitaine a besoin de revenir humer l’air de l’Auvergne. Bordeaux et l’Aquitaine ont leur charme mais bon sang, tout y est bien trop plat !

Vêtue d’une longue robe ample, ses cheveux relevés en un chignon appliqué, elle laisse à l’un de ses serviteurs le soin de la présenter.

Voyant l’homme essayer de se faire entendre auprès de deux valets réfractaires, elle s’avance.

« Je requiers une audience auprès du Duc.
- C’est que… Son Éminence a demandé à ne pas être dérangé…
- Ah ça, j’imagine qu’il doit être bien occupé ! »

Elle a un léger rire ironique et lève les yeux au ciel avant de faire un pas en avant.

« Ne me faites pas perdre plus de temps, je vous prie. Annoncez-lui que la Duchesse d’Aquitaine l’attend dans son antichambre. » Elle prend la direction d’un couloir attenant, son serviteur la suivant de près. « Je connais l’endroit, ne vous en faites pas. »

Dans son dos, les valets s’activent, surpris par pareille intrusion. Un majordome vient les rejoindre, semblant avoir reconnu la femme qui s’est ainsi présentée. La duchesse, quant à elle, s’approche d’une pièce où un garde lui ouvre une porte à double battants pendant qu’une jeune servante arrive, paniquée. « Nous… nous allons vous faire porter du thé, Madame. Le Duc va bientôt vous recevoir. »

Mathilde fait un signe de la tête et regarde la jeune femme qui s’éloigne à pas pressés, avant de souffler : « J’espère bien. »

Elle a à dire et à faire avec le jeune Duc. S’il croit que s’enfermer dans son château est une solution, elle compte bien lui remettre les idées en place. Les minutes s’égrainent lentement et lorsque la jeune servante revient avec un service à thé, l’air pincé de la Duchesse ne cache en rien son agacement. Elle n’a jamais été reconnue pour sa patience, il faut dire.



20 août 1590

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Mer 17 Nov - 22:43
Soulever les montagnes auvergnates
Comme prévu, il ne s’était rendu à Paris que pour rendre visite au Duc de Normandie, encore convalescent. Il n’avait pas ressenti la moindre motivation à se rendre au palais royal pour saluer sa cousine, se mettre à genoux, courber l’échine, ou tout autre geste de sympathie ou d’alliance avec elle. Sa visite terminée, Ambrose ne désirait qu’une chose : quitter la capitale. Inutile pour lui de rester plus longtemps au plus près de cette cour qui suit une reine qui n’aurait jamais dû toucher à la couronne. Sa famille ? Il l’avait reniée, tout simplement. La plupart couvaient, protégeaient, maternaient Victoire pour lui éviter d’être trop confrontée aux devoirs incombant à sa position, ce qui avait le don de particulièrement l’agacer. A ainsi la pomponner, elle n’était pas fichue de remplir son rôle. Il eut tout le loisir durant son voyage en calèche et à chaque étape dans des auberges pour ruminer, seul, en songeant au destin tragique de la couronne de France.

Lorsque, enfin, les roues de son carrosse retournèrent la terre de l’Auvergne, le Prince oublié se sentit chez lui, en sécurité, à l’abri des bêtises de cousine, quand bien même son Duché n’avait aucune indépendance et lui devait des comptes. Au moins, l’éloignement lui donnait l’illusion qu’il n’avait aucun rapport avec elle, ses rejetons, son conseil inexistant, sa cour de personnes sans cervelle… Il s’imaginait déjà retrouver sa quiétude, ses entraînements lui permettant de perfectionner sa maîtrise de l’épée, mais également de décharger l’énergie négative lui rongeant l’existence. Heureusement qu’Alaric était l’équivalent de son plus fidèle ami, cet aller-retour si rapide en direction de Paris n’aurait pas valu le coup pour quelqu’un d’autre.

Arrivé à Clermont, chez lui, il mit le pied à terre et demanda à ce que son maître d’arme prépare le nécessaire pour une session d’entraînement. Ambrose prit tout juste le temps de se vêtir plus confortablement, d’une chemise en lin claire, afin de supporter les chauds rayons de soleil d’août, et d’un pantalon dans les même tons et le voilà déjà à l’arrière de sa demeure, le soleil tapant sur sa tête brune, en garde pour batailler avec son serviteur et maître d’arme.

Cela faisait une heure, tout au plus, qu’ils échangeaient de vifs coups d’épées, à se féliciter tantôt l’un, tantôt l’autre au sujet d’une belle parade, lorsqu’un serviteur vint interrompre l’entraînement du Duc. Essoufflé et ruisselant, l’homme d’une quarantaine d'années annonça la venue de la Duchesse d’Aquitaine. Ambrose, devenu un ours mal léché, pensa tout simplement lui demander de repartir vers ses terres et de le laisser en paix, lorsque le domestique, paré à toute éventualité, lui répondit du tac-au-tac qu’elle avait déjà pris ses aises et l’attendait. Elle ne manquait pas de culot, c’était certain. Il se demanda un instant si elle n’avait jamais eu vent des rumeurs au sujet du comportement du Duc : devenu solitaire, isolé, réfractaire à la vie de cour et aux mondanités. Et bien puisqu’elle désirait le voir, ce serait tout de suite.

Et tout de suite, cela impliquait plein de sueur, les joues rouges, la chemise en partie détrempée et l’humeur à couper au couteau. En traversant sa demeure, le fameux domestique lui proposa tout de même une serviette pour se rafraîchir, qu’il accepta, mais il n’allait pas non plus faire moult d’efforts pour la Duchesse, qui n’avait pas prit le temps de le prévenir de son arrivée à l’aide d’une missive. Il pénétra sans prévenir dans l’antichambre où la Duchesse se trouvait, accompagnée d’une tasse de thé. Devait-il lui faire un baise-main ? Se contenter d’un signe de la tête ? Ne rien faire ? Il choisit la seconde option. Il était complètement dépassé par toutes les marques de politesses, maintenant qu’il vivait reclus.

- Duchesse, que me vaut l’honneur de votre visite ? Pardonnez ma tenue sommaire, j’étais en plein entraînement et visiblement, il ne fallait pas vous faire attendre.

Un ours mal léché, isolé et replié sur lui-même...
Clarisse d'Aquitaine
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Mer 17 Nov - 22:47

(RP du point de vue de la Duchesse d'Aquitaine)


Avouons-le tout net : le Duc a le sens de l’à-propos, à sa manière. Tandis que la Duchesse s’impatiente, le voilà qui arrive enfin. Et quelle arrivée ! Chemise trempée à demi entrouverte, les cheveux en bataille et le visage rougi par l’effort. Même si elle a son lot d’expériences surprenantes, il faut admettre que Mathilde d’Aquitaine ne s’attendait pas à cela et a un léger temps de retard pour fermer sa bouche ronde par la dimension incongrue d’une telle venue. Elle reste femme tout de même et au fond d’elle se rappelle à cette vue pourquoi sa fille a un penchant tout particulier pour cet homme. Ah, si elle était plus jeune !

Enfin... La question n’est pas là. Le Duc se contente d’un rapide signe de la tête à son encontre et prend la parole. On est bien loin de l’étiquette habituelle en pareilles circonstances et la Duchesse ne peut s’empêcher de lever les yeux au ciel.

« Monsieur le Duc, si je ne peux qu’être surprise par votre tenue, je loue toutefois votre sens des priorités. Je me doute que vous battre après votre ombre doit être un exercice prenant maintenant que vous vous êtes enfermé dans vos montagnes auvergnates… »

Elle le fixe un instant et puisqu’il ne réagit pas, ajoute : « Est-ce donc ainsi, dans votre antichambre, que vous souhaitiez que nous discutions ? » On le dit reclus dans ses terres, certes, mais tout de même ! Aurait-il oublié tout sens du convenable ?

Le majordome âgé croisé plus tôt s’est avancé derrière le Duc et se racle la gorge. « Votre Excellence, le petit salon a été préparé pour Madame la Duchesse et vous-même, si vous désirez… » Au moins une personne adepte du bon sens ici-bas ! Mathilde croise le regard du vieux serviteur qui baisse les yeux, embarrassé.

Comme pour l’aider, elle fixe le Duc avec un fin sourire. « Puisque je désire m’entretenir avec vous de votre avenir, autant le faire dans de bonnes conditions, ne croyez-vous pas ? » Elle ne lui laisse d’ailleurs pas le temps de répondre et s’avance vers le majordome. « Je vous suis. »



20 août 1590

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Mer 17 Nov - 22:50
Soulever les montagnes auvergnates
Son apparence, son ton, son comportement, rien n’était exemplaire ici. Ses parents, ou pire encore, son grand-père, devaient se retourner dans leur tombe en observant Ambrose ainsi accueillir la Duchesse d’Aquitaine. Néanmoins, l’avis de son grand-père, autrefois son idole, n’avait plus guère d’importance depuis qu’il avait découvert, comme tout le reste des français, sa trahison et son erreur de jugement…

Si rien n’allait dans l’image que renvoyait le Duc d’Auvergne, rien n’allait non plus avec la Duchesse, son invitée. En une poignée de secondes, elle réussit l’exploit de renfrogner un peu plus le brun qui sentit la chaleur irradier dans ses joues. Sous couvert de le féliciter d’avoir su prioriser la Duchesse, cette dernière lui rappela sa fuite au fin fond de l’Auvergne et son incapacité à correctement recevoir la noblesse de France. Ne désirant pas devenir désagréable, il pinça ses lèvres et poussa un soupir. En voulant donner une leçon à son invité surprise, cette dernière se jouait finalement de lui.

André, fidèle serviteur de sa famille depuis son enfance, proposa de rejoindre le petit salon. Un peu honteux, comme un enfant que l’on aurait réprimé et qui bouderait, Ambrose se chercha une contenance et bégaya quelques instants avant de reprendre une voix ferme :

- Hmm… C’est cela oui, le petit salon.

Mais la Duchesse suivait déjà André et Ambrose se sentit très légèrement laissé sur le carreau. Un plaisir. A quoi devait-il s’attendre au sujet de cette conversation sur son avenir ? Ambrose n’avait plus d’avenir depuis que sa place de roi avait été détournée par sa cousine, traîtresse, incapable, ayant pactisé au-delà des frontières… L’ours, autrement nommé le Prince oublié, ne se doutait absolument pas de la tournure que prendrait la conversation. Lui qui pensait renvoyer la Duchesse là où elle venait, finalement, il se sentit presque intrus dans sa propre demeure.

Retrouvant un semblant de courtoisie et de bon sens, il attendit que la Duchesse prenne place sur le fauteuil le plus confortable et, à son tour, il s’assit face à son invitée. Il n’allait tout de même pas se laisser impressionner par une bonne femme ! Une qu’il connaissait depuis son enfance et dont l’aînée avait fortement fréquenté son enfance. Elle ne lui était pas étrangère et ne l’impressionnait pas. Pourtant, il fallait être honnête : la mère de Clarisse dégageait une aisance naturelle et un fort caractère, dont sa fille avait d’ailleurs hérité.

- Madame, les conditions sont-elles réunies pour que nous puissions discuter de cet avenir que vous semblez connaître ?

Le Prince oublié avait été piqué, il vivait reclus, entouré de ses plus proches partisans et dans l’ignorance la plus totale du reste du monde, au-delà de son duché. Il ne fallait donc pas trop lui en demander en matière de politesse. Et surtout, quand bien même cela lui coûterait de l’avouer, il se sentait très vexé d’entendre que cette femme prétendait connaître les secrets de son avenir, quand lui-même était bien incapable d’imaginer un lendemain qui ne serait pas solitaire et sombre.

Un nouveau raclement de gorge de la part d’André et le Prince comprit que sa mauvaise humeur était de trop dans la conversation. Fort heureusement, l’homme était apprécié du Duc et il ne lui tiendrait pas rigueur d’ainsi intervenir dans une conversation entre nobles. Au contraire, il saurait le remercier de le rappeler à l’ordre, de lui montrer ses erreurs de jugements. André était un serviteur, mais il l’avait vu grandir et avait toujours été loyal envers sa famille. Vestige de son passé, il ne pouvait ni se passer de ses services, ni des bons souvenirs d’un passé anéanti par la maladie qui accompagnaient sa présence.

Les prunelles du Duc revinrent vers celles de la Duchesse et, après un bref soupir, il tenta de se rattraper maladroitement, mais sincèrement.

- Comme vous l’avez si bien souligné, je chasse principalement mon ombre au quotidien, alors tenir une conversation avec vous est un exercice particulièrement complexe. Dites-moi, Madame, pourquoi vous êtes-vous déplacée jusqu’ici alors que vous pouviez m’écrire ?

Après tout, il lui arrivait de lire ses lettres, parfois...
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Mer 17 Nov - 22:53
(RP du point de vue de la Duchesse d'Aquitaine)


On dit souvent que les nouvelles pousses ne seraient rien sans les anciennes et, en scrutant le dos du vieil homme qui la guide jusqu’au petit salon, Mathilde d’Aquitaine ne peut qu’acquiescer. Là où la jeunesse – plus si jeune, à bien y regarder – semble désemparée, c’est bien l’expérience qui s’apprête à prendre les devants et c’est elle qui se souvient encore de l’étiquette. La Duchesse n’ajoute rien face au Duc qui réagit avec un temps de retard et préfère afficher un sourire courtois à l’encontre du majordome qui la laisse entrer dans une salle plus élégante que la précédente.

Le Duc l’invite à s’asseoir sur l’un des fauteuils et elle ne se fait pas prier, lissant légèrement le pli de sa robe tandis qu’il s’installe à son tour, en face d’elle. Elle a toujours apprécié ce genre de moment, lorsque l’on bat les cartes pour un jeu dont elle seule connaît les règles, pour le moment. Le Duc n’aime visiblement pas plus que cela ses bons mots et elle hoche simplement la tête, l’air de rien.

« Oui, ce sera bien mieux ici, merci. » souffle-t-elle tout en captant l’intention du majordome et de son léger raclement de gorge. Si le jeune Duc d’Auvergne ne le réalise pas encore, il devrait mesurer la chance qu’il a d’avoir un tel homme dans son personnel de maison. Ce vieux serviteur paraît bien plus au fait que lui sur certaines choses… Dévoiler trop tôt son irritation n’aidera en rien le Duc à améliorer sa réputation. Elle pourrait en faire la remarque et… laisse couler.

Quoi qu’il essaie, elle gagnera sur le terrain des mots acides. Elle en a fait son arme au fil des ans. Mais elle n’est pas venue ici pour se quereller. Bien au contraire. Elle ne perd rien de l’attitude du brun sur son fauteuil qui semble chercher à deviner ses intentions. Il soupire et lorsque sa voix retentit à nouveau, il paraît nettement plus sincère, cette fois.

« C’est bien parce que cela vous est difficile qu’il vous faut vous exercer, cher Duc. L’épée est une chose, la stature et les mots en sont une autre. » Elle jette un regard circulaire sur le décor autour d’eux avant de laisser ses yeux bleus, petits bijoux dont sa fille a hérité, se poser à nouveau sur son interlocuteur.

« L’Auvergne est la terre de mes ancêtres, comme vous le savez… Je mets un point d’honneur à retourner ponctuellement à Forez, chaque année, pour voir mon frère le Marquis de Boisy. » Elle pourrait prétendre que c’est simplement pour cela qu’elle est venue jusqu’ici mais cela n’avancerait à rien. Elle n’a aucune raison de le faire languir.

« Alors je me suis dit que tant qu’à avoir le projet de vous parler, autant le faire en face-à-face. Ce dont nous avons à discuter se dit d’autant mieux à l’oral. » Elle marque un temps, cherchant ses mots. Mathilde est au courant de ce que l’on dit sur l’autre homme. D’un naturel déjà réservé, il serait devenu bourru entre ses murs. Ce qu’il lui a montré jusque-là va d’ailleurs en ce sens.

« Je suis venue vous rappeler que vous avez encore des alliés, Votre Excellence. Vous êtes un fils de France. Ne croyez pas que tout le monde l’a oublié. » Armand, son époux, n’approuve guère ce qu’elle est en train de dire. Il est trop frileux à l’idée de se monter contre la couronne mais sait pertinemment son projet de discussion avec le Duc et la teneur de ce qu’elle a à lui dire. Elle a émis l’idée, il n’a pas dit non. Aujourd’hui encore, c’est sa pensée à elle qu’elle exprime, bien plus que celle de son mari. Armand croit naïvement en l’harmonie et préfère ne jamais véritablement prendre parti.

« Pour le bien de la couronne, vous ne devriez pas vous enfermer ici. » Elle a encore beaucoup à dire mais ponctue ainsi, pour lui laisser le temps de réagir. D’entendre.



20 août 1590

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Mer 17 Nov - 22:56
Soulever les montagnes auvergnates
Face à son mauvais caractère, la Duchesse n’essaya pas de s’écraser pour rendre l’ours plus agréable. Et finalement, elle avait bien raison d’agir ainsi, Ambrose se ferait la remarque plus tard et André le lui confirmerait. Il fallait qu’il se reprenne, qu’il retrouve sa stature de noble. Ce n’était pas parce qu’on lui avait dérobé la couronne qu’il devait pour autant perdre de son éclat royal. En attendant, entendre dire qu’il manie bien l’épée mais se comporte comme un rustre, c’était quand même un tantinet vexant.

Pas le temps d’être boudeur, son vis-à-vis commençait à lui expliquer le fond de sa pensée et surtout sa venue ici. Certes, ses racines étaient profondément auvergnates, certes, il lui tenait à cœur d’y revenir régulièrement pour ne pas perdre son lien fraternel avec le Marquis de Boisy. Le Duc pouvait aisément l’entendre, mais cela ne répondait pas à sa question : pourquoi venir en personne ici quand une simple missive aurait pu faire l’affaire ? Ambrose avait presque envie de lui demander de passer les détails futiles pour en venir au point culminant de la conversation, mais bien évidemment, cela ne serait pas très bien perçu. Alors, cela lui coûta, la patience n’étant pas sa plus grande qualité, mais il ne la pria pas d’aller au cœur du sujet.

Lorsque la Duchesse lui rappela sa naissance et l’existence d’alliés, Ambrose ressentit une douleur sous sa poitrine, au niveau de son cœur. En réalité, ce dernier était en bonne santé, le Prince oublié entraînant quotidiennement son corps lors de ses entraînements, ne consommant pas outre mesure d’alcool et ayant une alimentation saine. Néanmoins, son âme, enfermée dans cet organe vital, souffrait qu’on lui rappelle sa destinée bafouée par une simple lettre de son ancêtre. Cela s’apparentait à de la torture, pour être plus exacte. Une torture qu’il s’infligeait, en songeant encore et encore au contenu de la lettre de son grand-père. Une torture qu’il subissait en se faisant appelé Duc et non Roi. Une torture qui le révulsait en constatant que la France sombrait lentement par l’incapacité de Victoire.

Éprouvé par ce qu’il entendait, le Prince oublié se frotta les yeux. Il savait fort bien que se replier en Auvergne, fuir la cour, les nobles au service de Sa Majesté la reine de la bêtise, c’était une grave erreur. Il devait se battre pour cette couronne, la sienne, celle qui n’avait de raison d’être que sur sa tête et non sur la tête blonde de sa cousine, longtemps exilée au Saint Empire Roman Germanique. Il avait envie de laisser éclater sa colère, celle qu’il exprimait uniquement dans ses vifs coups d’épée, durant ses entraînements. Néanmoins, une fois de plus, le Prince oublié resterait silencieux sur ses sentiments et ne laisserait que peu ses véritables pensées s’exprimer.

- Mes alliés Madame ? Ils ne se sont pas poussés au portillon pour me prêter allégeance lorsque la souveraineté de la France a été attribuée injustement à Victoire de France.

Le contraste entre la dureté de ses paroles, pourtant vraies et percutantes, et son ton impassible, son visage froid et figé dans une expression neutre, était remarquable. Ambrose était fidèle à lui-même, ou plutôt fidèle à cette personnalité qu’il s’était construit avec le temps, dans le simple but d’être un roi que l’on ne pourrait aisément déstabilisé. Finalement, cette facette de lui s’était recyclée, lui permettant de ne pas laisser transparaître combien la décision de son grand-père l’avait blessé, meurtri. Il n’était qu’un pion que l’on avait dépouillé de sa raison d’être. Il n’était qu’un pion que l’on avait mis au courant de toute cette intrigue au pire moment de sa vie, lorsqu’elle était rythmée par le deuil et la souffrance.
Clarisse d'Aquitaine
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Pièces : 2548

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Mer 17 Nov - 22:59
(RP du point de vue de la Duchesse d'Aquitaine)


Si les mots de la Duchesse d’Aquitaine ne sont pas de ceux que l’autre homme souhaite entendre, elle s’en moque bien. Elle n’est pas là pour le laisser s’apitoyer et l’accompagner dans son repli sur lui-même. Bien au contraire. Elle est femme à avoir toujours su tirer son épingle du jeu et ce n’est pas aujourd’hui que cela s’arrêtera. Que cet « ours », puisque c’est ainsi qu’on l’appelle, se renfrogne, cela le regarde. Il n’avancera pas s’il se contente de prendre poussière en ses terres. Et… si elle en croit la réaction qu’il a eu à l’annonce du couronnement de Victoire de France, son ego peut probablement le pousser plus loin que son goût pour les lamentations.

Pour cela, il aura besoin d’un coup de pouce. C’est bien ce qu’elle compte lui proposer. Mais en attendant, il faut qu’elle lui rappelle certaines choses. Comme le fait qu’il n’est pas le seul à avoir été surpris par les choix qui ont été faits, au sommet de la France. Nombreux sont ceux qui ne considèrent pas la Reine légitime pour diriger le pays. Nombreux sont ceux qui murmurent à son encontre et s'agacent de certains de ses choix, tout autant que de son parcours de vie. Quand il est question d’agir, toutefois, il ne reste plus grand monde. Si elle devait compter sur son mari le Duc d’Aquitaine, par exemple, elle se retrouverait à dire « C’est ainsi. », avec un fatalisme des plus épuisants.

Mathilde n’est pas de ceux-là. Elle l’a fait comprendre à Armand et le fera comprendre au Duc d’Auvergne, tout autant. « Dites-vous qu’il est préférable d’avoir de rares alliés de confiance à une foule de partisans prêts à vous trahir au moindre obstacle. » C’est un fait. « Et tant qu’à vouloir agir en votre sens, il vaut mieux le faire avec intelligence, désormais. Votre réaction à cette annonce et votre départ pour l’Auvergne ont largement trahi votre ressenti. Sur l’échiquier du pouvoir, l’impulsivité aide rarement. »

C’est ce qu’elle a toujours à sa fille dont elle n’est pas pleinement parvenue à contenir les crises de colère. Agir sur le coup de l’émotion, c’est se dévoiler bien plus qu’il ne le faut et laisser ses ennemis s’engouffrer dans la faille.  

« Si l’on veut rétablir l’ordre des choses… si vous voulez que l’on se rappelle de vous autrement que caché dans votre duché, Votre Excellence, il vous faut une bonne raison pour paraître à nouveau à la Cour. » Son intention va prendre forme peu à peu et ses yeux pétillent. « Et pas seul. »

Elle enchaîne rapidement, réaffirmant cette logique d’un geste de la main. « Avec la fiancée idéale à votre bras, vous y reviendrez plus fort et plus brillant… Agissez par contraste. Là où la couronne se ternit, dévoilez-vous comme une alternative silencieuse, par votre simple présence. La Reine n’aura aucune raison de ne pas vous accepter à ses côtés. »



20 août 1590

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Mer 17 Nov - 23:02
Soulever les montagnes auvergnates
C’était une qualité, tout comme un fardeau. Ambrose était capable de se contenir dans les situations ou bien d’autres se laisseraient emporter par les tremblements, les larmes, les battements de cœur rapides. Ici, quand bien même la colère était réelle, il ne la montrait pas. Tout comme le reste, il la gardait au fond de son cœur pour mûrir, puis refroidir. Hors de questions de battre des pieds dans le vide, de jouer des poings, d’avoir le visage tout rouge de colère et de hurler contre cette injustice. Peu de gens avaient le privilège de savoir le fond de sa pensée. Personne ne le comprenait, pas plus que personne ne méritait non plus de subir sa colère. C’était plus facile ainsi.

La Duchesse n’avait pas tort sur un point : le nombre faisait souvent la force et impressionnait, mais c’était également un danger, celui de subir bien plus de trahisons. Néanmoins, Ambrose ne pouvait compter que sur deux hommes comme principaux alliés : son frère, qui n’avait malheureusement pas hérité et n’était donc pas un poids dans la balance, et le Duc de Normandie, plutôt préoccupé à montrer sa colère envers la reine et son choix pour le maréchal Harcourt. Certes, cela était une bonne matière pour nourrir une alliance concrète entre les deux duchés, mais c’était maigre pour avoir un réel poids contre la couronne. Alors oui, le nombre était une force comme une faiblesse, mais deux nobles dispersés en France étaient surtout une faiblesse pour la moindre stratégie.

Il n’avait pas besoin que la Duchesse lui rappelle la plus grossière erreur de sa vie : celle de fuir la cour et de tourner le dos à la couronne, insatisfait par la tournure des événements. C’était également l’un de ses plus grands regrets, mais aux dernières nouvelles, il n’était pas capable de remonter le temps, seulement d’être pris de remords. Un peu vaincu face à cette vérité, il haussa les épaules, incapable de nier cette faute de sa part.
Un changement dans le regard de son invitée opéra dans son regard. A sa pupille bien plus présente, il devina qu’ils entraient dans le vif du sujet. Ainsi, le Prince oublié se redressa sur son siège et écouta attentivement chaque mot qu’elle choisit de prononcer.

Bien qu’elle n’ait pas explicitement exprimé son désir de le voir couronné plutôt que Victoire, la Duchesse avait parlé du mécontentement de bien du monde en France. Le lien était peut-être un peu hâtif, mais il en déduit que l’Aquitaine, qui ne s’était jusqu’ici pas prononcée, émettait quelques réserves au sujet de la souveraine de France. Ce détail, de la plus haute importance, expliquerait pourquoi son invitée a préféré une conversation en personne, plutôt qu’un échange de missives. La peur d’être prise la main dans le sac pourrait lui coûter cher, très cher. Et puis surtout, peut-être qu’enfin quelqu’un venait bousculer ce portillon, comme l’ours mal léché l’avait nommé ?

Le plan énoncé était en vérité très simple : retrouver une place à la cour, bien entouré, marié et apparaître comme tout le contraire de la souveraine. Son éclat revenu, nul doute que les regards se tourneraient vers lui, de nouveau. Et, quand bien même certains croyaient en Victoire de France, il y avait fort à parier qu’elle serait capable des pires décisions pour s’attirer la honte et le mépris. En comparaison, Ambrose redeviendrait la meilleure alternative à porter de main. C’était certain, ce serait plus efficace que de se terrer dans son duché en ignorant tout de la vie mondaine. L’idée n’était clairement pas mauvaise et ne lui demanderait pas d’effort surhumain, si l’on oublie qu’il devrait de nouveau fréquenter la noblesse quotidiennement et même les rejetons de sa cousine. Néanmoins, le Prince tiqua sur un point :

- Je suis forcé d’admettre l’idée simple, mais efficace. Ce n’est pas en restant ici que mes alliés me rejoindront pour me permettre de retrouver ce qui me revient de droit, ce pour quoi j’ai été mis au monde, instruit, éduqué, préparé. Néanmoins, dans votre discours, vous parlez d’une épouse. Vous devez bien connaître ma réputation à ce sujet et depuis mon isolement, je dois dire que mes prétendantes se sont faites plus silencieuses. Sans parler du fait qu’aucune n’a su trouver grâce aux yeux de feu mes parents, ni même aux miens lorsque j’ai eu mon mot à dire… A qui songez-vous ? Car j’imagine fort bien que vous avez quelques noms en tête.

Soudainement, une vague de nostalgie s’empara de lui. Il y a quelques années en arrière, il avait très certainement tenu un discours fort similaire avec… ses parents. De nombreuses joutes verbales avaient eu lieu entre eux. Au sujet d’étrangères dont il refusait ne serait-ce que de découvrir le portrait. De jeunes filles « bons partis » que ses parents trouvaient appréciables mais dont lui ne voyait aucun intérêt pour sa future vie de roi. Il se doutait même que quelques alliances avaient été discutées, débattues, refusées dans son dos, sans lui en souffler le moindre mot, et qu’un jour il finirait par les découvrir. Finalement, en quelque sorte, il avait gagné ces joutes avec ses parents, bien que le lot du gagnant ne soit peu enviable : la solitude.
Clarisse d'Aquitaine
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Clarisse d'Aquitaine
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Mer 17 Nov - 23:05

(RP du point de vue de la Duchesse d'Aquitaine)


L’attitude d’Ambrose de France pourrait presque être inquiétante, dans l’esprit de la Duchesse. Comptait-il réellement s’enfermer ici jusqu’à la fin de ses jours ? N’avait-il point envisagé, de lui-même, quelques coups d’éclat pour rentrer dans les bonnes grâces et redorer son blason ? Apparemment pas. Se plier au joug de sa cousine est donc à ce point impensable pour lui qu’il serait prêt à perdre le pouvoir que lui concède sa naissance…

L’ego des hommes est souvent bien difficile à appréhender, surtout quand il se mêle à un caractère difficilement discernable. Ce sens de l’honneur est admirable, certes, mais ne le mènera pas bien loin. Mathilde le sait et ose croire, vu sa réaction il y a quelques mois de cela, qu’il ne se contentera pas de cet exil forcé. Elle a des projets pour lui. Elle a des projets pour sa fille et cet homme en est la pierre angulaire.

Elle articule progressivement son idée, tâtant le terrain et sa manière de réagir. L’évocation du mariage ne le bouleverse pas plus que ça, il conçoit bien à quel point ce stratagème tombe sous le sens. C’est un premier pas. Elle acquiesce à ses dires. Il a l’étoffe d’un Prince, l’étoffe d’un Roi. Il a été façonné pour ça et il est inconcevable qu’on ait préféré les mots d’une simple lettre à l’évidence du sang. Est-ce de la jalousie féminine ? Allez savoir… Mathilde tout comme Clarisse ne portent pas particulièrement Victoire de France dans leur cœur, même si elles font en sorte de ne jamais trahir ce genre de pensée.

Quand l’homme s’attarde enfin sur l’élément principal de ce qu’elle désire lui faire entendre, elle ne peut s’empêcher de lever les yeux. « Ah ça ! Il faut dire que vos regrettés parents étaient des plus exigeants quant à votre avenir conjugal… » Elle ne sait d’expérience, puisque la proposition qu’elle va lui faire elle l’a déjà formulée, en d’autres temps, au précédent duc.

L’interrogation du brun est incroyable, dans sa formulation. Il n’est aucunement dans la raillerie ou le mépris. Il s’interroge sincèrement et Mathilde réagit par un léger rire. Bon Dieu que ce Duc d’Auvergne n’est pas perspicace quand il s’agit des choses du mariage ou de la conjugalité ! Mathilde se réjouit de ne pas avoir parlé de son entreprise à sa fille… celle-ci a déjà été peinée par le précédent refus des parents d’Ambrose, il ne manquerait plus qu’il la rejette à nouveau… Mais ne vous y trompez pas, si la Duchesse est ici présente, ce n’est pas par apitoiement pour le petit cœur bien trop mou de sa fille. Oh que non. Si elle est ici, c’est qu’elle sait qu’elle aura tout à gagner dans une telle alliance. Marier sa fille à ce drôle d’énergumène, c’est tirer le gros lot. C’est unir deux duchés d’importance et s’accorder par là-même une relation privilégiée avec la Normandie, d’ailleurs. L’amitié entre Ambrose et le Duc de Normandie ne date pas d’hier.

Maintenant… si dans tout ça son aînée retombe sur ses pattes, ce ne sera qu’un petit bonus non négligeable. Depuis longtemps Mathilde a « invité » Clarisse à s’approcher du jeune enfant qu’Ambrose était alors. Dès leur première rencontre sa fille a été marquée par cette rencontre, au point de progressivement créer un lien tout particulier avec le jeune homme (et peut-être à sens unique, certes). Ce qui est certain c’est qu’elle a longuement espéré pouvoir devenir son épouse avant que l’ancien Duc ne s’y oppose farouchement. Si le destin a mis à mal les deux tentatives de mariage de Clarisse, il faut peut-être y voir un signe fort. Aujourd’hui, tout est aligné pour que cette union puisse se faire.

Sauf peut-être… « Bon sang, ce que vous êtes aveugle ! On vous amènerait un agneau sous les yeux que vous ne le verrez pas, très cher ! » La Duchesse secoue la tête et son sourire se fond en un léger rictus. « Je le fais tout autant pour elle que pour vous… C’est de ma fille, grand dadais, que je viens vous parler. Clarisse d’Aquitaine. Elle qui se languit de vous depuis longtemps et qui vous a écrit à plusieurs reprises depuis que vous avez décidé de vous enfermer ici. Êtes-vous à ce point ignorant de l’affection qu’elle vous porte ? »

Elle a un soupir et ajoute : « Parlez librement. Clarisse ne sait rien de ma présence ici. C’est à vous de décider. Je saurais parfaitement entendre un refus de votre part… » Ma fille moins.

« C’est à vous de décider mais réfléchissez bien, il n’est pas dit que pareille opportunité se représente facilement à vous. »



20 août 1590

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Mer 17 Nov - 23:08
Soulever les montagnes auvergnates
Le Duc ne voulut pas prétendre le contraire lorsque la Duchesse rappela l’exigence de feu ses parents. Il aurait tout de même pu défendre un peu leur honneur, en lui indiquant qu’il avait parfois lui-même campé sur ses positions et refuser des alliances pourtant très alléchantes d’un point de vue extérieur. Néanmoins, ce serait avouer l’un de ses plus gros défauts et il estimait en avoir assez pris pour son grade aujourd’hui. Une nouvelle fois, avec une certaine nonchalance, il haussa les épaules, ne niant pas les faits.

S’en suivit un monologue lunaire de la part de la Duchesse d’Aquitaine. En vérité, ses propos n’avaient rien d’extraordinaire et n’importe qui aurait été d’accord avec elle. Néanmoins, pour Ambrose, il avait l’impression que chaque mot, chaque argument, sortait de sa manche ou du chapeau d’un magicien. Une nouvelle preuve de son incompréhension face à toutes ces choses : la séduction, le flirt, les œillades, les sentiments. C’était donc pour cela que Clarisse était devenue son ombre ! Elle l’aimait !

Il crut qu’il allait s’étouffer. En déglutissant sa salive, il l’avala de travers et fut pris d’une quinte de toux. Cela tombait plutôt bien, permettant de justifier son visage cramoisi. Bien qu’il était au repos depuis un certain temps, il sentit de nouveau son corps suer, réagissant à la tournure de la conversation. Soudain, il avait l’impression d’être redevenu un jeune garçon. Ridicule. Ambrose de France, prétendant au trône de France, n’avait pas su voir qu’une femme était éprise de lui. Elle était sous ses yeux, toutes ces années et lui n’avait vu qu’une espèce de fascination à outrance et une dévotion sans faille. Un crétin. Un gentil crétin, mais un gros crétin quand même.

Vint le sujet délicat des lettres. Foutu pour foutu, il décida de jouer carte sur table. Il était déjà tellement honteux, cela ne pourrait pas être pire. Ayant retrouvé une contenance et terminé de tousser, il avoua son crime :

- Il se peut que la plupart de mes lettres soient stockées quelque part et que je n’ai toujours pas daigné les ouvrir.

Ah, si. Il était bien possible qu’il vienne de passer un nouveau palier dans la honte. Maintenant, il n’osait plus regarder dans les yeux son vis-à-vis. Enfin, Ambrose ! Un peu de courage ! Il se gratta la tête pour essayer de temporiser… quoi ? La Duchesse attendait des réponses, un avis, un encouragement, un refus, des phrases, des mots. N’est-il pas connu que le Prince oublié ne s’ouvre que très peu souvent et à un nombre extrêmement réduit de personne ? Elle qui savait tout, elle devait bien le savoir, non ? De grâce, qu’elle arrête de le fixer ainsi, il en perdait ses mots.

Pour fuir sa présence envahissante dans la pièce, il se leva pour se servir un grand verre d’eau fraîche. Il en ingéra l’intégralité, cul sec, avant de s’en servir un second. C’est qu’il faisait soif et qu’il voulait gagner du temps, pour rassembler ses pensées et réussir à formuler un tant soit peu d’avis pour satisfaire son invitée.

Il se retourna de nouveau pour lui faire face, ressentant ses émotions plus posées et son esprit plus calme également. Est-ce qu’il proposa un verre à la Duchesse d’Aquitaine, comme un bon hôte ? Non. Est-ce qu’à ce stade cela était étonnant ? Non. A la place, il retourna s’asseoir en face d’elle et croisa nonchalamment une jambe.

- Je ne sais pas ce que vous attendez exactement de cette conversation, mais je ne peux décemment pas vous dire soudainement vouloir épouser votre fille.

« Décemment », il avait osé utiliser ce mot. Lui qui n’avait rien de décent et se comportait depuis le début de cette entrevue comme le premier des paysans ! Il se frotta le menton, pensif, le regard perdu dans le vide, avant d’admettre :

- Une alliance avec l’Aquitaine servirait certainement nos deux duchés. Très pragmatique, peu romantique. Votre fille a toujours su me supporter et pourtant, je ne lui ai jamais fait de cadeau. Toujours aucun romantisme. Beaucoup disent qu’elle a hérité de votre beauté et qu’il est étonnant qu’elle ne soit pas déjà mariée et mère. Un petit compliment pour la mère, mais toujours rien pour Clarisse. Je suppose oui qu’elle est un bon parti.

C’était navrant, mais il n’en avait pas conscience. Néanmoins, il fit preuve d’un peu de sentiment en décidant qu’il ne prendrait aucune décision seul :

- Je ne suis pas contre, mais j’ai besoin de m’entretenir avec votre fille. Je devrai commencer par lire ses lettres, je lui dois bien ça. Elle m’a toujours soutenue, peu importe la raison. Je sais que j’ai beaucoup de défauts, si votre idée devait aboutir, je voudrais être certain qu’elle sache dans quoi elle s’embarque. Je suis un grand dadais aveugle, mais je ne voudrais pas la rendre malheureuse. Comme elle, je suppose, j’aimerais bien un mariage heureux.

Que l’on soit bien clair, il venait de déverser tout le romantisme dont il était capable dans l’instant présent. Et histoire de continuer sur cette lancée il… haussa les épaules, une énième fois. Un ours… désespérant.
Clarisse d'Aquitaine
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Jeu 18 Nov - 0:59

(RP du point de vue de la Duchesse d'Aquitaine)


Le prince tombe réellement des nues. La duchesse tout autant, en écho. Comment cet homme peut être aussi candide vis-à-vis des choses des sentiments et de l’attraction ? Tout ours qu’il se prétend être, il n’a pas vécu dans une grotte, pourtant ! A moins qu’il ne soit de ces nobles qui vivent ces sujets comme de pures contraintes et laissent à d’autres le soin de décider pour eux… et encore ! La Duchesse doute grandement que s’il est aujourd’hui encore célibataire, il n’y soit pas pour quelque chose. Si ses parents étaient difficiles à satisfaire en la matière, elle sait tout de même que certaines prétendantes avaient su passer leurs filets.

Enfin, qu’il ne soit pas marié aujourd’hui l’arrange et fera – peut-être – les affaires de sa fille. S’il réalise toutefois la portée de ce qu’elle vient de lui annoncer. Ce n’est pas une tâche aisée. Mathilde n’est pas forcément ravie d’agir ainsi dans le dos de sa fille mais elle préfère revenir tâter le terrain d’elle-même plutôt que d’infliger à Clarisse le risque d’un refus et d’une énième déception. Son aînée ne sera pas non plus heureuse d’apprendre que sa mère a dévoilé à Ambrose la nature des sentiments qu’elle entretient pour lui… Sa fille a toujours été pleine de contrastes et croyait sincèrement que sa mère n’y verrait rien ? Allons, c’est mal la connaître ! Ce que sa fille faisait passer pour de heureux hasards ou de simples compliments à l’encontre du futur Roi, à l’époque, allait au-delà d’une simple dévotion admirative. C’est qu’elle a eu du temps pour entretenir cette fascination. Elle a eu du temps pour se lier d’amitié envers l’autre homme et prendre quasi systématiquement sa défense quand il était question de lui, d’une manière ou d’une autre, dans les conversations de salon.

Si les gens qui connaissent peu Clarisse n’y ont pas vu grand-chose, ses quelques amies et bien entendu sa mère n’ont jamais été dupes. Un sixième sens qu’ont les femmes, probablement. Armand lui-même a mis du temps avant de le réaliser, toujours gêné à l’idée que sa fille se prenne ouvertement d’affection pour quelqu’un dont les parents s’étaient déjà opposés à une union. Mais la vie est faite de rebondissements et Mathilde n’est pas peu fière de cette petite entreprise qu’elle effectue ici. L’embarras et la colère de sa fille seront bien vite soufflés si le Duc consent à l’épouser. Ah ça oui !

La Duchesse songe ainsi sans rien perdre de la réaction de son interlocuteur. Ses joues deviennent rouges, il tousse. Intérieurement elle songe à combien son fils Eustache serait nettement moins désemparé en pareille situation. Elle se doute qu’Ambrose ne doit pas se sentir bien à l’aise mais ne fait rien pour l’y aider. Ses yeux s’arrondissent quand il évoque des lettres qui s’entassent sans être lues. « Vous avez donc décidé d’abandonner tout bon sens en venant ici ? » Tout sens des responsabilités… Il y a peut-être une limite à ce qu’il est capable d’entendre et elle décide de ne pas pousser plus. « Cela explique qu’elle n’ait pas obtenu de réponse de votre part… »

Clarisse est suffisamment subtile pour ne jamais se mettre à découvert auprès du prince quand elle s’adresse à lui. Ni dans ses paroles ni dans ses écrits. Mathilde connait la fierté de sa fille sur ce point. C’est d’ailleurs pour cela qu’elle anticipe déjà sa réaction quand elle saura ce qui se dit ici. Ses lettres devaient certainement s’enquérir de sa santé et de son humeur, lui racontant quelques anecdotes pour alléger cette réalité qui est venue ternir l’avenir d’Ambrose. Rien qui ne la trahisse pour qui ne voit déjà rien. Mais pour Mathilde, c’est tout comme. On ne peut pas dire que sa fille soit d’une prévenance extrême (tout comme elle ne l’est pas particulièrement elle-même) et elle n'accorde ce genre d’attentions qu’à un nombre infime de personnes. Son frère, son père et… Ambrose. Voilà tout.

Et lui, le réceptacle de tout ça, celui que Clarisse suivait sans cesse quand elle le pouvait, celui qu’elle cherchait toujours à aider, adolescente, n’a rien vu et continuerait sans doute à ne rien voir pendant des années si Mathilde n’était pas intervenue. Quelques mots et le Prince apparait désormais tout secoué, presque penaud, tandis qu’il se réfugie derrière de grands verres d’eau. La Duchesse s’en amuse et croise les bras dans son fauteuil, lui laissant tout le temps dont il aura besoin pour s’en remettre.

Quand, enfin, il fait mine d’avoir retrouvé contenance et reprend la parole, c’est à son tour de se servir un verre d’eau. Comme un petit jeu qui l’amuse toute seule. Elle l’écoute, la mine distraite et pourtant entièrement attentive. Elle prend une large gorgée d’eau et repose ensuite son verre sur la table. « Je suis venue ici avec l’intention de vous ouvrir les yeux, Monsieur le Duc. Sur votre avenir, avant toute chose. Cette idée de mariage avec ma fille est essentiellement une proposition que je vous fais pour réveiller ce volcan endormi que vous êtes devenu. »

Au moins l’homme semble réceptif à ses remarques et c’est quelque chose qu’elle apprécie. Mieux, il a conscience des atouts qu’une telle union pourrait représenter, et quand il aborde Clarisse… elle le laisse faire. Même si elle fait preuve d’une grande fermeté et que sa relation avec sa fille a toujours été d’une complexité extrême, elle n’en reste pas moins une mère soucieuse du bien-être et du devenir de sa progéniture. Un bon parti, ce n’est pas peu dire.

« Ah ça… ce n’est pas faute de lui avoir trouvé des fiancés, pourtant. Le Duc de Montpensier, vous devez vous en souvenir... Quelle affaire ! » Il leur a fallu du temps pour faire entendre aux plus mauvaises langues qu’ils n’avaient rien à voir avec les manigances du Duc, à l’époque. Heureusement, Armand a toujours été d’une transparence à toute épreuve et sa réputation a aidé à mettre définitivement cette histoire derrière eux.

Ambrose n’est clairement pas poète mais petit à petit, ses mots presque maladroits sont touchants. « Vous avez raison, si vous acceptez de considérer sérieusement une telle union, vous entretenir avec Clarisse sera une bonne chose. Et commencez donc par la lire, en effet. Je ne dis pas que ses sentiments ont toujours été de cet ordre à votre égard mais… une chose en amenant une autre, cette dévotion qu’elle a très tôt eue envers vous s’est mue en un sentiment plus fort, c’est certain. Essayez donc de vous en souvenir. »

Cette conclusion qu’il a déstabilise quelque peu Mathilde. De nos jours les hommes qui prétendent à des mariages heureux sont bien rares. Les enjeux de pouvoir prennent toujours le dessus. C’est d’ailleurs ce qui l’a guidée jusqu’ici. Pour autant, il dit ne pas vouloir rendre Clarisse malheureuse et un sourire prend de lui-même place sur le visage de la Duchesse. Si sa fille en venait à épouser un tel homme, elle serait chanceuse. Oui, chanceuse. Même s’il le dissimule derrière des gestes un peu rustres. Une nouvelle fois la voilà qui lève les yeux au ciel.

« Vous êtes un drôle de bonhomme, Ambrose. Pour peu qu’on vous y pousse, je pense que vous saurez faire de grandes choses. » Cela sort de ses lèvres un peu malgré elle. Il ne sera du genre à s’offusquer de l’usage de son prénom, elle espère. « Clarisse est repartie pour la Cour quelques jours avant mon départ de Bordeaux. Comment souhaitez-vous procéder pour la voir ? »

Elle sait qu’il n’est pas retourné sur la capitale depuis longtemps et dans tous les cas, s’il demande à Clarisse de le rejoindre, ici ou ailleurs, sa fille remuera ciel et terre pour y parvenir.



20 août 1590

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Jeu 18 Nov - 22:32
Soulever les montagnes auvergnates
Il sentit qu’ils s’approchaient d’une limite, plutôt dangereuse, lorsqu’elle semblait se retenir de très fortement le juger, après avoir admis ignorer son courrier. Il voulait bien lui laisser l’occasion de parler sans filtre, d’émettre des remarques et de le plonger dans l’embarras le plus total… Néanmoins, il ne manquerait pas de taper du poing si elle outrepassait ses droits. Elle se trouvait face à un Prince de France, Roi par droit de sang (si une fichue griffe sur un bout de papier n’avait pas tout chamboulé) et Duc d’un puissant duché. Il ne tolérerait pas qu’elle l’insulte, mais fort heureusement, la Duchesse dû reconnaître le froncement de ses sourcils comme un signe alarmant. Ainsi, elle n’osa pas en dire davantage à ce sujet et il préféra balayer sa remarque sur son bon sens. S’il écoutait son bon sens, il l’enverrait se faire cuir un œuf chez elle et au pas de course pour avoir osé s’incruster chez lui sans prévenir en amont. Comme quoi, l’ours était mal léché, mais il faisait tout de même quelques efforts.

Un volcan endormi. Quelle ironie lorsque l’on sait que ses terres sont habitées de chaînes montagneuses autrefois menaçantes. Force lui était de reconnaître que son idée de mariage avait du bon. Une alliance permettait toujours d’afficher sa puissance. Et puis, un roi ne pouvait décemment pas être sans une reine. A l’inverse de sa cousine, pas fichue de se trouver un bon parti français pour assurer des héritiers de sang noble, bien français, mais cela, c’était un autre débat et surtout pas son problème.

Le destin semblait en quelques sortes se mêler à l’avenir d’Ambrose et Clarisse. Peut-être était-ce un signe ? Tous les deux avaient soit eu des fiançailles qui étaient tombées à l’eau, soit n’avaient jamais trouvé le parti idéal. Ils se connaissaient, se fréquentaient, se suivaient depuis tant d’années, à force cela ne devait plus être une simple coïncidence. A moins que le hasard ne soit pas simplement celui choisit par Dieu, mais que d’autres mains l’aient façonné, forcé. Dans tous les cas, Clarisse était encore très jeune et n’avait subit aucun préjudice entachant sa noblesse ou sa vertu. Tout du moins, rien n’allant en ce sens n’était parvenu aux oreilles du Prince oublié. Une telle union ne provoquerait donc aucun malus auprès de ses partisans, en théorie. Et puis, quand bien même sa vertu n’était plus très intacte, il n’en n’avait cure. Ce qui lui importerait, ce serait sa loyauté, sa fidélité et sa dévotion.

Il tenta de réfléchir à ses signes, des comportements, des attentions ou même des mots que Clarisse aurait eu à son égard, indices de ses sentiments forts pour le Prince… Mais il était bien trop aveugle et il lui faudrait bien plus de réflexion pour qu’ils lui sautent aux yeux. Il y avait fort à parier qu’ils auraient des conversations embarrassantes, surtout pour la demoiselle, devant justifier certains faits avec beaucoup d’explications, pour que l’ours comprenne des principes simples de la romance… Quel malaise ! Mais maintenant qu’il était au courant, de la bouche de sa propre mère, et non de celle de son meilleur ami le Duc de Normandie qui n’était jamais sympathique à l’égard de Clarisse, cela prenait un tout autre sens et l’intriguait fortement. Il eut soudain cette envie de fouiner dans son courrier pour lire, relire, chaque mot qu’elle lui avait adressé et ouvrir les yeux, enfin.

Il arqua un sourcil en entendant ses dernières paroles. Aux dernières nouvelles, elle n’était pas devenue sa belle-mère, alors cette familiarité en prononçant son prénom lui parut soudaine et déplacée. Cela lui donna notamment le sentiment qu’un mariage avec sa fille la collerait probablement beaucoup dans ses pattes et ses affaires concernant son ambition d’être le roi. Belle-maman deviendrait un pot de colle ? Il eut un frisson étrange en pensant cela. C’était bien trop tôt pour imaginer cela, il devait avant tout passer du temps avec Clarisse et être sûr d’elle, sûr de lui.

Le Prince oublié se gratta une nouvelle fois la tête en grognant quelques peu. Comment ça ce n’est pas très classe ? Elle l’avait appelé grand dadais, au diable les manières, elles ont été abandonnées depuis longtemps ! Nature, confiture, comme on dit !

- Je reviens justement de Paris. Il lâcha un soupir. Le voyage avait été un calvaire. S’il avait su… Il aurait fait l’effort d’occuper ses appartements parisiens pour l’inviter à discuter, chaperonnée, bien évidemment. Je suppose que je vais lire ses lettres, lui répondre et préparer mes affaires pour repartir dès demain. Avec Ambrose, ça ne traîne jamais ! Ce qui peut être fait au plus vite n’a pas lieu d’être repoussé ! Et si elle ne désire pas me rencontrer pour que nous puissions parler, ce que je comprendrais au vu de combien je peux être peu avenant, et bien… Tant pis pour moi. Je serai au moins au plus près du Duc de Normandie pour assister à son mariage à venir.
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Ven 19 Nov - 23:50

(RP du point de vue de la Duchesse d'Aquitaine)


Le froncement de sourcil ne passe pas inaperçu aux yeux de la Duchesse qui comprend bien vite que l’utilisation de son prénom était une mauvaise idée. Ce sera pour plus tard… si plus tard il y a. Ne va pas trop vite en besogne, Mathilde. Si une petite voix lui dit que ce projet de mariage est en bonne voie, vue l’attention du Prince à ses mots et la réflexion dans laquelle ils semblent le plonger, elle sait que sans confirmation officielle, tout cela demeure pour le moment une simple proposition. Chose rare, le Duc veut véritablement entendre Clarisse et discuter avec elle, là où d’autres se contenteraient d’acquiescer ou de refuser pour mieux se placer sur l’échiquier du pouvoir.

La Duchesse avait réfléchi jusqu’à la manière dont elle annoncerait la chose… elle n’avait pas pu voir plus loin. Ambrose de France la surprend positivement. Il n’a nullement l’air dans la manipulation. Il n’a aucunement feint sa surprise et l’embarras qui a suivi, tout comme il parait véritablement considérer chaque conseil qu’elle lui donne. Un ours, un volcan endormi, un prince oublié et reclus, certes, mais prompt à réagir pour peu qu’on lui donne de bonnes raisons de le faire. S’entretenir avec Clarisse parait être une justification légitime pour qu’il déclare vouloir repartir à Paris, et dès demain ! Alors même qu’il vient tout juste d’en rentrer.

C’est un sourire ravi qui prend place sur le visage de la Duchesse d’Aquitaine. Le brun est un peu maladroit dans son attitude, et pourtant, depuis le début il n’a pas eu un mot désobligeant concernant l’aînée d’Aquitaine. Pas plus qu’il n’a cherché de mauvais aspects à cette possible union. Dans l’esprit de Mathilde, tout s’emballe déjà et elle a un signe d’acquiescement. « C’est une très bonne idée. Elle sera ravie d’avoir de vos nouvelles. » A ce qu’il ajoute, elle se contente d’un soupir amusé.

« Ne vous en faites pas, Clarisse sera forcément heureuse de vous voir, quelle qu’en soit la raison. » Il est vrai que l’annonce du mariage du Duc de Normandie avec la désormais affublée du titre de Joyau de la saison fait grand bruit et Mathilde n’est pas surprise d’entendre le Prince en parler. Vu son amitié avec Alaric de Normandie, l’inverse aurait été surprenant. « Oui, j’ai entendu parler de cette union. Ce sera là aussi un beau mariage, à n’en point douter ! » Et si les relations entre la Normandie et l'Aquitaine étaient plus apaisées, elle ne serait pas contre y assister, d'ailleurs.

Elle s’entend parler et une idée lui vient en tête. « Pour en revenir à ma fille… Je ne pense pas l’informer de notre discussion. Quoique vous lui disiez, sa réaction sera ainsi neuve et honnête. Peut-être comprendrez vous mieux ainsi la nature de ses sentiments envers vous. » Plus d’une fois la Duchesse a inculqué à sa fille les valeurs de l’anticipation, avoir un temps d’avance, être toujours préparée à la moindre éventualité… et là, dans un moment sans doute décisif pour elle, elle décide de ne pas lui donner cette carte à glisser dans sa manche. Cette sincérité perdue qui se dégage du Prince est visiblement parvenue à l’atteindre sans qu’elle ne le réalise tout à fait.

Il veut la voir au plus vite, lui parler au plus vite et évoque son envie d’un mariage heureux. Rien de cela ne doit être altéré par de faux semblants. Même si… lorsqu’il est question d’Ambrose de France Clarisse est à fleur de peau malgré elle. Elle a beau se cacher derrière son égo et son autorité, le plus souvent, elle est une femme avec des faiblesses. Cet homme est sa plus grande. Alors oui, sa mère prend le parti de la pousser à se dévoiler face à lui.

Elle reprend quelques gorgées d’eau. « En tant que mère, je ne peux que vous remercier de la prévenance dont je vous vois faire preuve au regard de ma fille, Monsieur le Duc. La suite vous appartient donc, à vous comme à elle. » Elle a un regard autour d’eux et se lève finalement de son fauteuil. « Je ne voudrais guère vous retenir plus longtemps, j’ai conscience de m’être quelque peu imposée – c’est peu dire. Merci d’avoir pris le temps d’écouter ce que je souhaitais vous dire. » Tandis qu’il se lève à son tour avec politesse elle pose sa main sur le dos de la sienne et ajoute : « Si vous avez besoin de quoique ce soit avant votre départ pour la capitale, je suis à votre disposition. Comme je vous l’ai dit, je ne séjourne pas bien loin présentement. »

Quand le Duc et son majordome la guident jusqu’à la sortie du château, elle est très optimiste quant à ce petit « coup du destin » qu’elle vient de donner à un homme qui était peut être en phase de passer à côté de grandes choses.



20 août 1590

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