Il fut un temps où le jeune marquis était quelqu'un d'innocent et de particulièrement naïf, ayant passé les premières années de sa vie à l'abri de sa meute sur le territoire familiale Et puis la vie et surtout les conflits ont débarqué dans sa vie et les choses ont radicalement changé.

Il est aujourd'hui beaucoup moins accessible qu'autrefois. Mais il reste un membre de la noblesse et participant actif de la cour et se doit donc de maintenir les apparences et répondre à ses devoirs, il se présente donc affable la plupart du temps, d'une compagnie agréable pour peu que vous vous contentiez des apparences.
Pourtant, si vous prêtez attention, vous remarquerez que son regard reste dénué de vie, fermé là où son sourire se veut chaleureux, qu'il tend à maintenir une distance physique et qu'il est constamment aux aguets.
Alors qu'en est-il en réalité? Gabriel est un loup désabusé, dont le travail et sa meute sont les deux choses qui l'ont empêché de s'écrouler. Terrifié à l'idée de perdre quelqu'un qu'il aime une nouvelle fois, les épaules écrasées par un mélange de responsabilités et de culpabilité sur ses décisions passées, il transforme le tout en une haine viscérale pour les ses ennemis et un rejet systématique de tous ceux qui voudraient s'intégrer à sa vie.

Chacun s'accorde à dire pourtant qu'il effectue ses tâches avec diligence, et que le marquis est épris de justice et d'impartialité dans son service à la couronne. Il est intègre et jusqu'à preuve du contraire, respecté de ses pairs.

En tant que jeune alpha, il se sent obligé d'asseoir sa légitimité à sa position, malgré l'avoir prouvé en gagnant son titre, sans voir que sa meute le comprend et le soutien. Cela se traduit par une tendance à répondre à la contrariété par des éclats de colère et de la force physique pour remettre les autres "à leur place".
Mais ne vous y trompez pas. Il est loyal à sa meute, extrêmement loyal, et il ferait tout pour les quelques membres restant de celle-ci. Il fait des efforts pour être un alpha à la hauteur de son père, et c'est probablement ce côté qui lui vaut la clémence des loups les plus anciens. Il reste amer de la trêve entre les loups et les vampires, et sa volonté de vengeance est source d'inquiétude de ses proches.

Au fond, la seule chose que Gabriel veut, c'est reconstruire sa meute et lui faire retrouver ce qu'elle a perdu et peut être alors, répondra-t-il à cette petite envie toujours présente de trouver une partenaire et de fonder une famille. Sa famille.
Sa meute.




Issu d'une meute ancienne, Gabriel est le fils héritier de deux loups de sang pur. Il est né sur le territoire de celle-ci, à l'abri des regards. Les premières années de sa vie, il les a passées dans les bras de sa mère à être choyé, mais c'est lorsqu'il commence à explorer le monde et à s'exprimer que la meute se rend compte que Gabriel sort du lot. Sans parler d'être hors norme, le garçon voit littéralement la vie d'une autre façon et a dû développer ses autres sens pour compenser. De ce fait, entraîné et encouragé par la meute, il a affiné son nez et ses oreilles. Loin du niveau du loup, il reste particulièrement sensible aux sons et aux parfums.

Enfant pourri gâté en réponse, il grandit en compagnie d'un autre membre de la meute né en même temps, Antoine de Saulx, ainsi que d'autres bien sûr, mais Antoine reste encore aujourd'hui son plus proche confident. C'est avec lui qu'il a appris le maniement de l'épée avec son père, qu'il s'entraîne, avec qui il a fait le mur pour aller en ville, avec qui il a fait les quatre cent coup.
Ses parents donnèrent naissance entre temps à une petite sœur, puis une deuxième. Les deux enfants tout aussi énergiques que leur grand frère avait comme passe-temps de rendre Gabriel chèvre. Mais le louveteau laissait volontiers ses deux sœurs faire ce qu'elles désiraient de lui.

A 17 ans, son père décide de l'envoyer à la cour du Roi pour son service militaire. L'idée est également d'envoyer un représentant de la maison auprès de la cour, tandis que le chef de famille s'occupe des affaires souterraines. Année de tensions entre pays, cela passe bien au-dessus des préoccupations du jeune marquis qui découvre la cour, ses apparences et ses réalités. Trop jeune et inexpérimenté, il se fait mener par le bout du nez. C'est la dure réalisation qu'il comprendra bien plus tard, alors qu'il fait la rencontre d'une jeune femme avec qui il aura une idylle de quelques mois. Le jeune homme sérieux et captivé par le regard bleu de celle-ci tandis qu'elle ne faisait que jouer. Lorsqu'elle disparue brutalement sans un mot ni possibilité pour lui de la retrouver, il eut le cœur brisé pour la première fois.
Son enthousiasme douché, il reste en retrait, préféra se remettre dans l'ombre de son père pour les années à venir. Il n'eut pas le temps de s'ennuyer ceci dit puisque les tensions entre France et Angleterre se transformèrent en conflit ouvert, et où les armées furent mobilisées. Malgré la défaite, Gabriel et Antoine y survécurent, pour être mieux engouffrés par la guerre qui éclata entre Vampires et Loups-Garous.

A ce moment-là, Gabriel n'avait aucun a priori sur les Vampires, ayant été préservé par sa famille. Il connaissait leur existence, bien entendu et s'il ne les détestait pas, il n'était pas spécialement prêt à les accueillir à bras ouverts. Mais son père, l'alpha de la meute, s'était jeté à gueule ouverte dans le conflit, et le reste de la famille avait suivi d'un seul homme. C'est à ce moment-là que la réelle descente aux enfers a commencé pour le jeune marquis car qui dit conflit dit perte et les de Sercey en ont connu beaucoup.
A chaque nouveau cadavre retrouvé, ou nouveau membre disparu, c'était un déchirement supplémentaire pour les survivants. Chaque coup fut rendu avec toujours plus de violence et la meute vit sa puissance et sa vitalité être sérieusement entamée au fil des années.
Le coup de grâce lui fut apporté lorsque ce fut ses propres parents qui tombèrent. Une attaque particulièrement bien organisée de la part des Vampires eut raison d'une poignée de membres, dont son père et sa mère. C'est une nuit qui, encore aujourd'hui, reste gravée au fer rouge dans l'esprit du jeune loup, aveuglé par la douleur. Il ne sait pas vraiment ce qui se serait passé, si Antoine et ses sœurs ne l'avaient pas trouvé roulé en boule en train de pleurer dans un coin de sa chambre et n'étaient pas restés avec lui.

Peut-être que ce fut ce jour-là, que sa haine pour les vampires s'enflamma pour ne plus jamais s'éteindre.

Car un problème en entrainant un autre, la meute fut obligée de se retirer temporairement de la guerre. Sans alpha et désorientée, elle entra en guerre intestine pour redessiner totalement la hiérarchie de ses membres. Certains préférèrent laisser leur place, d'autres se jetèrent dans la bataille pour monter le plus haut possible. Gabriel en ressortit vainqueur, sa colère et sa jeunesse lui donnant la force et l'adrénaline nécessaire pour surpasser de peu les plus expérimentés. Il se hissa à la place qui était celle de son père, et s'il crut un temps qu'il pourrait parvenir à redresser les choses, la vie lui donna très rapidement tort.
Ho il ne parlait pas des membres qui, dans un premier temps, tentèrent de prendre le dessus ou de contester ses décisions. Non. Si sa jeunesse était sa plus grande force, elle se révéla aussi être sa plus grande faiblesse. Alors qu'il avait relancé la meute dans la bataille, ses décisions parfois hâtives et souvent dictée par la haine lui valurent toujours plus de morts, toujours plus de souffrance. Il dût même se battre une nouvelle fois pour sa place, après qu'une de ses décisions eut conduit à la mort de plusieurs loups. De ceux qu'il avait côtoyé. Il avait ignoré les conseils et mises en garde des plus anciens. Aujourd'hui encore, ces loups hantent ses nuits et ses cauchemars.

1545. Gabriel de Sercey se retira de la cour pour se concentrer sur des problèmes familiaux sur son domaine. Pour les humains il mourut quelques mois plus tard en laissant un seul et unique héritier, Adrien de Sercey. Un nom d'emprunt qui lui servit peu, tant il n'avait que peu de temps à consacrer à la cour.
Il venait de perdre sa plus jeune sœur qui, sans la digne lignée de la famille, avait voulu mener une opération sans son autorisation et était tombée dans un guet-apens. Marie de Sercey disparu-t-elle ainsi à son tour.

Dans sa peine et sa tristesse, alors qu'il s'était éloigné de tout pendant un temps en une tentative de retrouver son équilibre et sa force, il fit pourtant une rencontre inattendue. Une jeune humaine nommée Béatrice qui de façon surprenante parvint à se frayer un chemin dans son cœur. Une jeune femme douce et naïve, sans doute représentant une partie de ce qu'il avait perdu et tentait de retrouver. Il crut la perdre plusieurs fois. Le poids de sa nature ne pouvait être révélé aussi facilement et la demoiselle finit par s'impatienter d'être courtisée sans réelle avancée. Il avait fini par la demander en mariage, l'avait emmenée à l'écart pour la protéger. Elle lui donna une petite fille, sa princesse.
Toutes deux moururent dans l'incendie de leur propriétaire, un beau jour d'été. Gabriel arriva trop tard pour les sauver. Si quand il fermait les yeux il voyait les membres de sa meute disparus, désormais il entendait les cris de sa femme et sa famille. Les causes de l'incendie ne furent jamais identifiées. A ce jour, l'alpha est persuadé que les vampires sont derrière.

Il ne lui fallut pas plus pour retourner en première ligne sur le conflit. Mais cette fois de manière plus subtile, écoutant davantage ses membres. La chasse n'eut jamais été source de plus de plaisir que lorsqu'il pistait un vampire pour refermer sa mâchoire sur l'un d'eux. Et aucune des marques qui commencèrent à consteller son corps ne le freinèrent. Toutes ses cicatrices étaient autant de trophées de ses batailles gagnées.
Est-ce que les pertes cessèrent pour autant? Non. Bien sûr que non. Gabriel dût fermer son cœur pour espérer atténuer les lacérations causées par chaque mort. Impossible de ne pas être impacté pourtant, mais il fit de son mieux.

1560 - Victime d'un guet-apens à son tour des vampires, il restera en arrière pour tenter de protéger sa seconde sœur en faisant directement face à leurs assaillant. Il réussira à survivre après avoir commis un massacre. Pas elle. Il est décidé qu'il est plus prudent de disparaitre pendant un temps, le temps que l'alpha se remette de ses importantes blessures et de la disparation entière de sa famille. La meute est obligée de s'unir pour l'empêcher de perdre définitivement la raison. Antoine de Sercey disparait. S’enchainement plusieurs autres au fil des années.

Depuis cette attaque il est incapable de redevenir totalement humain. Sa dentition, celle qui lui a sauvé la vie ce jour-là, reste aussi acérée que celle d'un loup. C'est sa meilleure arme.

La suite ne vaut pas vraiment la peine d'être racontée, au risque d'être redondant. La guerre finit de mettre à mal la meute dans son ensemble. Gabriel a conscience que certains membres ont préféré s'enfuir pour éviter les conflits et pour être parfaitement honnête, il n'a pas le cœur de leur en vouloir ou d'être fâché. Eteint, il fait simplement de son mieux pour limiter la casse mais rien n'y fait. Toujours plus de morts, toujours plus de souffrances. Il n'a même plus envie de jouer les apparences vis à vis des humains et pour eux, les de Sercey vivent reclus sur leur domaine quand ils ne sont pas en mission d’ambassade ailleurs. Il n'a pas besoin de plus.
Ce n'est qu'au moment du traité que Gabriel semble retrouver de la vie. Parce qu'il est indigné, parce qu'il est furieux. Parce qu'il est inconcevable pour lui de faire la paix. Mais que faire d'autre? Sa meute ne se composait maintenant que de quelques individus, bien incapable de maintenir un conflit aussi important. Alors il s'était résigné, s'était replié un peu plus pour protéger ce qu’il lui restait, se laissant ronger par la rancœur.

Et finalement, il fut poussé par son ami de toujours pour faire autre chose que se morfondre dans son bureau et s'occuper des affaires de la famille de Sercey, qui avait perduré par on ne sait quel miracle. Parce qu'il devait se montrer, parce qu'il devait remonter. Pour la meute. Pour eux tous. Pour lui. Et bon gré mal gré, il avait fini par céder aux demandes. Il avait demandé à pouvoir faire son service militaire, en tant que jeune de Sercey, désireux de faire de nouveau ses preuves auprès de la cour et repartir dans la spirale.
Des rumeurs courent sur sa personne, et il en est conscient. Ses dents bien sûr. Parce qu’elles étaient un peu longues et du genre acérées. La belle affaire. Et il faisait de son mieux pour les faire taire. Quitte à jouer des poings quand on venait le chercher de trop prêt. Mais après tout, être un peu impulsif était un trait de caractère de la jeunesse, n'est-ce pas?

1590.
Le jeune Gabriel de Sercey, jeune noble fraichement débarqué de sa terre natale, débarque à la cour et se fait rapidement une place dans le corps armé. Ses dames sont extatiques de voir ainsi venir un jeune homme d'une petite vingtaine d'années, avec qui elles pourraient jouer et profiter.
Et Gabriel répondrait d'un simple sourire, en se laissant entrainer.