Ven 6 Aoû - 0:23
Ce ne fut que devant les grilles du domaine du château d'Orléans qu'Hildegard fut frappée d'un éclair d'hésitation. Alors que ses bottes soulevèrent la poussière d'un sentier battu par le soleil, elle réalisa soudainement l'état crasseux de ses vêtements usés par le voyage et l'allure peu majestueuse de son cheval Courtaud tout gris et pas bien beau avec ses cicatrices et sa queue coupée. Oh d'ordinaire, la chasseuse ne se souciait que très peu de son apparence, dissimulant un corps taillé par et pour le combat sous les longues robes de religieuse ou l'armure de la Milice et tirait parfois même comme un semblant de fierté à se déambuler arme à la ceinture et plastron sur la poitrine sur son lourd destrier tel un fier chevalier revenant d'une quête. Tel un homme. Or, en s'avançant l'allée trop bien entretenue des d'Orléans, Hildegard se sentit ridicule dans sa tenue de voyage avec ses cheveux mal coiffés.
D'autant plus qu'elle n'était pas seule. Et qu'Aimable avait au moins aussi fière allure qu'elle.
Que penserait la dame de la demeure de voir débouler dans sa maison ce couple de campagnards du Sud ? Quand bien même elle tâchait de ne rien laisser paraitre - surtout devant son frère, Hildegard sentit la gêne monter un peu plus en elle à chacun de ses pas. Et plus elle s'évertuait à rester impassible, plus elle se sentait honteuse non seulement de se soucier de quelque chose d'aussi trivial que son apparence compte tenu du sérieux de sa visite, mais également de se soucier de l'avis d'une personne du beau sexe.
Alors qu'ils se présentaient aux portes de la maison des d'Orléans, le regard d'Hildegard glissa vers son frère. L'avait-il vu rougir lorsqu'elle avait demandé à être reçue par Madame d'Orléans ? Avait-il vu ses yeux s'illuminer d'une flamme à la fois impatiente et anxieuse à la mention de la dame ? Si la condition d'Aimable demeurait un drôle de tabou entre eux, il existait un second non dit entre les deux adelphes : l'indéniable attirance de la soeur pour les dames. Un amour honni de Dieu qu'elle se gardait bien d'ébruiter, même et surtout auprès de sa famille nonobstant les doutes de certains. Même à son petit frère, Hildegard n'avait jamais rien avoué quand bien même elle se doutait que ce dernier ne lui jetterait jamais la pierre. Mais il était question d'honneur.
Non seulement Hildegard était du mauvais sexe pour sa condition de militaire mais elle l'était également dans ses passions.
Il était impensable d'ajouter une ligne de plus à la longue liste des infamies qu'elle avait apporté aux de Bayard.
Lorsque dans le beau salon dans lequel on leur avait demandé d'attendre surgit la silhouette de Diane, Hildegard fut la première à se lever, bondissant sur ses deux pieds, droite comme un piquet, limite prête à adresser un salut militaire à la blonde. Toutefois, son pied glissa discrètement vers son frère, tapant sur son talon en murmurant :
▬ Tâche de ne pas dire de bêtises plus grosses que toi et tiens-toi bien.
Mais mine de rien, un sourire timide apparut sur sa figure alors que ses épaules se relâchaient et qu'elle baissait légèrement le regard en inclinant la tête pour saluer Diane sur un ton suspicieusement agréable :
▬ Dame Diane, merci infiniment d'avoir accepté ma requête. C'est un honneur que vous nous dispensiez un peu de votre temps. Posant une main lourde sur l'épaule d'Aimable. Voici mon frère Aimable, chevalier instructeur à la Cour, dont je vous ai déjà parlé. Aimable je te présente Dame Diane, la soeur du Duc d'Orléans et médecin royal. Je jure sur mon honneur qu'il n'y a pas de meilleures mains dans toute la région pour ton... ton cas.
Qui d'autre que le médecin de la Milice pour se pencher sur l'épineux problème qui logeait dans le corps et peut-être l'âme d'Aimable ? Dans l'esprit simple d'Hildegard, il n'existait pas un mal en ce monde que le sourire lumineux de Diane ne saurait faire fondre.
D'autant plus qu'elle n'était pas seule. Et qu'Aimable avait au moins aussi fière allure qu'elle.
Que penserait la dame de la demeure de voir débouler dans sa maison ce couple de campagnards du Sud ? Quand bien même elle tâchait de ne rien laisser paraitre - surtout devant son frère, Hildegard sentit la gêne monter un peu plus en elle à chacun de ses pas. Et plus elle s'évertuait à rester impassible, plus elle se sentait honteuse non seulement de se soucier de quelque chose d'aussi trivial que son apparence compte tenu du sérieux de sa visite, mais également de se soucier de l'avis d'une personne du beau sexe.
Alors qu'ils se présentaient aux portes de la maison des d'Orléans, le regard d'Hildegard glissa vers son frère. L'avait-il vu rougir lorsqu'elle avait demandé à être reçue par Madame d'Orléans ? Avait-il vu ses yeux s'illuminer d'une flamme à la fois impatiente et anxieuse à la mention de la dame ? Si la condition d'Aimable demeurait un drôle de tabou entre eux, il existait un second non dit entre les deux adelphes : l'indéniable attirance de la soeur pour les dames. Un amour honni de Dieu qu'elle se gardait bien d'ébruiter, même et surtout auprès de sa famille nonobstant les doutes de certains. Même à son petit frère, Hildegard n'avait jamais rien avoué quand bien même elle se doutait que ce dernier ne lui jetterait jamais la pierre. Mais il était question d'honneur.
Non seulement Hildegard était du mauvais sexe pour sa condition de militaire mais elle l'était également dans ses passions.
Il était impensable d'ajouter une ligne de plus à la longue liste des infamies qu'elle avait apporté aux de Bayard.
Lorsque dans le beau salon dans lequel on leur avait demandé d'attendre surgit la silhouette de Diane, Hildegard fut la première à se lever, bondissant sur ses deux pieds, droite comme un piquet, limite prête à adresser un salut militaire à la blonde. Toutefois, son pied glissa discrètement vers son frère, tapant sur son talon en murmurant :
▬ Tâche de ne pas dire de bêtises plus grosses que toi et tiens-toi bien.
Mais mine de rien, un sourire timide apparut sur sa figure alors que ses épaules se relâchaient et qu'elle baissait légèrement le regard en inclinant la tête pour saluer Diane sur un ton suspicieusement agréable :
▬ Dame Diane, merci infiniment d'avoir accepté ma requête. C'est un honneur que vous nous dispensiez un peu de votre temps. Posant une main lourde sur l'épaule d'Aimable. Voici mon frère Aimable, chevalier instructeur à la Cour, dont je vous ai déjà parlé. Aimable je te présente Dame Diane, la soeur du Duc d'Orléans et médecin royal. Je jure sur mon honneur qu'il n'y a pas de meilleures mains dans toute la région pour ton... ton cas.
Qui d'autre que le médecin de la Milice pour se pencher sur l'épineux problème qui logeait dans le corps et peut-être l'âme d'Aimable ? Dans l'esprit simple d'Hildegard, il n'existait pas un mal en ce monde que le sourire lumineux de Diane ne saurait faire fondre.
Je suis vraiment désolée pour l'attente, j'espère c'est ok !
@Diane d'Orléans & @Aimable E. de BayardLun 30 Aoû - 11:48
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Le soleil chauffe agréablement sa nuque.
Un soupir s’arrache de ses lèvres : d’une main, il tient les rênes de sa jument, de l’autre, l’autre reste sur sa cuisse alors qu’Aimable élève les yeux vers le ciel. Ses prunelles célestes rencontrent leurs jumelles, entre les rayons farouches de sa coiffe solaire. Leurs yeux se croisent et Aimable se surprendrait presque à sourire : l’objet de la visite est un poids, au fond de son ventre, il s’exprime d’un battement de cœur plus vif, d’une ombre qui gronde et s’interroge – où nous emmène-T-ELLE ?
Aimable l’apaise d’un battement de paupières. Il n’y a rien à craindre. Avec Hildegard, il n’a jamais rien eu à craindre. Et ses coups ? Rappelle la Voix. Aimable hausse à peine les épaules, faisant mine de s’étirer – ses coups ? Ils lui ont appris à se battre. Ils ont fait de lui un guerrier. Il se souvient aussi de toutes ces fois où Hildegard le menait, lui et Marie, dans les bois les plus sombres à la traque d’un sanglier, quand elle rôdait aux alentours du domaine à la tombée du crépuscule, quand elle se battait des heures durant avec Ulric. A en faire trembler les montagnes ! Les grands murs résonnaient de leurs râles quand leur corps s’heurtait avec la violence de cerfs en plein combat.
Il n’y a rien à craindre.
Elle a PouRtant PEUR ?
L’interrogation l’arrache de ses pensées et il revient à la réalité. Hildegard a posé pied à terre et l’a devancé de quelques mètres. Son pas est différent. Il n’est plus aussi traînant et pourtant, elle semble prête à reculer à chaque pas. Elle se tient droite, si droite que sa silhouette s’en incline. Aimable ne prend plus le temps de réfléchir, d’un geste rapide, il pose pied à terre et son pas chaloupé rejoint celui de son aînée. Son épaule effleure la sienne, malgré leur différence de taille, c’est lui qui s’écarte avant qu’elle ne le bouscule. Sa jument suit en levant curieusement ses grandes oreilles : Aimable préfère les femelles, plus douces, plus paisibles. Elle s’approche de lui, longeant son bras de son museau, en réponse, Aimable le lui flatte avec tendresse.
Peur ? Non, Hildegard n’a pas peur.
Qu’est-ce que C’EST ?
Aimable observe sa sœur, lorsqu’elle s’avance pour les présenter.
Elle rougit.
Qu’est-CE QUE c’est ? SAIGNE ?
Non. Elle est… gênée ?
Stupéfait, Aimable cligne des paupières – il en serait presque bouche bée, heureusement, il se retient et préfère détourner les yeux vers la porte. Son cœur bat un peu plus vite. Il se sent… penaud, comme cette fois où il a ouvert la porte de ses sœurs par inadvertance et qu’il les a surpris se changer – c’était ensuivi une des courses les plus rapides de sa vie, bien que peut-être aucunes d’elles ne l’aient suivi. Marie s’était contentée de rire et continuait à se servir de ce souvenir honteux pour le faire rougir.
Sa sœur est une forteresse imprenable. Ses traits altiers sont toujours figés, fermés, maintenant fermement prisonnières la moindre de ses émotions. Sa vulnérabilité, si elle en a une, est enfouie depuis tant d’années qu’elle a disparu – mais Aimable sait. Il ne sait que trop bien qu’il existe des choses en ce monde qui ne disparaissent pas. Combien même tente-t-on de les enterrer. Elles finissent toujours par ressortir. Certaines d’entre elles sont inchangées, tels les corps qui hantent ce bas monde. D’autres ne sont que des traces obscures noircissant le parquet, une obscurité dans le regard, une aigreur dans le soupir, une moisissure tapie au fond de l’âme.
Que cache-t-elle au fond de ses donjons ? Quels secrets y pourrissent et la rongent ? Son cœur se serre à cette idée. Il ne ressent pas de peine, non, c’est un sentiment puissant qu’il se doit de museler. L’envie de l’aider. L’envie d’ouvrir ses cages et laisser la lumière entrer en elle. La libérer de son obscurité. Comme lui rêve qu’on ouvre sa cage thoracique pour lui extirper tout le mal qu’il renferme. La vie n’est pas aussi simple… Seul Dieu a le pouvoir d’expier ainsi le mal d’une âme.
Mais Aimable ne peut pas abandonner. Il ne veut pas. Il est le petit frère, il est le Chevalier ; et lorsqu’elle lui ouvrira ses portes, il compte bien s’y engouffrer. Eclairer ses ombres de sa propre lumière. La soulager. A sa manière. Comme lorsqu’elle prenait sa main pour le tirer quand il hésitait, face à la pénombre des grands bois. Il l’aidera.
Se tenant près d’elle, il se redresse avec fierté, les mains croisées dans le dos. Il se veut fort, qu’elle n’ait pas à s’inquiéter pour lui. Depuis quelques années, la timidité d’Aimable a été bien mise à mal par sa nouvelle position dans la Cour. Sans l’avoir vaincue, il a su remporter quelques victoires, assez pour ne plus hésiter sur ce champ de bataille. Supporter les regards reste un supplice, à présent supportable.
_ Tout va bien se passer, glisse-t-il à voix basse. Pour elle ? Pour lui ? Les deux à la fois. Eleanor, armée d’un sourire, armée d’une volonté et d’un optimisme si écrasant qu’elle a su rompre les barrières d’Aimable. Et lui offrir un peu de sa lumière. De son optimisme.
S’entendre prononcer ces mots est étrange, ils sonnent faux et pourtant, lui donnent espoir. Face à la nervosité de sa sœur, Aimable se sent plus paisible, les pieds bien ancrés dans le sol. Son assurance est nouvelle, peut-être, pour Hildegard ; une assurance travaillée au fur et à mesure des années, à force de prendre de l’expérience et confiance en ses capacités.
Jusqu’à ce que Diane fasse son apparition.
Ce visage, il l’a déjà vu. La vision de son saignement de nez intempestif lui revient de plein fouet et Aimable se retient de grimacer. Dieu, fasse qu’elle ne mentionne pas cet évènement – ni son impolitesse, ni l’étrangeté de sa réaction. Ou Hildegard lui adressera ses pires furies.
D’ailleurs, sa sœur le frappe déjà au talon et il hoche docilement la tête. Fermant le poing pour le poser sur son cœur, c’est une révérence qu’il offre à la jeune femme. Du coin de l’œil, il aperçoit le sourire timide qui éclaire le visage de son frère.
Cela fait des mois, au moins, qu’il ne l’a pas vue sourire.
Sa sœur ouvrirait-elle une meurtrière ? Il se doute que s’il s’avance, il se recevra une flèche – pour autant, elle ne dégage aucune menace à l’encontre de Diane. Au contraire. Ses yeux clairs s’élèvent discrètement vers elle.
Il dessine, du bout des yeux, la douceur de ses traits. Ses mâchoires sont peu prononcées, comme ses pommettes. L’absence de reliefs osseux ajoutent à la tendresse de ses longs cils derrière lesquels sont logés deux saphirs. Aimable les esquive d’un battement de paupière, laissant ses prunelles s’échapper le long de son nez fin, glisser comme de la rosée sur ses lèvres ourlées. Son teint est clair, sans être pâle, lui rappelant les premières chaleurs de l’aube. Chaleurs, le sourire qu’elle esquisse l’invite à courber davantage l’échine, il n’aperçoit que d’un œil sa longue chevelure élégamment ramenée sur son épaule.
La main de sa sœur s’abat sur son épaule sans qu’il ne frémisse. Il connaît sa poigne et, avec amusement, se rassure : c’est bien sa sœur, près de lui, malgré tous… ces changements qu’il devine.
_ Dame d’Orléans. Je vous remercie pour votre accueil et le temps que vous nous offrez. Je ne puis qu’exprimer à mon tour l’honneur de vous rencontrer ce jour. J’espère que notre venue ne sera en rien…
Notre CAS ?
_ … Ne sera en rien une gêne pour vous.
Notre Cas ? Que veut-elle FaIrrE ? Que va-t-elle NOUS faire ?
Heureusement, son interruption ne semble être due qu’à la timidité, au vu de ses yeux fixés sur le sol. La Voix, elle, laisse échapper un grondement mêlant agacement et curiosité.
Que veut-elle FaIirre ?
Comprendre.
Comprendre ?
Comprendre. Comprendre la Voix, comprendre ce qu’elle fait là, comprendre où elle se trouve – au fond de sa tête ? Simple folie ? Au fond de sa chair ? Tumeurs malignes.
La Voix, elle, ne comprend pas. Elle entend sa réponse mais ne s’en contente pas.
Je suis TOI ! Proteste-t-elle, nous sommes ENSEMBLE, sans Moi ton CORPS n’est R̶̺͙̹͉̘̹͕͍̙͈̯̻̀̓́̚I̶̢̛̙̣͖̖̙͍̜͍̯̪͙̘̅̓́̈́̂͗̄̔͘͜͝Ě̷̖̰̤̲̱̺̹̥̗͈̘̰͌̈́̾̍̓̍̚N̵̮̝̾͗̋̇̈̌̑̾̍̄̃̽͋͝!
Et sans Aimable, la Voix n’est rien non plus, lui répond-t-il. La Voix ronge, ses crocs raclent ses pensées pour en arracher un peu de vérité, qu’elle n’a d’autres choix qu’avaler.
Tu n’es qu’un HOte, l’hôte le plus VIEUX ! Bougonne-t-elle, l’insulte-t-elle ? Oh, être traité de vieux ne le dérange plus tellement : ses cheveux gris et ses douleurs articulaires témoignent d’une usure qu’un homme de son âge n’a pas à avoir.
Hôte ? Réagit-il, Parasite ! Répond-t-elle.
Parasite.
Ne chasse-t-on pas les ombres d’une forteresse en brisant ses murs ? Ne chasserait-il pas l’Ombre en lui en brisant son corps et ses os, en laissant la lumière l’inonder jusqu’au plus profond de ses viscères ?
La Voix Rit. Bien sûr que non.
Notre corps a déjà été brisé et nous sommes toujours ENSEMBLE. UNIS.
Dans la chair et le s̵̛̖̥̬̞͙̮͇̰̳̞̾̈́͛̇̇͜å̵̛̖̠̩͓͈̖̻̖̣͍͒̈́́͆̎̆̽̕͜n̸̨̺̟̣̝̩̼̦̫̤̮̲̺͉̲̓̇̿͊͌͌̑̍͂̊͘͝g̶̡̡͇̤̯̺͕̟̳̰̠̩͋̀͑͘.
Aimable et Hildegard sont si différents. Si semblables à la fois. Tous deux prisonniers d'une forteresse, dressant haut leur mur par peur des ombres qu'ils pourraient laisser échapper.
Que va-t-elle nous FAIRE ? MAL ?
Il n'y a rien à craindre. Il n'y a rien à craindre, avec Hildegard.
Vraiment ?
@Hildegard C. De Bayard @Diane d'Orléans
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Le soleil chauffe agréablement sa nuque.
Un soupir s’arrache de ses lèvres : d’une main, il tient les rênes de sa jument, de l’autre, l’autre reste sur sa cuisse alors qu’Aimable élève les yeux vers le ciel. Ses prunelles célestes rencontrent leurs jumelles, entre les rayons farouches de sa coiffe solaire. Leurs yeux se croisent et Aimable se surprendrait presque à sourire : l’objet de la visite est un poids, au fond de son ventre, il s’exprime d’un battement de cœur plus vif, d’une ombre qui gronde et s’interroge – où nous emmène-T-ELLE ?
Aimable l’apaise d’un battement de paupières. Il n’y a rien à craindre. Avec Hildegard, il n’a jamais rien eu à craindre. Et ses coups ? Rappelle la Voix. Aimable hausse à peine les épaules, faisant mine de s’étirer – ses coups ? Ils lui ont appris à se battre. Ils ont fait de lui un guerrier. Il se souvient aussi de toutes ces fois où Hildegard le menait, lui et Marie, dans les bois les plus sombres à la traque d’un sanglier, quand elle rôdait aux alentours du domaine à la tombée du crépuscule, quand elle se battait des heures durant avec Ulric. A en faire trembler les montagnes ! Les grands murs résonnaient de leurs râles quand leur corps s’heurtait avec la violence de cerfs en plein combat.
Il n’y a rien à craindre.
Elle a PouRtant PEUR ?
L’interrogation l’arrache de ses pensées et il revient à la réalité. Hildegard a posé pied à terre et l’a devancé de quelques mètres. Son pas est différent. Il n’est plus aussi traînant et pourtant, elle semble prête à reculer à chaque pas. Elle se tient droite, si droite que sa silhouette s’en incline. Aimable ne prend plus le temps de réfléchir, d’un geste rapide, il pose pied à terre et son pas chaloupé rejoint celui de son aînée. Son épaule effleure la sienne, malgré leur différence de taille, c’est lui qui s’écarte avant qu’elle ne le bouscule. Sa jument suit en levant curieusement ses grandes oreilles : Aimable préfère les femelles, plus douces, plus paisibles. Elle s’approche de lui, longeant son bras de son museau, en réponse, Aimable le lui flatte avec tendresse.
Peur ? Non, Hildegard n’a pas peur.
Qu’est-ce que C’EST ?
Aimable observe sa sœur, lorsqu’elle s’avance pour les présenter.
Elle rougit.
Qu’est-CE QUE c’est ? SAIGNE ?
Non. Elle est… gênée ?
Stupéfait, Aimable cligne des paupières – il en serait presque bouche bée, heureusement, il se retient et préfère détourner les yeux vers la porte. Son cœur bat un peu plus vite. Il se sent… penaud, comme cette fois où il a ouvert la porte de ses sœurs par inadvertance et qu’il les a surpris se changer – c’était ensuivi une des courses les plus rapides de sa vie, bien que peut-être aucunes d’elles ne l’aient suivi. Marie s’était contentée de rire et continuait à se servir de ce souvenir honteux pour le faire rougir.
Sa sœur est une forteresse imprenable. Ses traits altiers sont toujours figés, fermés, maintenant fermement prisonnières la moindre de ses émotions. Sa vulnérabilité, si elle en a une, est enfouie depuis tant d’années qu’elle a disparu – mais Aimable sait. Il ne sait que trop bien qu’il existe des choses en ce monde qui ne disparaissent pas. Combien même tente-t-on de les enterrer. Elles finissent toujours par ressortir. Certaines d’entre elles sont inchangées, tels les corps qui hantent ce bas monde. D’autres ne sont que des traces obscures noircissant le parquet, une obscurité dans le regard, une aigreur dans le soupir, une moisissure tapie au fond de l’âme.
Que cache-t-elle au fond de ses donjons ? Quels secrets y pourrissent et la rongent ? Son cœur se serre à cette idée. Il ne ressent pas de peine, non, c’est un sentiment puissant qu’il se doit de museler. L’envie de l’aider. L’envie d’ouvrir ses cages et laisser la lumière entrer en elle. La libérer de son obscurité. Comme lui rêve qu’on ouvre sa cage thoracique pour lui extirper tout le mal qu’il renferme. La vie n’est pas aussi simple… Seul Dieu a le pouvoir d’expier ainsi le mal d’une âme.
Mais Aimable ne peut pas abandonner. Il ne veut pas. Il est le petit frère, il est le Chevalier ; et lorsqu’elle lui ouvrira ses portes, il compte bien s’y engouffrer. Eclairer ses ombres de sa propre lumière. La soulager. A sa manière. Comme lorsqu’elle prenait sa main pour le tirer quand il hésitait, face à la pénombre des grands bois. Il l’aidera.
Se tenant près d’elle, il se redresse avec fierté, les mains croisées dans le dos. Il se veut fort, qu’elle n’ait pas à s’inquiéter pour lui. Depuis quelques années, la timidité d’Aimable a été bien mise à mal par sa nouvelle position dans la Cour. Sans l’avoir vaincue, il a su remporter quelques victoires, assez pour ne plus hésiter sur ce champ de bataille. Supporter les regards reste un supplice, à présent supportable.
_ Tout va bien se passer, glisse-t-il à voix basse. Pour elle ? Pour lui ? Les deux à la fois. Eleanor, armée d’un sourire, armée d’une volonté et d’un optimisme si écrasant qu’elle a su rompre les barrières d’Aimable. Et lui offrir un peu de sa lumière. De son optimisme.
S’entendre prononcer ces mots est étrange, ils sonnent faux et pourtant, lui donnent espoir. Face à la nervosité de sa sœur, Aimable se sent plus paisible, les pieds bien ancrés dans le sol. Son assurance est nouvelle, peut-être, pour Hildegard ; une assurance travaillée au fur et à mesure des années, à force de prendre de l’expérience et confiance en ses capacités.
Jusqu’à ce que Diane fasse son apparition.
Ce visage, il l’a déjà vu. La vision de son saignement de nez intempestif lui revient de plein fouet et Aimable se retient de grimacer. Dieu, fasse qu’elle ne mentionne pas cet évènement – ni son impolitesse, ni l’étrangeté de sa réaction. Ou Hildegard lui adressera ses pires furies.
D’ailleurs, sa sœur le frappe déjà au talon et il hoche docilement la tête. Fermant le poing pour le poser sur son cœur, c’est une révérence qu’il offre à la jeune femme. Du coin de l’œil, il aperçoit le sourire timide qui éclaire le visage de son frère.
Cela fait des mois, au moins, qu’il ne l’a pas vue sourire.
Sa sœur ouvrirait-elle une meurtrière ? Il se doute que s’il s’avance, il se recevra une flèche – pour autant, elle ne dégage aucune menace à l’encontre de Diane. Au contraire. Ses yeux clairs s’élèvent discrètement vers elle.
Il dessine, du bout des yeux, la douceur de ses traits. Ses mâchoires sont peu prononcées, comme ses pommettes. L’absence de reliefs osseux ajoutent à la tendresse de ses longs cils derrière lesquels sont logés deux saphirs. Aimable les esquive d’un battement de paupière, laissant ses prunelles s’échapper le long de son nez fin, glisser comme de la rosée sur ses lèvres ourlées. Son teint est clair, sans être pâle, lui rappelant les premières chaleurs de l’aube. Chaleurs, le sourire qu’elle esquisse l’invite à courber davantage l’échine, il n’aperçoit que d’un œil sa longue chevelure élégamment ramenée sur son épaule.
La main de sa sœur s’abat sur son épaule sans qu’il ne frémisse. Il connaît sa poigne et, avec amusement, se rassure : c’est bien sa sœur, près de lui, malgré tous… ces changements qu’il devine.
_ Dame d’Orléans. Je vous remercie pour votre accueil et le temps que vous nous offrez. Je ne puis qu’exprimer à mon tour l’honneur de vous rencontrer ce jour. J’espère que notre venue ne sera en rien…
Notre CAS ?
_ … Ne sera en rien une gêne pour vous.
Notre Cas ? Que veut-elle FaIrrE ? Que va-t-elle NOUS faire ?
Heureusement, son interruption ne semble être due qu’à la timidité, au vu de ses yeux fixés sur le sol. La Voix, elle, laisse échapper un grondement mêlant agacement et curiosité.
Que veut-elle FaIirre ?
Comprendre.
Comprendre ?
Comprendre. Comprendre la Voix, comprendre ce qu’elle fait là, comprendre où elle se trouve – au fond de sa tête ? Simple folie ? Au fond de sa chair ? Tumeurs malignes.
La Voix, elle, ne comprend pas. Elle entend sa réponse mais ne s’en contente pas.
Je suis TOI ! Proteste-t-elle, nous sommes ENSEMBLE, sans Moi ton CORPS n’est R̶̺͙̹͉̘̹͕͍̙͈̯̻̀̓́̚I̶̢̛̙̣͖̖̙͍̜͍̯̪͙̘̅̓́̈́̂͗̄̔͘͜͝Ě̷̖̰̤̲̱̺̹̥̗͈̘̰͌̈́̾̍̓̍̚N̵̮̝̾͗̋̇̈̌̑̾̍̄̃̽͋͝!
Et sans Aimable, la Voix n’est rien non plus, lui répond-t-il. La Voix ronge, ses crocs raclent ses pensées pour en arracher un peu de vérité, qu’elle n’a d’autres choix qu’avaler.
Tu n’es qu’un HOte, l’hôte le plus VIEUX ! Bougonne-t-elle, l’insulte-t-elle ? Oh, être traité de vieux ne le dérange plus tellement : ses cheveux gris et ses douleurs articulaires témoignent d’une usure qu’un homme de son âge n’a pas à avoir.
Hôte ? Réagit-il, Parasite ! Répond-t-elle.
Parasite.
Ne chasse-t-on pas les ombres d’une forteresse en brisant ses murs ? Ne chasserait-il pas l’Ombre en lui en brisant son corps et ses os, en laissant la lumière l’inonder jusqu’au plus profond de ses viscères ?
La Voix Rit. Bien sûr que non.
Notre corps a déjà été brisé et nous sommes toujours ENSEMBLE. UNIS.
Dans la chair et le s̵̛̖̥̬̞͙̮͇̰̳̞̾̈́͛̇̇͜å̵̛̖̠̩͓͈̖̻̖̣͍͒̈́́͆̎̆̽̕͜n̸̨̺̟̣̝̩̼̦̫̤̮̲̺͉̲̓̇̿͊͌͌̑̍͂̊͘͝g̶̡̡͇̤̯̺͕̟̳̰̠̩͋̀͑͘.
Aimable et Hildegard sont si différents. Si semblables à la fois. Tous deux prisonniers d'une forteresse, dressant haut leur mur par peur des ombres qu'ils pourraient laisser échapper.
Que va-t-elle nous FAIRE ? MAL ?
Il n'y a rien à craindre. Il n'y a rien à craindre, avec Hildegard.
Vraiment ?
@Hildegard C. De Bayard @Diane d'Orléans
Dim 5 Sep - 11:04
When the body speaks |
Pour une raison qui lui échappait, lorsqu’elle s’adressait à la seule femme de la milice, cette dernière semblait perdre sa contenance. Était-ce parce que Diane était aussi une femme enrôlée dans les affaires de cette armée luttant quand les créatures ? Était-ce parce qu’elle était médecin et que ce rôle était traditionnellement attribué à la gente masculine ? Ou bien avait-elle par le passé prononcé la moindre parole pouvant ébranler sa force de caractère ? Pourquoi ces rougissements, accompagnés parfois par quelques tremblements dans la voix et les mains ? Une nouvelle fois, Diane avait constaté avec tristesse des réactions inhabituelles chez l’abbesse lorsqu’elle lui avait parlé du cas de son frère et lui avait demandé de l’examiner. Bien évidemment, la physicienne avait accepté avec plaisir de lui rendre se service. Et, au fond, Hildegard devait bien se douter qu’elle obtiendrait une réponse positive, alors pourquoi tant de cérémonie et d’agitation ?
Car elle préférait cacher tous ses liens avec la milice, la dame d’Orléans avait proposé aux deux De Bayard de venir à elle, là où ils trouveraient un abri des regards indiscrets et une certaine intimité. Le rendez-vous était fixé et la physicienne n’avait pas cessé de songer à ce jour, trouvant tout de même curieuse la demande de la milicienne. Son instinct lui soufflait qu’il ne s’agirait pas simplement de jeter un œil à une vieille cicatrice mal guérie ou à un genou douloureux. Néanmoins, elle se garda bien de parler de ses spéculations à qui que ce soit et préféra attendre de découvrir de quoi souffrait le Chevalier De Bayard. Après tout, durant les festivités des noces d’Hermance de Navarre, elle l’avait surpris souffrant d’un saignement de nez qu’il avait tenté de minimiser…
Ponctuels, Diane n’avait même pas feint de surprise lorsqu’un domestique la tira de sa lecture pour annoncer l’arrivée des De Bayard. En remerciant le jeune homme, elle lui demanda que l’on prépare des rafraîchissements et quelques plateaux de fruits à picorer, selon les envies de chacun. Elle ajouta également qu’il faudrait fermer les portes pour laisser libre cours aux langues de se délier sans crainte et qu’il ne faudrait pas les interrompre, à moins d’une urgence absolue ou d’un bobo de sa nièce. Elle s’assura qu’il lui confirme que son matériel était déjà en place et puis elle le quitta pour rejoindre ses invités du jour.
Lorsqu’elle passa le seuil de la porte du salon, elle n’eut pas l’occasion de dire quoique ce soit que déjà la milicienne était sur le qui-vive, debout à la saluer avec un petit sourire presque timide, alors que les deux femmes se connaissaient déjà bien. L’abbesse présenta son frère, qui à son tour, salua poliment la dame d’Orléans. Enfin, comme pour terminer ce petit numéro de bienséance, la physicienne leur adressa son respect, accompagné du mythique sourire solaire qui faisait sa renommée :
- Soyez les bienvenus dans la demeure du Duc d’Orléans. Je vous en prie, asseyez-vous, détendez-vous. Vous avez parcouru une longue route pour me rejoindre ici, soufflez un coup, vous ne trouverez que de la bienveillance en ces lieux.
Et puis, surtout, ce salon en particulier n’avait pas été choisi au hasard. La dame d’Orléans avait largement prévu son coup en jetant son dévolu sur cette pièce du domaine spécifiquement. Plus éloignée des lieux les plus vivants et fréquentés, les domestiques ne multipliaient pas les allers-retours dans leur journée de travail aux abords de ce salon. Idéalement situé, le vis-à-vis vers l’extérieur était moindre, ne donnant pas sur une partie des jardins la plus fréquentée.
D’un geste de la main, elle invita les De Bayard à sa rasseoir et puis elle fit de même, juste en face d’eux. Une table basse prête à accueillir les rafraîchissements les séparant. Ces derniers n’étant toujours pas arrivés, il fallait encore tuer le temps en bavardages tout en légèreté, avant d’entrer dans le vifs du sujet et de laisser les mondanités de côté. Une phrase de la milicienne se répétait sans cesse dans ses oreilles, mais il n’était pas encore temps de rebondir sur ce fameux cas que représentait son frère…
Ses prunelles alternaient entre ses deux invités. Le visage d’Hildegard était un mélange de sérieux, de rigueur et de froideur, avec cette touche de timidité que seule Diane semblait lui provoquer. Le bas de son visage se voulait plus ferme, de paire avec la tension de son corps, bien que ses épaules avaient réussi à se détendre en découvrant la silhouette de la dame d’Orléans. Le haut de son visage, et tout notamment ses deux pupilles, étaient animées d’une certaine excitation, que la physicienne ne savait pas comment interpréter.
Le Chevalier, Aimable, lui donnait toujours la même impression que lors de leur première véritable rencontre, durant les festivités de juin. Son apparence dénotait avec son âge et le poids de la vie semblait peser sur chaque parcelle de son corps. Malgré une apparence que certain qualifiait de bourrue, Diane avait la sensation qu’en face d’elle se trouvait un homme doté de beaucoup de sensibilité. Son sourire était sincère et peut-être plaçait-il bien plus d’espoir dans cette rencontre que sa propre sœur. La physicienne fit le choix très rapide de ne pas mentionner l’incident du saignement de nez et sa manière de repousser son aide. Derrière un comportement se cache toujours des raisons et peut-être auront-ils l’occasion d’en reparler, plus tard.
- Avez-vous fait bon voyage ? D’ici quelques instants, cette table sera recouverte de mets simples mais délicieux pour vous permettre de reprendre des forces. Et n’ayez crainte pour vos montures, nos palefreniers sont déjà en train de s’en occuper.
Bien que la vue de gobelets remplis de boissons fraîches et fruits bien juteux ne manqueraient pas de les intéresser ne serait-ce que quelques instants, Diane estimait que le plus intéressant se trouvait dans un coin de son salon, recouvert d’un drap blanc pour ne pas trop attirer le regard : tout son attirail de médecin, soigneusement disposé pour l’examen promis au Chevalier.
Car elle préférait cacher tous ses liens avec la milice, la dame d’Orléans avait proposé aux deux De Bayard de venir à elle, là où ils trouveraient un abri des regards indiscrets et une certaine intimité. Le rendez-vous était fixé et la physicienne n’avait pas cessé de songer à ce jour, trouvant tout de même curieuse la demande de la milicienne. Son instinct lui soufflait qu’il ne s’agirait pas simplement de jeter un œil à une vieille cicatrice mal guérie ou à un genou douloureux. Néanmoins, elle se garda bien de parler de ses spéculations à qui que ce soit et préféra attendre de découvrir de quoi souffrait le Chevalier De Bayard. Après tout, durant les festivités des noces d’Hermance de Navarre, elle l’avait surpris souffrant d’un saignement de nez qu’il avait tenté de minimiser…
Ponctuels, Diane n’avait même pas feint de surprise lorsqu’un domestique la tira de sa lecture pour annoncer l’arrivée des De Bayard. En remerciant le jeune homme, elle lui demanda que l’on prépare des rafraîchissements et quelques plateaux de fruits à picorer, selon les envies de chacun. Elle ajouta également qu’il faudrait fermer les portes pour laisser libre cours aux langues de se délier sans crainte et qu’il ne faudrait pas les interrompre, à moins d’une urgence absolue ou d’un bobo de sa nièce. Elle s’assura qu’il lui confirme que son matériel était déjà en place et puis elle le quitta pour rejoindre ses invités du jour.
Lorsqu’elle passa le seuil de la porte du salon, elle n’eut pas l’occasion de dire quoique ce soit que déjà la milicienne était sur le qui-vive, debout à la saluer avec un petit sourire presque timide, alors que les deux femmes se connaissaient déjà bien. L’abbesse présenta son frère, qui à son tour, salua poliment la dame d’Orléans. Enfin, comme pour terminer ce petit numéro de bienséance, la physicienne leur adressa son respect, accompagné du mythique sourire solaire qui faisait sa renommée :
- Soyez les bienvenus dans la demeure du Duc d’Orléans. Je vous en prie, asseyez-vous, détendez-vous. Vous avez parcouru une longue route pour me rejoindre ici, soufflez un coup, vous ne trouverez que de la bienveillance en ces lieux.
Et puis, surtout, ce salon en particulier n’avait pas été choisi au hasard. La dame d’Orléans avait largement prévu son coup en jetant son dévolu sur cette pièce du domaine spécifiquement. Plus éloignée des lieux les plus vivants et fréquentés, les domestiques ne multipliaient pas les allers-retours dans leur journée de travail aux abords de ce salon. Idéalement situé, le vis-à-vis vers l’extérieur était moindre, ne donnant pas sur une partie des jardins la plus fréquentée.
D’un geste de la main, elle invita les De Bayard à sa rasseoir et puis elle fit de même, juste en face d’eux. Une table basse prête à accueillir les rafraîchissements les séparant. Ces derniers n’étant toujours pas arrivés, il fallait encore tuer le temps en bavardages tout en légèreté, avant d’entrer dans le vifs du sujet et de laisser les mondanités de côté. Une phrase de la milicienne se répétait sans cesse dans ses oreilles, mais il n’était pas encore temps de rebondir sur ce fameux cas que représentait son frère…
Ses prunelles alternaient entre ses deux invités. Le visage d’Hildegard était un mélange de sérieux, de rigueur et de froideur, avec cette touche de timidité que seule Diane semblait lui provoquer. Le bas de son visage se voulait plus ferme, de paire avec la tension de son corps, bien que ses épaules avaient réussi à se détendre en découvrant la silhouette de la dame d’Orléans. Le haut de son visage, et tout notamment ses deux pupilles, étaient animées d’une certaine excitation, que la physicienne ne savait pas comment interpréter.
Le Chevalier, Aimable, lui donnait toujours la même impression que lors de leur première véritable rencontre, durant les festivités de juin. Son apparence dénotait avec son âge et le poids de la vie semblait peser sur chaque parcelle de son corps. Malgré une apparence que certain qualifiait de bourrue, Diane avait la sensation qu’en face d’elle se trouvait un homme doté de beaucoup de sensibilité. Son sourire était sincère et peut-être plaçait-il bien plus d’espoir dans cette rencontre que sa propre sœur. La physicienne fit le choix très rapide de ne pas mentionner l’incident du saignement de nez et sa manière de repousser son aide. Derrière un comportement se cache toujours des raisons et peut-être auront-ils l’occasion d’en reparler, plus tard.
- Avez-vous fait bon voyage ? D’ici quelques instants, cette table sera recouverte de mets simples mais délicieux pour vous permettre de reprendre des forces. Et n’ayez crainte pour vos montures, nos palefreniers sont déjà en train de s’en occuper.
Bien que la vue de gobelets remplis de boissons fraîches et fruits bien juteux ne manqueraient pas de les intéresser ne serait-ce que quelques instants, Diane estimait que le plus intéressant se trouvait dans un coin de son salon, recouvert d’un drap blanc pour ne pas trop attirer le regard : tout son attirail de médecin, soigneusement disposé pour l’examen promis au Chevalier.
Dim 12 Sep - 23:47
@Diane d'Orléans & @Aimable E. de Bayard
Rêvait-elle ou le sourire de Diane était encore plus éclatant que d'ordinaire ? Hildegard se sentit instantanément rapetisser dans ses bottes quand bien même la chaleur de la dame était contagieuse : sans s'en rendre compte le sourire de la milicienne s'était élargi. Elle souriait à pleines dents. Comme frappée par un drôle d'enchantement.
Oui vraiment, il n'existait pas une chose sur terre que la douceur de Diane ne saurait faire fondre. Y compris le coeur d'Hildegard, cet organe si savamment verrouillé à double tour et enterré bien profond dans sa cuirasse depuis des années.
Quel malheur que d'être attirée par le soleil ! Elle croisa brièvement le regard curieux de son frère et l'expression de joie un peu béate qui illuminait ses traits se noircit immédiatement, retrouvant tout de leur froideur implacable et impeccable aussitôt que Diane leur eut tourné le dos. Dans ses yeux fusa un message, de ceux que frères et soeurs ont l'habitude de s'échanger quand il s'agit de se tirer les oreilles et de se pincer les bras derrière les parents. De ceux qui veulent dire « Pas un mot, pas un souffle. » Personne ne devait savoir que loin de leurs terres natales, choyée dans le domaine d'Orléans, brillait un joyau de bonne femme avec le pouvoir de transformer l'inflexible abbesse de Bayard en un toutou heureux en un battement de cils.
Charles était déjà un témoin de trop.
▬ C'est trop gentil, il ne fallait p-
▬ Dame Hildegard ! Bonjour !
Les protestations de la milicienne furent interrompues avant même d'être formulées par le cri enfantin d'une adorable bouille toute aussi blonde que celle de la médecin qui vint s'échouer dans ses pattes.
▬ Bonjour Iris. Par habitude, elle pliait déjà les genoux, anticipant le câlin de la gamine qui se jeta sur elle pour une étreinte avant de se glisser malicieusement auprès de Diane, non sans avoir salué Aimable d'un grand « Bonjour Messire ! ». Hildegard se fit la réflexion que la petite de Charles était dotée d'une énergie au moins aussi lumineuse que sa tante et prit place à table.
On était toujours bien reçu chez les d'Orléans. Trop bien reçu. Avec des goûters et de la dentelle. Tout ce qui déplaisait à la sévère abbesse qui malgré tout ses efforts n'arriverait que rarement à refuser les accueils de cette foutue famille solaire.
▬ Ma fille, je vous remercie infiniment comme d'habitude pour ce repas mais vous savez qu'il n'est pas nécessaire de nous gâter autant. Le voyage n'est pas si ardu que cela et nous avons l'habitude.
Tout ce faste, elle les laissait pour la noblesse de la capitale et puis Côme aussi, son cadet. Eux avaient tout le loisir de s'engraisser. Toutefois, elle savait que Charles et Diane avaient à coeur de bien faire et que c'était l'éducation qu'ils avaient tout deux reçus. Et puis son cheval, Courtaud, devait probablement ronfler de bonheur aux petits soins des palefreniers du domaine qui ne manqueraient pas de de le brosser tout en le nourrissant copieusement de carottes. Aussi prit-elle sur elle pour se montrer sage et ne pas trop mettre les coudes sur la table, laissant Iris lui faire la conversation puisque cette dernière avait l'air d'avoir attendu son retour pour lui faire le long compte-rendu de l'état des jardins de son père et du nombre de fleurs qui avaient été plantées pour la saison chaude. Passionnant. Heureusement que la bière était bonne.
Cependant, malgré tous les efforts de leurs hôtesses, Hildegard sentait indubitablement le malaise monter en elle, ramper doucement de son torse jusqu'à sa nuque. Il était là. Il ne partirait pas. Elle demeurait inhabituellement bien droite et tendue sur sa chaise, encore plus incapable que d'ordinaire de regarder la Dame d'Orléans dans les yeux ou de lui tenir la conversation plus de quelques phrases. Quel embarras. Et plus la collation durait, plus elle se sentait étouffer, écrasée par une angoisse qu'elle n'arrivait pas à identifier.
Aussi quand Iris lui proposa d'admirer elle-même les dernières plantations d'un arbuste dont elle avait déjà oublié le nom, l'abbesse sauta presque de son siège pour se laisser guider par la petite main de la demoiselle.
▬ Ah oui bien sûr si j'ai fait tout ce trajet c'est parce qu'il me tardait d'admirer les parterres de tulipes que vous m'avez montrée la dernière fois. Grinça-t-elle tout de même parce qu'on ne changeait pas un ours bougon en docile petit chiot en un claquement de doigts.
▬ Iris ! Les parterres d'Iris Dame Hildegard ! S'écria la petite.
▬ Oui oui Iris c'est ce que j'ai dit non ? Ah ne tirez pas, vous allez me casser le bras. Vous avez encore plus de force qu'avant !
▬ Point du tout, vous fabulez encore ! Rit la petite. Elle se stoppa tout de même avec un rire lorsque la milicienne lui fit signe de l'attendre.
S'avançant alors vers Diane et Aimable, elle leur adressa un petit hochement de tête et s'excusa maladroitement :
▬ Navrée, j'ai des affaires de la plus haute urgence à régler avec mademoiselle. J'espère que cela ne vous gêne pas. Vous n'avez pas besoin de moi de toutes façons ? Elle sentit ses épaules se crisper à nouveau en échangeant un regard avec son cadet et dessina solennellement le signe de croix avant de se reculer, aussitôt rejointe par Iris qui l'entraina à reculons hors de la pièce. Alors qu'elle disparaissait lentement hors de leur vue, elle ne cessait de fixer Aimable avec une lueur inquiète. Devait-elle vraiment le laisser seul avec la physicienne ? Et si les outils de cette dernière chatouillait l'engeance en lui ? Et s'il montrait les crocs ? Et si elle prenait peur ? Une grande inspiration. Pourquoi s'inviter dans un examen médical ?
▬ Et donc est-ce que votre père les a plantés ces forsythias depuis le temps que je lui répète ? Résonna sa voix au loin dans le couloir.
Elle avait tourné le dos. Il le fallait. Il fallait leur faire confiance. N'était-ce pas pour cela qu'elle avait insisté pour qu'ils se retrouvent tous les deux ? Ils seraient bien mieux tous les deux, à l'abri de son jugement et de ses inquiétudes...
Oui vraiment, il n'existait pas une chose sur terre que la douceur de Diane ne saurait faire fondre. Y compris le coeur d'Hildegard, cet organe si savamment verrouillé à double tour et enterré bien profond dans sa cuirasse depuis des années.
Quel malheur que d'être attirée par le soleil ! Elle croisa brièvement le regard curieux de son frère et l'expression de joie un peu béate qui illuminait ses traits se noircit immédiatement, retrouvant tout de leur froideur implacable et impeccable aussitôt que Diane leur eut tourné le dos. Dans ses yeux fusa un message, de ceux que frères et soeurs ont l'habitude de s'échanger quand il s'agit de se tirer les oreilles et de se pincer les bras derrière les parents. De ceux qui veulent dire « Pas un mot, pas un souffle. » Personne ne devait savoir que loin de leurs terres natales, choyée dans le domaine d'Orléans, brillait un joyau de bonne femme avec le pouvoir de transformer l'inflexible abbesse de Bayard en un toutou heureux en un battement de cils.
Charles était déjà un témoin de trop.
▬ C'est trop gentil, il ne fallait p-
▬ Dame Hildegard ! Bonjour !
Les protestations de la milicienne furent interrompues avant même d'être formulées par le cri enfantin d'une adorable bouille toute aussi blonde que celle de la médecin qui vint s'échouer dans ses pattes.
▬ Bonjour Iris. Par habitude, elle pliait déjà les genoux, anticipant le câlin de la gamine qui se jeta sur elle pour une étreinte avant de se glisser malicieusement auprès de Diane, non sans avoir salué Aimable d'un grand « Bonjour Messire ! ». Hildegard se fit la réflexion que la petite de Charles était dotée d'une énergie au moins aussi lumineuse que sa tante et prit place à table.
On était toujours bien reçu chez les d'Orléans. Trop bien reçu. Avec des goûters et de la dentelle. Tout ce qui déplaisait à la sévère abbesse qui malgré tout ses efforts n'arriverait que rarement à refuser les accueils de cette foutue famille solaire.
▬ Ma fille, je vous remercie infiniment comme d'habitude pour ce repas mais vous savez qu'il n'est pas nécessaire de nous gâter autant. Le voyage n'est pas si ardu que cela et nous avons l'habitude.
Tout ce faste, elle les laissait pour la noblesse de la capitale et puis Côme aussi, son cadet. Eux avaient tout le loisir de s'engraisser. Toutefois, elle savait que Charles et Diane avaient à coeur de bien faire et que c'était l'éducation qu'ils avaient tout deux reçus. Et puis son cheval, Courtaud, devait probablement ronfler de bonheur aux petits soins des palefreniers du domaine qui ne manqueraient pas de de le brosser tout en le nourrissant copieusement de carottes. Aussi prit-elle sur elle pour se montrer sage et ne pas trop mettre les coudes sur la table, laissant Iris lui faire la conversation puisque cette dernière avait l'air d'avoir attendu son retour pour lui faire le long compte-rendu de l'état des jardins de son père et du nombre de fleurs qui avaient été plantées pour la saison chaude. Passionnant. Heureusement que la bière était bonne.
Cependant, malgré tous les efforts de leurs hôtesses, Hildegard sentait indubitablement le malaise monter en elle, ramper doucement de son torse jusqu'à sa nuque. Il était là. Il ne partirait pas. Elle demeurait inhabituellement bien droite et tendue sur sa chaise, encore plus incapable que d'ordinaire de regarder la Dame d'Orléans dans les yeux ou de lui tenir la conversation plus de quelques phrases. Quel embarras. Et plus la collation durait, plus elle se sentait étouffer, écrasée par une angoisse qu'elle n'arrivait pas à identifier.
Aussi quand Iris lui proposa d'admirer elle-même les dernières plantations d'un arbuste dont elle avait déjà oublié le nom, l'abbesse sauta presque de son siège pour se laisser guider par la petite main de la demoiselle.
▬ Ah oui bien sûr si j'ai fait tout ce trajet c'est parce qu'il me tardait d'admirer les parterres de tulipes que vous m'avez montrée la dernière fois. Grinça-t-elle tout de même parce qu'on ne changeait pas un ours bougon en docile petit chiot en un claquement de doigts.
▬ Iris ! Les parterres d'Iris Dame Hildegard ! S'écria la petite.
▬ Oui oui Iris c'est ce que j'ai dit non ? Ah ne tirez pas, vous allez me casser le bras. Vous avez encore plus de force qu'avant !
▬ Point du tout, vous fabulez encore ! Rit la petite. Elle se stoppa tout de même avec un rire lorsque la milicienne lui fit signe de l'attendre.
S'avançant alors vers Diane et Aimable, elle leur adressa un petit hochement de tête et s'excusa maladroitement :
▬ Navrée, j'ai des affaires de la plus haute urgence à régler avec mademoiselle. J'espère que cela ne vous gêne pas. Vous n'avez pas besoin de moi de toutes façons ? Elle sentit ses épaules se crisper à nouveau en échangeant un regard avec son cadet et dessina solennellement le signe de croix avant de se reculer, aussitôt rejointe par Iris qui l'entraina à reculons hors de la pièce. Alors qu'elle disparaissait lentement hors de leur vue, elle ne cessait de fixer Aimable avec une lueur inquiète. Devait-elle vraiment le laisser seul avec la physicienne ? Et si les outils de cette dernière chatouillait l'engeance en lui ? Et s'il montrait les crocs ? Et si elle prenait peur ? Une grande inspiration. Pourquoi s'inviter dans un examen médical ?
▬ Et donc est-ce que votre père les a plantés ces forsythias depuis le temps que je lui répète ? Résonna sa voix au loin dans le couloir.
Elle avait tourné le dos. Il le fallait. Il fallait leur faire confiance. N'était-ce pas pour cela qu'elle avait insisté pour qu'ils se retrouvent tous les deux ? Ils seraient bien mieux tous les deux, à l'abri de son jugement et de ses inquiétudes...
@Diane d'Orléans & @Aimable E. de Bayard
Mar 14 Sep - 10:02
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@Hildegard C. De Bayard @Diane d'Orléans
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L’accueil est chaleureux, à l’image de leurs hôtes. Et le sourire d’Hildegard… le ferait presque rougir de joie. Elle a l’air si radieuse.
Il ne l’a jamais vue ainsi. Comme libérée de toutes ses préoccupations, allégée de cette armure qui l’étouffe – pas celle qui renferme son corps, non, mais celle qui pèse sur son âme. Ce ne sont pas seulement des devoirs, ce sont beaucoup de choses qui lui ont échappées, qu’on lui a dissimulées, qu’il discerne sans voir. Diane a-t-elle la force de briser ses chaînes ? Devra-t-il lui demander de l’aider… Comme Hildegard l’a fait envers lui ?
Que donnerait-il pour voir sa sœur heureuse ?
La culpabilité revient le frapper de plein fouet et naïvement, il s’interroge. Est-il responsable ? L’Ouroboros est-il la seule cause de son malheur ? Sa disparition l’aurait-elle soulagée ? Des questions auxquelles il pense sans cesse et qu’il n’a jamais osées lui poser, par peur d’entendre sa réponse. S’il n’avait pas eu sa femme ou ses enfants, s’il n’y avait pas eu Constantin, Aimable ne serait pas… Il n’aurait pas tenu jusque là. Lui en veut-elle… de s’être enchaîné à ce monde ? D’avoir décidé de vivre malgré le Malin qui vit dans sa tête ? Les doutes s’arrachent des ombres, ils reviennent susurrer à son oreille, le Chevalier frémit. Dans son esprit, sa poigne relâche légèrement celle de son épée et l’Ouroboros, lui, affiche un rictus fait d’os et de crocs.
Aimable préfère se détourner de lui, son cœur s’accélère. Il bat jusqu’aux bouts de ses doigts, une vie qui le rappelle à son devoir – avec lassitude, le Chevalier resserre son emprise sur son épée, pour tenir à distance l’Ouroboros. Le tenir loin de lui, loin des autres.
Il se sent terriblement petit, dans ce grand espace, avec sa sœur à ses côtés ; et pourtant, si énorme qu’il craint de ne faire tomber un vase par pure maladresse. Auprès d’Hildegard, il redevient quelque peu l’enfant qu’il a toujours été : timide, discret, il s’est naturellement reculé d’un léger pas en arrière. Sa nuque s’est courbée et il préfère finalement étudier leurs chaussures, ne levant les yeux vers leurs lèvres que lorsqu’elles prennent la parole.
Elle les invite à s’assoir et Aimable les imite. Ses articulations protestent et Aimable retient son souffle en craignant que le craquement ne soit perceptible par tous. En réponse, il fait légèrement rouler l’une de ses épaules, penche la tête sur le côté, comme sa sœur a l’habitude de faire – un mimétisme dont il n’a pas conscience et qui trahit… Des années de fervente observation.
L’arrivée d’Iris fait aussitôt se redresser Aimable. Un sourire fugace éclaire ses traits : disparaît l’homme usé, apparaît le père aimant. Une tendresse bourrue dans ses yeux clairs, sa posture dégage une nouvelle douceur. Il a redressé les épaules, replacé ses mains sur ses jambes et salue Iris d’un petit mouvement de tête.
_ Bonjour, demoiselle. Merci… Dame d’Orléans, pour votre hospitalité, répond-t-il simplement.
Contrairement aux apparences, Aimable est probablement le plus vorace de la famille. Bien souvent, ils ont accusé Côme et sa gourmandise – ou encore, Ulric et son énorme masse musculaire. En réalité, le discret Aimable a toujours été la main qui s’égarait dans les plats, avant, pendant et après les repas. Il ravale sa salive et s’efforce de se contenir, notamment en se contentant d’une douceur qu’il grignote calmement. Puis il compte quelques secondes avant de se resservir. A dire vrai, quand Hildegard se redresse, le plateau qui leur a été emmené est presque vide – avec innocence, Aimable lève simplement les yeux vers elle, ne semblant pas avoir bougé de sa chaise.
Le Chevalier avait écouté Iris déblatérer avec patience et expérience, il avait même interrogé l’enfant pour l’encourager à s’exprimer davantage. Il était plus bavard que sa sœur, mais en soit, n’avait pas réellement osé aborder directement Diane ou lancer un sujet de conversation entre adultes. Cette diversion lui avait permis d’épargner sa timidité et de se gaver discrètement des fruits ou autres sucreries qu’on leur avait apportés. Dignement, il termine par son jus de fruits, qu’il boit d’une traite en retenant un soupir soulagé.
Cette fois, il n’ya pas Côme pour mettre la faute sur son dos – mais il faut dire qu’Aimable n’a pas lui-même remarqué les ravages de son appétit. Quelques secondes lui sont nécessaires pour le remarquer, à dire vrai, c’est quand il tend une énième fois la main pour porter à ses lèvres le dernier morceau de fruit qu’il réalise. Décontenancé, il détaille le plateau du regard, se penche même pour voir si les sucreries ne s’en sont pas échappées, puis tourne les yeux vers le dernier morceau qu’il a entre ses doigts. Gêné, il hésite à le reposer mais se rappelle que c’est impoli – sa sœur lui frapperait la main -, il hésite, le reposer serait aussi impoli et manger le dernier sans l’avoir proposé aux autres l’est tout autant ! Perdu, Aimable garde le morceau de fruit entre ses doigts, reposant sa main sur sa cuisse en essayant de trouver une échappatoire à son problème.
_ Je… je suis désolé, j’étais… j’étais affamé, puis-je terminer ? Interroge-t-il, la gorge serrée sous l’anxiété. Bien sûr, qu’il peut terminer, maintenant qu’il a posé ses doigts sur le dernier morceau. Las, il se retient de masser ses paupières – il aurait dû faire plus attention.
Sa morphologie, au premier regard, paraît fine… et épaisse à la fois. Aucun kilo superflu n’adoucit ses traits austères, taillés à la serpe, mais sa taille n’atteste d’aucune maigreur.
Heureusement, Iris lui apporte son secours et entraîne sa sœur loin d’eux. Aimable tourne les yeux vers Hildegard, étonné, comme s’apprêtant à la rattraper. Il se retient et la regarde s’éloigner. Son cœur se serre davantage.
Abandonné, crache l’Ouroboros. Moqueur et méprisant.
Aimable détourne les yeux vers Diane, enfin, fixe plutôt ses mains.
Non, répond-t-il, Elle a d’autres obligations.
Regarder les fleurs, ricane la Voix.
Peut-être est-ce mieux ainsi, constate le Chevalier. Le soulagement, ainsi qu’une certaine tristesse, viennent apaiser le rouge à ses joues. Ses épaules s’affaissent légèrement, libérées de la tension qui les tenait bien hautes, ou écrasées par un autre fardeau.
Avait-il besoin d’elle ?
A sa question, une part de lui a envie de crier. Oui ! OUI ! Oui. Il a besoin qu’elle soit là, il a besoin qu’elle soit près de lui, qu’elle le soutienne face au combat qu’il doit mener. Qu’elle accepte cette part qu’il déteste – mais comment lui demander de faire ce que lui ne réussit pas ? Sa sœur est présente, il sait que s’il l’appelait, s’il lui demandait, elle viendrait. Mais il sait aussi quel serait le prix qu’elle devrait payer. Il sait qu’elle prendrait sur elle, que ce serait un effort, une chaîne de plus qui l’étranglerait.
Depuis quand l’amour est-il une chaîne ? Une prison qui étouffe l’autre ?
Si l’Ouroboros lui était retiré, si une part de lui lui était arraché, est-ce que sa sœur l’aimerait davantage ? Est-ce qu’elle réussirait à le côtoyer, sans plus le fuir, sans plus le repousser ?
TU NE PEUX PAS M’ARRACHER ! Rugit L’Ouroboros, si fort dans sa tête qu’il s’en sent grimacer.
Et s’il le pouvait, le ferait-il ? L’enlever… Ce serait comme se couper un deux, s’arracher un membre. Il a beau le détester, il a vécu avec lui tant d’années, il a grandi avec lui, il fait partie de lui. Est-ce à cause de lui que sa sœur le déteste ? Est-ce à cause de ce qu’il est et non pas seulement à cause de l’Ouroboros ? Que doit-il améliorer ? Que doit-il changer ?
Pour que sa sœur soit aussi épanouie qu’à l’instant où elle a souri à Diane.
Une humidité sur ses doigts attire son regard – le fruit, toujours entre ses doigts, sur lequel il a refermé son emprise. Il soupire et le porte finalement à ses lèvres pour l’avaler, malgré sa gorge serrée, récupérant une serviette pour s’essuyer longuement les mains, ses mains si grandes et lourdes.
Hildegard s’en va, comme elle l’a fait tant de fois, il ne l’a pas retenue. Malgré l’envie qui bout dans ses veines. Ce besoin qu’il a honte d’avouer.
_ Je… Je suis désolé de vous gêner.
C’est tout ce qu’il trouve à dire, pour commencer. S’excuser. Il est le seul de sa famille à continuellement s’excuser – à demander pardon pour tout, pour rien, pardon d’être ne serait-ce que là. A infliger des soucis et des souffrances.
Il baisse encore plus les yeux et frotte ses paupières, la fatigue du voyage dira-t-il.
La peur de ce qu’on va lui faire, de ce qu’on va lui découvrir, peur des conséquences sur lui, sa vision de lui-même et la vision que sa sœur aura de lui. Peut-être n’est-ce pas plus mal qu’elle s’en aille. Qu’elle ne voit pas, ne sache pas ce qu’il est. Qu’elle préserve le peu d’affection qu’elle peut avoir à son sujet.
_ C’est… C’est très difficile pour moi, avoue-t-il d’une voix plus tremblante qu’il ne l’aurait crue, J’ai…
Il ravale sa salive. Son cœur bat dans sa gorge, la pression s’étire de ses épaules jusqu’à écraser sa cage thoracique. Je suis désolé, a-t-il encore envie de dire.
_ Je…
Que dire ? Qu’il était malade ? L’est-il ? Qu’il est fou ? Qu’est ce que Hildegard a dit à Diane, QU’EST-CE QU’ON VA NOUS FAIRE ?
Il n’y a pas de meilleures mains dans la région pour ton CAS ! Rugit l’Ouroboros, sa voix mimant celle d’Hildegard, la rendant plus haineuse qu’elle ne l’a jamais été. Ca fait mal.
Il se sent vulnérable, sans sa sœur, en danger, il
_ J’ai peur, lâche-t-il soudain. L’humidité sur ses doigts, cette fois, ce n’est ni du fruit écrasé, ni du sang qui s’échappe de son nez. Ce sont des larmes qu’il écrase contre le dos de sa main, en un geste pudique, rapide, prétextant chasser une poussière.
Peur de ce que Diane pourrait voir et de ce quel cela signifierait.
Est-il réellement humain, comme il l’a tant de fois espéré ? Est-il humain, mérite-t-il une famille, des amis, d’être aimé ?
Ou n’est-il qu’un monstre qu’il faudrait éliminer ?
Il a tant d’espoir et à la fois, il a peur de tout ce qu’il pourrait perdre : son humanité. Est-elle réelle ou n’est-ce qu’un mensonge, une excuse pour vivre un jour de plus et laisser soin au monstre de tuer, tuer encore ?
Malgré tous ses efforts, Aimable sent son dos se courber sous le poids énorme qui écrase ses épaules, comme si l’Ouroboros lui-même pesait pour l’écraser, pour le mettre à terre. Il résiste, le Chevalier contracte ses muscles, s’efforce de redresser son torse, il manque d’air avec ses yeux embués.
_ Je… suis désolé… Ca va aller je… Je vais me reprendre.
A croire que la douceur de Diane effondre toutes les forteresses.
Il ne l’a jamais vue ainsi. Comme libérée de toutes ses préoccupations, allégée de cette armure qui l’étouffe – pas celle qui renferme son corps, non, mais celle qui pèse sur son âme. Ce ne sont pas seulement des devoirs, ce sont beaucoup de choses qui lui ont échappées, qu’on lui a dissimulées, qu’il discerne sans voir. Diane a-t-elle la force de briser ses chaînes ? Devra-t-il lui demander de l’aider… Comme Hildegard l’a fait envers lui ?
Que donnerait-il pour voir sa sœur heureuse ?
La culpabilité revient le frapper de plein fouet et naïvement, il s’interroge. Est-il responsable ? L’Ouroboros est-il la seule cause de son malheur ? Sa disparition l’aurait-elle soulagée ? Des questions auxquelles il pense sans cesse et qu’il n’a jamais osées lui poser, par peur d’entendre sa réponse. S’il n’avait pas eu sa femme ou ses enfants, s’il n’y avait pas eu Constantin, Aimable ne serait pas… Il n’aurait pas tenu jusque là. Lui en veut-elle… de s’être enchaîné à ce monde ? D’avoir décidé de vivre malgré le Malin qui vit dans sa tête ? Les doutes s’arrachent des ombres, ils reviennent susurrer à son oreille, le Chevalier frémit. Dans son esprit, sa poigne relâche légèrement celle de son épée et l’Ouroboros, lui, affiche un rictus fait d’os et de crocs.
Aimable préfère se détourner de lui, son cœur s’accélère. Il bat jusqu’aux bouts de ses doigts, une vie qui le rappelle à son devoir – avec lassitude, le Chevalier resserre son emprise sur son épée, pour tenir à distance l’Ouroboros. Le tenir loin de lui, loin des autres.
Il se sent terriblement petit, dans ce grand espace, avec sa sœur à ses côtés ; et pourtant, si énorme qu’il craint de ne faire tomber un vase par pure maladresse. Auprès d’Hildegard, il redevient quelque peu l’enfant qu’il a toujours été : timide, discret, il s’est naturellement reculé d’un léger pas en arrière. Sa nuque s’est courbée et il préfère finalement étudier leurs chaussures, ne levant les yeux vers leurs lèvres que lorsqu’elles prennent la parole.
Elle les invite à s’assoir et Aimable les imite. Ses articulations protestent et Aimable retient son souffle en craignant que le craquement ne soit perceptible par tous. En réponse, il fait légèrement rouler l’une de ses épaules, penche la tête sur le côté, comme sa sœur a l’habitude de faire – un mimétisme dont il n’a pas conscience et qui trahit… Des années de fervente observation.
L’arrivée d’Iris fait aussitôt se redresser Aimable. Un sourire fugace éclaire ses traits : disparaît l’homme usé, apparaît le père aimant. Une tendresse bourrue dans ses yeux clairs, sa posture dégage une nouvelle douceur. Il a redressé les épaules, replacé ses mains sur ses jambes et salue Iris d’un petit mouvement de tête.
_ Bonjour, demoiselle. Merci… Dame d’Orléans, pour votre hospitalité, répond-t-il simplement.
Contrairement aux apparences, Aimable est probablement le plus vorace de la famille. Bien souvent, ils ont accusé Côme et sa gourmandise – ou encore, Ulric et son énorme masse musculaire. En réalité, le discret Aimable a toujours été la main qui s’égarait dans les plats, avant, pendant et après les repas. Il ravale sa salive et s’efforce de se contenir, notamment en se contentant d’une douceur qu’il grignote calmement. Puis il compte quelques secondes avant de se resservir. A dire vrai, quand Hildegard se redresse, le plateau qui leur a été emmené est presque vide – avec innocence, Aimable lève simplement les yeux vers elle, ne semblant pas avoir bougé de sa chaise.
Le Chevalier avait écouté Iris déblatérer avec patience et expérience, il avait même interrogé l’enfant pour l’encourager à s’exprimer davantage. Il était plus bavard que sa sœur, mais en soit, n’avait pas réellement osé aborder directement Diane ou lancer un sujet de conversation entre adultes. Cette diversion lui avait permis d’épargner sa timidité et de se gaver discrètement des fruits ou autres sucreries qu’on leur avait apportés. Dignement, il termine par son jus de fruits, qu’il boit d’une traite en retenant un soupir soulagé.
Cette fois, il n’ya pas Côme pour mettre la faute sur son dos – mais il faut dire qu’Aimable n’a pas lui-même remarqué les ravages de son appétit. Quelques secondes lui sont nécessaires pour le remarquer, à dire vrai, c’est quand il tend une énième fois la main pour porter à ses lèvres le dernier morceau de fruit qu’il réalise. Décontenancé, il détaille le plateau du regard, se penche même pour voir si les sucreries ne s’en sont pas échappées, puis tourne les yeux vers le dernier morceau qu’il a entre ses doigts. Gêné, il hésite à le reposer mais se rappelle que c’est impoli – sa sœur lui frapperait la main -, il hésite, le reposer serait aussi impoli et manger le dernier sans l’avoir proposé aux autres l’est tout autant ! Perdu, Aimable garde le morceau de fruit entre ses doigts, reposant sa main sur sa cuisse en essayant de trouver une échappatoire à son problème.
_ Je… je suis désolé, j’étais… j’étais affamé, puis-je terminer ? Interroge-t-il, la gorge serrée sous l’anxiété. Bien sûr, qu’il peut terminer, maintenant qu’il a posé ses doigts sur le dernier morceau. Las, il se retient de masser ses paupières – il aurait dû faire plus attention.
Sa morphologie, au premier regard, paraît fine… et épaisse à la fois. Aucun kilo superflu n’adoucit ses traits austères, taillés à la serpe, mais sa taille n’atteste d’aucune maigreur.
Heureusement, Iris lui apporte son secours et entraîne sa sœur loin d’eux. Aimable tourne les yeux vers Hildegard, étonné, comme s’apprêtant à la rattraper. Il se retient et la regarde s’éloigner. Son cœur se serre davantage.
Abandonné, crache l’Ouroboros. Moqueur et méprisant.
Aimable détourne les yeux vers Diane, enfin, fixe plutôt ses mains.
Non, répond-t-il, Elle a d’autres obligations.
Regarder les fleurs, ricane la Voix.
Peut-être est-ce mieux ainsi, constate le Chevalier. Le soulagement, ainsi qu’une certaine tristesse, viennent apaiser le rouge à ses joues. Ses épaules s’affaissent légèrement, libérées de la tension qui les tenait bien hautes, ou écrasées par un autre fardeau.
Avait-il besoin d’elle ?
A sa question, une part de lui a envie de crier. Oui ! OUI ! Oui. Il a besoin qu’elle soit là, il a besoin qu’elle soit près de lui, qu’elle le soutienne face au combat qu’il doit mener. Qu’elle accepte cette part qu’il déteste – mais comment lui demander de faire ce que lui ne réussit pas ? Sa sœur est présente, il sait que s’il l’appelait, s’il lui demandait, elle viendrait. Mais il sait aussi quel serait le prix qu’elle devrait payer. Il sait qu’elle prendrait sur elle, que ce serait un effort, une chaîne de plus qui l’étranglerait.
Depuis quand l’amour est-il une chaîne ? Une prison qui étouffe l’autre ?
Si l’Ouroboros lui était retiré, si une part de lui lui était arraché, est-ce que sa sœur l’aimerait davantage ? Est-ce qu’elle réussirait à le côtoyer, sans plus le fuir, sans plus le repousser ?
TU NE PEUX PAS M’ARRACHER ! Rugit L’Ouroboros, si fort dans sa tête qu’il s’en sent grimacer.
Et s’il le pouvait, le ferait-il ? L’enlever… Ce serait comme se couper un deux, s’arracher un membre. Il a beau le détester, il a vécu avec lui tant d’années, il a grandi avec lui, il fait partie de lui. Est-ce à cause de lui que sa sœur le déteste ? Est-ce à cause de ce qu’il est et non pas seulement à cause de l’Ouroboros ? Que doit-il améliorer ? Que doit-il changer ?
Pour que sa sœur soit aussi épanouie qu’à l’instant où elle a souri à Diane.
Une humidité sur ses doigts attire son regard – le fruit, toujours entre ses doigts, sur lequel il a refermé son emprise. Il soupire et le porte finalement à ses lèvres pour l’avaler, malgré sa gorge serrée, récupérant une serviette pour s’essuyer longuement les mains, ses mains si grandes et lourdes.
Hildegard s’en va, comme elle l’a fait tant de fois, il ne l’a pas retenue. Malgré l’envie qui bout dans ses veines. Ce besoin qu’il a honte d’avouer.
_ Je… Je suis désolé de vous gêner.
C’est tout ce qu’il trouve à dire, pour commencer. S’excuser. Il est le seul de sa famille à continuellement s’excuser – à demander pardon pour tout, pour rien, pardon d’être ne serait-ce que là. A infliger des soucis et des souffrances.
Il baisse encore plus les yeux et frotte ses paupières, la fatigue du voyage dira-t-il.
La peur de ce qu’on va lui faire, de ce qu’on va lui découvrir, peur des conséquences sur lui, sa vision de lui-même et la vision que sa sœur aura de lui. Peut-être n’est-ce pas plus mal qu’elle s’en aille. Qu’elle ne voit pas, ne sache pas ce qu’il est. Qu’elle préserve le peu d’affection qu’elle peut avoir à son sujet.
_ C’est… C’est très difficile pour moi, avoue-t-il d’une voix plus tremblante qu’il ne l’aurait crue, J’ai…
Il ravale sa salive. Son cœur bat dans sa gorge, la pression s’étire de ses épaules jusqu’à écraser sa cage thoracique. Je suis désolé, a-t-il encore envie de dire.
_ Je…
Que dire ? Qu’il était malade ? L’est-il ? Qu’il est fou ? Qu’est ce que Hildegard a dit à Diane, QU’EST-CE QU’ON VA NOUS FAIRE ?
Il n’y a pas de meilleures mains dans la région pour ton CAS ! Rugit l’Ouroboros, sa voix mimant celle d’Hildegard, la rendant plus haineuse qu’elle ne l’a jamais été. Ca fait mal.
Il se sent vulnérable, sans sa sœur, en danger, il
_ J’ai peur, lâche-t-il soudain. L’humidité sur ses doigts, cette fois, ce n’est ni du fruit écrasé, ni du sang qui s’échappe de son nez. Ce sont des larmes qu’il écrase contre le dos de sa main, en un geste pudique, rapide, prétextant chasser une poussière.
Peur de ce que Diane pourrait voir et de ce quel cela signifierait.
Est-il réellement humain, comme il l’a tant de fois espéré ? Est-il humain, mérite-t-il une famille, des amis, d’être aimé ?
Ou n’est-il qu’un monstre qu’il faudrait éliminer ?
Il a tant d’espoir et à la fois, il a peur de tout ce qu’il pourrait perdre : son humanité. Est-elle réelle ou n’est-ce qu’un mensonge, une excuse pour vivre un jour de plus et laisser soin au monstre de tuer, tuer encore ?
Malgré tous ses efforts, Aimable sent son dos se courber sous le poids énorme qui écrase ses épaules, comme si l’Ouroboros lui-même pesait pour l’écraser, pour le mettre à terre. Il résiste, le Chevalier contracte ses muscles, s’efforce de redresser son torse, il manque d’air avec ses yeux embués.
_ Je… suis désolé… Ca va aller je… Je vais me reprendre.
A croire que la douceur de Diane effondre toutes les forteresses.
@Hildegard C. De Bayard @Diane d'Orléans
Lun 20 Sep - 15:49
When the body speaks |
Et comme pour confirmer ses dires, des domestiques apportèrent de quoi ravir le palais des invités De Bayard. Alors qu’ils quittaient la pièce, prêts à fermer la porte derrière eux, le petit ange d’Orléans apparut pour se jeter vers Hildegard et lui imposer une étreinte. Quand bien même cette façon de se présenter devant des invités n’était pas acceptable, la Duchesse ne put réprimer son sourire en voyant son adorable nièce aussi heureuse de la visite de son amie l’abbesse. Finalement, son adorable Iris la rejoignit et s’installa pour prendre par au petit goûté.
- Vous savez bien que nous désirons toujours gâter nos invités. Vous êtes des amis de notre famille, nous voulions profiter de cette occasion pour faire plaisir à votre palais.
Si Iris laissait de quoi grignoter ! Mais visiblement, le Chevalier lui faisait une grande concurrence ! Tous les deux ne se privaient pas pour montrer combien les mets leur plaisaient, ce qui évidemment, réchauffa le cœur de Diane, ravie de savoir accueillir et mettre à l’aise ses convives. Sa nièce était un vrai moulin à paroles, pour autant la tante ne l’interrompit pas dans ses récits extraordinaires à propos de la beauté de leur jardin, de la découverte de grosses limaces oranges et de quelles fleurs avaient été plantées pour rayonner cet été.
Sur ces belles paroles, le Chevalier, tout timide, demanda la permission de déguster la dernière sucrerie, un peu honteux de s’en être emparé sans la partager.
- Ne vous privez pas, nous en avons d’autres en cuisine si vous le souhaitez.
Le pauvre, il avait soudain un petit air enfantin. Presque plus enfantin que le minois de son Iris qui s’exprimait avec aisance et un vocabulaire très développé pour son âge. Le Chevalier n’était pas à l’aise, même après cette conversation sur les plantes et les douceurs sucrées. Cela peina quelque peu Diane, mais elle le masqua derrière son chaleureux sourire.
Sa nièce désirait entraîner l’abbesse dans leur jardin, une idée qui plaisait en demi-teinte à cette dernière, mais qui n’avait pour autant pas le courage de lui refuser cette petite balade. Qui pourrait refuser quoi que ce soit à ce petit joyau de tendresse ? Tout de même embarrassée de les laisser tous les deux, la milicienne s’excusa.
- Mademoiselle est très convaincante, n’est-ce pas ? Dit-elle en plaisantant.
Adressant un petit clin d’œil à sa petite fleur, elle les regarda s’éloigner, après que l’abbesse ait fait un signe de croix en fixant son frère, le regard craintif. Et Diane détourna les yeux, pour se plonger dans ceux du Chevalier. Néanmoins ce contact fut impossible, lui n’osait lever les yeux vers elle. Et son corps entier sembla rompre peu à peu, à commencer par sa posture et ses épaules, partant vers l’avant, sous le poids d’un mal qui semblait le ronger intérieurement. Machinalement, il porta à ses lèvres le dernier fruit. Durant tout ce temps, il l’avait gardé entre ses doigts, coupé dans son élan. Il attrapait une serviette et rompait le silence entre eux deux pour s’excuser de gêner la Duchesse.
- Mais il n’y a rien à pardonner, Messire.
Ses mots n’avaient pas l’air de l’atteindre. Le Chevalier semblait fatigué, épuisé, vidé. Il se frottait les paupières, comme prêt à lâcher prise, maintenant que sa sœur n’était plus présente pour le couvrir d’un regard lui implorant de bien se comporter. Muette et respectueuse, la physicienne laissa à son patient le temps de formuler, de verbaliser. Quoi ? Elle n’en savait rien, mais elle se doutait que cela ne serait pas simple. Hildegard n’avait pas parlé de son frère en des termes très concrets, ni n’avait évoqué ses maux avec précision.
Sa voix était tremblante, incertaine. Il avait encore ce petit air enfantin qui tordait le cœur de la physicienne. Cette dernière ressentait sa difficulté à s’exprimer. Par où commencer ? Quels mots choisir ? Plutôt désemparée face à l’assurance du Chevalier qui ne faisait que s’écrouler, la Dame d’Orléans ne sut quoi dire. Officiellement, c’était la première fois qu’elle le rencontrait. En vérité, ils n’avaient pas échangé plus que quelques mots et leur lien ne lui permettait pas, ou très difficilement, d’être trop familière et encourageante. Alors elle le couva d’un regard doux et compatissant, en attendant qu’il s’exprime davantage.
La suite était terrible à voir. Le Chevalier avoua sa peur et tenta de masquer ses larmes. Est-ce par pudeur ? Est-ce parce qu’il est un homme ? Est-ce parce qu’ils ne se connaissent pas assez ? Ne souhaitant pas l’incommoder après cette « faiblesse » qu’il avait voulut masquer en toute hâte, la Duchesse détourna le regard. Mais ses tentatives pour reprendre le dessus sur cette peur et sa voix enraillée la poussèrent à quitter son siège pour s’asseoir auprès de lui, là où sa sœur était assise avant qu’elle ne les quitte.
Diane entrait dans l’espace du Chevalier, sans lui demander sa permission, aussi espérait-elle qu’elle ne se trompait pas en agissant ainsi, en s’imposant ainsi. Pleine de compassion, la main n’hésitant pas dans son geste, elle vint trouver son épaule pour lui transmettre sa chaleur et sa tendresse. Un petit geste réconfortant, en somme. Peut-être qu’il la repousserait. Peut-être qu’elle en faisait trop. Néanmoins, elle ne pouvait ignorer sa détresse, ses pupilles brillantes et embuées, le rougissements autour de ses yeux et sur ses joues, ses lèvres tremblotantes et sa respiration irrégulière.
- Je vous en prie, détendez-vous. La peur est légitime, peu importe votre condition. Je vous promets que je ne vous veux aucun mal, je ne fais que répondre à l’appel de votre sœur. Je ne sais rien de vous, Messire, seulement que vous souffrez et je le vois. Laissez-moi, s’il vous plaît, vous venir en aide si je le puis. Et si cela peut apaiser vos maux, laissez ces larmes couler. Elles s’évanouiront dans cette pièce, votre sœur n’en saura rien et les murs n’en parleront à personne. Vous partirez peut-être allégé, ainsi. N’ayez pas honte de qui vous êtes. La peur et les sentiments sont légitimes.
Sortant d’une poche cachée dans sa robe un mouchoir de soie blanc, elle le tendit au Chevalier.
- Je ne ferai rien que vous n’accepterez pas, Messire. Un examen médical n’est jamais un moment de joie, mais je mettrai tout en œuvre pour que vous soyez en confiance. Nous avancerons pas à pas, à votre rythme et en accord avec votre volonté. Je n'ai pas l'intention d'ouvrir votre torse pour découvrir votre cœur de père aimant.
Elle pencha la tête et lui adressa un sourire. Peut-être qu'évoquer sa famille, ses enfants, lui redonnerait un peu de courage et de volonté ?
- Vous savez bien que nous désirons toujours gâter nos invités. Vous êtes des amis de notre famille, nous voulions profiter de cette occasion pour faire plaisir à votre palais.
Si Iris laissait de quoi grignoter ! Mais visiblement, le Chevalier lui faisait une grande concurrence ! Tous les deux ne se privaient pas pour montrer combien les mets leur plaisaient, ce qui évidemment, réchauffa le cœur de Diane, ravie de savoir accueillir et mettre à l’aise ses convives. Sa nièce était un vrai moulin à paroles, pour autant la tante ne l’interrompit pas dans ses récits extraordinaires à propos de la beauté de leur jardin, de la découverte de grosses limaces oranges et de quelles fleurs avaient été plantées pour rayonner cet été.
Sur ces belles paroles, le Chevalier, tout timide, demanda la permission de déguster la dernière sucrerie, un peu honteux de s’en être emparé sans la partager.
- Ne vous privez pas, nous en avons d’autres en cuisine si vous le souhaitez.
Le pauvre, il avait soudain un petit air enfantin. Presque plus enfantin que le minois de son Iris qui s’exprimait avec aisance et un vocabulaire très développé pour son âge. Le Chevalier n’était pas à l’aise, même après cette conversation sur les plantes et les douceurs sucrées. Cela peina quelque peu Diane, mais elle le masqua derrière son chaleureux sourire.
Sa nièce désirait entraîner l’abbesse dans leur jardin, une idée qui plaisait en demi-teinte à cette dernière, mais qui n’avait pour autant pas le courage de lui refuser cette petite balade. Qui pourrait refuser quoi que ce soit à ce petit joyau de tendresse ? Tout de même embarrassée de les laisser tous les deux, la milicienne s’excusa.
- Mademoiselle est très convaincante, n’est-ce pas ? Dit-elle en plaisantant.
Adressant un petit clin d’œil à sa petite fleur, elle les regarda s’éloigner, après que l’abbesse ait fait un signe de croix en fixant son frère, le regard craintif. Et Diane détourna les yeux, pour se plonger dans ceux du Chevalier. Néanmoins ce contact fut impossible, lui n’osait lever les yeux vers elle. Et son corps entier sembla rompre peu à peu, à commencer par sa posture et ses épaules, partant vers l’avant, sous le poids d’un mal qui semblait le ronger intérieurement. Machinalement, il porta à ses lèvres le dernier fruit. Durant tout ce temps, il l’avait gardé entre ses doigts, coupé dans son élan. Il attrapait une serviette et rompait le silence entre eux deux pour s’excuser de gêner la Duchesse.
- Mais il n’y a rien à pardonner, Messire.
Ses mots n’avaient pas l’air de l’atteindre. Le Chevalier semblait fatigué, épuisé, vidé. Il se frottait les paupières, comme prêt à lâcher prise, maintenant que sa sœur n’était plus présente pour le couvrir d’un regard lui implorant de bien se comporter. Muette et respectueuse, la physicienne laissa à son patient le temps de formuler, de verbaliser. Quoi ? Elle n’en savait rien, mais elle se doutait que cela ne serait pas simple. Hildegard n’avait pas parlé de son frère en des termes très concrets, ni n’avait évoqué ses maux avec précision.
Sa voix était tremblante, incertaine. Il avait encore ce petit air enfantin qui tordait le cœur de la physicienne. Cette dernière ressentait sa difficulté à s’exprimer. Par où commencer ? Quels mots choisir ? Plutôt désemparée face à l’assurance du Chevalier qui ne faisait que s’écrouler, la Dame d’Orléans ne sut quoi dire. Officiellement, c’était la première fois qu’elle le rencontrait. En vérité, ils n’avaient pas échangé plus que quelques mots et leur lien ne lui permettait pas, ou très difficilement, d’être trop familière et encourageante. Alors elle le couva d’un regard doux et compatissant, en attendant qu’il s’exprime davantage.
La suite était terrible à voir. Le Chevalier avoua sa peur et tenta de masquer ses larmes. Est-ce par pudeur ? Est-ce parce qu’il est un homme ? Est-ce parce qu’ils ne se connaissent pas assez ? Ne souhaitant pas l’incommoder après cette « faiblesse » qu’il avait voulut masquer en toute hâte, la Duchesse détourna le regard. Mais ses tentatives pour reprendre le dessus sur cette peur et sa voix enraillée la poussèrent à quitter son siège pour s’asseoir auprès de lui, là où sa sœur était assise avant qu’elle ne les quitte.
Diane entrait dans l’espace du Chevalier, sans lui demander sa permission, aussi espérait-elle qu’elle ne se trompait pas en agissant ainsi, en s’imposant ainsi. Pleine de compassion, la main n’hésitant pas dans son geste, elle vint trouver son épaule pour lui transmettre sa chaleur et sa tendresse. Un petit geste réconfortant, en somme. Peut-être qu’il la repousserait. Peut-être qu’elle en faisait trop. Néanmoins, elle ne pouvait ignorer sa détresse, ses pupilles brillantes et embuées, le rougissements autour de ses yeux et sur ses joues, ses lèvres tremblotantes et sa respiration irrégulière.
- Je vous en prie, détendez-vous. La peur est légitime, peu importe votre condition. Je vous promets que je ne vous veux aucun mal, je ne fais que répondre à l’appel de votre sœur. Je ne sais rien de vous, Messire, seulement que vous souffrez et je le vois. Laissez-moi, s’il vous plaît, vous venir en aide si je le puis. Et si cela peut apaiser vos maux, laissez ces larmes couler. Elles s’évanouiront dans cette pièce, votre sœur n’en saura rien et les murs n’en parleront à personne. Vous partirez peut-être allégé, ainsi. N’ayez pas honte de qui vous êtes. La peur et les sentiments sont légitimes.
Sortant d’une poche cachée dans sa robe un mouchoir de soie blanc, elle le tendit au Chevalier.
- Je ne ferai rien que vous n’accepterez pas, Messire. Un examen médical n’est jamais un moment de joie, mais je mettrai tout en œuvre pour que vous soyez en confiance. Nous avancerons pas à pas, à votre rythme et en accord avec votre volonté. Je n'ai pas l'intention d'ouvrir votre torse pour découvrir votre cœur de père aimant.
Elle pencha la tête et lui adressa un sourire. Peut-être qu'évoquer sa famille, ses enfants, lui redonnerait un peu de courage et de volonté ?
Ven 24 Sep - 0:25
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@Diane d'Orléans
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Elle approche.
Il le sent, sans même lever les yeux. Ce n’est pas comme avec les créatures, c’est une sensation très différente – elle ne vient pas de l’Ouroboros, mais de son cœur qui s’emballe lorsqu’elle s’installe près de lui.
Aimable détourne les yeux, préférant diriger son regard vers la fenêtre plutôt que dans sa direction. Il ne veut pas la déranger. Et la timidité lui broie la gorge. De toute sa fratrie, il a toujours été le plus sensible. Même Marie, sa petite sœur, ne laissait pas libre à ses émotions comme lui pouvait le faire… Enfin, est-ce vraiment une liberté ? Elles viennent le submerger. Complètement. La peur et la honte sont un tsunami qui met à bas sa raison, elles ne laissent intactes que des rivages – des mirages. Ses doutes et ses pensées irrationnelles sont les seuls rivages émergeant de ces eaux troubles. MAL ! Elle va Nous FaiRe du MAL. Ton CAS, NOTRE Cas, PArrRaSite ! Non, lorsqu’il approche de ces berges, elles se mettent en mouvement, reptiles sournois au corps glissant. Elles veulent le faire plonger dans l’obscurité, il sait qu’il doit tenir, qu’il ne doit pas se laisser mener.
Reprends toi, s’intime le Chevalier. Sa main cherche la Croix autour de son cou, elle l’extirpe de son col et se referme nerveusement sur l’argent. Son pouce parcourt sa surface abîmée et longe ses piques acérés. Il renifla et frotte ses paupières du dos de sa main libre. Le geste est plus précipité, cette fois. Instinctivement, il serre ses grandes épaules, ses jambes aussi, comme pour prendre le moins de place possible sur ce siège. Elle se tient là où Hildegard était.
Un mouvement, un contact, Aimable, par réflexe, contracte tous ses muscles. Comme si elle l’avait transpercé d’un poignard. Mais lui a toute autre crainte. Aucune agitation suspecte. Pas de spasmes, pas un mouvement furtif annonçant le passage de l’Ouroboros, non, ce contact, il est vrai, il est réel, il est Sur et non pas Sous sa peau. Alors, les épaules carrées du Chevalier frémissent puis, au fur et à mesure des secondes, elles se relâchent. Elles retombent légèrement et seulement alors, il parvient à reprendre son souffle. Profondément. Il s’était retenu de respirer l’espace de ces quelques secondes. Aimable hésite, entre se dégager pour la protéger, et rester pour… profiter de ce geste si doux à son égard.
La gentillesse et la tendresse, peu de personnes lui en ont offertes. Et elles lui font du bien. Fait-elle cela à sa sœur ? Il comprend mieux ses sourires lorsqu’elle la voit. Cette pensée l’attendrit légèrement et l’aide à se dégager du marais dans lequel il manque de s’embourber.
N’ayez pas honte, dit-elle. Et cette phrase lui fait serrer le poing sur sa croix. Jusqu’à ce qu’elle approche le mouchoir clair de sa main. Aimable, par politesse, s’en saisit de sa main libre. Le tissu est doux, sous ses doigts. Doux comme ses gestes envers lui. Il ne peut, il ne veut pas le souiller. Il garde simplement le mouchoir dans sa main, reposée sur sa cuisse.
Elle est si encourageante envers lui. D’une manière totalement différente de ce qu’il a connu. La volonté de fer des De Bayard a été forgé sous les coups qu’ils s’échangeaient entre eux. La moindre occasion leur permettait de tester leurs forces et leurs progrès. Se battre était un jeu, c’était une des façons les plus simples de s’exprimer – c’était plus facile que les mots, ça faisait moins mal, ça faisait moins peur aussi.
Lorsqu’elle mentionne ses enfants, Aimable cligne des paupières et enfin, sa main lâche progressivement sa croix d’argent ; ses deux poings se referment docilement sur le mouchoir blanc, qu’il garde contre lui. Il renifle et essuie encore quelques larmes.
_ Je… Mes enfants… Ils s’appellent Richard… Et Isabeau…
Elle ne lui avait pas demandé, peut-être même ne s’y intéressait-elle pas. Mais parler de sa famille l’aide à s’apaiser, assez pour qu’il en esquisse comme un semblant de sourire.
_ Richard fera sa communion… Cet été. C’est un garçon très intelligent pour son âge. Et Isabeau… Oh Isabeau tient beaucoup de sa tante. Je suis fier d’eux. Et je remercie Dieu qu’ils n’aient pas… mes problèmes.
Par quoi commencer ? Son cœur, dans sa cage thoracique, manque de ralentir. Puis s’accélère brusquement. Il ferme à demi les yeux, luttant contre la sensation de vertige qui manque de le saisir, il contracte ses poings pour revenir à lui. Les propos de Diane l’ont rassuré. Il lui fait confiance, avec cette naïveté qui caractérise le Chevalier, ignorant les cris et les protestations de l’Ouroboros qui râcle contre son crâne – Mal, mal, mal, murmure La Voix, Elle Va nous FaiRRre MAL -.
_ Je…
Par quoi commencer ? Le début, probablement. Et que dire ? Hildegard l’avait encouragé à lui faire confiance. Et à sa plus grande surprise, il découvre que sa sœur n’a pas plus explicité son problème. Une part en lui en est soulagé : il sera libre d’expliquer ses difficultés, avec ses mots. L’autre, quant à elle, ne peut que constater la distance que sa sœur préfère garder avec lui. Peut-être qu’elle-même ne sait pas ce qu’il en est de l’Ouroboros. C’est un sujet tabou, chez eux. Depuis sa plus tendre enfance, le silence lui a été intimé à ce sujet. Il n’a jamais explicité ce qu’était la Voix. Ce qu’Elle lui murmurait, ce qu’Elle lui faisait voir, ce qu’Elle lui faisait faire… et lui-même n’a pas toujours accès à ses souvenirs.
_ … Je… J’ai… Ca depuis que je suis né… je crois…
Aimable laisse ses doigts abîmés caresser songeusement le tissu du mouchoir, qu’il n’a pas osé déplier. La boule dans sa gorge est toujours là. La peur ou l’Ouroboros qui s’interpose pour restreindre sa parole ? Il ne sait pas.
_ Vous ne direz rien à Hildegard… s’il vous plaît… elle… elle ne voudra probablement pas savoir… Ma famille ne sait pas vraiment ce que C’est, de toute façon…
Aimable hausse légèrement ses lourdes épaules, un soupir s’arrachant de ses lèvres sous l’effort. Lui a l’impression de chercher son air.
_ C’est… C’est…
Qu’ESst ce QUE C’EST ?
_ C’est… C’est dans ma… tête… ? Peut-être même dans…mon corps…
NOUS. NotRE CoRPS
Aimable serre les poings. Ses jointures blanchissent. Sa peau s’étire, sur ses articulations. Il relâche aussitôt les mains, nouveau soupir, il inspire. La Voix se tait soudainement, il sent qu’Elle le fixe, qu’Elle attend, qu’Elle plante déjà ses griffes à la base de sa langue – c’est une douleur sourde, comme s’il avait avalé des aiguilles de travers. Elle serait capable de le faire taire, si Elle estime qu’il en dit trop…
_ … Mes enfants ne l’ont pas… Par miracle, je… je suis le seul de ma famille à… avoir Ca….
Miracle ou malédiction ?
Sans s’en rendre compte, son épaule s’est légèrement reposée contre la main de Diane. Malgré sa charpente et sa musculatures solides, le soutien apporté par la jeune femme, aussi délicat soit-il, lui semble nécessaire pour parler. Pour se confier.
_ Je ne sais pas… Comment en parler… C’est toujours là…
Toujours.
Toujours. Il n’y a ni repos, ni répit. Chaque seconde, Elle est Là, avec lui. Elle écoute, elle rugit, elle murmure, elle sourit, elle pince, elle mord, elle crie, elle rit. Elle est Là, JE suis LA, elle Vit chaque instant de Leur Notre Vie.
Entre l’ordre et le chaos, le Chevalier et la Bête, les frontières sont troublées : son âme erre entre ces deux terres, ses propres mots lui paraissent étrangers et criants de vérité. Dépersonnalisation, déréalisation, ce n’est pas seulement la peur, c’est encore et toujours le combat que l’un mène contre l’autre, jusqu’à ce que l’un soit plongé de force dans l’obscurité.
_ C’est…
Avec
NOUS
Ses lèvres ont gardé scellé les mots de l’Ouroboros, ils ne sont qu’un grondement qui meurt au fond de sa gorge, il les ravale péniblement.
Elle veut SaVoIR ? Nous Sommes là ToUs les DEUX
Elle est
Avec
NOUS
Avec
Il le sent, sans même lever les yeux. Ce n’est pas comme avec les créatures, c’est une sensation très différente – elle ne vient pas de l’Ouroboros, mais de son cœur qui s’emballe lorsqu’elle s’installe près de lui.
Aimable détourne les yeux, préférant diriger son regard vers la fenêtre plutôt que dans sa direction. Il ne veut pas la déranger. Et la timidité lui broie la gorge. De toute sa fratrie, il a toujours été le plus sensible. Même Marie, sa petite sœur, ne laissait pas libre à ses émotions comme lui pouvait le faire… Enfin, est-ce vraiment une liberté ? Elles viennent le submerger. Complètement. La peur et la honte sont un tsunami qui met à bas sa raison, elles ne laissent intactes que des rivages – des mirages. Ses doutes et ses pensées irrationnelles sont les seuls rivages émergeant de ces eaux troubles. MAL ! Elle va Nous FaiRe du MAL. Ton CAS, NOTRE Cas, PArrRaSite ! Non, lorsqu’il approche de ces berges, elles se mettent en mouvement, reptiles sournois au corps glissant. Elles veulent le faire plonger dans l’obscurité, il sait qu’il doit tenir, qu’il ne doit pas se laisser mener.
Reprends toi, s’intime le Chevalier. Sa main cherche la Croix autour de son cou, elle l’extirpe de son col et se referme nerveusement sur l’argent. Son pouce parcourt sa surface abîmée et longe ses piques acérés. Il renifla et frotte ses paupières du dos de sa main libre. Le geste est plus précipité, cette fois. Instinctivement, il serre ses grandes épaules, ses jambes aussi, comme pour prendre le moins de place possible sur ce siège. Elle se tient là où Hildegard était.
Un mouvement, un contact, Aimable, par réflexe, contracte tous ses muscles. Comme si elle l’avait transpercé d’un poignard. Mais lui a toute autre crainte. Aucune agitation suspecte. Pas de spasmes, pas un mouvement furtif annonçant le passage de l’Ouroboros, non, ce contact, il est vrai, il est réel, il est Sur et non pas Sous sa peau. Alors, les épaules carrées du Chevalier frémissent puis, au fur et à mesure des secondes, elles se relâchent. Elles retombent légèrement et seulement alors, il parvient à reprendre son souffle. Profondément. Il s’était retenu de respirer l’espace de ces quelques secondes. Aimable hésite, entre se dégager pour la protéger, et rester pour… profiter de ce geste si doux à son égard.
La gentillesse et la tendresse, peu de personnes lui en ont offertes. Et elles lui font du bien. Fait-elle cela à sa sœur ? Il comprend mieux ses sourires lorsqu’elle la voit. Cette pensée l’attendrit légèrement et l’aide à se dégager du marais dans lequel il manque de s’embourber.
N’ayez pas honte, dit-elle. Et cette phrase lui fait serrer le poing sur sa croix. Jusqu’à ce qu’elle approche le mouchoir clair de sa main. Aimable, par politesse, s’en saisit de sa main libre. Le tissu est doux, sous ses doigts. Doux comme ses gestes envers lui. Il ne peut, il ne veut pas le souiller. Il garde simplement le mouchoir dans sa main, reposée sur sa cuisse.
Elle est si encourageante envers lui. D’une manière totalement différente de ce qu’il a connu. La volonté de fer des De Bayard a été forgé sous les coups qu’ils s’échangeaient entre eux. La moindre occasion leur permettait de tester leurs forces et leurs progrès. Se battre était un jeu, c’était une des façons les plus simples de s’exprimer – c’était plus facile que les mots, ça faisait moins mal, ça faisait moins peur aussi.
Lorsqu’elle mentionne ses enfants, Aimable cligne des paupières et enfin, sa main lâche progressivement sa croix d’argent ; ses deux poings se referment docilement sur le mouchoir blanc, qu’il garde contre lui. Il renifle et essuie encore quelques larmes.
_ Je… Mes enfants… Ils s’appellent Richard… Et Isabeau…
Elle ne lui avait pas demandé, peut-être même ne s’y intéressait-elle pas. Mais parler de sa famille l’aide à s’apaiser, assez pour qu’il en esquisse comme un semblant de sourire.
_ Richard fera sa communion… Cet été. C’est un garçon très intelligent pour son âge. Et Isabeau… Oh Isabeau tient beaucoup de sa tante. Je suis fier d’eux. Et je remercie Dieu qu’ils n’aient pas… mes problèmes.
Par quoi commencer ? Son cœur, dans sa cage thoracique, manque de ralentir. Puis s’accélère brusquement. Il ferme à demi les yeux, luttant contre la sensation de vertige qui manque de le saisir, il contracte ses poings pour revenir à lui. Les propos de Diane l’ont rassuré. Il lui fait confiance, avec cette naïveté qui caractérise le Chevalier, ignorant les cris et les protestations de l’Ouroboros qui râcle contre son crâne – Mal, mal, mal, murmure La Voix, Elle Va nous FaiRRre MAL -.
_ Je…
Par quoi commencer ? Le début, probablement. Et que dire ? Hildegard l’avait encouragé à lui faire confiance. Et à sa plus grande surprise, il découvre que sa sœur n’a pas plus explicité son problème. Une part en lui en est soulagé : il sera libre d’expliquer ses difficultés, avec ses mots. L’autre, quant à elle, ne peut que constater la distance que sa sœur préfère garder avec lui. Peut-être qu’elle-même ne sait pas ce qu’il en est de l’Ouroboros. C’est un sujet tabou, chez eux. Depuis sa plus tendre enfance, le silence lui a été intimé à ce sujet. Il n’a jamais explicité ce qu’était la Voix. Ce qu’Elle lui murmurait, ce qu’Elle lui faisait voir, ce qu’Elle lui faisait faire… et lui-même n’a pas toujours accès à ses souvenirs.
_ … Je… J’ai… Ca depuis que je suis né… je crois…
Aimable laisse ses doigts abîmés caresser songeusement le tissu du mouchoir, qu’il n’a pas osé déplier. La boule dans sa gorge est toujours là. La peur ou l’Ouroboros qui s’interpose pour restreindre sa parole ? Il ne sait pas.
_ Vous ne direz rien à Hildegard… s’il vous plaît… elle… elle ne voudra probablement pas savoir… Ma famille ne sait pas vraiment ce que C’est, de toute façon…
Aimable hausse légèrement ses lourdes épaules, un soupir s’arrachant de ses lèvres sous l’effort. Lui a l’impression de chercher son air.
_ C’est… C’est…
Qu’ESst ce QUE C’EST ?
_ C’est… C’est dans ma… tête… ? Peut-être même dans…mon corps…
NOUS. NotRE CoRPS
Aimable serre les poings. Ses jointures blanchissent. Sa peau s’étire, sur ses articulations. Il relâche aussitôt les mains, nouveau soupir, il inspire. La Voix se tait soudainement, il sent qu’Elle le fixe, qu’Elle attend, qu’Elle plante déjà ses griffes à la base de sa langue – c’est une douleur sourde, comme s’il avait avalé des aiguilles de travers. Elle serait capable de le faire taire, si Elle estime qu’il en dit trop…
_ … Mes enfants ne l’ont pas… Par miracle, je… je suis le seul de ma famille à… avoir Ca….
Miracle ou malédiction ?
Sans s’en rendre compte, son épaule s’est légèrement reposée contre la main de Diane. Malgré sa charpente et sa musculatures solides, le soutien apporté par la jeune femme, aussi délicat soit-il, lui semble nécessaire pour parler. Pour se confier.
_ Je ne sais pas… Comment en parler… C’est toujours là…
Toujours.
Toujours. Il n’y a ni repos, ni répit. Chaque seconde, Elle est Là, avec lui. Elle écoute, elle rugit, elle murmure, elle sourit, elle pince, elle mord, elle crie, elle rit. Elle est Là, JE suis LA, elle Vit chaque instant de Leur Notre Vie.
Entre l’ordre et le chaos, le Chevalier et la Bête, les frontières sont troublées : son âme erre entre ces deux terres, ses propres mots lui paraissent étrangers et criants de vérité. Dépersonnalisation, déréalisation, ce n’est pas seulement la peur, c’est encore et toujours le combat que l’un mène contre l’autre, jusqu’à ce que l’un soit plongé de force dans l’obscurité.
_ C’est…
Avec
NOUS
Ses lèvres ont gardé scellé les mots de l’Ouroboros, ils ne sont qu’un grondement qui meurt au fond de sa gorge, il les ravale péniblement.
Elle veut SaVoIR ? Nous Sommes là ToUs les DEUX
Elle est
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@Diane d'Orléans
Lun 27 Sep - 17:21
When the body speaks |
Passée la surprise de se retrouver d’un coup si proche d’elle malgré lui, le Chevalier finit par baisser sa garde. Très progressivement, avec beaucoup de lenteur. Tout du moins, c’est ainsi qu’elle interpréta son langage corporel. Et puis surtout, il ne l’avait pas repoussée, n’avait pas dégagé son sa main de son épaule d’un mouvement brusque, ou n’avait pas essayé de rejeter son petit mouchoir bien féminin. En choisissant de lui apporter de la compassion, Diane était entrée dans son espace personnel, mais elle ne l’avait pas poussé dans ses retranchements. Il acceptait cette situation, peut-être parce que l’aura de la physicienne était lumineuse et pleine d’espoir ?
Le sujet des enfants semblait être un bon début, afin que sa langue se détente et lui permette de plus parler, sans honte. Il évoqua donc Richard et Isabeau et, à l’aide de petits mouvements de tête, la Duchesse l’intima silencieusement de continuer sur cette voie. N’y-a-t-il pas de bonheur plus grand que sa propre chaire et son sang ? Ainsi, il devrait trouver le courage d’affronter cet examen. En tout cas, elle souhaitait mettre toutes les chances de son côté pour que cela soit possible. Néanmoins, très rapidement, l’inquiétude revint dans les propos du Chevalier. Les mots semblaient plus difficiles à trouver. Imaginant son propre courage comme une vague d’énergie, Diane tenta d’en faire parvenir à Aimable à l’aide de ce contact avec sa main.
Petit à petit, elle glanait quelques informations. Ce mal qui le rongeait était un fardeau présent depuis sa naissance. Il le décrivit comme une maladie mentale, avant de parler d’atteinte physique. Silencieuse et attentive aux réactions du corps du Chevalier, elle remarqua combien ses muscles, pris dans la tourmente de la pression, se contractaient avant de se détendre, et ainsi de suite. Il y avait très peu de contacts entre leurs prunelles et la Duchesse se douta que chercher trop longtemps à croiser son regard le mettrait mal à l’aise, à force. Ainsi, elle détailla son visage, marqué par la fatigue. Ses yeux descendirent le long de son cou. Son pouls était visible, bien qu’elle ne se trouve pas à quelques centimètres de sa gorge pour l’observer. Son cœur battait rapidement et fort. Sa simple présence ne suffisait pas à calmer l’emballement de son organe vital.
Il était le seul à subir cette condition. Et bien qu’elle décelait dans sa voix un grand soulagement de ne pas avoir vu ses enfants en hériter, elle ressentit également beaucoup de peine. La solitude d’un fardeau que l’on ne peut partager, en voilà une grande peine. Le bout de ses doigts tapotèrent son épaule, très doucement, en signe de sa compassion. Ce geste le mena consciemment, ou inconsciemment, à venir chercher la chaleur de sa paume. Elle sentit son poids très légèrement balancer en sa direction. Peut-être qu’il n’avait pas l’habitude d’autant de bienveillance ? Peut-être qu’elle était une source de soulagement ? Ce rôle, que bien d’autres ne supportent pas, elle l’endosserait avec plaisir, si elle était persuadée que cela puisse lui être bénéfique.
Mais voilà, le Chevalier semblait avoir atteint ses limites. Elle visualisa son mal être aux portes de ses lèvres, faisant barrage pour qu’il ne puisse le verbaliser et ainsi décharger un peu son fardeau. Sa gorge semblait se nouer et elle constata avec effroi que son pouls ne cessait de battre de plus en plus vite. Ses muscles étaient tendus. Finalement, Diane s’interrogea… Avait-elle réellement réussi à respecter son espace personnel ? Est-ce qu’elle n’en avait pas trop fait ? Non, c’était la femme qui parlait, pas le médecin. Ce dernier savait qu’elle était une personne altruiste et désireuse d’aider son prochain. En s’approchant ainsi de lui, elle avait voulu lui donner sa force et son courage. La femme pensait qu’elle s’était immiscée dans ses secrets, le médecin savait qu’elle cherchait à diagnostiquer ce mal-être qui le rongeait. Pour autant, c’est la femme qui prit le relais…
Diane était née avec une voix d’ange, c’était un fait. Et tout ceux pour qui elle chantait, s’accordaient à dire qu’il n’y avait pas une seule fausse notre lorsqu’elle vocalisait. Que sa voix était capable de transmettre du courage et même de charmer. Il n’était pas rare, lorsqu’elle soignait des patients, voire même des Miliciens, qu’elle fredonne un air pour détourner l’attention du malade ou du blessé et de lui permettre de s’apaiser. Est-ce que c’était également sa botte secrète pour se sortir d’une situation délicate ? Oui, certainement. Et aujourd’hui, en présence du Chevalier, elle ressentit le besoin de fredonner un air doux et chaleureux, pour qu’il puisse se retrouver, renouer avec sa volonté et son courage.
Durant tout le temps où sa voix chantonnait, tel un petit oiseau bien heureux de vivre, elle garda sa main posée sur l’épaule de son patient. Elle se permit même de temps en temps de la remuer un peu, ce qui donna une petite caresse sur son vêtement. Et tout naturellement, son buste se balança au rythme de son chant. Quant à son visage, il se voulait lumineux, juste ce qu’il fallait pour que le Chevalier puisse reprendre des forces face à son fardeau. Qu’il s’arme pour mieux l’affronter. Elle ne chercha pas à croiser son regard lorsqu’il ne le souhaitait pas. Néanmoins, elle profita de son chant pour remarquer ses effets positifs sur son corps. Quand bien même tout n’était pas gagné, ses muscles n’étaient plus aussi tendus et surtout, son cœur palpitait moins depuis son cou. N’était-ce pas encourageant ?
Sa chanson arrivait à sa fin. Elle sentit ses joues rosirent, gênée d’avoir soudainement chanter, mais tout de même confiante. Jusqu’ici, sa technique secrète avait fait ses preuve, le Chevalier était un homme sensible, elle le percevait… Alors, cela devrait faire effet… ?
- Est-ce que vous vous sentez mieux, Aimable ?
Le sujet des enfants semblait être un bon début, afin que sa langue se détente et lui permette de plus parler, sans honte. Il évoqua donc Richard et Isabeau et, à l’aide de petits mouvements de tête, la Duchesse l’intima silencieusement de continuer sur cette voie. N’y-a-t-il pas de bonheur plus grand que sa propre chaire et son sang ? Ainsi, il devrait trouver le courage d’affronter cet examen. En tout cas, elle souhaitait mettre toutes les chances de son côté pour que cela soit possible. Néanmoins, très rapidement, l’inquiétude revint dans les propos du Chevalier. Les mots semblaient plus difficiles à trouver. Imaginant son propre courage comme une vague d’énergie, Diane tenta d’en faire parvenir à Aimable à l’aide de ce contact avec sa main.
Petit à petit, elle glanait quelques informations. Ce mal qui le rongeait était un fardeau présent depuis sa naissance. Il le décrivit comme une maladie mentale, avant de parler d’atteinte physique. Silencieuse et attentive aux réactions du corps du Chevalier, elle remarqua combien ses muscles, pris dans la tourmente de la pression, se contractaient avant de se détendre, et ainsi de suite. Il y avait très peu de contacts entre leurs prunelles et la Duchesse se douta que chercher trop longtemps à croiser son regard le mettrait mal à l’aise, à force. Ainsi, elle détailla son visage, marqué par la fatigue. Ses yeux descendirent le long de son cou. Son pouls était visible, bien qu’elle ne se trouve pas à quelques centimètres de sa gorge pour l’observer. Son cœur battait rapidement et fort. Sa simple présence ne suffisait pas à calmer l’emballement de son organe vital.
Il était le seul à subir cette condition. Et bien qu’elle décelait dans sa voix un grand soulagement de ne pas avoir vu ses enfants en hériter, elle ressentit également beaucoup de peine. La solitude d’un fardeau que l’on ne peut partager, en voilà une grande peine. Le bout de ses doigts tapotèrent son épaule, très doucement, en signe de sa compassion. Ce geste le mena consciemment, ou inconsciemment, à venir chercher la chaleur de sa paume. Elle sentit son poids très légèrement balancer en sa direction. Peut-être qu’il n’avait pas l’habitude d’autant de bienveillance ? Peut-être qu’elle était une source de soulagement ? Ce rôle, que bien d’autres ne supportent pas, elle l’endosserait avec plaisir, si elle était persuadée que cela puisse lui être bénéfique.
Mais voilà, le Chevalier semblait avoir atteint ses limites. Elle visualisa son mal être aux portes de ses lèvres, faisant barrage pour qu’il ne puisse le verbaliser et ainsi décharger un peu son fardeau. Sa gorge semblait se nouer et elle constata avec effroi que son pouls ne cessait de battre de plus en plus vite. Ses muscles étaient tendus. Finalement, Diane s’interrogea… Avait-elle réellement réussi à respecter son espace personnel ? Est-ce qu’elle n’en avait pas trop fait ? Non, c’était la femme qui parlait, pas le médecin. Ce dernier savait qu’elle était une personne altruiste et désireuse d’aider son prochain. En s’approchant ainsi de lui, elle avait voulu lui donner sa force et son courage. La femme pensait qu’elle s’était immiscée dans ses secrets, le médecin savait qu’elle cherchait à diagnostiquer ce mal-être qui le rongeait. Pour autant, c’est la femme qui prit le relais…
Diane était née avec une voix d’ange, c’était un fait. Et tout ceux pour qui elle chantait, s’accordaient à dire qu’il n’y avait pas une seule fausse notre lorsqu’elle vocalisait. Que sa voix était capable de transmettre du courage et même de charmer. Il n’était pas rare, lorsqu’elle soignait des patients, voire même des Miliciens, qu’elle fredonne un air pour détourner l’attention du malade ou du blessé et de lui permettre de s’apaiser. Est-ce que c’était également sa botte secrète pour se sortir d’une situation délicate ? Oui, certainement. Et aujourd’hui, en présence du Chevalier, elle ressentit le besoin de fredonner un air doux et chaleureux, pour qu’il puisse se retrouver, renouer avec sa volonté et son courage.
Durant tout le temps où sa voix chantonnait, tel un petit oiseau bien heureux de vivre, elle garda sa main posée sur l’épaule de son patient. Elle se permit même de temps en temps de la remuer un peu, ce qui donna une petite caresse sur son vêtement. Et tout naturellement, son buste se balança au rythme de son chant. Quant à son visage, il se voulait lumineux, juste ce qu’il fallait pour que le Chevalier puisse reprendre des forces face à son fardeau. Qu’il s’arme pour mieux l’affronter. Elle ne chercha pas à croiser son regard lorsqu’il ne le souhaitait pas. Néanmoins, elle profita de son chant pour remarquer ses effets positifs sur son corps. Quand bien même tout n’était pas gagné, ses muscles n’étaient plus aussi tendus et surtout, son cœur palpitait moins depuis son cou. N’était-ce pas encourageant ?
Sa chanson arrivait à sa fin. Elle sentit ses joues rosirent, gênée d’avoir soudainement chanter, mais tout de même confiante. Jusqu’ici, sa technique secrète avait fait ses preuve, le Chevalier était un homme sensible, elle le percevait… Alors, cela devrait faire effet… ?
- Est-ce que vous vous sentez mieux, Aimable ?
Ven 1 Oct - 13:30
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@Diane d'Orléans
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Les prunelles de la jeune femme étudient ses traits.
Il sent la pression de son regard – cette main qui l’effleure sans le toucher. Gêné, Aimable baisse les yeux, ne souhaitant pas infliger à Diane la rusticité de ses traits. Il déteste ses cheveux grisonnants, il déteste ses pommettes saillantes, il déteste cette peau burinée marquée de cicatrices, il déteste jusqu’aux petites rides qui s’esquissent au coin de ses yeux. Son nez autrefois droit est tordu sous les coups qu’il a reçus – pas forcément ceux de ses ennemis. Ses lèvres sont rongées, abîmées, mordues par le vent, le froid, déchirées par ses combats. Son propre corps souffre des stigmates d’une vie de combat et ses yeux fuyants trahissent qu’il n’a toujours pas quitté le champ de bataille.
Diane est si douce. Sa main reste sur son épaule. Elle l’effleure, elle le tapote, elle reste si proche, sans avoir peur qu’il ne l’écrase, qu’il ne lui fasse du mal. Il n’est pas habitué à ce qu’on lui fasse confiance, et ça fait du bien de ne pas avoir à se sentir acculé. Et elle chante.
Surpris, Aimable se tend l’espace de quelques secondes, s’apaise tout aussi vite. La Voix s’est figée après quelques secondes à s’agiter : elle tend l’oreille à son tour.
Qu’est-ccce qu’Elle FAiT ? Elle GEMIT ? Elle a MAL ?
Aux yeux de la Bête, tout ne peut être que souffrance ou violence. Le Chevalier pourrait presque la croire, s’il n’y avait pas cette main sur son épaule – est-elle désespérée ? Prie-t-elle pour son âme ? Et bien qu’aucun texte sacré ne s’échappe de ses lèvres, sa voix a tout d’une sainte. Elle est claire. Douce et chaleureuse, comme les rayons d’un soleil à l’aube. Aimable retombe dans le silence, il se concentre sur elle et, curieuse, la Voix en fait de même.
Il chante, lui aussi, parfois.
A quoi ça Serrt ?
A rien, s’amuse à répondre le Chevalier, A faire du bien.
Du… Bien ? Répète la Voix, décontenancée, NON ! NON ! ELLE VEUT FAIRE MAL !
Aimable retient un soupir et parvient à l’ignorer. Non. Si elle voulait tant leur nuire, elle ne se montrerait pas si patiente avec lui. Les mains rejointes contre lui, contre son ventre, comme un geste de prière, il écoute en silence. C’est agréable. Et la Voix, en fin de compte, accepte d’écouter à son tour – Aimable n’entend plus du côté gauche, il ne s’en inquiète pas. La Voix a le droit d’en profiter Elle aussi. A moins que par mécontentement, Elle ne cherche à l’en priver ? Le Chevalier dissimule son sourire à cette idée. Elle peut agir comme un enfant, parfois.
Quand son chant se termine, Aimable entrouvre les paupières et finalement, la Voix se recule au fond de sa tête.
_ Mieux… Merci, répond finalement le Chevalier. Il détourne timidement les yeux, pour reprendre.
_ Votre voix… Est magnifique.
Il finit par se redresser légèrement pour masser sa nuque. Ses muscles se sont légèrement relâchés… C’est une sensation si étrange. Se sentir…
Détendu. Son cœur bat plus lentement. Plus lentement.
Plus. Lentement.
_Elle veut Entendre NotRe VOoix ? NoTR-
Cette Voix.
Elle ne vient pas de sa tête, cette fois.
Aimable est saisi d’horreur. Il s’est étranglé. Cette Voix.
C’est venu du fond de sa gorge. Plus profondément encore. Ses lèvres n’ont pas bougé et pourtant, la Voix, il L’a entendue, elle aussi. Une Voix pleine de Crocs, d’os qui s’heurtent, de chairs qui se déchirent, il sent la douleur, son corps saisi d’un frisson viscéral, ça bouge dans ses veines. Aimable se lève d’un bond, s’éloignant de quelques pas alors qu’il récupère la croix qu’il garde autour du cou. Une croix attachée à une chaîne faite d’anneaux de cottes de maille.
Il tremble, alors qu’il raffermit sa main sur la croix. Son pouce épouse une des pointes acérées, la douleur se ravive, son cœur s’accélère, il se ressaisit. La Voix rit, dans son esprit. Elle ne lui laisse aucun répit.
Pourquoi ? Demande le Chevalier. Pourquoi n’a-t-il pas droit à la paix ?
La Bête montre les crocs. A-t-elle peur ? A-t-elle agi par simple méchanceté ? Il ne sait pas.
_... Je suis désolé , murmure Aimable. Il a le goût du sang dans la bouche – qu’est ce que la Voix a déchiré pour se manifester ? La blessure est sûrement interne.
_... Vous l’avez entendue… C’est… Cette Voix. Je l’entends dans ma tête. Elle me dit. Elle me fait voir des choses… Affreuses. Tout le temps. Constamment. Quand je fais l’erreur d’abaisser ma garde, Elle tente de prendre le dessus. Elle vit dans ma tête mais je La sens dans mon corps, des fois, Elle se manifeste, comme là, des fois, c’est encore pire… Elle… Change mon corps. Je ne sais pas ce qu’elle en fait. Je ne sens que la douleur dans ces moments là et parfois, je me réveille quelques jours plus tard… Sans savoir ce qu’il s’est passé… J’ai essayé de me dire qu’Elle n’existait pas mais Elle est bien là, Elle est réelle…
Aimable se mord la lèvre, sa main tenant fermement sa croix.
_ Tant que je garde conscience je… Je peux La maîtriser. La douleur m’aide à rester conscient, ça me raccroche au présent, pas dans les cauchemars où Elle veut m’entraîner.
Si Diane a offert sa voix angélique, l’Ouroboros a répondu de sa voix démoniaque. Infernale.
Les épaules du Chevalier s’alourdissent sous son fardeau.
_ Je suis désolé. Je ne sais pas vraiment ce que j’espère, j’aimerai… j’aimerai comprendre ce qu’il m’arrive… J’aimerai contrôler tout ça… Je ne sais pas si j’espère être fou ou bien possédé par un monstre. Au moins, si j’étais fou, Ca resterait juste… Dans ma tête…
Un rire bref, sans joie, s’échappe de ses lèvres alors qu’il masse ses paupières. C’est plus un geste de désespoir qu’un réel rire, à dire vrai.
_ Je ne veux pas vous effrayer et je… je ferai tout mon possible pour ne pas vous blesser, je vous le jure… Mais si vous avez peur, je comprendrai, je… Nous dirons à ma sœur que nous avons essayé et que j’ai préféré m’en aller…
Il ne supporterait pas le regard d’Hildegard. Il est déjà assez bouleversé d’avoir entendu la Voix se manifester.
Voulait-Elle seulement se signaler ? Ne supportant plus d’être ignorée. Elle ne se fait plus entendre, ni dans sa tête, ni dans son corps. Elle attend. Ses nombreuses gueules déblatèrent inlassablement des mots sans sens, des murmures semblables aux chants des grillons, un son si présent auquel Aimable ne fait plus attention.
Echos de lointaines conversations (DOulEur – CAS - Comprendre – Mal - BiEn – TOUJOURS – PEUR -- Corps – Voix – Nous – Ensemble – RICHARD ISABEAU – Enfants – CHANT – Prière – Bénédicité – MANGER – FAIm – SouffrAnce – Espérance – DESESPOIR – CauchEmAr – POURQUOI – ParLer – Entendre - ECoUTER)
Peut-être ne voulait-Elle que se faire Entendre. Ne supportant plus le silence de son- de leur existence.
Il sent la pression de son regard – cette main qui l’effleure sans le toucher. Gêné, Aimable baisse les yeux, ne souhaitant pas infliger à Diane la rusticité de ses traits. Il déteste ses cheveux grisonnants, il déteste ses pommettes saillantes, il déteste cette peau burinée marquée de cicatrices, il déteste jusqu’aux petites rides qui s’esquissent au coin de ses yeux. Son nez autrefois droit est tordu sous les coups qu’il a reçus – pas forcément ceux de ses ennemis. Ses lèvres sont rongées, abîmées, mordues par le vent, le froid, déchirées par ses combats. Son propre corps souffre des stigmates d’une vie de combat et ses yeux fuyants trahissent qu’il n’a toujours pas quitté le champ de bataille.
Diane est si douce. Sa main reste sur son épaule. Elle l’effleure, elle le tapote, elle reste si proche, sans avoir peur qu’il ne l’écrase, qu’il ne lui fasse du mal. Il n’est pas habitué à ce qu’on lui fasse confiance, et ça fait du bien de ne pas avoir à se sentir acculé. Et elle chante.
Surpris, Aimable se tend l’espace de quelques secondes, s’apaise tout aussi vite. La Voix s’est figée après quelques secondes à s’agiter : elle tend l’oreille à son tour.
Qu’est-ccce qu’Elle FAiT ? Elle GEMIT ? Elle a MAL ?
Aux yeux de la Bête, tout ne peut être que souffrance ou violence. Le Chevalier pourrait presque la croire, s’il n’y avait pas cette main sur son épaule – est-elle désespérée ? Prie-t-elle pour son âme ? Et bien qu’aucun texte sacré ne s’échappe de ses lèvres, sa voix a tout d’une sainte. Elle est claire. Douce et chaleureuse, comme les rayons d’un soleil à l’aube. Aimable retombe dans le silence, il se concentre sur elle et, curieuse, la Voix en fait de même.
Il chante, lui aussi, parfois.
A quoi ça Serrt ?
A rien, s’amuse à répondre le Chevalier, A faire du bien.
Du… Bien ? Répète la Voix, décontenancée, NON ! NON ! ELLE VEUT FAIRE MAL !
Aimable retient un soupir et parvient à l’ignorer. Non. Si elle voulait tant leur nuire, elle ne se montrerait pas si patiente avec lui. Les mains rejointes contre lui, contre son ventre, comme un geste de prière, il écoute en silence. C’est agréable. Et la Voix, en fin de compte, accepte d’écouter à son tour – Aimable n’entend plus du côté gauche, il ne s’en inquiète pas. La Voix a le droit d’en profiter Elle aussi. A moins que par mécontentement, Elle ne cherche à l’en priver ? Le Chevalier dissimule son sourire à cette idée. Elle peut agir comme un enfant, parfois.
Quand son chant se termine, Aimable entrouvre les paupières et finalement, la Voix se recule au fond de sa tête.
_ Mieux… Merci, répond finalement le Chevalier. Il détourne timidement les yeux, pour reprendre.
_ Votre voix… Est magnifique.
Il finit par se redresser légèrement pour masser sa nuque. Ses muscles se sont légèrement relâchés… C’est une sensation si étrange. Se sentir…
Détendu. Son cœur bat plus lentement. Plus lentement.
Plus. Lentement.
_Elle veut Entendre NotRe VOoix ? NoTR-
Cette Voix.
Elle ne vient pas de sa tête, cette fois.
Aimable est saisi d’horreur. Il s’est étranglé. Cette Voix.
C’est venu du fond de sa gorge. Plus profondément encore. Ses lèvres n’ont pas bougé et pourtant, la Voix, il L’a entendue, elle aussi. Une Voix pleine de Crocs, d’os qui s’heurtent, de chairs qui se déchirent, il sent la douleur, son corps saisi d’un frisson viscéral, ça bouge dans ses veines. Aimable se lève d’un bond, s’éloignant de quelques pas alors qu’il récupère la croix qu’il garde autour du cou. Une croix attachée à une chaîne faite d’anneaux de cottes de maille.
Il tremble, alors qu’il raffermit sa main sur la croix. Son pouce épouse une des pointes acérées, la douleur se ravive, son cœur s’accélère, il se ressaisit. La Voix rit, dans son esprit. Elle ne lui laisse aucun répit.
Pourquoi ? Demande le Chevalier. Pourquoi n’a-t-il pas droit à la paix ?
La Bête montre les crocs. A-t-elle peur ? A-t-elle agi par simple méchanceté ? Il ne sait pas.
_... Je suis désolé , murmure Aimable. Il a le goût du sang dans la bouche – qu’est ce que la Voix a déchiré pour se manifester ? La blessure est sûrement interne.
_... Vous l’avez entendue… C’est… Cette Voix. Je l’entends dans ma tête. Elle me dit. Elle me fait voir des choses… Affreuses. Tout le temps. Constamment. Quand je fais l’erreur d’abaisser ma garde, Elle tente de prendre le dessus. Elle vit dans ma tête mais je La sens dans mon corps, des fois, Elle se manifeste, comme là, des fois, c’est encore pire… Elle… Change mon corps. Je ne sais pas ce qu’elle en fait. Je ne sens que la douleur dans ces moments là et parfois, je me réveille quelques jours plus tard… Sans savoir ce qu’il s’est passé… J’ai essayé de me dire qu’Elle n’existait pas mais Elle est bien là, Elle est réelle…
Aimable se mord la lèvre, sa main tenant fermement sa croix.
_ Tant que je garde conscience je… Je peux La maîtriser. La douleur m’aide à rester conscient, ça me raccroche au présent, pas dans les cauchemars où Elle veut m’entraîner.
Si Diane a offert sa voix angélique, l’Ouroboros a répondu de sa voix démoniaque. Infernale.
Les épaules du Chevalier s’alourdissent sous son fardeau.
_ Je suis désolé. Je ne sais pas vraiment ce que j’espère, j’aimerai… j’aimerai comprendre ce qu’il m’arrive… J’aimerai contrôler tout ça… Je ne sais pas si j’espère être fou ou bien possédé par un monstre. Au moins, si j’étais fou, Ca resterait juste… Dans ma tête…
Un rire bref, sans joie, s’échappe de ses lèvres alors qu’il masse ses paupières. C’est plus un geste de désespoir qu’un réel rire, à dire vrai.
_ Je ne veux pas vous effrayer et je… je ferai tout mon possible pour ne pas vous blesser, je vous le jure… Mais si vous avez peur, je comprendrai, je… Nous dirons à ma sœur que nous avons essayé et que j’ai préféré m’en aller…
Il ne supporterait pas le regard d’Hildegard. Il est déjà assez bouleversé d’avoir entendu la Voix se manifester.
Voulait-Elle seulement se signaler ? Ne supportant plus d’être ignorée. Elle ne se fait plus entendre, ni dans sa tête, ni dans son corps. Elle attend. Ses nombreuses gueules déblatèrent inlassablement des mots sans sens, des murmures semblables aux chants des grillons, un son si présent auquel Aimable ne fait plus attention.
Echos de lointaines conversations (DOulEur – CAS - Comprendre – Mal - BiEn – TOUJOURS – PEUR -- Corps – Voix – Nous – Ensemble – RICHARD ISABEAU – Enfants – CHANT – Prière – Bénédicité – MANGER – FAIm – SouffrAnce – Espérance – DESESPOIR – CauchEmAr – POURQUOI – ParLer – Entendre - ECoUTER)
Peut-être ne voulait-Elle que se faire Entendre. Ne supportant plus le silence de son- de leur existence.
@Diane d'Orléans
Sam 9 Oct - 11:09
When the body speaks |
Le Chevalier revint à la réalité en ouvrant ses paupières, mais le lien entre leurs regards fut bref. Néanmoins, elle n’y vit ni moquerie, ni jugement. Après tout, il aurait très bien pu trouver sa démarche niaise, enfantine, déplacée. Nenni. Cette petite bulle de douceur semblait avoir fait son effet et même lui avoir plu. Un petit sourire soulagé, mais également satisfait, habilla le visage de la physicienne. Le compliment qui suivit était évidemment plaisant pour son ego, mais il trouva surtout écho dans sa volonté de servir son prochain. Tout cela n’avait pas été vain. Elle retira sa main de son épaule, alors qu’il se redressait, mais son geste pour nouer ses deux paumes contre elle se figea dans le temps.
Un craquement sinistre.
Une monstruosité sans nom.
L’écho de l’enfer.
Le Chevalier bondit de son assise et s’empara de sa croix autour de son cou. Diane ne semblait pas réagir, à vrai dire, elle était pétrifiée, coupée dans son élan, tentant de comprendre cet enchaînement soudain. Du silence et de l’apaisement grâce à son chant, ils étaient passés à… ça. Elle ne savait comment le définir. La surprise se lisait sur son visage, devenu livide et ses yeux cherchant des réponses dans le vide. Ses prunelles se raccrochèrent au visage d’Aimable, lui même horrifié par la tournure de la situation. Et vint le temps des explications…
- Oh Aimable… Souffla-t-elle, se rendant compte de la pitié dans sa voix.
Quand bien même elle souhaitait être bienveillante, cela avait dépassé son imagination. Il n’était pas rare d’entendre parler de cas de folie, de dédoublement de personnalité inexpliqué, de dépression… Mais elle avait le pressentiment qu’il ne s’agissait ici pas d’un mal-être mental, d’un esprit troublé par des traumatismes, ou d’une simple possession démonique. Connaissant le monde des créatures, la physicienne, ne se raccrocha pas simplement à des explications scientifiques ou spirituelles, elle vit ici l’emprise d’un malin démon, rongeant, épuisant, vampirisant le Chevalier.
Se rendant compte de son erreur, en lui montrant sa pitié, elle se reprit. Le médecin revint, reprenant le dessus sur la femme pleine de compassion. A son tour elle se leva pour rejoindre son patient, et se voulant rassurante, elle posa ses deux mains sur les siennes, emprisonnant sa croix, sa foi.
- Je vous mentirais si je disais ne pas avoir été glacée par ce son. Je n’ai jamais rien entendu de tel de toute ma vie. Néanmoins, je n’ai pas peur de vous. Ce que vous me décrivez, ce n’est pas vous. Cette entité, qui semble enfermée en vous, prête à se manifester pour prendre le dessus sur vous, voilà ce qui provoque mon effroi.
Elle songea à sa solitude, à ce que cela devait provoquer en lui d’avoir cette entité, cette voix, cette présence au quotidien, mais de ne pas pouvoir la justifier auprès des autres, de peur qu’on décide de le brûler sur un bûché, ou que l’on se mette à le juger sévèrement. Cette angoisse de l’incompréhension, de ne pas être validé, d’être méprisé… Elle songea également à sa sœur, l’abbesse qui s’était tournée vers Diane, car elles avaient un lien de confiance grâce à la Milice, et peut-être aussi parce qu’elle était désespérée face à la condition de son frère et de la torture qu’il subissait. Pour toutes ces raisons et parce que son cœur ne se sentait pas de l’abandonner, elle voulut lui promettre de toute mettre en œuvre pour être son soutien, son médecin, sa béquille.
- Je ferai tout ce que je peux pour vous Aimable. Laissez-moi vous aider, vous soulager, vous apaiser. Je ne puis prétendre vous « soigner », vous « débarrasser », mais je peux vous écouter et tenter de vous comprendre. Je ferai des recherches, je tenterai de m’informer pour vous. Peut-être avons-nous des écrits sur des « maux » similaires. Je serai discrète, je n’ébruiterai pas votre condition, vous pouvez avoir confiance en moi. Et je sais, je sens bien, que vous ne me ferez pas de mal. S’il dois m’arriver quelque chose, ce ne sera pas votre faute.
Elle planta son regard dans le sien, approchant son visage. A bas les conventions, personne n’était présent pour les observer, les critiquer. Un sujet grave était abordé, les mondanités n’avaient plus lieu d’être. Sa voix était presque trop grave par rapport à son timbre chantant habituel, signe qu’elle prenait très à cœur et sérieusement le sujet.
- S’il doit m’arriver quelque chose, ce sera sa faute. Cette… entité deviendra ma patiente également. J’apprendrai à la connaître, à la reconnaître. Nous finirons bien par travailler ensemble. Je lui donnerai l’importance qu’elle mérite pour mieux la comprendre.
Une menace pour cette entité ? Une promesse ? Elle n’était pas dans le corps ou l’esprit d’Aimable pour savoir ce que penserait son mal.
Un craquement sinistre.
Une monstruosité sans nom.
L’écho de l’enfer.
Le Chevalier bondit de son assise et s’empara de sa croix autour de son cou. Diane ne semblait pas réagir, à vrai dire, elle était pétrifiée, coupée dans son élan, tentant de comprendre cet enchaînement soudain. Du silence et de l’apaisement grâce à son chant, ils étaient passés à… ça. Elle ne savait comment le définir. La surprise se lisait sur son visage, devenu livide et ses yeux cherchant des réponses dans le vide. Ses prunelles se raccrochèrent au visage d’Aimable, lui même horrifié par la tournure de la situation. Et vint le temps des explications…
- Oh Aimable… Souffla-t-elle, se rendant compte de la pitié dans sa voix.
Quand bien même elle souhaitait être bienveillante, cela avait dépassé son imagination. Il n’était pas rare d’entendre parler de cas de folie, de dédoublement de personnalité inexpliqué, de dépression… Mais elle avait le pressentiment qu’il ne s’agissait ici pas d’un mal-être mental, d’un esprit troublé par des traumatismes, ou d’une simple possession démonique. Connaissant le monde des créatures, la physicienne, ne se raccrocha pas simplement à des explications scientifiques ou spirituelles, elle vit ici l’emprise d’un malin démon, rongeant, épuisant, vampirisant le Chevalier.
Se rendant compte de son erreur, en lui montrant sa pitié, elle se reprit. Le médecin revint, reprenant le dessus sur la femme pleine de compassion. A son tour elle se leva pour rejoindre son patient, et se voulant rassurante, elle posa ses deux mains sur les siennes, emprisonnant sa croix, sa foi.
- Je vous mentirais si je disais ne pas avoir été glacée par ce son. Je n’ai jamais rien entendu de tel de toute ma vie. Néanmoins, je n’ai pas peur de vous. Ce que vous me décrivez, ce n’est pas vous. Cette entité, qui semble enfermée en vous, prête à se manifester pour prendre le dessus sur vous, voilà ce qui provoque mon effroi.
Elle songea à sa solitude, à ce que cela devait provoquer en lui d’avoir cette entité, cette voix, cette présence au quotidien, mais de ne pas pouvoir la justifier auprès des autres, de peur qu’on décide de le brûler sur un bûché, ou que l’on se mette à le juger sévèrement. Cette angoisse de l’incompréhension, de ne pas être validé, d’être méprisé… Elle songea également à sa sœur, l’abbesse qui s’était tournée vers Diane, car elles avaient un lien de confiance grâce à la Milice, et peut-être aussi parce qu’elle était désespérée face à la condition de son frère et de la torture qu’il subissait. Pour toutes ces raisons et parce que son cœur ne se sentait pas de l’abandonner, elle voulut lui promettre de toute mettre en œuvre pour être son soutien, son médecin, sa béquille.
- Je ferai tout ce que je peux pour vous Aimable. Laissez-moi vous aider, vous soulager, vous apaiser. Je ne puis prétendre vous « soigner », vous « débarrasser », mais je peux vous écouter et tenter de vous comprendre. Je ferai des recherches, je tenterai de m’informer pour vous. Peut-être avons-nous des écrits sur des « maux » similaires. Je serai discrète, je n’ébruiterai pas votre condition, vous pouvez avoir confiance en moi. Et je sais, je sens bien, que vous ne me ferez pas de mal. S’il dois m’arriver quelque chose, ce ne sera pas votre faute.
Elle planta son regard dans le sien, approchant son visage. A bas les conventions, personne n’était présent pour les observer, les critiquer. Un sujet grave était abordé, les mondanités n’avaient plus lieu d’être. Sa voix était presque trop grave par rapport à son timbre chantant habituel, signe qu’elle prenait très à cœur et sérieusement le sujet.
- S’il doit m’arriver quelque chose, ce sera sa faute. Cette… entité deviendra ma patiente également. J’apprendrai à la connaître, à la reconnaître. Nous finirons bien par travailler ensemble. Je lui donnerai l’importance qu’elle mérite pour mieux la comprendre.
Une menace pour cette entité ? Une promesse ? Elle n’était pas dans le corps ou l’esprit d’Aimable pour savoir ce que penserait son mal.
Sam 9 Oct - 12:35
"NOUS PAS ConFiANCeeeeeeeeeeeeeeee ! cette... cette... CETTE FEMME GNAAAAAAAAAAAAAARH.... !" L'Ouroboros ne se manifeste pas de façon aussi violente que d'habitude, toutefois il sait, il sent que quelque chose ne va pas et il se méfie de Diane comme un lion en cage, tournant et faisant des aller-retours dans votre crâne.
Il siffle comme un serpent et finalement... Finalement s’empare d'une bras d'Aimable pour venir attraper l'épaule de Diane, sans douceur. Heureusement, la physicienne n'est pas blessée, mais elle sera au moins surprise. Pendant ce temps, dans votre tête, l'Ouroboros se questionne. "Eeeeeeesssssssssssssst-ce qu'elle a ... PEUUUUUR ? Essssssst-ce qu'elle va Pr-Pr-PRIEEEER ?!"
Intervention PNJ
"NOUS PAS ConFiANCeeeeeeeeeeeeeeee ! cette... cette... CETTE FEMME GNAAAAAAAAAAAAAARH.... !" L'Ouroboros ne se manifeste pas de façon aussi violente que d'habitude, toutefois il sait, il sent que quelque chose ne va pas et il se méfie de Diane comme un lion en cage, tournant et faisant des aller-retours dans votre crâne.
Il siffle comme un serpent et finalement... Finalement s’empare d'une bras d'Aimable pour venir attraper l'épaule de Diane, sans douceur. Heureusement, la physicienne n'est pas blessée, mais elle sera au moins surprise. Pendant ce temps, dans votre tête, l'Ouroboros se questionne. "Eeeeeeesssssssssssssst-ce qu'elle a ... PEUUUUUR ? Essssssst-ce qu'elle va Pr-Pr-PRIEEEER ?!"
Mar 12 Oct - 16:53
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Elle est si pâle, au son de leur voix.
L’horreur logée dans sa gorge, à moins que ce ne soit la peur, lui fait mal. A l’entente de son nom, il se sent frémir, c’est un rappel à la réalité. Au corps qu’il habite. Aimable… Aimable. L’entendre est rassurant, il répète son nom parmi les prières alors que le silence retombe.
Ses mains si douces se referment sur les siennes. Elles raffermissent leur étreinte, il sent l’argent sous ses doigts, le métal si froid. La chaleur de sa peau – sa chair – contre la sienne. Un battement de paupières plus lent, Aimable se sent dissocier, séparé entre la Bête et le Chevalier.
L’Humain l’écoute. Il l’entend, malgré la distance, elle le prend aux tripes. C’est ce qu’il a toujours rêvé d’entendre. Cette entité n’est pas lui. Elle ne l’est pas. Un sourire manque d’étirer ses lèvres – mais son visage ne réagit pas. Il sent cette rupture avec son propre corps, ses muscles, il voit derrière Ses yeux à Elle quand Elle élance soudain le bras.
La Voix a profité d’un moment d’inattention. Ses tendons, ses muscles, c’est à Elle qu’ils obéissent lorsqu’elle raffermit l’emprise de ses doigts sur l’épaule de la jeune femme. Il sent Sa Chair sous ses doigts, le fin tissu qui la sépare de sa poigne et la Bête gronde de satisfaction au sein de ses veines. Elle aime la violence. Elle aime l’idée de la tenir, de l’étudier, de l’effrayer. Va-t-elle prier ?
Prier. Prier. C’est l’arme du Chevalier.
Du sang goutte. Ce n’est pas de l’épaule de Diane.
Aimable a serré sa croix de sa main libre. Les pointes acérées ont percé sa peau, assez pour que le sang perle, le sang le long de sa main. Son souffle est lent, non, il s’arrête, il s’accélère. Il résiste contre la pression de l’Ouroboros sur sa cage thoracique.
_ Lâche, murmurent les mâchoires serrées de l’homme.
Est-ce le Chevalier qui s’adresse à la Bête ou l’Ouroboros qui menace Aimable ? La tension est visible, elle se voit dans les muscles si contractés de ses bras que les veines en deviennent saillantes, Diane perçoit probablement le mouvement fugace contre son épaule. Comme un serpent se faufilant sous le derme du Chevalier – le linceul de son humanité.
Peur – Prière – Essst-ce qu’elle VA PRIER
Comme si Elle pouvait comprendre quelque chose à la prière !
La Voix lui renvoie toutes ces prières qu’il récite inlassablement, agenouillé devant l’autel, agenouillé dans sa chambre quand le martinet laboure son dos, avant de manger, avant de tuer, les prières – PEUR Rugit la Voix.
Les prières font partie de leur quotidien. Un rituel, qu’Aimable ne sait pas si la Voix s’y habitue ou s’en enrage. Qu’attend-t-elle ? Qu’elle prie, pour lui faire confiance ? Qu’elle s’effraie, pour se sentir Puissante, Dominante ? Cette sensation, Aimable la connaît. C’est fugace. Et tellement bon à la fois.
Non. Non… Non, non, ça, c’est à la Voix, ce n’est pas à lui. La Voix n’est pas lui. Leurs sensations se troublent, le flou revient, il bat des paupières, il doit rester. Les pics de sa Croix disparaissent totalement, la douleur le foudroie et lui arrache un gémissement de souffrance, malgré ses mâchoires serrées.
Et pourtant. C’est bien sa main qui tient Diane par l’épaule – leur main. Que ferait Hildegard si elle le voyait ? Elle se saisirait de son épée. Elle lui trancherait le bras. Il en est persuadé. C’est sa faute, si l’Ouroboros l’a saisie. Il devrait toujours se contrôler. Il devrait ! Mais il n’y arrive pas. Son impuissance. Est effrayante.
_ Lâche…, murmure Aimable.
_ Est-ce qu’elle va PRrrIer, gronde la Voix au fond de ses entrailles, au profond de sa gorge. Aimable fronce les sourcils. Si elle a pris possession de son bras… Lui a toujours celle de ses jambes. Pour l’instant. D’un mouvement soudain, il recule de deux pas. Sa main, armée de la croix, adresse un coup vif à son avant-bras gauche pour qu’il lâche prise. Ses doigts se rétractent alors que la Voix crisse dans son Crane – MAL ! Rugit-elle, accusatrice. Aimable lâche sa croix, qui tombe au sol dans un bruit métallique : sa main droite tente de retenir le poignet de sa main gauche. Il reprend son souffle.
_ Je… Je ne vous ai pas fait mal…. ? Je suis désolé…
L’horreur logée dans sa gorge, à moins que ce ne soit la peur, lui fait mal. A l’entente de son nom, il se sent frémir, c’est un rappel à la réalité. Au corps qu’il habite. Aimable… Aimable. L’entendre est rassurant, il répète son nom parmi les prières alors que le silence retombe.
Ses mains si douces se referment sur les siennes. Elles raffermissent leur étreinte, il sent l’argent sous ses doigts, le métal si froid. La chaleur de sa peau – sa chair – contre la sienne. Un battement de paupières plus lent, Aimable se sent dissocier, séparé entre la Bête et le Chevalier.
L’Humain l’écoute. Il l’entend, malgré la distance, elle le prend aux tripes. C’est ce qu’il a toujours rêvé d’entendre. Cette entité n’est pas lui. Elle ne l’est pas. Un sourire manque d’étirer ses lèvres – mais son visage ne réagit pas. Il sent cette rupture avec son propre corps, ses muscles, il voit derrière Ses yeux à Elle quand Elle élance soudain le bras.
La Voix a profité d’un moment d’inattention. Ses tendons, ses muscles, c’est à Elle qu’ils obéissent lorsqu’elle raffermit l’emprise de ses doigts sur l’épaule de la jeune femme. Il sent Sa Chair sous ses doigts, le fin tissu qui la sépare de sa poigne et la Bête gronde de satisfaction au sein de ses veines. Elle aime la violence. Elle aime l’idée de la tenir, de l’étudier, de l’effrayer. Va-t-elle prier ?
Prier. Prier. C’est l’arme du Chevalier.
Du sang goutte. Ce n’est pas de l’épaule de Diane.
Aimable a serré sa croix de sa main libre. Les pointes acérées ont percé sa peau, assez pour que le sang perle, le sang le long de sa main. Son souffle est lent, non, il s’arrête, il s’accélère. Il résiste contre la pression de l’Ouroboros sur sa cage thoracique.
_ Lâche, murmurent les mâchoires serrées de l’homme.
Est-ce le Chevalier qui s’adresse à la Bête ou l’Ouroboros qui menace Aimable ? La tension est visible, elle se voit dans les muscles si contractés de ses bras que les veines en deviennent saillantes, Diane perçoit probablement le mouvement fugace contre son épaule. Comme un serpent se faufilant sous le derme du Chevalier – le linceul de son humanité.
Peur – Prière – Essst-ce qu’elle VA PRIER
Comme si Elle pouvait comprendre quelque chose à la prière !
La Voix lui renvoie toutes ces prières qu’il récite inlassablement, agenouillé devant l’autel, agenouillé dans sa chambre quand le martinet laboure son dos, avant de manger, avant de tuer, les prières – PEUR Rugit la Voix.
Les prières font partie de leur quotidien. Un rituel, qu’Aimable ne sait pas si la Voix s’y habitue ou s’en enrage. Qu’attend-t-elle ? Qu’elle prie, pour lui faire confiance ? Qu’elle s’effraie, pour se sentir Puissante, Dominante ? Cette sensation, Aimable la connaît. C’est fugace. Et tellement bon à la fois.
Non. Non… Non, non, ça, c’est à la Voix, ce n’est pas à lui. La Voix n’est pas lui. Leurs sensations se troublent, le flou revient, il bat des paupières, il doit rester. Les pics de sa Croix disparaissent totalement, la douleur le foudroie et lui arrache un gémissement de souffrance, malgré ses mâchoires serrées.
Et pourtant. C’est bien sa main qui tient Diane par l’épaule – leur main. Que ferait Hildegard si elle le voyait ? Elle se saisirait de son épée. Elle lui trancherait le bras. Il en est persuadé. C’est sa faute, si l’Ouroboros l’a saisie. Il devrait toujours se contrôler. Il devrait ! Mais il n’y arrive pas. Son impuissance. Est effrayante.
_ Lâche…, murmure Aimable.
_ Est-ce qu’elle va PRrrIer, gronde la Voix au fond de ses entrailles, au profond de sa gorge. Aimable fronce les sourcils. Si elle a pris possession de son bras… Lui a toujours celle de ses jambes. Pour l’instant. D’un mouvement soudain, il recule de deux pas. Sa main, armée de la croix, adresse un coup vif à son avant-bras gauche pour qu’il lâche prise. Ses doigts se rétractent alors que la Voix crisse dans son Crane – MAL ! Rugit-elle, accusatrice. Aimable lâche sa croix, qui tombe au sol dans un bruit métallique : sa main droite tente de retenir le poignet de sa main gauche. Il reprend son souffle.
_ Je… Je ne vous ai pas fait mal…. ? Je suis désolé…
Ven 15 Oct - 11:37
When the body speaks |
L’espace d’un instant, très court et fragile, elle a l’impression qu’Aimable est satisfait de son discours. Peut-être qu’il se sent entendu et écouté, qu’il partage sa peine et se dit entre de bonnes mains protectrices et bienveillantes. Jusqu’au moment où une brisure se produit et que son bras se lève, attrapant l’épaule de la physicienne. Sa poigne est ferme, rude, presque violente. Le corps de Diane est mince, très mince. Non pas qu’elle chipote spécialement sur la nourriture comme la plupart des dames de la cour pour garder un taille élégante. Elle sait céder face aux plaisirs des sucreries et les goûtés sont son péché mignon. Néanmoins, elle a toujours eu un métabolisme rapide et ses journées étant bien chargées et rythmées, ne supportant pas le repos constant, toutes ces douceurs n’ont pas le temps de se fixer sur son corps.
Un hoquet de surprise s’échappe de sa bouche. En quelques battements de cils elle réalise ce qui venait de se produire. La main d’Aimable vevait d’agripper fermement à son épaule. La main d’Aimable, ou la volonté de l’entité… Elle ne le savait pas encore, mais un étrange pressentiment lui souffla que le Chevalier n’avait aucune raison d’ainsi la brutaliser. La douleur n’était pas vive, c’était surtout la surprise qui faisait s’emballer son cœur. Mais il ne faudrait surtout pas qu’il essaye de lui broyer l’épaule, elle ne ferait pas long feu.
- Aimable… ? Murmure-t-elle, masquant son inquiétude dans sa voix.
Ses prunelles firent des allers-retours entre sa main et son visage. Finalement, son regard se fixa sur la croix. Du sang commençait à couler de sa main tant il se meurtrit la paume, se raccrochant sans doute à la réalité qu’impliquait cette souffrance. La physicienne fronça malgré elle les sourcils. Il faudrait qu’elle examine cette blessure qu’il s’infligeait pour la soigner. Ses yeux remontèrent sur son visage tandis que d’une voix très grave, provenant du plus profond de sa gorge, mais dont il était à l’origine, il ordonna une première fois à l’entité de lâcher sa prise sur l’épaule de la Duchesse. A ce moment, elle en conclue qu’Aimable était toujours présent et qu’un lutte interne se produisait sous ses yeux, bien qu’elle lui soit totalement invisible. Et parce qu’elle n’y avait aucun accès, elle choisit le silence pour soutien. Son cœur continuait de battre à toute allure et elle espérait le dénouement de cet épisode de crise en faveur du Chevalier.
Une seconde fois, il lui donna le même ordre. Et pour réponse, elle entendit l’entité se manifester. Cela ressemblait à un grondement, appuyant sur certains sons plutôt que d’autres. Le Chevalier parvint à se détacher de la physicienne en reculant et se donnant un coup avec le bras dont il avait le plein contrôle. Préférant ne pas attiser davantage la curiosité de son mal, à son tour Diane fit quelques pas en arrière et se massa l’épaule, là où se trouvait quelques instants plutôt la poigne d’Aimable. Après avoir lâché sa croix tâchée de sang, il lui demande s’il l’avait blessée. Elle le rassura bien rapidement.
- Vous ne m’avez pas blessé Aimable, ne vous excusez pas. Quant à cette voix, elle m’a prise au dépourvu.
La Duchesse ne saurait dire comment elle se sentait après cet étrange enchaînement, mais il était certain qu’elle ressentait un peu de colère envers cette entité. Pas parce qu’elle avait voulut lui faire du mal au travers du Chevalier. Mais parce qu’elle ne l’avait pas respectée, tandis que Diane avait voulut bien faire en s’adressant directement à elle, en lui donnant une certaine importance, pour ne pas nier son existence et la vexer. Le respect se devait d’être mutuel. Ici, c’était la Duchesse qui était vexée. Ainsi, elle posa ses poings sur ses hanches et s’adressa à la voix, de là où elle se trouvait.
- Ce n’est pas en essayant de me faire peur que je vais fuir. Je suis du genre têtue et je ne lâche pas facilement mes promesses, alors il faudra bien plus pour que j’arrête de me préoccuper d’Aimable et de vous.
Cela dit, elle décida de ne pas plus s’occuper de la voix dans la tête et le corps du Chevalier. Ce dernier s’était blessé et la physicienne ne désirait pas voir plus de sang couler aujourd’hui. Ainsi, en quelques enjambées, elle rejoignit la table où se trouvait tout le matériel qu’elle avait préparé en amont. Elle retira le drap qui recouvrait le contenu, pour le protéger des regards curieux et se munit de quoi nettoyer sa paume et la bander. Lorsqu’elle se retourna vers son patient, elle l’invita à la rejoindre sur le canapé, pour qu’elle puisse l’examiner.
- Venez mon ami, nous n’allons pas laisser cette plaie empirer.
Un hoquet de surprise s’échappe de sa bouche. En quelques battements de cils elle réalise ce qui venait de se produire. La main d’Aimable vevait d’agripper fermement à son épaule. La main d’Aimable, ou la volonté de l’entité… Elle ne le savait pas encore, mais un étrange pressentiment lui souffla que le Chevalier n’avait aucune raison d’ainsi la brutaliser. La douleur n’était pas vive, c’était surtout la surprise qui faisait s’emballer son cœur. Mais il ne faudrait surtout pas qu’il essaye de lui broyer l’épaule, elle ne ferait pas long feu.
- Aimable… ? Murmure-t-elle, masquant son inquiétude dans sa voix.
Ses prunelles firent des allers-retours entre sa main et son visage. Finalement, son regard se fixa sur la croix. Du sang commençait à couler de sa main tant il se meurtrit la paume, se raccrochant sans doute à la réalité qu’impliquait cette souffrance. La physicienne fronça malgré elle les sourcils. Il faudrait qu’elle examine cette blessure qu’il s’infligeait pour la soigner. Ses yeux remontèrent sur son visage tandis que d’une voix très grave, provenant du plus profond de sa gorge, mais dont il était à l’origine, il ordonna une première fois à l’entité de lâcher sa prise sur l’épaule de la Duchesse. A ce moment, elle en conclue qu’Aimable était toujours présent et qu’un lutte interne se produisait sous ses yeux, bien qu’elle lui soit totalement invisible. Et parce qu’elle n’y avait aucun accès, elle choisit le silence pour soutien. Son cœur continuait de battre à toute allure et elle espérait le dénouement de cet épisode de crise en faveur du Chevalier.
Une seconde fois, il lui donna le même ordre. Et pour réponse, elle entendit l’entité se manifester. Cela ressemblait à un grondement, appuyant sur certains sons plutôt que d’autres. Le Chevalier parvint à se détacher de la physicienne en reculant et se donnant un coup avec le bras dont il avait le plein contrôle. Préférant ne pas attiser davantage la curiosité de son mal, à son tour Diane fit quelques pas en arrière et se massa l’épaule, là où se trouvait quelques instants plutôt la poigne d’Aimable. Après avoir lâché sa croix tâchée de sang, il lui demande s’il l’avait blessée. Elle le rassura bien rapidement.
- Vous ne m’avez pas blessé Aimable, ne vous excusez pas. Quant à cette voix, elle m’a prise au dépourvu.
La Duchesse ne saurait dire comment elle se sentait après cet étrange enchaînement, mais il était certain qu’elle ressentait un peu de colère envers cette entité. Pas parce qu’elle avait voulut lui faire du mal au travers du Chevalier. Mais parce qu’elle ne l’avait pas respectée, tandis que Diane avait voulut bien faire en s’adressant directement à elle, en lui donnant une certaine importance, pour ne pas nier son existence et la vexer. Le respect se devait d’être mutuel. Ici, c’était la Duchesse qui était vexée. Ainsi, elle posa ses poings sur ses hanches et s’adressa à la voix, de là où elle se trouvait.
- Ce n’est pas en essayant de me faire peur que je vais fuir. Je suis du genre têtue et je ne lâche pas facilement mes promesses, alors il faudra bien plus pour que j’arrête de me préoccuper d’Aimable et de vous.
Cela dit, elle décida de ne pas plus s’occuper de la voix dans la tête et le corps du Chevalier. Ce dernier s’était blessé et la physicienne ne désirait pas voir plus de sang couler aujourd’hui. Ainsi, en quelques enjambées, elle rejoignit la table où se trouvait tout le matériel qu’elle avait préparé en amont. Elle retira le drap qui recouvrait le contenu, pour le protéger des regards curieux et se munit de quoi nettoyer sa paume et la bander. Lorsqu’elle se retourna vers son patient, elle l’invita à la rejoindre sur le canapé, pour qu’elle puisse l’examiner.
- Venez mon ami, nous n’allons pas laisser cette plaie empirer.
Ven 19 Nov - 12:39
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Le hoquet de surprise de la jeune femme résonne encore dans l’esprit du Chevalier.
Il sent la chaleur de sa peau sous ses doigts, la finesse de son épaule qu’il aurait pu écraser. La Voix se rétracte, elle est toujours dans sa tête, mais sa main gauche lui obéit cette fois. Il referme, entrouvre les doigts, fixant la plaie qu’il s’est infligée à son avant-bras. Le sang épais s’échappe à grosses gouttes de la blessure.
_ Aimable… ?
Entendre son nom lui arrache un frisson. L’entendre lui donne du courage. Il se rappelle de qui il est. Le Chevalier. L’heure n’est plus au repos : il laisse ici ce que Diane lui a offert. Cette sérénité. L’homme reprend les armes. La tension familière s’est ravivée, tout son corps, s’est contracté. Pour contenir la Bête. Qu’importe la douleur. Qu’importe la fatigue.
Le Chevalier a baissé sa garde et l’Ouroboros en a profité pour frapper. Il avait promis à Hildegard d’être prudent, de faire attention, il n’a pas réussi, il l’a…
Elle assure qu’il ne l’a pas blessée.
Soulagé, Aimable dessine le signe de la Croix sur son torse, de sa main gauche, à plusieurs reprises, comme pour en chasser le démon. Il sait que c’est inutile. Les larmes ensanglantées continuent de dévaler le long de son bras, gouttant de ses doigts, en tâches sur le sol. Gêné, Aimable récupère son mouchoir déjà tâché, se penche pour essuyer le sol, puis, grossièrement, écrase le tissu souillé contre la plaie pour contenir le saignement.
Il se redresse et se recule d’un pas, encore un autre, presque 5 mètres les séparent à présent. Elle qui était si proche il y a de cela quelques secondes, il suffit d’un instant pour que tout bascule. Il s’y est habitué. Tout ce qu’on a eu la chance de posséder, risque d’être perdu. Son fardeau s’abat sur ses épaules.
Autour de son cou, se resserre une corde. Celle de la culpabilité. De la honte de s’être ainsi dévoilé. Ses pensées se font assassines, elles s’abattent sur la Bête et le Chevalier en insultes incisives. Sa sœur ne lui pardonnera jamais. Et lui ? Pourra-t-il s’excuser ? Non. Il n’en est pas capable. Il n’en a pas le droit.
_ Elle prend… toujours au dépourvu…
Aimable halète légèrement. Il peine à retrouver son souffle, sa gorge est nouée, les muscles tendus de son dos emprisonnent sa cage thoracique. Il ralentit le rythme de sa respiration, essuyant grossièrement le sang qui souille sa peau. Voir Diane placer ses poings sur ses hanches le fait déjà se détourner, comme pour ne pas lui infliger sa vue. Il pense qu’elle va le houspiller. Lui reprocher de ne pas avoir su contrôler la Voix.
C’est ce que ses frères et ses sœurs feraient. S’ils ne se contentaient pas de le fuir du regard et de s’écarter de lui sans lui adresser un regard.
Et pourtant, ce n’est pas à lui qu’elle s’adresse. Son cœur s’accélère légèrement. C’est à Elle. Décontenancé, Aimable lève les yeux vers elle. Le Chevalier est reconnaissant. Mais inquiet. Qu’elle n’aille pas provoquer la Voix… Qu’Elle ne s’en prenne pas plus à elle. Sa détermination est touchante, assez pour qu’un sourire éclaire timidement les lèvres d’Aimable.
Elle lui rappelle Eleanor. Sa douce et si volontaire épouse. Eleanor a su apaiser l’Ouroboros, à sa manière – assez pour que la Voix ne l’attaque pas. Comment s’y est-elle prise ? A croire que la Bête a su s’attacher à elle, à sa chevelure flamboyante, à ses formes rebondies. Elle a su trouver du plaisir au sein de ses bras, Elle susurre son désir à l’oreille du Chevalier, des vices sur lesquels sa religion appose un tabou. Eleanor a parfois eu peur de la Voix, peur du mal qu’Elle pourrait faire à son époux plus du mal qu’Elle pourrait lui faire à elle.
La Voix s’est aussi attachée à Richard et Isabeau. Enfants, les appelle-t-Elle de sa voix grondante.
Aucune excuse ne franchit les lèvres du Chevalier. La Voix se contente de gronder dans son crâne, de rôder sans plus se manifester. Il se sent épuisé.
Diane s’éloigne vers son matériel, qu’elle dévoile d’un geste habitué. Curieux, Aimable y perd son regard quelques secondes. Perdu dans ses pensées, il finit par observer la plaie sur sa paume et celle de son avant-bras, puis finit par se pencher pour entourer la chaîne et la croix autour de sa main gauche. Ses gestes sont minutieux.
_ … Ma Dame, je…
Il cherche ses mots. Et pour une fois, ils sont si simples à trouver.
_ Vous êtes d’un courage et d’une bonté… Que peu d’âmes en ce monde ont possédé…
Il ravale sa salive.
_ Je vous suis reconnaissant. Pour ce que vous m’avez offert. Votre écoute, votre présence et les soins que vous m’avez donnés. Je ne souhaite pas vous mettre plus en danger, pas plus que je ne l’ai déjà fait.
Il se recule d’un nouveau pas, le cœur lourd comme une pierre dans sa cage thoracique.
_ Je ne parviens pas toujours à la contrôler. J’ai peur du mal qu’elle pourrait vous infliger. Je… Je devrais partir…
Mais sa sœur, qu’allait-elle penser ? Qu’allait-elle comprendre ? Elle saurait. Elle se douterait.
Elle serait déçue. Pis encore.
_ Je… Est-ce que vous avez… Une corde ?
Probablement. En tant que physicienne… Il a déjà été confronté à des médecins disons des plus rustiques. Qui vous attache à une véritable table de torture pour vous remettre un os en place ou vous font mordre dans un morceau de bois le temps de replacer un membre déplacé.
_ Il m’arrive de… de m’attacher…Pour ne pas bouger… Ce serait peut-être plus prudent pour panser ma main…
Que dire à Hildegard au sujet de ses plaies ? Qu’ils ont tenté de trouver la Voix ? Elle ne voudra rien entendre de toute façon. Mais si elle sait qu’il a pris la fuite sans elle, elle le traquerait pour savoir ce qui a pu se passer. Il ne se sent pas prêt de lui en parler.
Il sent la chaleur de sa peau sous ses doigts, la finesse de son épaule qu’il aurait pu écraser. La Voix se rétracte, elle est toujours dans sa tête, mais sa main gauche lui obéit cette fois. Il referme, entrouvre les doigts, fixant la plaie qu’il s’est infligée à son avant-bras. Le sang épais s’échappe à grosses gouttes de la blessure.
_ Aimable… ?
Entendre son nom lui arrache un frisson. L’entendre lui donne du courage. Il se rappelle de qui il est. Le Chevalier. L’heure n’est plus au repos : il laisse ici ce que Diane lui a offert. Cette sérénité. L’homme reprend les armes. La tension familière s’est ravivée, tout son corps, s’est contracté. Pour contenir la Bête. Qu’importe la douleur. Qu’importe la fatigue.
Le Chevalier a baissé sa garde et l’Ouroboros en a profité pour frapper. Il avait promis à Hildegard d’être prudent, de faire attention, il n’a pas réussi, il l’a…
Elle assure qu’il ne l’a pas blessée.
Soulagé, Aimable dessine le signe de la Croix sur son torse, de sa main gauche, à plusieurs reprises, comme pour en chasser le démon. Il sait que c’est inutile. Les larmes ensanglantées continuent de dévaler le long de son bras, gouttant de ses doigts, en tâches sur le sol. Gêné, Aimable récupère son mouchoir déjà tâché, se penche pour essuyer le sol, puis, grossièrement, écrase le tissu souillé contre la plaie pour contenir le saignement.
Il se redresse et se recule d’un pas, encore un autre, presque 5 mètres les séparent à présent. Elle qui était si proche il y a de cela quelques secondes, il suffit d’un instant pour que tout bascule. Il s’y est habitué. Tout ce qu’on a eu la chance de posséder, risque d’être perdu. Son fardeau s’abat sur ses épaules.
Autour de son cou, se resserre une corde. Celle de la culpabilité. De la honte de s’être ainsi dévoilé. Ses pensées se font assassines, elles s’abattent sur la Bête et le Chevalier en insultes incisives. Sa sœur ne lui pardonnera jamais. Et lui ? Pourra-t-il s’excuser ? Non. Il n’en est pas capable. Il n’en a pas le droit.
_ Elle prend… toujours au dépourvu…
Aimable halète légèrement. Il peine à retrouver son souffle, sa gorge est nouée, les muscles tendus de son dos emprisonnent sa cage thoracique. Il ralentit le rythme de sa respiration, essuyant grossièrement le sang qui souille sa peau. Voir Diane placer ses poings sur ses hanches le fait déjà se détourner, comme pour ne pas lui infliger sa vue. Il pense qu’elle va le houspiller. Lui reprocher de ne pas avoir su contrôler la Voix.
C’est ce que ses frères et ses sœurs feraient. S’ils ne se contentaient pas de le fuir du regard et de s’écarter de lui sans lui adresser un regard.
Et pourtant, ce n’est pas à lui qu’elle s’adresse. Son cœur s’accélère légèrement. C’est à Elle. Décontenancé, Aimable lève les yeux vers elle. Le Chevalier est reconnaissant. Mais inquiet. Qu’elle n’aille pas provoquer la Voix… Qu’Elle ne s’en prenne pas plus à elle. Sa détermination est touchante, assez pour qu’un sourire éclaire timidement les lèvres d’Aimable.
Elle lui rappelle Eleanor. Sa douce et si volontaire épouse. Eleanor a su apaiser l’Ouroboros, à sa manière – assez pour que la Voix ne l’attaque pas. Comment s’y est-elle prise ? A croire que la Bête a su s’attacher à elle, à sa chevelure flamboyante, à ses formes rebondies. Elle a su trouver du plaisir au sein de ses bras, Elle susurre son désir à l’oreille du Chevalier, des vices sur lesquels sa religion appose un tabou. Eleanor a parfois eu peur de la Voix, peur du mal qu’Elle pourrait faire à son époux plus du mal qu’Elle pourrait lui faire à elle.
La Voix s’est aussi attachée à Richard et Isabeau. Enfants, les appelle-t-Elle de sa voix grondante.
Aucune excuse ne franchit les lèvres du Chevalier. La Voix se contente de gronder dans son crâne, de rôder sans plus se manifester. Il se sent épuisé.
Diane s’éloigne vers son matériel, qu’elle dévoile d’un geste habitué. Curieux, Aimable y perd son regard quelques secondes. Perdu dans ses pensées, il finit par observer la plaie sur sa paume et celle de son avant-bras, puis finit par se pencher pour entourer la chaîne et la croix autour de sa main gauche. Ses gestes sont minutieux.
_ … Ma Dame, je…
Il cherche ses mots. Et pour une fois, ils sont si simples à trouver.
_ Vous êtes d’un courage et d’une bonté… Que peu d’âmes en ce monde ont possédé…
Il ravale sa salive.
_ Je vous suis reconnaissant. Pour ce que vous m’avez offert. Votre écoute, votre présence et les soins que vous m’avez donnés. Je ne souhaite pas vous mettre plus en danger, pas plus que je ne l’ai déjà fait.
Il se recule d’un nouveau pas, le cœur lourd comme une pierre dans sa cage thoracique.
_ Je ne parviens pas toujours à la contrôler. J’ai peur du mal qu’elle pourrait vous infliger. Je… Je devrais partir…
Mais sa sœur, qu’allait-elle penser ? Qu’allait-elle comprendre ? Elle saurait. Elle se douterait.
Elle serait déçue. Pis encore.
_ Je… Est-ce que vous avez… Une corde ?
Probablement. En tant que physicienne… Il a déjà été confronté à des médecins disons des plus rustiques. Qui vous attache à une véritable table de torture pour vous remettre un os en place ou vous font mordre dans un morceau de bois le temps de replacer un membre déplacé.
_ Il m’arrive de… de m’attacher…Pour ne pas bouger… Ce serait peut-être plus prudent pour panser ma main…
Que dire à Hildegard au sujet de ses plaies ? Qu’ils ont tenté de trouver la Voix ? Elle ne voudra rien entendre de toute façon. Mais si elle sait qu’il a pris la fuite sans elle, elle le traquerait pour savoir ce qui a pu se passer. Il ne se sent pas prêt de lui en parler.
Sam 20 Nov - 13:10
When the body speaks |
En voyant que son patient, le Chevalier de Bayard, hésitait à s’asseoir comme lui avait demandé, elle se douta du trouble qui l’habitait. Avait-elle fait l’erreur d’admettre sa surprise en découvrant la voix de son mal qui le ronge ? Il s’arma de nouveau de sa croix, un objet auquel il semblait beaucoup tenir, porteur de sa foi et très probablement rassurant dans les moments les plus sombres.
En bégayant, il la complimenta puis la remercia pour sa gentillesse. A cela, la physicienne secoua la tête, car pour elle il n’y avait ni courage, ni bonté dans ses actions, simplement un besoin impérieux de venir en aide à son prochain. Et son prochain, ici, semblait refuser son aide. Hors de question que, sous son toit, ou plus exactement sous celui de son frère, un invité soit blessé et reparte sans le moindre soin.
Le cruel manque de confiance d’Aimable la peina. La suite de ses propos l’horrifia. Il était tout simplement inconcevable de l’attacher, par la crainte qu’il puisse de nouveau ne plus être maître de ses gestes. Affichant sa stupeur, elle lui répondit du tac au tac :
- Il en est hors de question Messire, vous n’êtes pas une bête sauvage qui m’effraie et cette voix ne gagnera pas aujourd’hui face à moi.
Têtue est la physicienne. Impressionnée, très certainement. Néanmoins, elle ne laisserait pas à cette entité l’occasion de ronger plus de terrain aujourd’hui. Diane s’avança d’un pas décidé vers le Chevalier et l’attrapa par le coude pour le forcer à s’asseoir sur le fauteuil. Évidemment, avec son poids plume et son cœur en or, elle ne se fit pas violence et n’essaya pas de le malmener. Simplement, elle préféra faire preuve de fermeté, pour son bien, pour sa santé, comme elle le ferait avec n’importe quel patient souffrant.
On ne pouvait pas dire qu’Aimable était serein lorsqu’elle commença à nettoyer le sang qui séchait déjà là où il avait coulé. Ainsi, pour le rassurer, elle songea que discuter ne serait pas suffisant et elle se mit à fredonner un nouvel air. Son précédent chant avait fait son petit effet et elle s’imagina que la voix était intriguée, à l’écoute de ses mots, de son rythme. La diversion semblait suffisante car durant tout le temps où elle nettoya puis banda sa main, il n’y eut ni crise, ni mouvement incontrôlé. Peut-être qu’une lutte interne se déroulait, en tout cas, Aimable ne laissa rien transparaître.
Son travail achevé, elle reprit un air bien plus jovial et calme et lui dit, fière de voir le Chevalier regagnant du terrain :
- Vous voyez, point de corde et tout s’est bien passé !
La voix de sa jolie fleur se fit entendre au loin. L’excitation de la petite fille était palpable lorsqu’elle traversa les couloirs, enjouée pour on ne sait quelle raison et qu’elle débarqua dans le petit salon, les joues rosies par sa course folle, ayant entraînée derrière elle l’abbesse.
- Dans le jardin nous avons trouvé une chatte avec ses quatre chatons ! Pouvons-nous les garder ?
La milicienne derrière son Iris avait également les joues roses et elle devina que sa nièce lui avait fait parcourir tous les jardins en long, en large et en travers au pas de course, trop excitée à l’idée de lui faire découvrir le moindre changement. Amusée, Diane jugea que le tête-à-tête avec le Chevalier de Bayard n’irait pas plus loin, pour ne pas trop le brusquer ni pousser l’entité à faire du mal.
- Et bien, il faudra demander à votre père si vous êtes en âge de vous occuper de ces animaux, car ils ne sont ni des poupées, ni des peluches. Venez donc vous asseoir, vous êtes essoufflées, prenez un rafraîchissement.
Son regard alterna entre la main bandée du Chevalier et l’air interrogatif de sa sœur.
- Tout va bien mon amie, il se peut que la chaleur m’ait fait perdre momentanément le contrôle de mes gestes et que votre frère en ait subit les conséquences. Pour me faire pardonner, je me suis bien évidemment occupée de cette plaie. J’espère que cette balade avec Iris était plaisante ?
Pour éviter d’en parler trop longuement, de raviver les craintes du Chevalier, elle changea habilement de sujet. Il était dorénavant temps de passer un bon moment de calme, d'échanges, de rires et d'histoires, avant de se quitter.
En bégayant, il la complimenta puis la remercia pour sa gentillesse. A cela, la physicienne secoua la tête, car pour elle il n’y avait ni courage, ni bonté dans ses actions, simplement un besoin impérieux de venir en aide à son prochain. Et son prochain, ici, semblait refuser son aide. Hors de question que, sous son toit, ou plus exactement sous celui de son frère, un invité soit blessé et reparte sans le moindre soin.
Le cruel manque de confiance d’Aimable la peina. La suite de ses propos l’horrifia. Il était tout simplement inconcevable de l’attacher, par la crainte qu’il puisse de nouveau ne plus être maître de ses gestes. Affichant sa stupeur, elle lui répondit du tac au tac :
- Il en est hors de question Messire, vous n’êtes pas une bête sauvage qui m’effraie et cette voix ne gagnera pas aujourd’hui face à moi.
Têtue est la physicienne. Impressionnée, très certainement. Néanmoins, elle ne laisserait pas à cette entité l’occasion de ronger plus de terrain aujourd’hui. Diane s’avança d’un pas décidé vers le Chevalier et l’attrapa par le coude pour le forcer à s’asseoir sur le fauteuil. Évidemment, avec son poids plume et son cœur en or, elle ne se fit pas violence et n’essaya pas de le malmener. Simplement, elle préféra faire preuve de fermeté, pour son bien, pour sa santé, comme elle le ferait avec n’importe quel patient souffrant.
On ne pouvait pas dire qu’Aimable était serein lorsqu’elle commença à nettoyer le sang qui séchait déjà là où il avait coulé. Ainsi, pour le rassurer, elle songea que discuter ne serait pas suffisant et elle se mit à fredonner un nouvel air. Son précédent chant avait fait son petit effet et elle s’imagina que la voix était intriguée, à l’écoute de ses mots, de son rythme. La diversion semblait suffisante car durant tout le temps où elle nettoya puis banda sa main, il n’y eut ni crise, ni mouvement incontrôlé. Peut-être qu’une lutte interne se déroulait, en tout cas, Aimable ne laissa rien transparaître.
Son travail achevé, elle reprit un air bien plus jovial et calme et lui dit, fière de voir le Chevalier regagnant du terrain :
- Vous voyez, point de corde et tout s’est bien passé !
La voix de sa jolie fleur se fit entendre au loin. L’excitation de la petite fille était palpable lorsqu’elle traversa les couloirs, enjouée pour on ne sait quelle raison et qu’elle débarqua dans le petit salon, les joues rosies par sa course folle, ayant entraînée derrière elle l’abbesse.
- Dans le jardin nous avons trouvé une chatte avec ses quatre chatons ! Pouvons-nous les garder ?
La milicienne derrière son Iris avait également les joues roses et elle devina que sa nièce lui avait fait parcourir tous les jardins en long, en large et en travers au pas de course, trop excitée à l’idée de lui faire découvrir le moindre changement. Amusée, Diane jugea que le tête-à-tête avec le Chevalier de Bayard n’irait pas plus loin, pour ne pas trop le brusquer ni pousser l’entité à faire du mal.
- Et bien, il faudra demander à votre père si vous êtes en âge de vous occuper de ces animaux, car ils ne sont ni des poupées, ni des peluches. Venez donc vous asseoir, vous êtes essoufflées, prenez un rafraîchissement.
Son regard alterna entre la main bandée du Chevalier et l’air interrogatif de sa sœur.
- Tout va bien mon amie, il se peut que la chaleur m’ait fait perdre momentanément le contrôle de mes gestes et que votre frère en ait subit les conséquences. Pour me faire pardonner, je me suis bien évidemment occupée de cette plaie. J’espère que cette balade avec Iris était plaisante ?
Pour éviter d’en parler trop longuement, de raviver les craintes du Chevalier, elle changea habilement de sujet. Il était dorénavant temps de passer un bon moment de calme, d'échanges, de rires et d'histoires, avant de se quitter.
Sam 20 Nov - 13:18
Si l'Ouroboros ne s'agite plus, sa voix parvient de nouveau à siffler entre vos lèvres. "Chaaaaaaaaatoooooooooons.... CHATONS ! ...." Un grondement sourd et il reprend "Yulaaaaaa.... Yula aimait les chaaaaaatoooooons.... YULA !"
Intervention PNJ
Si l'Ouroboros ne s'agite plus, sa voix parvient de nouveau à siffler entre vos lèvres. "Chaaaaaaaaatoooooooooons.... CHATONS ! ...." Un grondement sourd et il reprend "Yulaaaaaa.... Yula aimait les chaaaaaatoooooons.... YULA !"
Sam 27 Nov - 15:51
@Diane d'Orléans & @Aimable E. de Bayard
Avec un sourire et une couronne de fleurs, Hildegard pressa le pas dans le couloir.
▬ Iris ne courrez pas comme ça, vous risquez de vous faire mal.
En s'entendant à haute voix, elle pensa subitement à sa mère, à combien de fois cette dernière l'avait mise en garde contre les courses et les jeux de lutte de la cour où ses vêtements finissaient toujours tâchés et ses genoux abimés. Elle se sentit soudainement vieille alors qu'elle poussait la porte, laissant la gamine se faufiler à l'intérieur en narrant à sa tante leur découverte sous une des haies bordant l'allée principale :
▬ Dans le jardin nous avons trouvé un chatte avec ses quatre chatons ! Pouvons-nous les garder ?
▬ Je lui ai déjà dit non. Avoua la milicienne avant d'inspirer un grand coup pour reprendre son souffle. Elle avait expliqué à la petite que ces chats étaient sauvages et certainement mieux dehors plutôt qu'enfermés à l'intérieur. D'autant plus que la mère ne semblait pas particulièrement vouloir être domestiquée.
Son regard balaya la pièce. D'abord Diane. Elle ne soutint pas son regard bien longtemps avant de baisser les yeux à ses pieds. Et de sentir les poils de sa nuque s'hérisser.
Étaient-ce des tâches de sang par terre ? Aussitôt l'abbesse se tourna vers son frère, le dévisagea un long instant d'un air accusateur avant de s'attarder sur le bandage qu'il avait autour de la paume.
▬ Que s'est-il passé ? Sa voix sonnait comme un blâme. Hildegard pouvait parfaitement imaginer ce qui s'était produit. C'était l'oeuvre de La Bête. Elle était sortie. Jamais Diane n'aurait levé la main - même accidentellement sur un de ses patients. La Bête avait tenté de s'en prendre à elle.
Raide, elle serra ses poings un instant. Avait-elle bien fait de les laisser seuls ? Était-ce réellement une bonne idée d'amener Aimable ? Et si... et si un jour il ne pouvait plus La contrôler ? Que dirait-elle à Iris ? À Charles ? Pourrait-elle seulement vivre avec le poids de cette culpabilité sur les épaules.
Un soupir. Ne pas tirer de conclusions hâtives. Ne pas montrer cette vague d'inquiétude qui venait lui mordre les pieds. Elle tira une chaise et s'assied, jambes écartées et coudes posés sur ses genoux.
▬ J'ai eu l'immense plaisir d'inspecter les jardins de fond en comble y compris sous les platebandes grâce à Iris. Je peux ainsi vous donner l'assurance qu'aucune créature maléfique ne se cache dans vos parterres de fleurs. Ironisa-t-elle avant de dévisager à nouveau son cadet. Avez-vous trouvé quelque chose de notoire ? Devrions-nous revenir ensemble ?
Pourraient-ils revenir ensemble ? Avec la certitude qu'ils ne feraient pas entrer le loup dans la douce bergerie des d'Orléans.
▬ Iris ne courrez pas comme ça, vous risquez de vous faire mal.
En s'entendant à haute voix, elle pensa subitement à sa mère, à combien de fois cette dernière l'avait mise en garde contre les courses et les jeux de lutte de la cour où ses vêtements finissaient toujours tâchés et ses genoux abimés. Elle se sentit soudainement vieille alors qu'elle poussait la porte, laissant la gamine se faufiler à l'intérieur en narrant à sa tante leur découverte sous une des haies bordant l'allée principale :
▬ Dans le jardin nous avons trouvé un chatte avec ses quatre chatons ! Pouvons-nous les garder ?
▬ Je lui ai déjà dit non. Avoua la milicienne avant d'inspirer un grand coup pour reprendre son souffle. Elle avait expliqué à la petite que ces chats étaient sauvages et certainement mieux dehors plutôt qu'enfermés à l'intérieur. D'autant plus que la mère ne semblait pas particulièrement vouloir être domestiquée.
Son regard balaya la pièce. D'abord Diane. Elle ne soutint pas son regard bien longtemps avant de baisser les yeux à ses pieds. Et de sentir les poils de sa nuque s'hérisser.
Étaient-ce des tâches de sang par terre ? Aussitôt l'abbesse se tourna vers son frère, le dévisagea un long instant d'un air accusateur avant de s'attarder sur le bandage qu'il avait autour de la paume.
▬ Que s'est-il passé ? Sa voix sonnait comme un blâme. Hildegard pouvait parfaitement imaginer ce qui s'était produit. C'était l'oeuvre de La Bête. Elle était sortie. Jamais Diane n'aurait levé la main - même accidentellement sur un de ses patients. La Bête avait tenté de s'en prendre à elle.
Raide, elle serra ses poings un instant. Avait-elle bien fait de les laisser seuls ? Était-ce réellement une bonne idée d'amener Aimable ? Et si... et si un jour il ne pouvait plus La contrôler ? Que dirait-elle à Iris ? À Charles ? Pourrait-elle seulement vivre avec le poids de cette culpabilité sur les épaules.
Un soupir. Ne pas tirer de conclusions hâtives. Ne pas montrer cette vague d'inquiétude qui venait lui mordre les pieds. Elle tira une chaise et s'assied, jambes écartées et coudes posés sur ses genoux.
▬ J'ai eu l'immense plaisir d'inspecter les jardins de fond en comble y compris sous les platebandes grâce à Iris. Je peux ainsi vous donner l'assurance qu'aucune créature maléfique ne se cache dans vos parterres de fleurs. Ironisa-t-elle avant de dévisager à nouveau son cadet. Avez-vous trouvé quelque chose de notoire ? Devrions-nous revenir ensemble ?
Pourraient-ils revenir ensemble ? Avec la certitude qu'ils ne feraient pas entrer le loup dans la douce bergerie des d'Orléans.
@Diane d'Orléans & @Aimable E. de Bayard
Mer 1 Déc - 11:57
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L’assurance de Diane le prend de court.
Déconfit, Aimable lève les yeux vers elle, sans pour autant la regarder dans les yeux. Le cœur battant à vive allure dans sa cage thoracique. Cette femme, est-elle guidée par sa bravoure ou par son inconscience ? Mais ne dit-on pas que le génie côtoie la folie ?
Entrouvrant les lèvres, Aimable ne répond rien. Etranglé par son désir de lui faire confiance, Se faire confiance, alors que la peur écartèle ses viscères. Celle de faire mal. De blesser. De ne pas se contrôler. Malgré lui, il n’arrête pas de trembler, les muscles si tétanisés qu’il a l’impression de s’en écraser.
La seule femme qui a fait preuve d’une telle audace... n’est autre qu’Eleanor. Une douce réminiscence l’effleure, la chaleur de son sourire, la détermination de ses yeux clairs, ses mains posées sur ses hanches. Ses épaules se relâchent, un soupir rauque s’arrache de ses lèvres. Est-ce la Bête qui gronde ? Ou le Chevalier qui baisse les armes ?
Aucun sourire n’effleure ses lèvres et pourtant, il y aurait matière à rire. Il l’a attaquée et pourtant, elle ne voit pas de Monstre en lui. Il aurait pu lui écraser l’épaule, la soulever d’une seule main – elle est si frêle -, mais la voilà certaine qu’il ne lui fera pas de mal. D’où vient cette confiance qu’elle lui offre ? Il ne s’en sent pas digne.
Alors sois-le. Cette phrase, sortie de nulle part, franchit son esprit. Le Chevalier s’est redressé. Loin, loin derrière ses yeux, sous ses pupilles, il affronte toujours la Bête. La Voix l’a mordu au bras, Elle lui a arraché son bouclier, il saigne. Mais la Lumière éclaire son armure. Sa main armée de la Croix, son cœur, armé de sa Foi. Le Chevalier se tient debout, de nouveau, il se met en garde malgré le rictus qu’affiche le Monstre.
La Voix jubile, à moins qu’elle ne sanglote, les borborygmes rauques qui résonnent dans sa conscience sont sans sens. C’est un maelstrom de chuchotements, de sensations fugaces, de souvenances souillées de sang, de violence, de larmes. Un chaos difficilement contenu dans sa boîte crânienne, qu’un coup d’hache suffirait à fendre. Qu’est-ce qui se déverserait ?
Les yeux d’Aimable se baissent songeusement vers sa plaie. Le sang ne coule qu’à peine, un sang d’un rouge épais, dessous, qu’est-ce qui se cache ? Parfois, il a l’envie de saisir son couteau, de labourer sa peau, purger le mal. Mais est-ce la solution ?
Diane s’avance d’un pas, elle saisit son coude. Par pur réflexe, Aimable s’est tendu. Son corps entier s’est contracté, arrêtant net Diane dans son mouvement. L’homme pèse aussi lourd qu’un âne mort, son souffle s’est retenu, son bras libre s’est levé. Vers son visage. Comme un enfant battu.
L’éducation des De Bayard a toujours été rude. Leurs jeux étaient brutaux, faits de morsures, de coups, de griffures. Mais aucun d’eux n’a connu de débordements de violence. Aucun d’eux n’a enduré la rage d’un adulte sur un enfant. Ses réactions, Aimable ne les comprend pas toujours, ni son entourage.
Cette peur, peur qu’on lui fasse du mal alors que la seule menace vit au fond de ses veines.
La Bête se jette sur le Chevalier, le Chevalier recule. Pour mieux saisir son bouclier. Alors que la Bête se jette sur lui, il La repousse, de tout son poids, dans les ombres de sa conscience.
L’effort l’aide à se reprendre, Aimable cligne des paupières et revient à la réalité. Diane peut sentir les muscles se dénouer, enfin, le Chevalier la suit docilement sans plus opposer de résistance. Il tremble légèrement, reprend son souffle et essuie son front souillé de sueur. Lui si brave… Il est rare qu’il laisse échapper sa peur.
Elle n’a été présente que quelques secondes, le temps d’un battement de paupières, d’un mouvement vif. Il n’y a plus aucune trace de son trouble, seulement cette allure fatiguée et renfermée, les yeux baissés. Il s’assoit sur le fauteuil et la laisse saisir son bras pour nettoyer la plaie.
Aimable surveille, d’un regard, son bras, puis baisse les yeux vers la croix qu’il caresse du bout du pouce. Il se sent épuisé mais il sait que le repos ne viendra que plus tard. Lorsqu’il sera seul, loin de Diane et d’Hildegard.
Alors, Diane chante. Aimable lève les yeux vers elle et écoute. Etrangement, ce son le rassure. Assez pour qu’il ouvre docilement la main, lui permettant de nettoyer correctement la plaie. La Voix, sonnée par le coup de bouclier du Chevalier, s’est rétractée et tend l’oreille. Elle écoute, avec lui, cette prière. De sa main libre, Aimable se signe dans un réflexe et referme ses doigts sur sa croix. Elle a raison. Tout s’est bien passé.
Ce simple constat lui redonne quelque peu confiance en lui. Assez pour que, dans son esprit, le Chevalier plante fermement ses pieds sur le sol de sa conscience. Qu’il roule des épaules, comme Hildegard a tant l’habitude de faire.
Une part en lui refuse de considérer que cette réussite lui appartient. Sans Diane, il n’y serait pas parvenu.
_ Merci…
Le murmure est très discret. C’est un grondement, un son rêche, comme la pression d’un pelage contre les doigts de la physicienne. Leurs yeux s’effleurent, un geste… presque intime de la part du Chevalier avant qu’il ne se redresse à l’approche de l’enfant et de sa sœur.
Ses mains se croisent dans le dos pour dissimuler sa plaie. Il se tient droit, noble, malgré ses yeux baissés. Effacé, il espère que leurs attentions ne se dirigent que vers Diane et non plus vers lui.
Un souffle. Autre que le sien. Entre ses lèvres. La Bête respire, Aimable referme sévèrement les mâchoires, contenant ses mots qu’il sent dans sa gorge, qu’il entend, dans sa tête. Chatons. Yula. Yula…
Ce nom qui les hante.
Mais le Chevalier est déterminé à ne pas plus laisser de terrain à la Bête. Elle rôde, mais la peine l’apaise, prières, Yula, chatons, peur, douleurs, douleurs, croix, sang, prières, Peur– il n’écoute que d’une oreille.
Hildegard se tend. Il le sait, sans même la voir. Instinctivement, Aimable repose sa chaussure sur les tâches de sang. Les dissimulant. Inutile d’infliger telle vision à un enfant. Ses yeux remarquent enfin la couronne de fleurs sur les traits si durs de sa sœur, une vision si surprenante qu’il s’arrache de ses pensées pour la dévisager.
Décidément, cette maison dévoile un visage qu’Aimable n’a vu depuis bien longtemps.
Il se souvient d’Hildegard, que Gwendoline coiffait lorsqu’elles étaient jeunes. D’Hildegard qui échangeait sa robe avec un pantalon de Côme, le temps de s’entraîner avec eux à l’épée. D’Hildegard qui prenait la main de Marie, abattant son autre poing sur les enfants qui la chahutaient.
Cette Hildegard. N’est pas si loin, peut-être.
Sa question tombe comme un couperet, dans sa tête, le Chevalier sursaute quand il sent le coup s’abattre sur son épaule. Pour autant, il ne lâche pas ses armes. Aimable ravale sa salive, massant sa main blessée de l’autre, les gardant contre ses reins pour préserver l’innocence d’Iris. Que répondre à sa sœur ? Aucune ne lui conviendra. Mais s’il garde le silence, elle ne verra que le danger qu’il représente.
_ J’ai sursauté quand l’examen a commencé. Je me suis blessé… par inadvertance, un regard s’adresse à Iris, une œillade pour excuse à Diane. Malheureusement, Hildegard n’est jamais dupe. Avec elle, l’expression « noyer le poisson » n’a jamais été aussi vraie : il s’agit bien souvent d’une vaine tentative d’apaiser la méfiance de sa sœur.
_ J’ai pu me maîtriser. Diane sait… Comment apaiser les inquiétudes de ses patients. Tout s’est bien passé.
Si Hildegard s’assoit, Aimable reste debout. Aux aguets. Comme toujours.
Il a bien trop abaissé sa garde.
_ Votre frère pourra venir me voir, au besoin, je ne vois aucun mal que je ne puis tenter de guérir seule, mon amie. N’ayez crainte, il me ferait très plaisir de lui venir en aide.
La réponse de Diane le soulage et il incline davantage la nuque pour la remercier. Les De Bayard ne s’éternisent guère et après quelques échanges courtois, se séparent de la Dame d’Orléans.
Les échanges entre le frère et la sœur sont rares, suite à leur départ. Aimable rejoint ses pensées, son combat, lâchant prise sur son corps épuisé. Il écoute distraitement sa sœur, pour qui le silence et l’ignorance sont les meilleurs des boucliers. Protégée derrière les murs épais de sa forteresse.
Aimable a peur de s’en approcher. Peur qu’elle ne l’accueille d’eaux brûlantes.
Ou pis encore. Que ses murs s’effondrent. Qu’elle s’écroule.
Il reste à cette lisière, si proche et si loin d’elle, à espérer qu’un jour, il parviendra de nouveau à l’aborder.
Sa main se referme sur sa croix et il s’étonne de ne pas sentir son froid. Quelques secondes sont nécessaires pour se rappeler du bandage qui protège sa plaie, protège sa main. Comme un encouragement. Aimable baisse les yeux, sourit faiblement.
Il a espoir.
Déconfit, Aimable lève les yeux vers elle, sans pour autant la regarder dans les yeux. Le cœur battant à vive allure dans sa cage thoracique. Cette femme, est-elle guidée par sa bravoure ou par son inconscience ? Mais ne dit-on pas que le génie côtoie la folie ?
Entrouvrant les lèvres, Aimable ne répond rien. Etranglé par son désir de lui faire confiance, Se faire confiance, alors que la peur écartèle ses viscères. Celle de faire mal. De blesser. De ne pas se contrôler. Malgré lui, il n’arrête pas de trembler, les muscles si tétanisés qu’il a l’impression de s’en écraser.
La seule femme qui a fait preuve d’une telle audace... n’est autre qu’Eleanor. Une douce réminiscence l’effleure, la chaleur de son sourire, la détermination de ses yeux clairs, ses mains posées sur ses hanches. Ses épaules se relâchent, un soupir rauque s’arrache de ses lèvres. Est-ce la Bête qui gronde ? Ou le Chevalier qui baisse les armes ?
Aucun sourire n’effleure ses lèvres et pourtant, il y aurait matière à rire. Il l’a attaquée et pourtant, elle ne voit pas de Monstre en lui. Il aurait pu lui écraser l’épaule, la soulever d’une seule main – elle est si frêle -, mais la voilà certaine qu’il ne lui fera pas de mal. D’où vient cette confiance qu’elle lui offre ? Il ne s’en sent pas digne.
Alors sois-le. Cette phrase, sortie de nulle part, franchit son esprit. Le Chevalier s’est redressé. Loin, loin derrière ses yeux, sous ses pupilles, il affronte toujours la Bête. La Voix l’a mordu au bras, Elle lui a arraché son bouclier, il saigne. Mais la Lumière éclaire son armure. Sa main armée de la Croix, son cœur, armé de sa Foi. Le Chevalier se tient debout, de nouveau, il se met en garde malgré le rictus qu’affiche le Monstre.
La Voix jubile, à moins qu’elle ne sanglote, les borborygmes rauques qui résonnent dans sa conscience sont sans sens. C’est un maelstrom de chuchotements, de sensations fugaces, de souvenances souillées de sang, de violence, de larmes. Un chaos difficilement contenu dans sa boîte crânienne, qu’un coup d’hache suffirait à fendre. Qu’est-ce qui se déverserait ?
Les yeux d’Aimable se baissent songeusement vers sa plaie. Le sang ne coule qu’à peine, un sang d’un rouge épais, dessous, qu’est-ce qui se cache ? Parfois, il a l’envie de saisir son couteau, de labourer sa peau, purger le mal. Mais est-ce la solution ?
Diane s’avance d’un pas, elle saisit son coude. Par pur réflexe, Aimable s’est tendu. Son corps entier s’est contracté, arrêtant net Diane dans son mouvement. L’homme pèse aussi lourd qu’un âne mort, son souffle s’est retenu, son bras libre s’est levé. Vers son visage. Comme un enfant battu.
L’éducation des De Bayard a toujours été rude. Leurs jeux étaient brutaux, faits de morsures, de coups, de griffures. Mais aucun d’eux n’a connu de débordements de violence. Aucun d’eux n’a enduré la rage d’un adulte sur un enfant. Ses réactions, Aimable ne les comprend pas toujours, ni son entourage.
Cette peur, peur qu’on lui fasse du mal alors que la seule menace vit au fond de ses veines.
La Bête se jette sur le Chevalier, le Chevalier recule. Pour mieux saisir son bouclier. Alors que la Bête se jette sur lui, il La repousse, de tout son poids, dans les ombres de sa conscience.
L’effort l’aide à se reprendre, Aimable cligne des paupières et revient à la réalité. Diane peut sentir les muscles se dénouer, enfin, le Chevalier la suit docilement sans plus opposer de résistance. Il tremble légèrement, reprend son souffle et essuie son front souillé de sueur. Lui si brave… Il est rare qu’il laisse échapper sa peur.
Elle n’a été présente que quelques secondes, le temps d’un battement de paupières, d’un mouvement vif. Il n’y a plus aucune trace de son trouble, seulement cette allure fatiguée et renfermée, les yeux baissés. Il s’assoit sur le fauteuil et la laisse saisir son bras pour nettoyer la plaie.
Aimable surveille, d’un regard, son bras, puis baisse les yeux vers la croix qu’il caresse du bout du pouce. Il se sent épuisé mais il sait que le repos ne viendra que plus tard. Lorsqu’il sera seul, loin de Diane et d’Hildegard.
Alors, Diane chante. Aimable lève les yeux vers elle et écoute. Etrangement, ce son le rassure. Assez pour qu’il ouvre docilement la main, lui permettant de nettoyer correctement la plaie. La Voix, sonnée par le coup de bouclier du Chevalier, s’est rétractée et tend l’oreille. Elle écoute, avec lui, cette prière. De sa main libre, Aimable se signe dans un réflexe et referme ses doigts sur sa croix. Elle a raison. Tout s’est bien passé.
Ce simple constat lui redonne quelque peu confiance en lui. Assez pour que, dans son esprit, le Chevalier plante fermement ses pieds sur le sol de sa conscience. Qu’il roule des épaules, comme Hildegard a tant l’habitude de faire.
Une part en lui refuse de considérer que cette réussite lui appartient. Sans Diane, il n’y serait pas parvenu.
_ Merci…
Le murmure est très discret. C’est un grondement, un son rêche, comme la pression d’un pelage contre les doigts de la physicienne. Leurs yeux s’effleurent, un geste… presque intime de la part du Chevalier avant qu’il ne se redresse à l’approche de l’enfant et de sa sœur.
Ses mains se croisent dans le dos pour dissimuler sa plaie. Il se tient droit, noble, malgré ses yeux baissés. Effacé, il espère que leurs attentions ne se dirigent que vers Diane et non plus vers lui.
Un souffle. Autre que le sien. Entre ses lèvres. La Bête respire, Aimable referme sévèrement les mâchoires, contenant ses mots qu’il sent dans sa gorge, qu’il entend, dans sa tête. Chatons. Yula. Yula…
Ce nom qui les hante.
Mais le Chevalier est déterminé à ne pas plus laisser de terrain à la Bête. Elle rôde, mais la peine l’apaise, prières, Yula, chatons, peur, douleurs, douleurs, croix, sang, prières, Peur– il n’écoute que d’une oreille.
Hildegard se tend. Il le sait, sans même la voir. Instinctivement, Aimable repose sa chaussure sur les tâches de sang. Les dissimulant. Inutile d’infliger telle vision à un enfant. Ses yeux remarquent enfin la couronne de fleurs sur les traits si durs de sa sœur, une vision si surprenante qu’il s’arrache de ses pensées pour la dévisager.
Décidément, cette maison dévoile un visage qu’Aimable n’a vu depuis bien longtemps.
Il se souvient d’Hildegard, que Gwendoline coiffait lorsqu’elles étaient jeunes. D’Hildegard qui échangeait sa robe avec un pantalon de Côme, le temps de s’entraîner avec eux à l’épée. D’Hildegard qui prenait la main de Marie, abattant son autre poing sur les enfants qui la chahutaient.
Cette Hildegard. N’est pas si loin, peut-être.
Sa question tombe comme un couperet, dans sa tête, le Chevalier sursaute quand il sent le coup s’abattre sur son épaule. Pour autant, il ne lâche pas ses armes. Aimable ravale sa salive, massant sa main blessée de l’autre, les gardant contre ses reins pour préserver l’innocence d’Iris. Que répondre à sa sœur ? Aucune ne lui conviendra. Mais s’il garde le silence, elle ne verra que le danger qu’il représente.
_ J’ai sursauté quand l’examen a commencé. Je me suis blessé… par inadvertance, un regard s’adresse à Iris, une œillade pour excuse à Diane. Malheureusement, Hildegard n’est jamais dupe. Avec elle, l’expression « noyer le poisson » n’a jamais été aussi vraie : il s’agit bien souvent d’une vaine tentative d’apaiser la méfiance de sa sœur.
_ J’ai pu me maîtriser. Diane sait… Comment apaiser les inquiétudes de ses patients. Tout s’est bien passé.
Si Hildegard s’assoit, Aimable reste debout. Aux aguets. Comme toujours.
Il a bien trop abaissé sa garde.
_ Votre frère pourra venir me voir, au besoin, je ne vois aucun mal que je ne puis tenter de guérir seule, mon amie. N’ayez crainte, il me ferait très plaisir de lui venir en aide.
La réponse de Diane le soulage et il incline davantage la nuque pour la remercier. Les De Bayard ne s’éternisent guère et après quelques échanges courtois, se séparent de la Dame d’Orléans.
Les échanges entre le frère et la sœur sont rares, suite à leur départ. Aimable rejoint ses pensées, son combat, lâchant prise sur son corps épuisé. Il écoute distraitement sa sœur, pour qui le silence et l’ignorance sont les meilleurs des boucliers. Protégée derrière les murs épais de sa forteresse.
Aimable a peur de s’en approcher. Peur qu’elle ne l’accueille d’eaux brûlantes.
Ou pis encore. Que ses murs s’effondrent. Qu’elle s’écroule.
Il reste à cette lisière, si proche et si loin d’elle, à espérer qu’un jour, il parviendra de nouveau à l’aborder.
Sa main se referme sur sa croix et il s’étonne de ne pas sentir son froid. Quelques secondes sont nécessaires pour se rappeler du bandage qui protège sa plaie, protège sa main. Comme un encouragement. Aimable baisse les yeux, sourit faiblement.
Il a espoir.
- Spoiler:
- La réponse de Diane m'a été transmise par la joueuse, je l'ai juste intégrée à mon post
Merci encore toutes les deux pour ce rp super, je me suis éclatée à l'écrire avec vous !