Lun 8 Fév - 16:45
C’est un jour de fête au domaine De Bayard.
La fratrie s’est réunie. Les grandes tables ont été dressées. Les enfants jouent, Isabeau affronte son cousin de son épée en bois. Richard, l’aîné, aide Eleanor à mettre la table. Aimable couve du regard sa petite famille, et son attention se dirige vers Ulric.
L’Ours gris attend, assis sur son banc. Son dos immense adossé à la table, ses énormes mains rugueuses jouent songeusement avec une pièce qu’il fait tourner entre ses doigts épais. Le visage buriné, barré de cicatrices, l’homme est peu avenant ; la montagne a forgé son visage à grands coups de marteau, enfonçant les orbites, taillant les pommettes, éclatant et tordant le nez. Le Forgeron lui a offert deux éclats d’argent pour prunelles, que l’obscurité de ses sourcils broussailleux ne parvient pas à dissimuler.
Aimable, à ses côtés, paraît bien plus frêle, la taille plus marquée. Pour autant, ses épaules restent développées ; sa taille dépasse d’une bonne tête celle des hommes qu’il a l’habitude de côtoyer. Son derme est plus doré que brun, bien que la nature ait apprécié marquer ses traits à coups de serpe, taillant pommettes, mâchoires, tranchant les joues et les lèvres. Pas que ! Le silence est tel le blason des De Bayard. Ainsi, il n’est pas rare de voir les deux frères cheminer sans prononcer un mot.
Ils se trouvent dans la cour de sa demeure, voisine à celle de son frère. Une grande table a été installée et en dehors, le long des jardins, une autre est dressée. L’on entend les rires des enfants, les voix des serviteurs, les ordres des épouses. Le hennissement lointain d’un cheval attire l’attention de l’aîné. Ulric se lève et le banc tremble sous le soulagement. Le suivant du regard, Aimable se lève à son tour, engage spontanément le pas à son frère.
Ulric rejoint une silhouette qu’Aimable s’efforce d’ignorer. Un jeune homme. Tignasse brune, sauvage, buisson où s’échappent deux yeux sombres, si sombres qu’ils le font frémir. Le faciès si sérieux ne suffit pas à dissimuler totalement la jeunesse de ses traits ; il y a cette étrange innocence qui se dégage de ce teint de porcelaine, de ce visage dénué de rides ou de cicatrices. Parfois, Aimable se demande ; pourquoi Ulric a-t-il recueilli cet enfant ? Ulric est un homme aguerri. La vie l’a tant marqué qu’il s’est refermé comme un coffre ; combien de coups d’épée, d’hache, ont percé sa chair et ne lui ont arraché qu’un grognement ? Parfois, Aimable se demande où son cœur se terre. Et c’est dans ses choix qu’il se trahit. Offrant sa chance à ce pauvre erre, sa compassion à ce garçon qu’il regarde à peine.
Aimable connaît son frère. Il sait qu’Ulric agit ; il ne parle pas, jamais, et inversement, il attend des autres des actes plus que des mots. Pour lui, les paroles ne sont que des mensonges ou une perte de temps. Qu’a fait ce garçon pour qu’il l’accepte ? Peut-être s’est-il simplement présenté. Peut-être lui a-t-il seulement demandé de l’embaucher.
Aimable préfère détourner les yeux. En présence de l’enfant, la Voix s’anime. Elle parle, elle gronde, elle gagne de l’ampleur alors qu’elle souhaite s’arracher de son terrier, mais il l’enfonce d’un coup de pied. Non, pas aujourd’hui. Il ne veut pas L’entendre. Tant et si bien qu’il ne voit pas Ulric adresser au jeune Emilien un signe de main ; l’aîné rejoint son cheval, sur lequel il grimpe dans un son rauque. Aimable s’arrache de ses pensées, surpris, il accélère l’allure.
_ Qu’allons-nous faire, mon frère ?
Ulric, en réponse, désigne l’arc qu’il détache de sa selle pour le passer à son épaule.
_ Penses-tu qu’il est temps de chasser ?
La question s’accompagne d’un sourire, une complicité toute fraternelle étincelle dans ses yeux clairs. Ulric ne répond pas ; d’un coup de talons, il invite sa monture à avancer. Oh est-ce l'ennui, la paix ou un animal qu'il va chasser ? C'est un autre secret qu'Ulric n'est pas prêt de révéler.
Rapidement, Aimable se prépare, embrasse son épouse – Ne rentrez pas trop tard ! demande-t-elle et lui hoche la tête – avant de récupérer sa monture. Il cherche du regard Emilien. C’est ainsi que son frère le lui a présenté, entre son arrivée et la mise en place des tables. Un fauconnier.
Finalement, Aimable parvient à rejoindre son frère. Ulric a probablement fui le bruit, le monde. C’est un grand solitaire et Aimable n’a rien à lui envier à ce sujet. Pour autant, leur promenade est aujourd’hui troublée par l’intrusion de ce garçon. Et tout ce qu’elle éveille en lui.
Car Aimable a beau s’éloigner de la demeure, le bruit le suit. Le brouhaha dans son esprit. Incessant. La Voix qui gronde, crache, s’agace, s’ani...
Loup, loup, LouUuUp, LOUP, LE LOUP AIMABLE, LE LOUP RODE, LE LOUUP
_ Sois nos yeux.
Ulric l’a murmuré et pourtant, sa voix est si grave, si puissante, qu’elle l’a arraché de ses pensées. Aimable tourne alors les yeux vers Emilien, c’est en chien de faïence qu’il l’observe.
La fratrie s’est réunie. Les grandes tables ont été dressées. Les enfants jouent, Isabeau affronte son cousin de son épée en bois. Richard, l’aîné, aide Eleanor à mettre la table. Aimable couve du regard sa petite famille, et son attention se dirige vers Ulric.
L’Ours gris attend, assis sur son banc. Son dos immense adossé à la table, ses énormes mains rugueuses jouent songeusement avec une pièce qu’il fait tourner entre ses doigts épais. Le visage buriné, barré de cicatrices, l’homme est peu avenant ; la montagne a forgé son visage à grands coups de marteau, enfonçant les orbites, taillant les pommettes, éclatant et tordant le nez. Le Forgeron lui a offert deux éclats d’argent pour prunelles, que l’obscurité de ses sourcils broussailleux ne parvient pas à dissimuler.
Aimable, à ses côtés, paraît bien plus frêle, la taille plus marquée. Pour autant, ses épaules restent développées ; sa taille dépasse d’une bonne tête celle des hommes qu’il a l’habitude de côtoyer. Son derme est plus doré que brun, bien que la nature ait apprécié marquer ses traits à coups de serpe, taillant pommettes, mâchoires, tranchant les joues et les lèvres. Pas que ! Le silence est tel le blason des De Bayard. Ainsi, il n’est pas rare de voir les deux frères cheminer sans prononcer un mot.
Ils se trouvent dans la cour de sa demeure, voisine à celle de son frère. Une grande table a été installée et en dehors, le long des jardins, une autre est dressée. L’on entend les rires des enfants, les voix des serviteurs, les ordres des épouses. Le hennissement lointain d’un cheval attire l’attention de l’aîné. Ulric se lève et le banc tremble sous le soulagement. Le suivant du regard, Aimable se lève à son tour, engage spontanément le pas à son frère.
Ulric rejoint une silhouette qu’Aimable s’efforce d’ignorer. Un jeune homme. Tignasse brune, sauvage, buisson où s’échappent deux yeux sombres, si sombres qu’ils le font frémir. Le faciès si sérieux ne suffit pas à dissimuler totalement la jeunesse de ses traits ; il y a cette étrange innocence qui se dégage de ce teint de porcelaine, de ce visage dénué de rides ou de cicatrices. Parfois, Aimable se demande ; pourquoi Ulric a-t-il recueilli cet enfant ? Ulric est un homme aguerri. La vie l’a tant marqué qu’il s’est refermé comme un coffre ; combien de coups d’épée, d’hache, ont percé sa chair et ne lui ont arraché qu’un grognement ? Parfois, Aimable se demande où son cœur se terre. Et c’est dans ses choix qu’il se trahit. Offrant sa chance à ce pauvre erre, sa compassion à ce garçon qu’il regarde à peine.
Aimable connaît son frère. Il sait qu’Ulric agit ; il ne parle pas, jamais, et inversement, il attend des autres des actes plus que des mots. Pour lui, les paroles ne sont que des mensonges ou une perte de temps. Qu’a fait ce garçon pour qu’il l’accepte ? Peut-être s’est-il simplement présenté. Peut-être lui a-t-il seulement demandé de l’embaucher.
Aimable préfère détourner les yeux. En présence de l’enfant, la Voix s’anime. Elle parle, elle gronde, elle gagne de l’ampleur alors qu’elle souhaite s’arracher de son terrier, mais il l’enfonce d’un coup de pied. Non, pas aujourd’hui. Il ne veut pas L’entendre. Tant et si bien qu’il ne voit pas Ulric adresser au jeune Emilien un signe de main ; l’aîné rejoint son cheval, sur lequel il grimpe dans un son rauque. Aimable s’arrache de ses pensées, surpris, il accélère l’allure.
_ Qu’allons-nous faire, mon frère ?
Ulric, en réponse, désigne l’arc qu’il détache de sa selle pour le passer à son épaule.
_ Penses-tu qu’il est temps de chasser ?
La question s’accompagne d’un sourire, une complicité toute fraternelle étincelle dans ses yeux clairs. Ulric ne répond pas ; d’un coup de talons, il invite sa monture à avancer. Oh est-ce l'ennui, la paix ou un animal qu'il va chasser ? C'est un autre secret qu'Ulric n'est pas prêt de révéler.
Rapidement, Aimable se prépare, embrasse son épouse – Ne rentrez pas trop tard ! demande-t-elle et lui hoche la tête – avant de récupérer sa monture. Il cherche du regard Emilien. C’est ainsi que son frère le lui a présenté, entre son arrivée et la mise en place des tables. Un fauconnier.
Finalement, Aimable parvient à rejoindre son frère. Ulric a probablement fui le bruit, le monde. C’est un grand solitaire et Aimable n’a rien à lui envier à ce sujet. Pour autant, leur promenade est aujourd’hui troublée par l’intrusion de ce garçon. Et tout ce qu’elle éveille en lui.
Car Aimable a beau s’éloigner de la demeure, le bruit le suit. Le brouhaha dans son esprit. Incessant. La Voix qui gronde, crache, s’agace, s’ani...
Loup, loup, LouUuUp, LOUP, LE LOUP AIMABLE, LE LOUP RODE, LE LOUUP
_ Sois nos yeux.
Ulric l’a murmuré et pourtant, sa voix est si grave, si puissante, qu’elle l’a arraché de ses pensées. Aimable tourne alors les yeux vers Emilien, c’est en chien de faïence qu’il l’observe.
Lun 15 Fév - 0:42
Depuis qu’il est arrivé, Emilien laisse son regard trainer partout. Il sait qu’il n’est pas là pour s’amuser ou profiter de cette fête imprévue, mais malgré tout il est incapable, pour le moment, d’être totalement concentré sur ce pourquoi il est ici. Du bout des doigts il caresse l’encolure du cheval à côté duquel il se trouve, mais en réalité son attention n’est pas fixée sur lui. Il note les personnes présentes, tellement de gens. Il sait qu’il s’agit d’une réunion de famille, mais pour lui ce n’est pas quelque chose d’habituelle. Il se prend à songer qu’il aurait peut-être apprécié se retrouver dans une situation de ce genre, un jour, mais en même temps il ne regrette pas la façon dont il a été élevé, au contraire même. Puis, il sait bien aussi qu’il ne pourrait pas, en réalité, rester ainsi très longtemps. Son regard continue de passer de convive en convive, sans s’arrêter assez longtemps sur l’un ou l’autre pour paraitre malpoli, mais juste assez pour pouvoir noter quelques détails. Les enfants qui rient, tout à leurs jeux, ces mêmes jeux qu’il a lui-même pratiqué lorsqu’il avait leur âge. Puis il passe aux adultes, hommes, femmes, les ressemblances entre certains d’entre eux sont tellement flagrantes qu’il ne peut pas passer à côté.
Puis, il passe aux tables, les effluves du repas viennent jusqu’à lui et les odeurs se mêlent à présent aux images. Il pourrait rester là des heures, à noter chaque détail, à passer de l’un à l’autre, sans se soucier de l’importance réelle d’aucun d’entre eux, en réalité, mais il est rappelé au moment présent par le bruit des chevaux. Comme s’il s’agissait d’un signal, il voit l’homme qui lui a donné sa chance se lever de son banc pour le rejoindre. A partir de ce moment-là, il prend sur lui pour rester concentré, pour ne pas laisser son regard aller à nouveau d’une personne à une autre, d’une couleur à une autre. Malgré tout, un instant il remarque qu’une autre silhouette suit celle du seigneur qu’il sert, la curiosité marque alors les traits de l’Infant. La ressemblance entre les deux frères est flagrante, personne ne pourrait la nier, pourtant ils sont aussi différents. Il a besoin de lever légèrement la tête pour s’adresser à eux et si la curiosité est toujours un peu présente dans son regard, elle cède peu à peu le pas à un sérieux qui peut sembler étrange pour ceux ne le connaissant pas, avant qu’un sourire ne fende son visage en guise de réponse.
Il laisse les deux frères à leurs préparatifs de départ et rejoint rapidement la fauconnerie, il sait déjà ce dont il a besoin, en réalité, tout est prêt, il lui suffit juste d’une dernière vérification. Lorsqu’il en ressort, les deux hommes sont à cheval et il ne tient qu’à lui de les suivre. Son attention est focalisée sur l’oiseau qui repose désormais sur son avant-bras ganté. Tout ce qui, auparavant, pouvait jouer sur ses sens semble avoir disparu, plus rien n’existe que l’oiseau et l’excitation qu’il fait naitre en lui. De l’excitation, mais aussi, toujours, un peu d’angoisse, celle de ne pas être à la hauteur de la tache qui lui a été confiée, celle de voir l’oiseau dont il a la charge disparaitre ou être blessé. Il sait que, inéluctablement, ce genre de chose finira par arriver, mais il fait de son mieux pour repousser ce moment fatidique aussi loin qu’il en est capable.
Habituellement, il arrive à rester concentré sur l’oiseau et sur rien d’autre, mais pas aujourd’hui. Aujourd’hui il n’arrive pas à passer outre le regard qu’il sent sur lui, ce même regard qu’il a déjà senti à plusieurs reprises, ce regard qui fait s’éveiller son instinct, qui lui souffle qu’il y a comme un danger, sans qu’il ne soit capable de l’identifier. Quand Ulric prend la parole, une espèce de frisson le parcourt et il se focalise à nouveau sur ce qu’il doit faire.
– Bien Monseigneur.
Son cœur bat la chamade lorsqu’il ôte le capuchon du rapace, lui offrant à nouveau la vue et, d’un geste, il le propulse dans les airs, il ne quitte pas l’oiseau des yeux, un peu inquiet, mais en même temps il n’arrive pas à se détourner totalement de la sensation qui le tient. Et lorsque, finalement, il cède à l’espèce de pression et tourne la tête vers Aimable, c’est l’incompréhension la plus totale qui s’affiche sur son visage. Est-ce qu’il a fait quelque chose de mal, à un moment donné, qui puisse justifier le regard que l’homme pose sur lui ? Il frissonne à nouveau, mal à l’aise et tente de se reconcentrer sur le rapace qui les survole, puis se met à faire des cercles à quelques mètres d’eux, comme pour indiquer qu’il a repéré quelque chose.
Puis, il passe aux tables, les effluves du repas viennent jusqu’à lui et les odeurs se mêlent à présent aux images. Il pourrait rester là des heures, à noter chaque détail, à passer de l’un à l’autre, sans se soucier de l’importance réelle d’aucun d’entre eux, en réalité, mais il est rappelé au moment présent par le bruit des chevaux. Comme s’il s’agissait d’un signal, il voit l’homme qui lui a donné sa chance se lever de son banc pour le rejoindre. A partir de ce moment-là, il prend sur lui pour rester concentré, pour ne pas laisser son regard aller à nouveau d’une personne à une autre, d’une couleur à une autre. Malgré tout, un instant il remarque qu’une autre silhouette suit celle du seigneur qu’il sert, la curiosité marque alors les traits de l’Infant. La ressemblance entre les deux frères est flagrante, personne ne pourrait la nier, pourtant ils sont aussi différents. Il a besoin de lever légèrement la tête pour s’adresser à eux et si la curiosité est toujours un peu présente dans son regard, elle cède peu à peu le pas à un sérieux qui peut sembler étrange pour ceux ne le connaissant pas, avant qu’un sourire ne fende son visage en guise de réponse.
Il laisse les deux frères à leurs préparatifs de départ et rejoint rapidement la fauconnerie, il sait déjà ce dont il a besoin, en réalité, tout est prêt, il lui suffit juste d’une dernière vérification. Lorsqu’il en ressort, les deux hommes sont à cheval et il ne tient qu’à lui de les suivre. Son attention est focalisée sur l’oiseau qui repose désormais sur son avant-bras ganté. Tout ce qui, auparavant, pouvait jouer sur ses sens semble avoir disparu, plus rien n’existe que l’oiseau et l’excitation qu’il fait naitre en lui. De l’excitation, mais aussi, toujours, un peu d’angoisse, celle de ne pas être à la hauteur de la tache qui lui a été confiée, celle de voir l’oiseau dont il a la charge disparaitre ou être blessé. Il sait que, inéluctablement, ce genre de chose finira par arriver, mais il fait de son mieux pour repousser ce moment fatidique aussi loin qu’il en est capable.
Habituellement, il arrive à rester concentré sur l’oiseau et sur rien d’autre, mais pas aujourd’hui. Aujourd’hui il n’arrive pas à passer outre le regard qu’il sent sur lui, ce même regard qu’il a déjà senti à plusieurs reprises, ce regard qui fait s’éveiller son instinct, qui lui souffle qu’il y a comme un danger, sans qu’il ne soit capable de l’identifier. Quand Ulric prend la parole, une espèce de frisson le parcourt et il se focalise à nouveau sur ce qu’il doit faire.
– Bien Monseigneur.
Son cœur bat la chamade lorsqu’il ôte le capuchon du rapace, lui offrant à nouveau la vue et, d’un geste, il le propulse dans les airs, il ne quitte pas l’oiseau des yeux, un peu inquiet, mais en même temps il n’arrive pas à se détourner totalement de la sensation qui le tient. Et lorsque, finalement, il cède à l’espèce de pression et tourne la tête vers Aimable, c’est l’incompréhension la plus totale qui s’affiche sur son visage. Est-ce qu’il a fait quelque chose de mal, à un moment donné, qui puisse justifier le regard que l’homme pose sur lui ? Il frissonne à nouveau, mal à l’aise et tente de se reconcentrer sur le rapace qui les survole, puis se met à faire des cercles à quelques mètres d’eux, comme pour indiquer qu’il a repéré quelque chose.
Mer 17 Fév - 14:58
Aimable ne prête pas attention à l’oiseau qui s’envole.
Les yeux du jeune homme rejoignent les siens. Son incompréhension… Est si vive qu’elle le poignarde. Le coup est suffisant pour qu’il se sente reculer, ses yeux, d’ailleurs, se détournent de ses prunelles alors qu’un poids repose sur ses épaules. Lui n’a pas de faucon à son bras. Lui ne peut pas se débarrasser d’un mouvement de ce qui pèse sur son âme. Non… Non, l’Ouroboros est toujours là, il perçoit toujours son souffle à son oreille, ses griffes acérées autour de son corps, sa mâchoire qui le dévore de l’intérieur. Parfois, elle remonte et c’est sur son cœur qu’elle appuie ses crocs. D’ailleurs, elle ronge ses rênes, ses côtes et cette souffrance s’ajoute à la peine. Commet-il une erreur, à propos de ce garçon ?
N̶̬̳̥͓̥͍̳͑̓ò̸̞̾̄͂̀͑̌̔̌̉̈́̀͌́͝O̶̙̺̬̪̪͖̜͈̳̣̠͓͛̊̈̋͛̃̊̏̀̐̈́̓͗͆̆ơ̸̬̪̝̣͈̬͖̰̓͐̈͆͌̅͂̉̔͝ͅn̸͇͍͑̍̅́͆.̵̡̭͖͍̜̝̃̃͂̆̓̓̀͝ ̶̢̢̘̣̰͉͖̝̮̮̖̳͚̹̈́̀̊̈́̈͊̋͋̆̆͝Į̴̣̹̬͉̲̟̫̩̭͕̮̣͇̒̈̐̀͠l̸̢̘͓͎̫̬̱̿̈́̆̿̃͌̃̇̈̊̓͆͝͝ ̶͙̻̹̖̠̣̖̞̯̘̼̈́̌̇̿͋̊̍͂͂͐͂̚͠ͅe̶̢̢̧̦̞͍̹̲̲̥̊̎̉͊̔̌̌̓̄̋̊͋̌̽ͅs̴̛̺̯̩̤̭̼t̶̜̋̇̿͗̀͊̈́̋̈́̏͆͛͂͐͜͠ ̵̡̥̙̝͈͒̿̂̐͌̏͆͐̀̿̌̈́̉͠L̷̡̠̭̝͎̝͎͎̙̖͚̔̈́̈́͒̓͐̂͛̀͆̎̾̊̂͜o̴̟̙̩̹̽̚͜͝u̷̘̤̝̰͉̜͌͛̑͐̀́̅̚͜ͅÙ̶̧̢̳͈̜͔̺͉͚̑͊͌͘͝u̷̩͊͗p̸̱͙̼̭͇̹͍̰̱͙͂͆̓͠
Lorsque l’oiseau tourne en cercle, Ulric adresse un coup de talon à sa monture, pour la convaincre d’avancer. Aimable lui engage le pas, mais ses yeux se tournent finalement vers le jeune homme. Ce sont ses lèvres qu’il préfère fixer. Et pour autant, c’est des crocs qu’il a la sensation de voir… Ses paupières se plissent, l’Ouroboros accentue la pression sur son esprit, la migraine s’éveille. L’air froid soulage quelque peu ses tempes brûlantes alors qu’il masse sa nuque d’un geste las, les yeux se ferment et se détournent, c’est une danse qu’il n’a cesse de mener. Qui le fatigue, l’épuise et durant laquelle il ne cesse de trébucher.
Ulric, cependant, ne semble avoir aucune hésitation. Lorsque le faucon se rapproche de sa proie, l’homme esquisse un sourire impatient : comme un enfant, il attend que l’oiseau fonde. Chasseur dans l’âme, il ressent l’excitation de l’animal, l’ivresse d’une poursuite, et Aimable, oh lui attend la mise à mort. Sous leurs écorces farouches, se terrent deux bêtes drapées d’honneur… Et d’un cœur. Car l’énorme main d’Ulric, celle qui a déjà brisé des crânes sous son poing, se repose sans douceur sur la tignasse du jeune pour la lui décoiffer. Ce geste d’affection, ce n’est qu’à ses propres enfants qu’il parvient à l’offrir… Il s’est vraiment attaché à lui. Qu’a-t-il fait pour lui plaire ? Peut-être qu’il s’est contenté de le regarder. Parfois, le cœur de son frère rompt face à l’innocence, la vulnérabilité, la douceur d’une âme égarée.
Aimable se sent plus cruel que lui et ses yeux se rabaissent, les sourcils légèrement froncés, les paupières lourdes de culpabilité. Cette haine au fond de lui, il ne parvient pas à l’identifier, il n’est pas toujours capable de s’en dissocier. L’Ouroboros et lui se battent, les émotions qui giclent sont souillées de leurs pensées, éclaboussures ensanglantées. Jusqu’à ce que le plus blessé finisse par s’agenouiller. Et en présence d’une créature, les assauts de la Voix ne sont que plus violents. Chaque seconde s’accompagne d’une morsure, d’un cri, d’un grondement. Son âme s’use, elle s’écorche, et combien même se voudrait-il neutre envers l’enfant, il est tant poussé à bout qu’il en devient irritable. Il préfère le repousser. L’écarter. Se faire craindre ou détester. Si cela peut un tant soit peu le protéger.
_ Où… Où est ce que mon frère t’a trouvé ?
Aimable l’a finalement demandé. Il n’interroge pas son frère ; il sait qu’Ulric ne répondra pas. L’homme est l’incarnation même du silence et les rares fois où il prend la parole, ses mots valent leur pesant d’or.
Malgré toutes ses promesses, son envie viscéral de le rejeter, Aimable n’en est pas capable. Il s’intéresse à lui et cherche même à e̵̻͇͎̝̥͙͖͖͚͚̞̤͈͛́̏̐͑́̈̉̇̀̂̚͝ ̶̡̩͔̟̮͇̭̙̮͙̖̞̞̆̅̆̌́̀̇̃̅͜͠͝c̴̨̢̛̯̳͕̘͙̱̙̼̾̃͂̄̾̓̀̎̈́̂̄͠ö̷̧̞͓̲̻̗͈̘̱̻͖́̓̈̈́̑̄̇̂̎͜͝ͅm̸̨̛̙̣̦̬̖̜̎̄̋̉͂͆͑̑̈̆̊͝p̸̙͑̍̊̊͑͌̓͌̔͊͒̾͑͠ļ̸͉͔͚̺̎̈́̏̓̀͑̆͋̔̾̀̽̍̉͝i̷̖͈̞̭̤̻̝̥̦̪͖͕̓q̶̧̯͇̜̐̍u̵̢̮̰̼̫̣͇̬̩͓͝ę̷͉̖͐̏͗̃̑̓̋͆́̃͆͑̍r̸̮̗͓̫̝͈̲͕̙̪̬̣̽͊͆ͅ ̷̣͕͓̼̔̀͒̄͠͝͠ͅl̷̪͓͕̦̣͕͙̩͚͔͕̱̞̣͊͂͆ą̴̫̩̩͎̹͉͕́͊̎͐͆̉̿̈́̾́͝ ̵̧̡͇̘̭̳͈̘͇̫͖̠̈́̽̃̅͛̓̌̊̍̈͐c̶̡̬̻͎̹͖̈́̒͂͊͗͜ḩ̶̨͔̝͉̟͔̬̜̰̈́͜͜ͅo̸̻͖͇̍̃̍́͘ͅs̴͚̲͙̦̫͈͉͍̥̙̱͎͒͜e̶̲̪̭͐͋̿̆̃̅̚.̷̨̖̮̲̝̲̙̞͖͍̻͔̿͜ à converser
Cet enfant n’est pas responsable du mal qui coule dans ses veines. Il n’est pas responsable de cette malédiction qu’il devra endurer. Il
ị̵̡̛̪̫͋̾̾̌̌̏̆̚͝l̸̡̺͙̋͂͂̋̋͂̋̅̇̂͝͝͝ ̶͔̾̓̐̑̔̉͌e̶̝̞͍̺̅̿̍̈́̒͝s̵̩̩̘̰͕̫̮̪̳̗̹̟̪̿͛̓͊̏̊͆̿̚̕͠ṯ̷̢͙̜͚̦͉̐̿̄͊ ̸̠̲̞̭̪͍̺̋͛̑̀̃̀̔̊̔̽̒͘͘͠͝r̶͓̱̝͚̖̻̩͔͊͑̅̉͑̈͠é̸̡̛͙̫̗̩̮̦͉̤͚̣̣̦̥̃̾̉͂̉͐͠ṣ̷̡̪̮̦̠͔̗͚̙̻͉̂̾̒́̊̂̔̐͛̚͜͜ṕ̸̢̱͇͍̮͖̒̀͛́̔̏̓̓̌̆̀̾͘ő̵̳̺̎̓̊̑̇n̷̡̡͚̙̠̼̝͍̏̎̋̂̈́̍͒͘͠s̶̠̮͊̚a̸̞͓̠͙̟̜̓̃b̸̢͈̩̀͌́̈́̌̉͂l̷̢͓̟̣̼͇̳̤̥̠̲̈̓͗͆̎́̌͗͗͋̔͑͝͝ͅe̷͙͚̎̈̇͌̀̆̾̔̍̈́̌̊́ ̷̡̡͎̻̝̰̭̌͑̅̀͂̾̀͋͌̇͋̈́͘͜͝ì̸̢̢̡͍̻̜͇̣̮̮̫͆͝ļ̴͚͉̹̱͖͍̙̈́̀͜͝ ̶̢̳̯̘̖̎t̵̛̲͓̜͍̿̓̾̆̃͗̚͘u̷͉̓̈́̀̈̊ȩ̵̜͚̱͈̯̪̺͖̤͉̼̩̗́̈́̓̑͛̒̈́̀͗̈́̈́̉̕͝͝r̸̦͇͈̙͍̤̗̥͈̤̐̀̑͊͋̀̀͐̆̊͒̚͜a̶̧͕̬̰̱͓̘͖̓͒͝
Les yeux du jeune homme rejoignent les siens. Son incompréhension… Est si vive qu’elle le poignarde. Le coup est suffisant pour qu’il se sente reculer, ses yeux, d’ailleurs, se détournent de ses prunelles alors qu’un poids repose sur ses épaules. Lui n’a pas de faucon à son bras. Lui ne peut pas se débarrasser d’un mouvement de ce qui pèse sur son âme. Non… Non, l’Ouroboros est toujours là, il perçoit toujours son souffle à son oreille, ses griffes acérées autour de son corps, sa mâchoire qui le dévore de l’intérieur. Parfois, elle remonte et c’est sur son cœur qu’elle appuie ses crocs. D’ailleurs, elle ronge ses rênes, ses côtes et cette souffrance s’ajoute à la peine. Commet-il une erreur, à propos de ce garçon ?
N̶̬̳̥͓̥͍̳͑̓ò̸̞̾̄͂̀͑̌̔̌̉̈́̀͌́͝O̶̙̺̬̪̪͖̜͈̳̣̠͓͛̊̈̋͛̃̊̏̀̐̈́̓͗͆̆ơ̸̬̪̝̣͈̬͖̰̓͐̈͆͌̅͂̉̔͝ͅn̸͇͍͑̍̅́͆.̵̡̭͖͍̜̝̃̃͂̆̓̓̀͝ ̶̢̢̘̣̰͉͖̝̮̮̖̳͚̹̈́̀̊̈́̈͊̋͋̆̆͝Į̴̣̹̬͉̲̟̫̩̭͕̮̣͇̒̈̐̀͠l̸̢̘͓͎̫̬̱̿̈́̆̿̃͌̃̇̈̊̓͆͝͝ ̶͙̻̹̖̠̣̖̞̯̘̼̈́̌̇̿͋̊̍͂͂͐͂̚͠ͅe̶̢̢̧̦̞͍̹̲̲̥̊̎̉͊̔̌̌̓̄̋̊͋̌̽ͅs̴̛̺̯̩̤̭̼t̶̜̋̇̿͗̀͊̈́̋̈́̏͆͛͂͐͜͠ ̵̡̥̙̝͈͒̿̂̐͌̏͆͐̀̿̌̈́̉͠L̷̡̠̭̝͎̝͎͎̙̖͚̔̈́̈́͒̓͐̂͛̀͆̎̾̊̂͜o̴̟̙̩̹̽̚͜͝u̷̘̤̝̰͉̜͌͛̑͐̀́̅̚͜ͅÙ̶̧̢̳͈̜͔̺͉͚̑͊͌͘͝u̷̩͊͗p̸̱͙̼̭͇̹͍̰̱͙͂͆̓͠
Lorsque l’oiseau tourne en cercle, Ulric adresse un coup de talon à sa monture, pour la convaincre d’avancer. Aimable lui engage le pas, mais ses yeux se tournent finalement vers le jeune homme. Ce sont ses lèvres qu’il préfère fixer. Et pour autant, c’est des crocs qu’il a la sensation de voir… Ses paupières se plissent, l’Ouroboros accentue la pression sur son esprit, la migraine s’éveille. L’air froid soulage quelque peu ses tempes brûlantes alors qu’il masse sa nuque d’un geste las, les yeux se ferment et se détournent, c’est une danse qu’il n’a cesse de mener. Qui le fatigue, l’épuise et durant laquelle il ne cesse de trébucher.
Ulric, cependant, ne semble avoir aucune hésitation. Lorsque le faucon se rapproche de sa proie, l’homme esquisse un sourire impatient : comme un enfant, il attend que l’oiseau fonde. Chasseur dans l’âme, il ressent l’excitation de l’animal, l’ivresse d’une poursuite, et Aimable, oh lui attend la mise à mort. Sous leurs écorces farouches, se terrent deux bêtes drapées d’honneur… Et d’un cœur. Car l’énorme main d’Ulric, celle qui a déjà brisé des crânes sous son poing, se repose sans douceur sur la tignasse du jeune pour la lui décoiffer. Ce geste d’affection, ce n’est qu’à ses propres enfants qu’il parvient à l’offrir… Il s’est vraiment attaché à lui. Qu’a-t-il fait pour lui plaire ? Peut-être qu’il s’est contenté de le regarder. Parfois, le cœur de son frère rompt face à l’innocence, la vulnérabilité, la douceur d’une âme égarée.
Aimable se sent plus cruel que lui et ses yeux se rabaissent, les sourcils légèrement froncés, les paupières lourdes de culpabilité. Cette haine au fond de lui, il ne parvient pas à l’identifier, il n’est pas toujours capable de s’en dissocier. L’Ouroboros et lui se battent, les émotions qui giclent sont souillées de leurs pensées, éclaboussures ensanglantées. Jusqu’à ce que le plus blessé finisse par s’agenouiller. Et en présence d’une créature, les assauts de la Voix ne sont que plus violents. Chaque seconde s’accompagne d’une morsure, d’un cri, d’un grondement. Son âme s’use, elle s’écorche, et combien même se voudrait-il neutre envers l’enfant, il est tant poussé à bout qu’il en devient irritable. Il préfère le repousser. L’écarter. Se faire craindre ou détester. Si cela peut un tant soit peu le protéger.
_ Où… Où est ce que mon frère t’a trouvé ?
Aimable l’a finalement demandé. Il n’interroge pas son frère ; il sait qu’Ulric ne répondra pas. L’homme est l’incarnation même du silence et les rares fois où il prend la parole, ses mots valent leur pesant d’or.
Malgré toutes ses promesses, son envie viscéral de le rejeter, Aimable n’en est pas capable. Il s’intéresse à lui et cherche même à e̵̻͇͎̝̥͙͖͖͚͚̞̤͈͛́̏̐͑́̈̉̇̀̂̚͝ ̶̡̩͔̟̮͇̭̙̮͙̖̞̞̆̅̆̌́̀̇̃̅͜͠͝c̴̨̢̛̯̳͕̘͙̱̙̼̾̃͂̄̾̓̀̎̈́̂̄͠ö̷̧̞͓̲̻̗͈̘̱̻͖́̓̈̈́̑̄̇̂̎͜͝ͅm̸̨̛̙̣̦̬̖̜̎̄̋̉͂͆͑̑̈̆̊͝p̸̙͑̍̊̊͑͌̓͌̔͊͒̾͑͠ļ̸͉͔͚̺̎̈́̏̓̀͑̆͋̔̾̀̽̍̉͝i̷̖͈̞̭̤̻̝̥̦̪͖͕̓q̶̧̯͇̜̐̍u̵̢̮̰̼̫̣͇̬̩͓͝ę̷͉̖͐̏͗̃̑̓̋͆́̃͆͑̍r̸̮̗͓̫̝͈̲͕̙̪̬̣̽͊͆ͅ ̷̣͕͓̼̔̀͒̄͠͝͠ͅl̷̪͓͕̦̣͕͙̩͚͔͕̱̞̣͊͂͆ą̴̫̩̩͎̹͉͕́͊̎͐͆̉̿̈́̾́͝ ̵̧̡͇̘̭̳͈̘͇̫͖̠̈́̽̃̅͛̓̌̊̍̈͐c̶̡̬̻͎̹͖̈́̒͂͊͗͜ḩ̶̨͔̝͉̟͔̬̜̰̈́͜͜ͅo̸̻͖͇̍̃̍́͘ͅs̴͚̲͙̦̫͈͉͍̥̙̱͎͒͜e̶̲̪̭͐͋̿̆̃̅̚.̷̨̖̮̲̝̲̙̞͖͍̻͔̿͜ à converser
Cet enfant n’est pas responsable du mal qui coule dans ses veines. Il n’est pas responsable de cette malédiction qu’il devra endurer. Il
ị̵̡̛̪̫͋̾̾̌̌̏̆̚͝l̸̡̺͙̋͂͂̋̋͂̋̅̇̂͝͝͝ ̶͔̾̓̐̑̔̉͌e̶̝̞͍̺̅̿̍̈́̒͝s̵̩̩̘̰͕̫̮̪̳̗̹̟̪̿͛̓͊̏̊͆̿̚̕͠ṯ̷̢͙̜͚̦͉̐̿̄͊ ̸̠̲̞̭̪͍̺̋͛̑̀̃̀̔̊̔̽̒͘͘͠͝r̶͓̱̝͚̖̻̩͔͊͑̅̉͑̈͠é̸̡̛͙̫̗̩̮̦͉̤͚̣̣̦̥̃̾̉͂̉͐͠ṣ̷̡̪̮̦̠͔̗͚̙̻͉̂̾̒́̊̂̔̐͛̚͜͜ṕ̸̢̱͇͍̮͖̒̀͛́̔̏̓̓̌̆̀̾͘ő̵̳̺̎̓̊̑̇n̷̡̡͚̙̠̼̝͍̏̎̋̂̈́̍͒͘͠s̶̠̮͊̚a̸̞͓̠͙̟̜̓̃b̸̢͈̩̀͌́̈́̌̉͂l̷̢͓̟̣̼͇̳̤̥̠̲̈̓͗͆̎́̌͗͗͋̔͑͝͝ͅe̷͙͚̎̈̇͌̀̆̾̔̍̈́̌̊́ ̷̡̡͎̻̝̰̭̌͑̅̀͂̾̀͋͌̇͋̈́͘͜͝ì̸̢̢̡͍̻̜͇̣̮̮̫͆͝ļ̴͚͉̹̱͖͍̙̈́̀͜͝ ̶̢̳̯̘̖̎t̵̛̲͓̜͍̿̓̾̆̃͗̚͘u̷͉̓̈́̀̈̊ȩ̵̜͚̱͈̯̪̺͖̤͉̼̩̗́̈́̓̑͛̒̈́̀͗̈́̈́̉̕͝͝r̸̦͇͈̙͍̤̗̥͈̤̐̀̑͊͋̀̀͐̆̊͒̚͜a̶̧͕̬̰̱͓̘͖̓͒͝
Ven 19 Fév - 0:51
Il l’impressionne. Emilien a beau garder les yeux rivés sur l’oiseau, a beau s’inquiéter de savoir si celui-ci va faire ce pourquoi il est là, son attention est sans cesse détournée de son objectif par l’homme derrière lui. Il a beau tenter de rester concentré sur son travail, il ne cesse de repenser au regard qu’il lui a jeté et il ne comprend toujours pas. Plus il cherche à comprendre et moins il a l’impression d’être face à quelque chose de compréhensible. Il est persuadé qu’il lui manque une donnée ou que l’homme a une information qu’il ne devrait pas avoir. Emilien se reprit au moment où l’oiseau plongea, ses yeux s’écarquillèrent et durant un lapse de temps assez court, il oublia tout ce qui n’était pas le rapace et son action. Les ailes qui fendent l’air, qui se placent de façon à maximiser la vitesse, les serres puissantes qui se tendent en avant et se referme avec une précision surhumaine sur leur proie. D’une certaine manière, l’Infant peut comprendre l’excitation que doit ressentir l’animal en cet instant, lui, ce qu’il ressent c’est de la fierté. Ce sentiment s’accentue lorsqu’il sent la main d’Ulric de Bayard atterrir sur son crâne et il lève les yeux vers lui, un sourire éclaire son visage jusqu’à présent sérieux, détend ses traits et il se contente d’incliner légèrement la tête avant d’aller récupérer l’oiseau. Il lui offre un morceau de viande séchée et le laisse en profiter avant de le remettre sur son avant-bras, lui soufflant quelques mots à mi-voix, comme si celui-ci était en mesure de comprendre son langage humain.
Lorsqu’il regarde à nouveau autour de lui, c’est pour voir le plus vieux des deux hommes récupérer la proie du rapace. La prise de parole d’Aimable, à son attention, le prend par surprise et, durant un instant il se contente de le fixer, les yeux légèrement arrondis, avant de se reprendre et de hausser les épaules.
– Désolé. Je cherchais du travail et votre frère a accepté de me donner ma chance. Il hésite un instant avant d’ajouter, auprès des oiseaux.
Emilien n’est pas vraiment sûr, en réalité, de répondre à la question qui lui a été posée. Il baisse légèrement la tête, s’enfermant un instant dans la contemplation de l’oiseau qui est à présent posé sagement sur son bras. Son poids a un côté rassurant qu’Emilien n’arrive pas à s’expliquer.
– Je ne sais pas si on peut vraiment dire qu’il m’a trouvé… je ne suis pas un animal errant.
Du bout du doigt, il effleure une aile du rapace, avant de finalement relever la tête vers l’homme, posant son regard dans le sien en clignant légèrement des yeux alors qu’il hésite un instant.
– Si je peux me permettre Monseigneur, j’ai l’impression que ma présence vous dérange… J’ai fait ou dit quelque chose qui vous a déplu ? Si c’est le cas, je m’en excuse.
Pourtant, il n’en a pas l’impression, en réalité, Emilien est quasiment sûr de n’avoir rien à se reprocher en cet instant et il détourne à nouveau les yeux du chevalier pour s’occuper de l’oiseau à son bras qui semble s’impatienter et bat des ailes, comme pour prendre son envol malgré le masque qui lui recouvre les yeux. Il lui offre un nouveau morceau de viande et lui laisse le temps de le manger, avant de demander la permission de le lâcher une nouvelle fois.
Lorsqu’il regarde à nouveau autour de lui, c’est pour voir le plus vieux des deux hommes récupérer la proie du rapace. La prise de parole d’Aimable, à son attention, le prend par surprise et, durant un instant il se contente de le fixer, les yeux légèrement arrondis, avant de se reprendre et de hausser les épaules.
– Désolé. Je cherchais du travail et votre frère a accepté de me donner ma chance. Il hésite un instant avant d’ajouter, auprès des oiseaux.
Emilien n’est pas vraiment sûr, en réalité, de répondre à la question qui lui a été posée. Il baisse légèrement la tête, s’enfermant un instant dans la contemplation de l’oiseau qui est à présent posé sagement sur son bras. Son poids a un côté rassurant qu’Emilien n’arrive pas à s’expliquer.
– Je ne sais pas si on peut vraiment dire qu’il m’a trouvé… je ne suis pas un animal errant.
Du bout du doigt, il effleure une aile du rapace, avant de finalement relever la tête vers l’homme, posant son regard dans le sien en clignant légèrement des yeux alors qu’il hésite un instant.
– Si je peux me permettre Monseigneur, j’ai l’impression que ma présence vous dérange… J’ai fait ou dit quelque chose qui vous a déplu ? Si c’est le cas, je m’en excuse.
Pourtant, il n’en a pas l’impression, en réalité, Emilien est quasiment sûr de n’avoir rien à se reprocher en cet instant et il détourne à nouveau les yeux du chevalier pour s’occuper de l’oiseau à son bras qui semble s’impatienter et bat des ailes, comme pour prendre son envol malgré le masque qui lui recouvre les yeux. Il lui offre un nouveau morceau de viande et lui laisse le temps de le manger, avant de demander la permission de le lâcher une nouvelle fois.
Dim 21 Fév - 11:28
La chute de l’oiseau est grisante.
Ses ailes plaquées contre son corps, les serres tendues vers l’avant.
Notre bond est puissant. Notre élan est la charge d’un taureau. Nos mains, nos longues mains, se referment sur le corps qui se débat, mais nos mâchoires se referment sur sa nuque, claquement sec qui résonne jusqu’à dans notre tête, les mâchoires déchiquètent la peau, la chair, carnage, ivresse, nous voulons ses viscères
La vision s’impose à ses yeux et quelques battements de paupières affolés sont nécessaires pour s’en débarrasser. Il a la sensation de manquer d’air, les fourmis au bout de ses doigts l’invite à resserrer son emprise sur ses rênes. Son corps se tend, les muscles se contractent, il revient à l’instant présent lorsqu’il réalise la morsure du vent froid sur ses lèvres gercées. Le souffle rapide, malgré le cœur lent, la buée s’échappe. Son âme s’écharpe. Il serre les lèvres, mais il sait qu’il est trop tard. Ce qu’il vient de voir est un coup de poignard et malgré ses muscles contractés, son corps s’est mis à trembler.
Il ignore volontairement la viande que l’infant donne à son faucon. Il ne prête aucune attention au cadavre qu’Ulric est allé récupérer. Pourtant, il ne manque pas le sourire qui éclaire le regard de l’aîné ; son visage reste figé, taillé dans la pierre, mais l’éclat dans ses yeux trahit sa fierté. Ulric est un homme sincère, appréciant les actes plutôt que les mots et il faut dire que le jeune fauconnier est plutôt doué. Ulric apprécie probablement le spectacle du faucon qui vole au dessus d’eux, leur offrant la vision d’une liberté que tous Hommes doivent lui envier.
Voler. Voler dans le ciel sans être alourdi par des pieds, par le poids des péchés. Pouvoir s’élever vers Dieu et le contempler, être porté par son souffle lorsque le vent s’engouffre dans les plumes, être accompagné de son regard lorsque l’on plane. L’existence des hommes est si troublée. Condamnés à ramper, à marcher sur une terre souillée de poussières, de sang et d’autres choses, les chairs alourdies par la souffrance, les années ou les péchés, l’âme prisonnière de cette prison dont seule la Mort pourra la libérer.
L’on pourrait dire que le faucon est, lui aussi, attaché à son maître mais le lien qui les unit est un lien d’affection, de confiance. Un lien bien différent de celui qui lie leur âme à leur écorce physique. Ulric, Aimable, n’éprouvent aucune tendresse pour le corps dont ils sont prisonniers. Ulric encourage Emilien à libérer son oiseau, une fois de plus ; et le frère aîné suit alors la course de l’oiseau, sur le dos de sa monture. Ses yeux gris dévoués à l’envol du faucon, comme s’il eut été un ange pouvant le soulager ou le guider. A qui confie-t-il ses prières ? Dans le secret, et pourtant, aujourd’hui, Aimable a presque la sensation de le voir bouger les lèvres.
La remarque d’Emilien attire l’attention d’Aimable. Pas un animal errant ? Aimable a quelques réserves, à ce sujet. Il ne comprend pas le mal que l’enfant semble avoir vu dans ses mots, et hésite à s’excuser. Le Chevalier a sa fierté. Jusqu’à entendre l’enfant s’excuser. Ces mots, si prudemment glissés, pèsent sur ses épaules et face à ce fardeau, Aimable incline la nuque. C’est un poids qu’il serre les dents pour porter, avant de redresser les yeux vers le dos de son frère. Ulric s’est assez éloigné.
Ț̶̨̟͛̈̃́o̷̙̲̣͍̰̻̮̲̎̉̓̐̒͂̌͝ń̶̛̹͕̬͑͐̀̐̈̃̌̍̿̎̄͜͜ ̴̺̫̙̠̞͔̞͍̠͒́͛̉̍̎̇͐̾̌̇̽͒͗ͅḘ̷̡̘̭̘̏̿͐ͅȩ̴͙͇̟̞̰͋̚ͅx̵̗̥̜̦͔͓̝͉͕̝͚̘̮͑̍̓̓͆͂̋̄͝i̷̘͈̱̦̮͙͖͗̄̀̎̑̊͋̚͝ͅs̵̨̧͔̽̒̆̀͊̂͂̃̉͋́͒̚͝t̴͖̥̬̱̱̙̟̖̋͆̔̂̔̍͒́͜E̶̯̾͆̀̇͊̉̽̆̚ṋ̵̝̬͓͔̲͔͍̾́͒̆̒͛̍͘͝ĉ̵̨̭͓͉̯͇̫̝͓͍̖̭̈̇͂̓̐̎̇̾͜e̸̗̳̭̣͕̟̩̥̅ͅ ̶̧̩̤̠̟̹̩̏͋̎͂̉͜͜ń̸̥̙͉̔͂̿̉̉̐̆͐́̏́͆̚͝ö̸̢̢͓̝̱͓̭̹͕̻̗̝͈͉̜̃ŭ̸̧͎̘̹̻̳͕͗̏̒s̵̰̻̭͎̖̩̪̲̺̦͚̀̋̀̑̂̀̍͆͗̈́̚͠͝ͅ ̴̧̠͕̳̦̰̊͐̆̽͜d̷̞͕̫̯̒̋̃̌̎̇͑́͘͠͠ͅé̴̲̖̅͆̈́̔̏R̵̝̺͎͕̆̏̈́̾̎͝͝R̴̡͇͉͙͎̞̪͍͓̥͓̚r̵̛͓͇͆͆͊̄̾a̶͈̝̞̞̺̰̍͆ṇ̸̾̐̊̈͑̈́̔̓̄͐͛̕g̴̙̖̖̩̝̱̝̞̦̲͚̳̒e̴̠̣̝̞̫̰̜̤̦̬͓̝̎̍̾͐̄̒̓͌͋̏͘̚͝͝ͅ ̴̧̱̘̻̟̺̩̘̘̈́͜͝ͅ
La haine, le mépris de la Voix, roulent dans ses veines, c’est un grondement si rauque que ses lèvres scellées ne suffisent pas à le contenir. Le son est inhumain, c’est guttural, ça gronde sous sa cage thoracique, ce n’est pas son souffle qui l’explique car Aimable respire. Et le son qu’il produit n’est en rien influé par sa respiration. Aimable toussote, au creux de son poing, comme si une quinte de toux pouvait couvrir ce qu’il vient de se produire. Ulric, plus loin, s’est immobilisé. Aimable, lui, a les yeux creusées, les épaules soudainement voûtées, son regard s’éteint et se dépose tristement sur la lèvre inférieure de l’enfant à ses côtés.
_ Tu n’as fait aucun mal. Ne t’excuse pas. Les De Bayard sont des âmes farouches et je pense… je pense que comme mon frère, il me faut du temps pour accepter de nouvelles présences. Ton faucon est très bien dressé, est-ce toi qui l’as éduqué ? Je ne pensais pas que mon frère en avait en son acquisition, vous devez l’avoir trouvé récemment ?
Il sait que son frère ne va pas répondre. Et c’est peut-être sa manière de pousser Emilien et Aimable à se rapprocher. Depuis qu’Emilien a rejoins la famille d’Ulric, il a probablement vu que les De Bayard sont une famille très soudée. Si soudée que les étrangers peinent à y trouver leur place ou même à se faire accepter. Comme avec un oiseau, c’est du temps, c’est de la confiance et beaucoup de patience. Ce sont des encouragements, des progrès discrets mais réels, ce sont des gestes, de la douceur, des mots qui apaisent.
Pourquoi un homme aussi froid, aussi distant qu’Ulric, a ouvert ses portes au jeune Emilien ? Le jeune homme a su réussir l’épreuve la plus ardue, Ulric est réputé pour être aussi affectueux qu’un rocher escarpé. Pour autant, sa vision a su éveiller un peu de tendresse sous cette carcasse si rude.
Aimable est si différent de son frère. Réputé pour sa bienveillance et sa compassion, les masques sous lesquels se terrent un cœur avide de sang et de chair.
Si Ulric rêve d’être un oiseau pour sa liberté, Aimable, lui, ne voit que les serres souillées de sang et la chair dont l’animal se nourrit.
Et si Ulric voit l’innocence, la vulnérabilité sous les traits de ce jeune, Aimable, lui, ne voit que la mâchoire d’un loup prêt à le dévorer.
Ses ailes plaquées contre son corps, les serres tendues vers l’avant.
Notre bond est puissant. Notre élan est la charge d’un taureau. Nos mains, nos longues mains, se referment sur le corps qui se débat, mais nos mâchoires se referment sur sa nuque, claquement sec qui résonne jusqu’à dans notre tête, les mâchoires déchiquètent la peau, la chair, carnage, ivresse, nous voulons ses viscères
La vision s’impose à ses yeux et quelques battements de paupières affolés sont nécessaires pour s’en débarrasser. Il a la sensation de manquer d’air, les fourmis au bout de ses doigts l’invite à resserrer son emprise sur ses rênes. Son corps se tend, les muscles se contractent, il revient à l’instant présent lorsqu’il réalise la morsure du vent froid sur ses lèvres gercées. Le souffle rapide, malgré le cœur lent, la buée s’échappe. Son âme s’écharpe. Il serre les lèvres, mais il sait qu’il est trop tard. Ce qu’il vient de voir est un coup de poignard et malgré ses muscles contractés, son corps s’est mis à trembler.
Il ignore volontairement la viande que l’infant donne à son faucon. Il ne prête aucune attention au cadavre qu’Ulric est allé récupérer. Pourtant, il ne manque pas le sourire qui éclaire le regard de l’aîné ; son visage reste figé, taillé dans la pierre, mais l’éclat dans ses yeux trahit sa fierté. Ulric est un homme sincère, appréciant les actes plutôt que les mots et il faut dire que le jeune fauconnier est plutôt doué. Ulric apprécie probablement le spectacle du faucon qui vole au dessus d’eux, leur offrant la vision d’une liberté que tous Hommes doivent lui envier.
Voler. Voler dans le ciel sans être alourdi par des pieds, par le poids des péchés. Pouvoir s’élever vers Dieu et le contempler, être porté par son souffle lorsque le vent s’engouffre dans les plumes, être accompagné de son regard lorsque l’on plane. L’existence des hommes est si troublée. Condamnés à ramper, à marcher sur une terre souillée de poussières, de sang et d’autres choses, les chairs alourdies par la souffrance, les années ou les péchés, l’âme prisonnière de cette prison dont seule la Mort pourra la libérer.
L’on pourrait dire que le faucon est, lui aussi, attaché à son maître mais le lien qui les unit est un lien d’affection, de confiance. Un lien bien différent de celui qui lie leur âme à leur écorce physique. Ulric, Aimable, n’éprouvent aucune tendresse pour le corps dont ils sont prisonniers. Ulric encourage Emilien à libérer son oiseau, une fois de plus ; et le frère aîné suit alors la course de l’oiseau, sur le dos de sa monture. Ses yeux gris dévoués à l’envol du faucon, comme s’il eut été un ange pouvant le soulager ou le guider. A qui confie-t-il ses prières ? Dans le secret, et pourtant, aujourd’hui, Aimable a presque la sensation de le voir bouger les lèvres.
La remarque d’Emilien attire l’attention d’Aimable. Pas un animal errant ? Aimable a quelques réserves, à ce sujet. Il ne comprend pas le mal que l’enfant semble avoir vu dans ses mots, et hésite à s’excuser. Le Chevalier a sa fierté. Jusqu’à entendre l’enfant s’excuser. Ces mots, si prudemment glissés, pèsent sur ses épaules et face à ce fardeau, Aimable incline la nuque. C’est un poids qu’il serre les dents pour porter, avant de redresser les yeux vers le dos de son frère. Ulric s’est assez éloigné.
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La haine, le mépris de la Voix, roulent dans ses veines, c’est un grondement si rauque que ses lèvres scellées ne suffisent pas à le contenir. Le son est inhumain, c’est guttural, ça gronde sous sa cage thoracique, ce n’est pas son souffle qui l’explique car Aimable respire. Et le son qu’il produit n’est en rien influé par sa respiration. Aimable toussote, au creux de son poing, comme si une quinte de toux pouvait couvrir ce qu’il vient de se produire. Ulric, plus loin, s’est immobilisé. Aimable, lui, a les yeux creusées, les épaules soudainement voûtées, son regard s’éteint et se dépose tristement sur la lèvre inférieure de l’enfant à ses côtés.
_ Tu n’as fait aucun mal. Ne t’excuse pas. Les De Bayard sont des âmes farouches et je pense… je pense que comme mon frère, il me faut du temps pour accepter de nouvelles présences. Ton faucon est très bien dressé, est-ce toi qui l’as éduqué ? Je ne pensais pas que mon frère en avait en son acquisition, vous devez l’avoir trouvé récemment ?
Il sait que son frère ne va pas répondre. Et c’est peut-être sa manière de pousser Emilien et Aimable à se rapprocher. Depuis qu’Emilien a rejoins la famille d’Ulric, il a probablement vu que les De Bayard sont une famille très soudée. Si soudée que les étrangers peinent à y trouver leur place ou même à se faire accepter. Comme avec un oiseau, c’est du temps, c’est de la confiance et beaucoup de patience. Ce sont des encouragements, des progrès discrets mais réels, ce sont des gestes, de la douceur, des mots qui apaisent.
Pourquoi un homme aussi froid, aussi distant qu’Ulric, a ouvert ses portes au jeune Emilien ? Le jeune homme a su réussir l’épreuve la plus ardue, Ulric est réputé pour être aussi affectueux qu’un rocher escarpé. Pour autant, sa vision a su éveiller un peu de tendresse sous cette carcasse si rude.
Aimable est si différent de son frère. Réputé pour sa bienveillance et sa compassion, les masques sous lesquels se terrent un cœur avide de sang et de chair.
Si Ulric rêve d’être un oiseau pour sa liberté, Aimable, lui, ne voit que les serres souillées de sang et la chair dont l’animal se nourrit.
Et si Ulric voit l’innocence, la vulnérabilité sous les traits de ce jeune, Aimable, lui, ne voit que la mâchoire d’un loup prêt à le dévorer.
Dim 28 Fév - 20:17
Réactif, Emilien n’attend pas pour relâcher l’oiseau lorsque l’autorisation lui est donnée. Son regard sombre se fixe à présent sur lui, ne le quitte pas et l’envie un peu. Il imagine sans mal la sensation de liberté qu’il doit ressentir lorsqu’il est ainsi en vol, avec pour terrain de jeu l’immensité du ciel. Emilien s’est demandé à plusieurs reprises pourquoi celui-ci revenait lorsqu’il le lui demandait, il l’a aussi demandé à l’homme qui lui a enseigné ce qu’il sait. La réponse a toujours été la même, invariablement : « Être libre c’est bien, mais sans endroit où revenir lorsque l’on en a le besoin, ça ne sert à rien. Les oiseaux et les humains sont pareils à ce niveau. Tant qu’ils sauront qu’ils sont chez eux avec toi, les oiseaux dont tu as la charge reviendront toujours. ». Sur le moment, il n’avait pas compris ce que ça signifiait réellement et même maintenant il a encore un peu de mal, même s’il se rend compte qu’avoir un vrai chez-lui, comme lorsqu’il était encore avec sa mère, lui manque par moment. Durant un bref lapse de temps, il arrive à en oublier la présence de l’homme à ses côtés et le sentiment de malaise qu’il fait naitre en lui, tout captivé qu’il est par le vol du rapace qui cherche une nouvelle proie. Celui-ci profite de sa liberté, pour le temps qu’elle durera et, inconsciemment, Emilien se retrouve en lui. Pas au niveau de la liberté, lui est totalement libre d’aller où il veut quand il le souhaite, mais malgré tout il reste dépendant de quelque chose qu’il ne maitrise pas et qu’il ne maitrisera jamais.
Il est ramené à l’instant présent par le son étrange qui s’échappe de la gorge de l’homme à ses côtés, il quitte alors le rapace des yeux pour fixer à nouveau ce dernier. Un bref instant il a l’impression d’être la proie face au prédateur, cette sensation amplifie son malaise, il peut sentir les poils se hérisser sur sa nuque. La sensation est fugace mais bien présente. Emilien tente alors de se reprendre, se convaincre que tout ça n’est que le fruit de son imagination. Le changement d’attitude d’Aimable lui fait baisser les yeux un instant, ajoutant à son incompréhension, jusqu’à ce que celui-ci prenne la parole.
– Je vois. Durant un instant une expression un peu naïve passe sur son visage, avant de disparaitre au moment où il reprend la parole. Alors j’espère que je réussirai à me faire accepter de vous.
Le regard du jeune homme se reposa sur l’oiseau, tout ce qu’on pouvait lire sur son visage à présent c’était de la fierté. Fierté face au compliment, fierté car ce dernier venait de l’homme qui semblait tant se défier de lui aussi. Il acquiesce avec légèreté, sans quitter le volatile des yeux alors que celui-ci continue ses cercles à la recherche d’une proie quelconque. Même de là où il est Emilien peut voir les pointes des rémiges vibrer dans l’air, le moindre muscle se tendre, la queue qui rectifie la trajectoire alors que l’attention du rapace se fixe enfin sur quelque chose.
– Il ne m’appartient pas, il est à votre frère. Finalement, il repose son regard dans celui d’Aimable. Il était blessé lorsqu’il a été trouvé, je l’ai soigné, j’ai gagné sa confiance. C’est la première fois qu’il sort en véritable chasse.
Un sourire fend cette fois le visage d’Emilien, alors qu’il ne détourne pas le regard.
– Je peux vous poser une question moi aussi ? J’ai entendu les domestiques dire que vous êtes un chevalier, c’est vrai ? Ca veut dire que vous vous battez dans des tournois ?
La curiosité, mais aussi l’innocence et le manque de culture d’Emilien semblaient jaillir sans retenue, après tout, n’était-il pas en train de discuter avec quelqu’un qu’il n’aurait peut-être jamais du approcher vu l’endroit d’où il venait ?
Il est ramené à l’instant présent par le son étrange qui s’échappe de la gorge de l’homme à ses côtés, il quitte alors le rapace des yeux pour fixer à nouveau ce dernier. Un bref instant il a l’impression d’être la proie face au prédateur, cette sensation amplifie son malaise, il peut sentir les poils se hérisser sur sa nuque. La sensation est fugace mais bien présente. Emilien tente alors de se reprendre, se convaincre que tout ça n’est que le fruit de son imagination. Le changement d’attitude d’Aimable lui fait baisser les yeux un instant, ajoutant à son incompréhension, jusqu’à ce que celui-ci prenne la parole.
– Je vois. Durant un instant une expression un peu naïve passe sur son visage, avant de disparaitre au moment où il reprend la parole. Alors j’espère que je réussirai à me faire accepter de vous.
Le regard du jeune homme se reposa sur l’oiseau, tout ce qu’on pouvait lire sur son visage à présent c’était de la fierté. Fierté face au compliment, fierté car ce dernier venait de l’homme qui semblait tant se défier de lui aussi. Il acquiesce avec légèreté, sans quitter le volatile des yeux alors que celui-ci continue ses cercles à la recherche d’une proie quelconque. Même de là où il est Emilien peut voir les pointes des rémiges vibrer dans l’air, le moindre muscle se tendre, la queue qui rectifie la trajectoire alors que l’attention du rapace se fixe enfin sur quelque chose.
– Il ne m’appartient pas, il est à votre frère. Finalement, il repose son regard dans celui d’Aimable. Il était blessé lorsqu’il a été trouvé, je l’ai soigné, j’ai gagné sa confiance. C’est la première fois qu’il sort en véritable chasse.
Un sourire fend cette fois le visage d’Emilien, alors qu’il ne détourne pas le regard.
– Je peux vous poser une question moi aussi ? J’ai entendu les domestiques dire que vous êtes un chevalier, c’est vrai ? Ca veut dire que vous vous battez dans des tournois ?
La curiosité, mais aussi l’innocence et le manque de culture d’Emilien semblaient jaillir sans retenue, après tout, n’était-il pas en train de discuter avec quelqu’un qu’il n’aurait peut-être jamais du approcher vu l’endroit d’où il venait ?
Ven 5 Mar - 15:04
La question naïve du jeune homme le surprend.
La Voix se tait, ou l’attention d’Aimable est alors saisie par la curiosité innocente du jeune homme. Dans cette interrogation, il y devine une étrange admiration, celle d’un enfant face aux exploits d’un Chevalier. Il en a tant vu, des bambins aux yeux écarquillés ou ne serait-ce que ses fils qui sourient avec fierté… Pour autant, il ne s’y habitue pas ; face à ces regards, toute l’humilité écrase ses épaules et contraint sa tête à s’incliner.
Plus encore face à Emilien.
Mérite-t-il ce regard, ces questions ? L’innocence trahit un manque d’expérience. Il est d’habitude si sombre, ce garçon, son visage est si fermé qu’Aimable a tendance à oublier son âge. Il pourrait être son fils et a peut-être l’âge de son neveu. Son instinct paternel s’éprend de culpabilité. Pris de remords, c’est d’une main ferme qu’il retient le collet de sa méfiance, de cette haine, cette rage viscérale pour le loup qui vit en cet enfant. Il n’est qu’une victime, s’efforce-t-il de se dire. Et étrangement, il parvient péniblement à dissocier l’humain de la bête, assez pour s’adoucir. Ses épaules se relâchent alors que son regard abandonne ses armes, ses yeux observent simplement les lèvres du jeune garçon, jusqu’à se détourner vers son frère et l’oiseau.
_ La première fois, hm ? Tu l’as très bien dressé. Je ne connais rien… En dressage d’oiseaux. Comment t’y es-tu pris pour le discipliner ?
Si le regard d’Emilien cherche le sien, ses yeux ne croisent jamais son regard. Aimable prend garde de ne pas unir ses prunelles à celles de l’enfant. Cela est presque comique de voir le grand homme comme intimidé face à la bouille du jeune homme alors qu’en réalité, c’est pour le protéger qu’il s’efforce de ne pas le regarder. Il sait que l’Ouroboros considérait cet échange comme une provocation. Depuis toutes ces années où ils se sont côtoyés, Aimable ne connaît que trop bien la Voix qui vit dans sa tête.
_ Oui… Je suis Chevalier. Je me charge d’assurer la protection de notre domaine. De ceux qui en ont le besoin. Et de respecter les alliances que ma famille a nouées. Mais je n’ai jamais participé à un tournoi. Les tournois sont interdits… depuis… 1550 je crois ?
_ 1559.
Corrige Ulric, pourtant à une quinzaine de mètres d’eux. Aimable adresse un regard surpris à son aîné, et esquisse finalement un sourire avant de reprendre.
_ En effet… Le Roi de France, Henri II, a participé à un tournoi contre le Comte de Montgomery. Malheureusement, l’issu du tournoi fut dramatique pour le Roi… Il n’a pas survécu aux blessures consécutives à l’affrontement. En réponse, tournois comme joutes ont été interdits sur le territoire français. Cependant, il arrive que certains Chevaliers se proposent des défis voire des duels pour évaluer leurs forces. Me concernant, je ne me suis entraîné que contre mon frère. Et cela équivaut bien à un tournoi.
Les autres… Oh, les autres, ce n’était pas tant de l’entraînement. Et ce n’était pas des Chevaliers. Brigands de grands chemins, il n’était pas rare qu’il en croise lors de ses longs voyages, notamment lorsqu’il montait à Paris. Sans compter les… autres. Les autres choses.
Nous ChaSSOns
Aimable se contente de légèrement soupirer, avant de reprendre.
_ Tes parents étaient-ils fauconniers ?
Dans leurs montagnes, les noms des Nobles se connaissent ; ce sont les mêmes familles qui ont guerroyé ensemble ou ont lutté les unes contre les autres pendant des générations, des siècles mêmes. Les De Bayard, bien qu’ils ne maîtrisent pas le domaine le plus important, font partie des plus redoutés. L’on vante leurs compétences au combat, leur expérience, on les dit faits de sang et d’acier. Les De Bayard sont craints pour leur caractère mais appréciés pour leur loyauté. Pour leur sens du devoir, pour leur sérieux et leur vivacité.
Emilien a-t-il déjà servi une autre famille ? Une erreur a-t-il été commise pour qu’il soit convié à chercher un autre employeur, ou est-il d’une origine roturière, sans noblesse dans les veines ? La fauconnerie est un art que l’on apprécie chez les Nobles et un jeune homme de sa tempe pourrait aisément parvenir à se faire une place dans la haute société. S’il allait à Paris et démontrait son talent, Aimable est sûr qu’il pourrait tout à fait se faire embaucher par une famille plus puissante, d’un rang plus important. Peut-être que ce garçon pourrait… les représenter auprès de la Couronne, il a ouï dire que les chasses au faucon étaient très appréciées…
Et alors, il comprend.
Il comprend pourquoi Ulric a accepté Emilien. Il suffit de voir la maîtrise qu’il a de son animal… Ce serait un autre argument pour défendre la réputation des De Bayard. Malgré leur domaine restreint, ils ne perdent ni de leur puissance ni de leur prestance. Emilien, un jour, représentera peut-être leur famille face aux grands Nobles de Paris.
Songeusement, Aimable ferme à demi les yeux.
_... Je te présente mes excuses. J’accepte ta présence. Je suis… farouche. Comme mon frère l’est. Ton talent est indiscutable et il est vrai qu’un fauconnier de ta tempe peut beaucoup apporter à notre famille. T’es-tu déjà rendu sur Paris ? Combien même ne font-ils plus de tournois, j’ai ouï dire que les fauconniers étaient très appréciés et respectés. L’on apprécie les voir démontrer leurs talents et mettre en spectacle leurs oiseaux. J’en ai même vu avec des hérons ou des perdrix…
La Voix se tait, ou l’attention d’Aimable est alors saisie par la curiosité innocente du jeune homme. Dans cette interrogation, il y devine une étrange admiration, celle d’un enfant face aux exploits d’un Chevalier. Il en a tant vu, des bambins aux yeux écarquillés ou ne serait-ce que ses fils qui sourient avec fierté… Pour autant, il ne s’y habitue pas ; face à ces regards, toute l’humilité écrase ses épaules et contraint sa tête à s’incliner.
Plus encore face à Emilien.
Mérite-t-il ce regard, ces questions ? L’innocence trahit un manque d’expérience. Il est d’habitude si sombre, ce garçon, son visage est si fermé qu’Aimable a tendance à oublier son âge. Il pourrait être son fils et a peut-être l’âge de son neveu. Son instinct paternel s’éprend de culpabilité. Pris de remords, c’est d’une main ferme qu’il retient le collet de sa méfiance, de cette haine, cette rage viscérale pour le loup qui vit en cet enfant. Il n’est qu’une victime, s’efforce-t-il de se dire. Et étrangement, il parvient péniblement à dissocier l’humain de la bête, assez pour s’adoucir. Ses épaules se relâchent alors que son regard abandonne ses armes, ses yeux observent simplement les lèvres du jeune garçon, jusqu’à se détourner vers son frère et l’oiseau.
_ La première fois, hm ? Tu l’as très bien dressé. Je ne connais rien… En dressage d’oiseaux. Comment t’y es-tu pris pour le discipliner ?
Si le regard d’Emilien cherche le sien, ses yeux ne croisent jamais son regard. Aimable prend garde de ne pas unir ses prunelles à celles de l’enfant. Cela est presque comique de voir le grand homme comme intimidé face à la bouille du jeune homme alors qu’en réalité, c’est pour le protéger qu’il s’efforce de ne pas le regarder. Il sait que l’Ouroboros considérait cet échange comme une provocation. Depuis toutes ces années où ils se sont côtoyés, Aimable ne connaît que trop bien la Voix qui vit dans sa tête.
_ Oui… Je suis Chevalier. Je me charge d’assurer la protection de notre domaine. De ceux qui en ont le besoin. Et de respecter les alliances que ma famille a nouées. Mais je n’ai jamais participé à un tournoi. Les tournois sont interdits… depuis… 1550 je crois ?
_ 1559.
Corrige Ulric, pourtant à une quinzaine de mètres d’eux. Aimable adresse un regard surpris à son aîné, et esquisse finalement un sourire avant de reprendre.
_ En effet… Le Roi de France, Henri II, a participé à un tournoi contre le Comte de Montgomery. Malheureusement, l’issu du tournoi fut dramatique pour le Roi… Il n’a pas survécu aux blessures consécutives à l’affrontement. En réponse, tournois comme joutes ont été interdits sur le territoire français. Cependant, il arrive que certains Chevaliers se proposent des défis voire des duels pour évaluer leurs forces. Me concernant, je ne me suis entraîné que contre mon frère. Et cela équivaut bien à un tournoi.
Les autres… Oh, les autres, ce n’était pas tant de l’entraînement. Et ce n’était pas des Chevaliers. Brigands de grands chemins, il n’était pas rare qu’il en croise lors de ses longs voyages, notamment lorsqu’il montait à Paris. Sans compter les… autres. Les autres choses.
Nous ChaSSOns
Aimable se contente de légèrement soupirer, avant de reprendre.
_ Tes parents étaient-ils fauconniers ?
Dans leurs montagnes, les noms des Nobles se connaissent ; ce sont les mêmes familles qui ont guerroyé ensemble ou ont lutté les unes contre les autres pendant des générations, des siècles mêmes. Les De Bayard, bien qu’ils ne maîtrisent pas le domaine le plus important, font partie des plus redoutés. L’on vante leurs compétences au combat, leur expérience, on les dit faits de sang et d’acier. Les De Bayard sont craints pour leur caractère mais appréciés pour leur loyauté. Pour leur sens du devoir, pour leur sérieux et leur vivacité.
Emilien a-t-il déjà servi une autre famille ? Une erreur a-t-il été commise pour qu’il soit convié à chercher un autre employeur, ou est-il d’une origine roturière, sans noblesse dans les veines ? La fauconnerie est un art que l’on apprécie chez les Nobles et un jeune homme de sa tempe pourrait aisément parvenir à se faire une place dans la haute société. S’il allait à Paris et démontrait son talent, Aimable est sûr qu’il pourrait tout à fait se faire embaucher par une famille plus puissante, d’un rang plus important. Peut-être que ce garçon pourrait… les représenter auprès de la Couronne, il a ouï dire que les chasses au faucon étaient très appréciées…
Et alors, il comprend.
Il comprend pourquoi Ulric a accepté Emilien. Il suffit de voir la maîtrise qu’il a de son animal… Ce serait un autre argument pour défendre la réputation des De Bayard. Malgré leur domaine restreint, ils ne perdent ni de leur puissance ni de leur prestance. Emilien, un jour, représentera peut-être leur famille face aux grands Nobles de Paris.
Songeusement, Aimable ferme à demi les yeux.
_... Je te présente mes excuses. J’accepte ta présence. Je suis… farouche. Comme mon frère l’est. Ton talent est indiscutable et il est vrai qu’un fauconnier de ta tempe peut beaucoup apporter à notre famille. T’es-tu déjà rendu sur Paris ? Combien même ne font-ils plus de tournois, j’ai ouï dire que les fauconniers étaient très appréciés et respectés. L’on apprécie les voir démontrer leurs talents et mettre en spectacle leurs oiseaux. J’en ai même vu avec des hérons ou des perdrix…
Sam 13 Mar - 19:00
La première fois oui. Emilien hoche la tête sans réellement y songer en guise de réponse en même temps que les rougeurs sur ses joues semblaient s’installer sans vouloir les quitter. Il est habité par une étrange fierté qu’il n’arrive pas à endiguer et son regard se repose alors sur le vol du rapace. Il s’agit là, pour lui, d’une façon comme une autre de donner le change, de reprendre un minimum le contrôle sur lui-même pour ne pas passer pour un parfait idiot. Puis, finalement, il retourne la tête vers le seigneur à ses côtés, l’observant un instant en silence. Il note au passage que celui-ci ne semble jamais croiser son regard, mais il n’arrive pas à déterminer pourquoi. Il peut sentir la partie loup, ancrée en lui, lui intimer de garder intacte la méfiance qu’il ressentait jusqu’à présent, mais Emilien a du mal. Parce qu’il est fier et heureux qu’on reconnaisse son travail, parce qu’il est en train de parler avec un chevalier et qu’il se sentait un peu comme un enfant face à un héros. Un peu beaucoup.
– Eh bien… il a fait le lien entre moi et la nourriture en fait. C’est moi qui le nourris depuis que nous l’avons récupéré. Je ne saurais pas vraiment expliquer comment ça fonctionne mais en fait, la petite capuche que je lui mets sur la tête lui enlève tout ses repères et comme ça, pendant un temps, j’ai été le seul repère qu’il a eu.
Emilien n’est pas sûr d’être réellement compréhensible. Il se tait un instant, tapotant ses lèvres de son index, avant de tout simplement sourire en direction d’Aimable.
– Je ne sais pas très bien expliquer, mais je pourrai vous montrer si vous voulez ! Enfin, si vous avez le temps.
Le manque de culture d’Emilien lui revient en plein visage lorsque le chevalier répond à sa question et encore plus lorsque le frère de lui celui-ci prend à son tour la parole. Le manque de culture et la naïveté dont il peut parfois, souvent, faire preuve lorsque l’on passe l’espèce de masque qu’il porte pendant qu’il s’occupe de ses oiseaux. Ses lèvres forment un « o » presque parfait, alors qu’il ne laisse échapper le moindre son, un instant, et la gêne s’installe sur son visage, changeant son expression en un instant, avant de se mêler de nouveau à la curiosité.
– Je ne savais pas tout ça. Je suis désolé, ma question a dû vous paraitre totalement stupide. Mais… C’est très intéressant.
Son regard dévie un instant sur les armes que portent les deux hommes, il ne peut que laisser son imagination faire son travail et inventer les combats qu’ils ont pu mener l’un et l’autre lui qui, et il se gardera bien de le mentionner, n’a en réalité jamais posé les doigts sur la garde d’une épée. Il est ramené à l’instant présent par la question qui lui est adressée. Durant un bref moment il fixe Aimable, avant de sourire légèrement en secouant la tête.
– Non pas du tout. Ma mère possède quelques chèvres et vend leur lait… ainsi que des plantes et des racines.
Rien de plus. Une certaine nostalgie s’affiche quelques secondes sur le visage du jeune homme lorsqu’il évoque sa mère et sa façon de vivre, mais il la chasse aussi rapidement qu’elle est arrivée.
– Quant à mon père, Dieu seul le sait.
Cette fois, en revanche, le haussement d’épaules d’Emilien est clairement visible et il reporte son attention sur l’oiseau qui continue de tourner au-dessus de leurs têtes, peut-être qu’il cherche une nouvelle proie, ou peut-être qu’il est, en réalité, simplement en train de profiter de la liberté dont il jouit actuellement, libre de toutes entraves. Emilien espère naïvement que celui-ci finira toujours par revenir, mais il sait aussi que, s’il était à la place du faucon, il profiterait de cette liberté pour partir plus loin encore, découvrir de nouveaux horizons et reprendre sa vie sauvage.
Face aux excuses du chevalier Emilien affiche une expression un peu perdue et il secoue la tête.
– Vous n’avez pas à vous excuser. C’est normal d’être méfiant lorsque quelqu’un d’inconnu s’approche de notre famille. Peut-être que cet inconnu peut représenter un danger.
Il se souvient parfaitement de l’inquiétude de sa mère lorsqu’il a commencé à lui parler de « l’homme aux oiseaux », lorsqu’il était enfant, de la méfiance dont elle a fait preuve et dont elle a tenté de l’imprégner. Alors, d’une certaine manière, il peut comprendre.
– Je ne sais pas si les fauconniers sont respectés en réalité. Je suis juste heureux de pouvoir faire quelque chose que j’aime et reconnaissant à votre frère de m’avoir donné ma chance alors que je sortais de nulle part.
A ces derniers mots, le regard d’Emilien se porte sur le géant et il se demande un instant si celui-ci a conscience d’à quel point il peut lui être reconnaissant.
– Je suis déjà allé à Paris oui. J’avais jamais vu autant de gens, entendu autant de bruits, ni même sentis autant d’odeurs, c’était un peu effrayant et perturbant, mais j’aurais voulu pouvoir tout voir et tout entendre en même temps.
Cela dit, là il n’était plus sûr de réellement répondre à la question qui lui avait été posée.
– Eh bien… il a fait le lien entre moi et la nourriture en fait. C’est moi qui le nourris depuis que nous l’avons récupéré. Je ne saurais pas vraiment expliquer comment ça fonctionne mais en fait, la petite capuche que je lui mets sur la tête lui enlève tout ses repères et comme ça, pendant un temps, j’ai été le seul repère qu’il a eu.
Emilien n’est pas sûr d’être réellement compréhensible. Il se tait un instant, tapotant ses lèvres de son index, avant de tout simplement sourire en direction d’Aimable.
– Je ne sais pas très bien expliquer, mais je pourrai vous montrer si vous voulez ! Enfin, si vous avez le temps.
Le manque de culture d’Emilien lui revient en plein visage lorsque le chevalier répond à sa question et encore plus lorsque le frère de lui celui-ci prend à son tour la parole. Le manque de culture et la naïveté dont il peut parfois, souvent, faire preuve lorsque l’on passe l’espèce de masque qu’il porte pendant qu’il s’occupe de ses oiseaux. Ses lèvres forment un « o » presque parfait, alors qu’il ne laisse échapper le moindre son, un instant, et la gêne s’installe sur son visage, changeant son expression en un instant, avant de se mêler de nouveau à la curiosité.
– Je ne savais pas tout ça. Je suis désolé, ma question a dû vous paraitre totalement stupide. Mais… C’est très intéressant.
Son regard dévie un instant sur les armes que portent les deux hommes, il ne peut que laisser son imagination faire son travail et inventer les combats qu’ils ont pu mener l’un et l’autre lui qui, et il se gardera bien de le mentionner, n’a en réalité jamais posé les doigts sur la garde d’une épée. Il est ramené à l’instant présent par la question qui lui est adressée. Durant un bref moment il fixe Aimable, avant de sourire légèrement en secouant la tête.
– Non pas du tout. Ma mère possède quelques chèvres et vend leur lait… ainsi que des plantes et des racines.
Rien de plus. Une certaine nostalgie s’affiche quelques secondes sur le visage du jeune homme lorsqu’il évoque sa mère et sa façon de vivre, mais il la chasse aussi rapidement qu’elle est arrivée.
– Quant à mon père, Dieu seul le sait.
Cette fois, en revanche, le haussement d’épaules d’Emilien est clairement visible et il reporte son attention sur l’oiseau qui continue de tourner au-dessus de leurs têtes, peut-être qu’il cherche une nouvelle proie, ou peut-être qu’il est, en réalité, simplement en train de profiter de la liberté dont il jouit actuellement, libre de toutes entraves. Emilien espère naïvement que celui-ci finira toujours par revenir, mais il sait aussi que, s’il était à la place du faucon, il profiterait de cette liberté pour partir plus loin encore, découvrir de nouveaux horizons et reprendre sa vie sauvage.
Face aux excuses du chevalier Emilien affiche une expression un peu perdue et il secoue la tête.
– Vous n’avez pas à vous excuser. C’est normal d’être méfiant lorsque quelqu’un d’inconnu s’approche de notre famille. Peut-être que cet inconnu peut représenter un danger.
Il se souvient parfaitement de l’inquiétude de sa mère lorsqu’il a commencé à lui parler de « l’homme aux oiseaux », lorsqu’il était enfant, de la méfiance dont elle a fait preuve et dont elle a tenté de l’imprégner. Alors, d’une certaine manière, il peut comprendre.
– Je ne sais pas si les fauconniers sont respectés en réalité. Je suis juste heureux de pouvoir faire quelque chose que j’aime et reconnaissant à votre frère de m’avoir donné ma chance alors que je sortais de nulle part.
A ces derniers mots, le regard d’Emilien se porte sur le géant et il se demande un instant si celui-ci a conscience d’à quel point il peut lui être reconnaissant.
– Je suis déjà allé à Paris oui. J’avais jamais vu autant de gens, entendu autant de bruits, ni même sentis autant d’odeurs, c’était un peu effrayant et perturbant, mais j’aurais voulu pouvoir tout voir et tout entendre en même temps.
Cela dit, là il n’était plus sûr de réellement répondre à la question qui lui avait été posée.
Sam 27 Mar - 22:45
Le sourire du jeune homme est un éclat de soleil dans un ciel ombragé ; son visage est toujours si sombre qu’un peu de joie éclaircit totalement ses traits. Ses yeux s’illuminent d’une admiration pleine d’innocence, et cette adoration ébranle ses protections. Malgré tous les murs qu’il s’efforce de dresser, Aimable ne parvient pas à rester indifférent face à ce garçon. C’est un enfant, et pourtant, la haine brûle dans ses veines, c’est une morsure qu’il étouffe en gardant sa main serrée sur son collier. Sur la croix qu’il garde précieusement entre ses doigts, au travers de sa chemise. Peut-être que le jeune discerne les anneaux autour de son cou, cette chaîne à laquelle sa croix d’argent est accrochée.
L’enfant à ses côtés est tout ce qu’il veut protéger.
Et le loup dans ses veines… C’est tout ce qu’il veut exterminer.
Face à ces deux identités, il sent son être se dissocier. Le chevalier, le chasseur. L’homme, le monstre. Mais l’Ouroboros reste dans les ombres. Il ne s’échappe qu’en pensées fugaces, c’est le grondement lointain d’un orage, les cliquetis de griffes sur son crâne.
Aimable tient les rênes ; son regard reste fixe, alors que ses autres sens sont aux aguets. Il se concentre sur le contact du cuir contre sa main, la morsure du vent alpin sur sa peau usée. Les odeurs de sa monture se mêlent à celles de la terre, c’est un parfum douceâtre, familier, qui lui rappelle son humanité. Il entend le bruissement des plumes de l’oiseau, son cri aigu, le souffle rauque de sa jument, les grondements graves d’Ulric. Ce sont ses repères. Si l’oiseau n’a qu’Emilien, lui a sa famille, lui a Dieu, lui a toutes ces sensations que son corps ressent.
Il apprécie ses limites : les douleurs de ses articulations, la fatigue sur ses épaules, toutes ces odeurs qu’il ne perçoit pas, effacées et écrasées par les fragrances sauvages, la lisière de la forêt plongée dans l’ombre. Ses yeux ne discernent qu’une obscurité. Elle reste latente. Sur ses gardes. Prudente. Aimable la verrait presque frémir, montrer les dents – non, ce ne sont que quelques branches recouvertes de neige.
_ Il n’y a pas de questions bêtes.
Les mots lui échappent. Les souvenirs lui reviennent. Aimable, qui marche près de son frère : Baptiste. Pas Ulric. Cet homme usé par les soucis, aux yeux bleu d’un doux radicalement différent du leur ; semblable au ciel de l’aube. Porteur d’espoir. Une innocence, non, non, une expérience apaisée par une forme d’insouciance. La curiosité et l’assurance d’un jeune homme, étoffées par l’expérience d’un homme plus âgé. Baptiste était un homme sans âges et plein d’adages. Il n’existe pas de questions bêtes.
_ Tu as l’esprit vif. Curieux. De belles qualités.
Percevant le regard sur leurs armes, Aimable lève un sourcil. Sa grande main effleure alors le pommeau de son épée.
_ … Si tu veux, je te montrerai comment j’aiguise mon épée. Tu pourras essayer. En échange, tu me montreras comment tu t’occupes de ton oiseau.
Emilien évoque sa mère ; les quelques chèvres qu’ils possédaient. Eux ont des vaches, des poules, un énorme cochon, que l’on garde pour les jours de fête. Aimable espère que ces animaux offrent à Emilien un semblant de familiarité. Après tout, à quoi peut-il se raccrocher ? Sa mère est absente, son père, il ne l’a jamais connu. Et c’est lorsqu’il voit Ulric se retourner qu’il finit par esquisser un sourire. Amusé. Ses énormes épaules et son dos fait de pierres font de lui un homme impressionnant, si ce n’est pour dire, intimidant. Un homme effrayant, dont l’énorme cœur est bien caché sous une épaisse couche de muscles, de graisse, de blessures et de cicatrices. Un corps marqué par la guerre, un cœur qui a saigné et qui continue d’aimer. Il y a sûrement bien assez de place pour ce rejeton qu’il a ramassé, comme pour tous ces orphelins que Marie a expressément ramassés. Elle les aime, les a éduqués et ne cesse de leur chercher un avenir… Sa fratrie est un exemple, un modèle qu’Aimable s’efforce de suivre.
_ Oh…C’est avec mon frère que vous êtes montés sur Paris ? Ou c’eut été de ton propre chef ?... Qu’est ce que tu as vu qui a pu susciter ton intérêt ? La première fois que je suis monté sur Paris, je me souviens que, comme toi, j’ai été choqué par le monde. Par les bruits. Et j’étais stupéfait face à l’architecture. Les rues si étroites, les maisons en équilibre. Et le pont ! Immense. Quand nous avons traversé ce fleuve, je me suis demandé combien de jours et combien d’hommes avaient été nécessaires pour construire ça… Pour une fois, un pont était assez solide pour endurer mon poids et celui d’Ulric.
Malicieux, Aimable ne laisse pour autant rien paraître. Ses yeux se sont cependant plissés, et c’est avec une certaine complicité qu’il adresse un discret regard à Emilien, du coin des yeux, jusqu’à redresser franchement les prunelles vers son frère. Ulric se contente de les ignorer, peut-être ne les a-t-il pas même écoutés… Il laisse soin à Emilien d trouver ses repères, même avec son frère, malgré tout ce qu’il sait. Peut-être est-ce une épreuve, un geste de confiance mais ce n’est pas un acte de négligence. Aimable connaît bien trop son frère pour qu’Ulric accepte un tel risque… Aimable ne veut pas le décevoir. Et veut apprendre à se contrôler.
Peut être que connaître davantage Emilien l’aidera à voir l’humain. Et peut-être qu'Aimable sera un de ses repères, dans ce ciel où tant d'oiseaux ont volé sans branches sur lesquelles se poser.
L’enfant à ses côtés est tout ce qu’il veut protéger.
Et le loup dans ses veines… C’est tout ce qu’il veut exterminer.
Face à ces deux identités, il sent son être se dissocier. Le chevalier, le chasseur. L’homme, le monstre. Mais l’Ouroboros reste dans les ombres. Il ne s’échappe qu’en pensées fugaces, c’est le grondement lointain d’un orage, les cliquetis de griffes sur son crâne.
Aimable tient les rênes ; son regard reste fixe, alors que ses autres sens sont aux aguets. Il se concentre sur le contact du cuir contre sa main, la morsure du vent alpin sur sa peau usée. Les odeurs de sa monture se mêlent à celles de la terre, c’est un parfum douceâtre, familier, qui lui rappelle son humanité. Il entend le bruissement des plumes de l’oiseau, son cri aigu, le souffle rauque de sa jument, les grondements graves d’Ulric. Ce sont ses repères. Si l’oiseau n’a qu’Emilien, lui a sa famille, lui a Dieu, lui a toutes ces sensations que son corps ressent.
Il apprécie ses limites : les douleurs de ses articulations, la fatigue sur ses épaules, toutes ces odeurs qu’il ne perçoit pas, effacées et écrasées par les fragrances sauvages, la lisière de la forêt plongée dans l’ombre. Ses yeux ne discernent qu’une obscurité. Elle reste latente. Sur ses gardes. Prudente. Aimable la verrait presque frémir, montrer les dents – non, ce ne sont que quelques branches recouvertes de neige.
_ Il n’y a pas de questions bêtes.
Les mots lui échappent. Les souvenirs lui reviennent. Aimable, qui marche près de son frère : Baptiste. Pas Ulric. Cet homme usé par les soucis, aux yeux bleu d’un doux radicalement différent du leur ; semblable au ciel de l’aube. Porteur d’espoir. Une innocence, non, non, une expérience apaisée par une forme d’insouciance. La curiosité et l’assurance d’un jeune homme, étoffées par l’expérience d’un homme plus âgé. Baptiste était un homme sans âges et plein d’adages. Il n’existe pas de questions bêtes.
_ Tu as l’esprit vif. Curieux. De belles qualités.
Percevant le regard sur leurs armes, Aimable lève un sourcil. Sa grande main effleure alors le pommeau de son épée.
_ … Si tu veux, je te montrerai comment j’aiguise mon épée. Tu pourras essayer. En échange, tu me montreras comment tu t’occupes de ton oiseau.
Emilien évoque sa mère ; les quelques chèvres qu’ils possédaient. Eux ont des vaches, des poules, un énorme cochon, que l’on garde pour les jours de fête. Aimable espère que ces animaux offrent à Emilien un semblant de familiarité. Après tout, à quoi peut-il se raccrocher ? Sa mère est absente, son père, il ne l’a jamais connu. Et c’est lorsqu’il voit Ulric se retourner qu’il finit par esquisser un sourire. Amusé. Ses énormes épaules et son dos fait de pierres font de lui un homme impressionnant, si ce n’est pour dire, intimidant. Un homme effrayant, dont l’énorme cœur est bien caché sous une épaisse couche de muscles, de graisse, de blessures et de cicatrices. Un corps marqué par la guerre, un cœur qui a saigné et qui continue d’aimer. Il y a sûrement bien assez de place pour ce rejeton qu’il a ramassé, comme pour tous ces orphelins que Marie a expressément ramassés. Elle les aime, les a éduqués et ne cesse de leur chercher un avenir… Sa fratrie est un exemple, un modèle qu’Aimable s’efforce de suivre.
_ Oh…C’est avec mon frère que vous êtes montés sur Paris ? Ou c’eut été de ton propre chef ?... Qu’est ce que tu as vu qui a pu susciter ton intérêt ? La première fois que je suis monté sur Paris, je me souviens que, comme toi, j’ai été choqué par le monde. Par les bruits. Et j’étais stupéfait face à l’architecture. Les rues si étroites, les maisons en équilibre. Et le pont ! Immense. Quand nous avons traversé ce fleuve, je me suis demandé combien de jours et combien d’hommes avaient été nécessaires pour construire ça… Pour une fois, un pont était assez solide pour endurer mon poids et celui d’Ulric.
Malicieux, Aimable ne laisse pour autant rien paraître. Ses yeux se sont cependant plissés, et c’est avec une certaine complicité qu’il adresse un discret regard à Emilien, du coin des yeux, jusqu’à redresser franchement les prunelles vers son frère. Ulric se contente de les ignorer, peut-être ne les a-t-il pas même écoutés… Il laisse soin à Emilien d trouver ses repères, même avec son frère, malgré tout ce qu’il sait. Peut-être est-ce une épreuve, un geste de confiance mais ce n’est pas un acte de négligence. Aimable connaît bien trop son frère pour qu’Ulric accepte un tel risque… Aimable ne veut pas le décevoir. Et veut apprendre à se contrôler.
Peut être que connaître davantage Emilien l’aidera à voir l’humain. Et peut-être qu'Aimable sera un de ses repères, dans ce ciel où tant d'oiseaux ont volé sans branches sur lesquelles se poser.
Dim 11 Avr - 23:20
Il n’y a pas de questions bêtes. A nouveau un sourire s’affiche sur le visage d’Emilien. Sourire parce qu’il aime ce genre de réponses, parce qu’elle appelle à laisser libre cours à sa curiosité, à ne pas hésiter à poser les questions qui le font s’interroger, parce qu’elles appelleront, le plus souvent, une réponse. Sourire, aussi, parce que c’est quelque chose que lui répétait régulièrement « l’homme aux oiseaux », lorsqu’il était enfant et que ça fait naitre en lui des souvenirs agréables. Les rougeurs, sur les joues d’Emilien s’accentuent encore sous ce qui semble être des compliments et il baisse légèrement la tête, mal à l’aise.
– Euh… Merci.
Suite à sa proposition, Emilien ne s’était pas attendu à une telle réponse. Ses yeux s’écarquillèrent alors qu’il reposait son regard sur le chevalier, comme s’il n’était pas réellement sûr de ce que celui-ci venait de lui proposer. Le masque neutre qu’il portait lorsqu’il s’occupait de ses oiseaux avait définitivement disparu pour céder le pas au jeune homme curieux et innocent, mais dans le même temps il pouvait le loup en lui qui lui souffler de rester prudent, de ne pas baisser sa garde. Pourtant, l’humain n’avait pas envie de l’écouter pour une fois. alors il hocha la tête avec enthousiasme.
– Je veux bien ! Enfin… Si vous n’avez pas des choses plus importantes à faire. Je veux dire… vous devez avoir des choses bien plus importantes à faire que perdre du temps avec quelqu’un comme moi.
N’importe qui aurait des choses plus importantes à faire que passer du temps avec un simple employé, du moins c’était ce dont Emilien était intimement convaincu, mais ça allait aussi totalement à l’encontre de son envie de satisfaire sa curiosité, alors si ça n’était pas ce que penchait Aimable, ça allait énormément l’arranger.
Le jeune homme se perdit un instant dans ses souvenirs. Il devait être honnête et admettre que, bien souvent, sa mère lui manquait et que ne pas rentrer chez lui parce qu’il en était trop loin, laissait comme une sensation de vide. Il savait aussi que cette sensation était également liée à sa nature de lycan. Bien souvent la sensation d’être loin d’une meute devenait douloureuse, c’est dans ces moments-là qu’Emilien se repliait totalement sur les oiseaux dont il avait la charge, comme une sorte de cataplasme affectif sur une blessure qu’il s’était lui-même infligé en quittant son lieu d’origine. Il fallait donc qu’il assume son choix. Heureusement, la suite de la conversation sembla intéresser le chevalier, à sa grande surprise. Il prit quelques secondes avant de répondre, cherchant à nouveau des yeux le faucon pour être sûr que celui-ci ne s’était pas enfui. Ce n’est que lorsqu’il a repéré l’oiseau qu’il s’intéresse à nouveau à l’homme à ses côtés. Un sourire malicieux répond aux dernières paroles, malicieux, amusé, Emilien ne s’était pas attendu à ce que le chevalier fasse de l’humour, surtout au détriment du géant qui se tient à proximité d’eux et qui doit clairement entendre tout ce qu’ils se disent.
– Non, c’était avant. Je ne suis pas originaire d’ici, je viens des Vosges.
Un léger sourire affleure sur son visage alors qu’il repense à sa première visite à Paris.
– Tout. Je n’avais jamais vu une ville aussi grande, ni autant de monde réuni au même endroit. Partout où on regarde, il y a des gens, qui sont toujours occupés. Comme des petites fourmis. Ça change de l’endroit où j’ai grandi. Et puis, il y a les odeurs aussi, par endroit ça sent bon la nourriture, mais en même temps, derrière il y a toujours cette mauvaise odeur qui s’imprègne partout et qui nous suit partout. Et la Seine aussi, j’avais jamais vu un fleuve aussi large et aussi rapide !
Emilien s’anime alors qu’il parle, son visage, mais aussi sa voix laissent transparaitre beaucoup plus de choses que les mots qu’il prononce. Toute l’excitation qu’il a ressentie lorsqu’il est arrivé en ville la toute première fois. il n’a pas conscience, en revanche, qu’à parler des odeurs il en dévoile peut-être trop sur lui même, sur ce qu’il est capable de sentir qui ne correspond pas forcément à ce qu’aurait senti un humain normal. Mais puisque le chevalier a l’air de s’intéresser à ce qu’il raconte, il en profite, comme le ferait un enfant à qui un adulte laisserait la parole et tant pis pour le loup en lui qui gronde doucement pour tenter de l’alerter.
– J’ai vu le palais aussi, il était tellement grand !
Tellement grand et tellement intéressant.
– Euh… Merci.
Suite à sa proposition, Emilien ne s’était pas attendu à une telle réponse. Ses yeux s’écarquillèrent alors qu’il reposait son regard sur le chevalier, comme s’il n’était pas réellement sûr de ce que celui-ci venait de lui proposer. Le masque neutre qu’il portait lorsqu’il s’occupait de ses oiseaux avait définitivement disparu pour céder le pas au jeune homme curieux et innocent, mais dans le même temps il pouvait le loup en lui qui lui souffler de rester prudent, de ne pas baisser sa garde. Pourtant, l’humain n’avait pas envie de l’écouter pour une fois. alors il hocha la tête avec enthousiasme.
– Je veux bien ! Enfin… Si vous n’avez pas des choses plus importantes à faire. Je veux dire… vous devez avoir des choses bien plus importantes à faire que perdre du temps avec quelqu’un comme moi.
N’importe qui aurait des choses plus importantes à faire que passer du temps avec un simple employé, du moins c’était ce dont Emilien était intimement convaincu, mais ça allait aussi totalement à l’encontre de son envie de satisfaire sa curiosité, alors si ça n’était pas ce que penchait Aimable, ça allait énormément l’arranger.
Le jeune homme se perdit un instant dans ses souvenirs. Il devait être honnête et admettre que, bien souvent, sa mère lui manquait et que ne pas rentrer chez lui parce qu’il en était trop loin, laissait comme une sensation de vide. Il savait aussi que cette sensation était également liée à sa nature de lycan. Bien souvent la sensation d’être loin d’une meute devenait douloureuse, c’est dans ces moments-là qu’Emilien se repliait totalement sur les oiseaux dont il avait la charge, comme une sorte de cataplasme affectif sur une blessure qu’il s’était lui-même infligé en quittant son lieu d’origine. Il fallait donc qu’il assume son choix. Heureusement, la suite de la conversation sembla intéresser le chevalier, à sa grande surprise. Il prit quelques secondes avant de répondre, cherchant à nouveau des yeux le faucon pour être sûr que celui-ci ne s’était pas enfui. Ce n’est que lorsqu’il a repéré l’oiseau qu’il s’intéresse à nouveau à l’homme à ses côtés. Un sourire malicieux répond aux dernières paroles, malicieux, amusé, Emilien ne s’était pas attendu à ce que le chevalier fasse de l’humour, surtout au détriment du géant qui se tient à proximité d’eux et qui doit clairement entendre tout ce qu’ils se disent.
– Non, c’était avant. Je ne suis pas originaire d’ici, je viens des Vosges.
Un léger sourire affleure sur son visage alors qu’il repense à sa première visite à Paris.
– Tout. Je n’avais jamais vu une ville aussi grande, ni autant de monde réuni au même endroit. Partout où on regarde, il y a des gens, qui sont toujours occupés. Comme des petites fourmis. Ça change de l’endroit où j’ai grandi. Et puis, il y a les odeurs aussi, par endroit ça sent bon la nourriture, mais en même temps, derrière il y a toujours cette mauvaise odeur qui s’imprègne partout et qui nous suit partout. Et la Seine aussi, j’avais jamais vu un fleuve aussi large et aussi rapide !
Emilien s’anime alors qu’il parle, son visage, mais aussi sa voix laissent transparaitre beaucoup plus de choses que les mots qu’il prononce. Toute l’excitation qu’il a ressentie lorsqu’il est arrivé en ville la toute première fois. il n’a pas conscience, en revanche, qu’à parler des odeurs il en dévoile peut-être trop sur lui même, sur ce qu’il est capable de sentir qui ne correspond pas forcément à ce qu’aurait senti un humain normal. Mais puisque le chevalier a l’air de s’intéresser à ce qu’il raconte, il en profite, comme le ferait un enfant à qui un adulte laisserait la parole et tant pis pour le loup en lui qui gronde doucement pour tenter de l’alerter.
– J’ai vu le palais aussi, il était tellement grand !
Tellement grand et tellement intéressant.
Jeu 29 Avr - 10:34
Le jeune homme rougit – son rougissement draine le sang jusqu’à ses joues et l’Ouroboros désire y planter ses crocs, sentir la chair se déchirer et délivrer son précieux fluide, laper la plaie, s’en combler les papilles, mordre, mordre et arracher, Aimable le fait taire d’un battement de paupières. Lent mais ferme, la barrière contient la Bête et la Voix gronde. L’Homme la tient par le collet, assez pour qu’elle se recule et laisse libre cours à ses pensées.
_ Tu n’auras qu’à venir un matin, à l’aube, dans la cour de ma bâtisse. J’y entraîne Richard et Isabeau. Tu pourras y assister.
Ses précieux enfants. Isabeau n’a qu’une poignée d’années. Un enfant aux bonnes joues, au rire franc, qui galope partout lorsqu’il rend visite à son oncle, grimpant sur les bancs, les tables ou les bras qui s’offrent. Richard, de 6 ans son aîné, est un garçon plus timide et réservé, vouant toute son affection à Dieu, aux broderies et à la gravure. Un jeune homme rêveur et déjà appliqué, lorsqu’il veille sur son frère. Emilien les a déjà probablement rencontrés, lors des réunions de famille, et peut-être même qu’ils lui ont proposé de jouer avec eux. S’il a accepté, il a pu parcourir à leurs côtés le domaine des De Bayard, jouer avec l’aide d’épées en bois ou encore, explorer le petit bois…
Les yeux d’Aimable rencontrent, quelques secondes, ceux de son frère. C’est comme s’il croisait le fer… Avec lui. Il sent sa force écrasante qui broie son regard, mais il tient, soutient l’assaut sans faiblir. La tension est à peine perceptible, ce n’est qu’une contraction légère de sa nuque. Ulric reste silencieux et finalement, préfère observer le vol de l’oiseau. L’énorme Chevalier semble toujours… Soulagé de voir l’animal s’élancer avec tant d’aisance. Disposer d’une liberté à laquelle il a toujours rêvée. Aimable accompagne, finalement, le regard de son frère et sent le poids sur ses épaules se relâcher. Ulric a vu. Il a vu, que l’Ouroboros restait encore en retrait. Qu’Aimable contrôlait. Qu’Emilien ne risquait rien – pour l’instant, mais cet instant, aussi petit soit-il, est un espoir auquel tous deux peuvent s’accrocher. Son frère est-il fier, inquiet, soulagé ? Parfois, Aimable aimerait avoir le courage de le lui demander.
Comment deux hommes, si courageux au combat, peuvent-ils être incapables de se parler ? Lorsque cela arrivera, ce sera probablement l’une des batailles les plus difficiles qu’il faudra mener. Et plus les années passent, plus Ulric s’éloigne de ce champ de combat. Comme Hildegard avant lui. Voir sa famille s’éloigner de lui… Est une souffrance pour laquelle il se refuse de leur en vouloir. Un jour, il prendra le taureau par les cornes. Ce sera lui, qui se jettera au combat. Le temps renforce sa conviction, ses certitudes. Celle qu’on n’a qu’une famille et qu’il ne veut pas la perdre. Qu’il veut vivre avec eux, combien même est-il différent d’eux. Le Chevalier a besoin d’alliés face au Monstre qui vit sous sa peau. Lové dans ses viscères et toujours présente dans sa tête. Sont-ils capables de les discerner ? De voir Aimable et l’Ouroboros ? Ou sont-ils, pour eux, une seule entité ?
_ Les Vosges sont-elles si différentes de nos montagnes ?
Le jeune homme parle avec tant d’enthousiasme… Comme Isabeau, le jour où il a découvert une mare aux crapauds pour la première fois. Il se souvient des étoiles dans ses yeux noisettes, de la stupéfaction mêlée de joie et d’une inquiétude naturelle face à l’inconnu, de ses gazouillis d’enfant, murmures empressés parfois percés d’exclamations impressionnées. Richard était plus réservé, dans ses émotions, mais Aimable aimait le voir, lorsqu’il se laissait gagner à la joie. Richard restait quelques secondes sans voix, puis son visage s’éclairait d’un sourire plein de fossette, semblable à celui de sa mère, ses mains s’unissant en un geste de prière comme pour remercier Dieu de ses miracles. Les joies sont simples.
Tant et si bien qu’Aimable se surprend à sourire, lui aussi. Le coin de ses lèvres se marque de vallons, sa peau se creuse, dessine la joie qui s’élève jusqu’à ses yeux. Les rides sur son front se relâchent, son regard s’éclaire. L’acier de ses prunelles se réfugie dans un fourreau céleste, un ciel plus serein qu’il dévoile d’un battement de paupières. La tendresse d’un père, qu’il laisse échapper d’un grondement digne d’un vieux chien.
_ Ah oui ? Jamais ? Ulric ne t’a donc jamais emmené à la cascade d’Allières ?
_ Le terrain est trop marécageux. Dangereux, se contente de grogner Ulric. Comme quoi, l’homme les écoute.
_ Alors celle de la Gouille !
L’évocation de cette cascade arrache un sourire à son frère aîné. Si peu accoutumé à exprimer sa joie, ce simple geste se rapproche davantage d’une grimace douloureuse que d’un sourire, il faut dire que les cicatrices qui barrent son faciès profitent du moindre geste pour trancher son derme. Ulric se contente d’un haussement d’épaules et Aimable parvient à comprendre ce que ce mouvement signifie.
_ Je comprends. Après la fonte des neiges… C’est encore plus magnifique. Tu auras l’occasion d’y aller. C’est un endroit magnifique. On n’y sent que la terre, l’eau et la sève. Pas comme ceux que l’on sent à Paris. Y’avait il des endroits, dans ton pays, qui vaudraient d’être vus ?
_ Tu n’auras qu’à venir un matin, à l’aube, dans la cour de ma bâtisse. J’y entraîne Richard et Isabeau. Tu pourras y assister.
Ses précieux enfants. Isabeau n’a qu’une poignée d’années. Un enfant aux bonnes joues, au rire franc, qui galope partout lorsqu’il rend visite à son oncle, grimpant sur les bancs, les tables ou les bras qui s’offrent. Richard, de 6 ans son aîné, est un garçon plus timide et réservé, vouant toute son affection à Dieu, aux broderies et à la gravure. Un jeune homme rêveur et déjà appliqué, lorsqu’il veille sur son frère. Emilien les a déjà probablement rencontrés, lors des réunions de famille, et peut-être même qu’ils lui ont proposé de jouer avec eux. S’il a accepté, il a pu parcourir à leurs côtés le domaine des De Bayard, jouer avec l’aide d’épées en bois ou encore, explorer le petit bois…
Les yeux d’Aimable rencontrent, quelques secondes, ceux de son frère. C’est comme s’il croisait le fer… Avec lui. Il sent sa force écrasante qui broie son regard, mais il tient, soutient l’assaut sans faiblir. La tension est à peine perceptible, ce n’est qu’une contraction légère de sa nuque. Ulric reste silencieux et finalement, préfère observer le vol de l’oiseau. L’énorme Chevalier semble toujours… Soulagé de voir l’animal s’élancer avec tant d’aisance. Disposer d’une liberté à laquelle il a toujours rêvée. Aimable accompagne, finalement, le regard de son frère et sent le poids sur ses épaules se relâcher. Ulric a vu. Il a vu, que l’Ouroboros restait encore en retrait. Qu’Aimable contrôlait. Qu’Emilien ne risquait rien – pour l’instant, mais cet instant, aussi petit soit-il, est un espoir auquel tous deux peuvent s’accrocher. Son frère est-il fier, inquiet, soulagé ? Parfois, Aimable aimerait avoir le courage de le lui demander.
Comment deux hommes, si courageux au combat, peuvent-ils être incapables de se parler ? Lorsque cela arrivera, ce sera probablement l’une des batailles les plus difficiles qu’il faudra mener. Et plus les années passent, plus Ulric s’éloigne de ce champ de combat. Comme Hildegard avant lui. Voir sa famille s’éloigner de lui… Est une souffrance pour laquelle il se refuse de leur en vouloir. Un jour, il prendra le taureau par les cornes. Ce sera lui, qui se jettera au combat. Le temps renforce sa conviction, ses certitudes. Celle qu’on n’a qu’une famille et qu’il ne veut pas la perdre. Qu’il veut vivre avec eux, combien même est-il différent d’eux. Le Chevalier a besoin d’alliés face au Monstre qui vit sous sa peau. Lové dans ses viscères et toujours présente dans sa tête. Sont-ils capables de les discerner ? De voir Aimable et l’Ouroboros ? Ou sont-ils, pour eux, une seule entité ?
_ Les Vosges sont-elles si différentes de nos montagnes ?
Le jeune homme parle avec tant d’enthousiasme… Comme Isabeau, le jour où il a découvert une mare aux crapauds pour la première fois. Il se souvient des étoiles dans ses yeux noisettes, de la stupéfaction mêlée de joie et d’une inquiétude naturelle face à l’inconnu, de ses gazouillis d’enfant, murmures empressés parfois percés d’exclamations impressionnées. Richard était plus réservé, dans ses émotions, mais Aimable aimait le voir, lorsqu’il se laissait gagner à la joie. Richard restait quelques secondes sans voix, puis son visage s’éclairait d’un sourire plein de fossette, semblable à celui de sa mère, ses mains s’unissant en un geste de prière comme pour remercier Dieu de ses miracles. Les joies sont simples.
Tant et si bien qu’Aimable se surprend à sourire, lui aussi. Le coin de ses lèvres se marque de vallons, sa peau se creuse, dessine la joie qui s’élève jusqu’à ses yeux. Les rides sur son front se relâchent, son regard s’éclaire. L’acier de ses prunelles se réfugie dans un fourreau céleste, un ciel plus serein qu’il dévoile d’un battement de paupières. La tendresse d’un père, qu’il laisse échapper d’un grondement digne d’un vieux chien.
_ Ah oui ? Jamais ? Ulric ne t’a donc jamais emmené à la cascade d’Allières ?
_ Le terrain est trop marécageux. Dangereux, se contente de grogner Ulric. Comme quoi, l’homme les écoute.
_ Alors celle de la Gouille !
L’évocation de cette cascade arrache un sourire à son frère aîné. Si peu accoutumé à exprimer sa joie, ce simple geste se rapproche davantage d’une grimace douloureuse que d’un sourire, il faut dire que les cicatrices qui barrent son faciès profitent du moindre geste pour trancher son derme. Ulric se contente d’un haussement d’épaules et Aimable parvient à comprendre ce que ce mouvement signifie.
_ Je comprends. Après la fonte des neiges… C’est encore plus magnifique. Tu auras l’occasion d’y aller. C’est un endroit magnifique. On n’y sent que la terre, l’eau et la sève. Pas comme ceux que l’on sent à Paris. Y’avait il des endroits, dans ton pays, qui vaudraient d’être vus ?
Dim 30 Mai - 16:35
Le sourire d’Emilien, lorsqu’il lui propose de venir assister à l’un de ses entrainements, est sans équivoque. Cette proposition est bien mieux que tout ce à quoi il a pu s’attendre jusqu’à présent. Il ne sait même pas quoi dire pour remercier le chevalier et, finalement, c’est un simple « merci » qui lui échappe alors qu’il détourne les yeux pour observer de nouveau le vol de l’oiseau. Les cercles de ce dernier sont de plus en plus grands, de plus en plus lointains et Emilien sait que ça signifie qu’il ne repère rien d’intéressant pour le moment. Encore quelques tours et celui-ci reviendra de lui-même se poser sur son bras, à la recherche d’une récompense, à défaut d’avoir trouvé une proie. Emilien sait que d’autres oiseaux, mieux entrainés, réussiraient à trouver une proie à chacun de leurs envols, le sien a encore des choses à apprendre, comme lui. Mais ils avaient le temps, l’un et l’autre.
L’oiseau sortit finalement de son champ de vision et il reporta son attention sur les deux hommes. Même lui pouvait sentir, à défaut de comprendre, les échanges silencieux qui passaient entre eux, cela attisait sa curiosité, sans que pour autant il ne tente de se montrer indiscret. A la question, il hocha la tête, offrant un demi sourire au chevalier.
– Elles sont différentes oui. Les arbres et les plantes ne sont pas les mêmes. Les odeurs aussi. Je pense que, si on demandait à quelqu’un qui ne les connait pas, il répondrait probablement que toutes les montagnes se ressemblent, mais ça n’est pas le cas. L’Infant garde un instant le silence, pensif, et puis : elles sont différentes. Et puis, il y a aussi les animaux. Ce ne sont pas les mêmes ici et chez moi. Mais, c’est très beau ici aussi, c’est juste différent.
Emilien espère ne pas vexer Aimable en disant ça, car ça n’est pas son but. Les lieux qu’évoque le chevalier lui sont parfaitement inconnus et il secoue la tête en guise de réponse, en même temps qu’il tente d’imaginer les différents lieux qui ont été mentionnés.
– J’aimerais bien aller les voir, les deux.
La mention des odeurs lui tire un sourire amusé et il hoche la tête. Si les lieux en eux-mêmes ne lui parlent absolument pas, les odeurs auxquelles le chevalier fait allusion n’ont pas de mystère pour lui. Elles font partie intégrante de ses origines et de sa nature. A l’inverse de celles qu’il a pu sentir en pleine ville. Emilien reste silencieux un instant, son regard filant une nouvelle fois vers le ciel alors que le rapace réapparait finalement et pique dans sa direction. Il lève le bras pour permettre à celui-ci d’atterrir et effleure sa tête d’une légère caresse.
– Les lacs, les lacs et leurs côtés sauvages. Lorsqu’on y est, et qu’on respecte le silence, on peut rencontrer une multitude d’animaux, ils sont plus nombreux que les humains. Certains d’entres eux n’ont même jamais rencontré d’homme, alors on peut les approcher sans qu’ils ne se méfient.
Et il y avait aussi des possibilités de chasse énormes, mais ça, Emilien n’allait pas le dire à haute voix, car cela risquait d’entrainer des questions auxquelles il n’avait pas forcément envie ou la possibilité de répondre.
L’oiseau sortit finalement de son champ de vision et il reporta son attention sur les deux hommes. Même lui pouvait sentir, à défaut de comprendre, les échanges silencieux qui passaient entre eux, cela attisait sa curiosité, sans que pour autant il ne tente de se montrer indiscret. A la question, il hocha la tête, offrant un demi sourire au chevalier.
– Elles sont différentes oui. Les arbres et les plantes ne sont pas les mêmes. Les odeurs aussi. Je pense que, si on demandait à quelqu’un qui ne les connait pas, il répondrait probablement que toutes les montagnes se ressemblent, mais ça n’est pas le cas. L’Infant garde un instant le silence, pensif, et puis : elles sont différentes. Et puis, il y a aussi les animaux. Ce ne sont pas les mêmes ici et chez moi. Mais, c’est très beau ici aussi, c’est juste différent.
Emilien espère ne pas vexer Aimable en disant ça, car ça n’est pas son but. Les lieux qu’évoque le chevalier lui sont parfaitement inconnus et il secoue la tête en guise de réponse, en même temps qu’il tente d’imaginer les différents lieux qui ont été mentionnés.
– J’aimerais bien aller les voir, les deux.
La mention des odeurs lui tire un sourire amusé et il hoche la tête. Si les lieux en eux-mêmes ne lui parlent absolument pas, les odeurs auxquelles le chevalier fait allusion n’ont pas de mystère pour lui. Elles font partie intégrante de ses origines et de sa nature. A l’inverse de celles qu’il a pu sentir en pleine ville. Emilien reste silencieux un instant, son regard filant une nouvelle fois vers le ciel alors que le rapace réapparait finalement et pique dans sa direction. Il lève le bras pour permettre à celui-ci d’atterrir et effleure sa tête d’une légère caresse.
– Les lacs, les lacs et leurs côtés sauvages. Lorsqu’on y est, et qu’on respecte le silence, on peut rencontrer une multitude d’animaux, ils sont plus nombreux que les humains. Certains d’entres eux n’ont même jamais rencontré d’homme, alors on peut les approcher sans qu’ils ne se méfient.
Et il y avait aussi des possibilités de chasse énormes, mais ça, Emilien n’allait pas le dire à haute voix, car cela risquait d’entrainer des questions auxquelles il n’avait pas forcément envie ou la possibilité de répondre.
Jeu 10 Juin - 13:34
Les De Bayard sont à la chevalerie ce qu’est la roche à la montagne.
Et les De Bayard ont, depuis des générations, planté leurs racines dans les flancs escarpés. Au plus haut des sommets. Au plus proche de Dieu et de sa lumière divine, au contact d’une terre fertile lorsque l’on sait être patients. Prêts à endurer les intempéries et l’usure du temps. La nature, qui équilibre si bien les choses, veille à ce qu’ils restent en peu de nombre : combien de ses ancêtres ont été emportés avant même leur naissance, et combien d’entre eux ont perdu la vie en pleine force de l’âge ? Bourgeons et rameaux, la Mort les ramasse et offre leur bouquet fleuri à Dieu.
Aimable sait que le temps lui est compté. Qu’un jour, comme les autres, il mourra. Ses cheveux grisonnent, ses articulations craquent, les douleurs et l’usure sont déjà là. La fatigue sur ses épaules, la lassitude dans le regard, cette chair qui faiblit, ultime barrage face au monstre qu’il abrite. Que faire, de son existence ? Plutôt qu’à vivre à Paris, c’est à ses montagnes qu’il aimerait la dédier. Marcher des heures dans la forêt, longer les lacs, surprendre la course d’une biche ou l’envol d’un oiseau. Il imagine sans pour autant voir les endroits qu’Emilien décrit. Les arbres… Changent-ils de couleurs ? D’odeurs ? D’apparence ? Quels animaux il y a-t-il ? Chevreuils ou puissants cerfs, sangliers ou simples lièvres.
_ Ce doit être un endroit merveilleux. Là où l’Homme n’a encore pas imposé sa souillure et qu’il ne reste que la pureté d’un monde créé par Dieu.
Un monde où il aimerait se rendre.
Loin d’une humanité qu’il n’arrive pas à accepter. Les humains sont si nombreux, les alliés sont rares, la bonté l’est plus encore. Aimable pense à ce Noah et ses marques sur sa peau, aux horreurs que ses yeux ont déjà pu voir. Des horreurs que des bêtes elles-mêmes n’auraient pas commises – exceptés NOUS.
L’intervention de l’Ouroboros lui arrache un discret soupir et finalement, voilà qu’ils reprennent le chemin de domaine. La table est dressée, le repas a commencé. Pour autant, quelques assiettes les attendent. Aimable se charge de ramener les montures aux écuries. L’énorme bras d’Ulric écrase alors les maigres épaules d’Emilien. D’une poigne d’acier, l’ours serre l’enfant contre son flanc, avant de le relâcher dans un grognement satisfait.
_ Toi et ton oiseau avez bien travaillé.
Eleanor lève les yeux. La jeune femme s’approche. Ses cheveux d’or mêlés de cuivre cascadant sur ses épaules gracieuses, ses yeux bruns mouchetés d’émeraudes éclairés d’un sourire. Nez mutin, malice s’esquisse au coin de ses lèvres, les tâches de rousseur éparpillées sur ses joues rappellent de belles embrasées. De petite taille, Dieu a fait d’elle une créature d’une beauté noble et sauvage, avec ses joues rondes, sa poitrine généreuse, son ventre rebondi, ses hanches fertiles. Ses sourcils broussailleux, les bras solides et parcourus de quelques petites plaies, les mains usées par le travail. Eleanor est une femme issue de la basse noblesse, qui a forgé sa fortune à la force de ses mains. Elle félicite Emilien d’une main sur son épaule, avant de récupérer les lapins.
_ Allez donc vous installer ! Je vais préparer le lapin et vous en faire chauffer, qu’en dîtes-vous ?
Ulric se contente d’un grognement, déjà, Eleanor s’en va. L’homme va s’installer à table. Discret comme une ombre, Aimable se contente de longer les convives, se glissant en cuisine pour rejoindre son épouse…
Au même instant, Richard et Isabeau sont occupés à manger leurs pommes de terre. Richard a une dizaine d’années. Assez grand et efflanqué, ses grands yeux bleus gris rappellent ceux d’Aimable et ceux d’un frère qu’Emilien n’a jamais connu. Un garçon calme, posé, curieux et réfléchi, d’une intelligence étrangement intimidante – Richard n’est pas un enfant qui joue ou s’amuse comme le font les autres. Le visage toujours grave, il semble constamment plongé dans des réflexions qu’aucun adulte ne peut comprendre. Isabeau, lui, n’a qu’une poignée d’années. L’enfant est vif, bruyant, plein de vie et d’amour, d’un courage débordant que son frère passe son temps à apaiser. Bouillonnant, voilà qu’Isabeau récupère sa cuillère pour enfourner des pommes de terre dans sa bouche, bien convaincu qu’il peut avaler son assiette d’un coup. C’est avec la bouche pleine qu’il accoste Emilien.
_ Cu veux des p’tates ?
Richard s’arrache de ses pensées et adresse un regard lourd à son frère.
_ Mange avant de parler. Je… Si tu veux t’installer, il y a de la place de notre côté ou du côté des adultes, précise l’aîné à l’adresse d’Emilien. Les De Bayard ont de grandes tables, il est rare que les serviteurs puissent s’y installer. Mais les jours de fête, il arrive que certains privilégiés puissent participer aux festivités.
Des festivités dont les causes n’ont probablement pas encore été précisées à Emilien…
Et les De Bayard ont, depuis des générations, planté leurs racines dans les flancs escarpés. Au plus haut des sommets. Au plus proche de Dieu et de sa lumière divine, au contact d’une terre fertile lorsque l’on sait être patients. Prêts à endurer les intempéries et l’usure du temps. La nature, qui équilibre si bien les choses, veille à ce qu’ils restent en peu de nombre : combien de ses ancêtres ont été emportés avant même leur naissance, et combien d’entre eux ont perdu la vie en pleine force de l’âge ? Bourgeons et rameaux, la Mort les ramasse et offre leur bouquet fleuri à Dieu.
Aimable sait que le temps lui est compté. Qu’un jour, comme les autres, il mourra. Ses cheveux grisonnent, ses articulations craquent, les douleurs et l’usure sont déjà là. La fatigue sur ses épaules, la lassitude dans le regard, cette chair qui faiblit, ultime barrage face au monstre qu’il abrite. Que faire, de son existence ? Plutôt qu’à vivre à Paris, c’est à ses montagnes qu’il aimerait la dédier. Marcher des heures dans la forêt, longer les lacs, surprendre la course d’une biche ou l’envol d’un oiseau. Il imagine sans pour autant voir les endroits qu’Emilien décrit. Les arbres… Changent-ils de couleurs ? D’odeurs ? D’apparence ? Quels animaux il y a-t-il ? Chevreuils ou puissants cerfs, sangliers ou simples lièvres.
_ Ce doit être un endroit merveilleux. Là où l’Homme n’a encore pas imposé sa souillure et qu’il ne reste que la pureté d’un monde créé par Dieu.
Un monde où il aimerait se rendre.
Loin d’une humanité qu’il n’arrive pas à accepter. Les humains sont si nombreux, les alliés sont rares, la bonté l’est plus encore. Aimable pense à ce Noah et ses marques sur sa peau, aux horreurs que ses yeux ont déjà pu voir. Des horreurs que des bêtes elles-mêmes n’auraient pas commises – exceptés NOUS.
L’intervention de l’Ouroboros lui arrache un discret soupir et finalement, voilà qu’ils reprennent le chemin de domaine. La table est dressée, le repas a commencé. Pour autant, quelques assiettes les attendent. Aimable se charge de ramener les montures aux écuries. L’énorme bras d’Ulric écrase alors les maigres épaules d’Emilien. D’une poigne d’acier, l’ours serre l’enfant contre son flanc, avant de le relâcher dans un grognement satisfait.
_ Toi et ton oiseau avez bien travaillé.
Eleanor lève les yeux. La jeune femme s’approche. Ses cheveux d’or mêlés de cuivre cascadant sur ses épaules gracieuses, ses yeux bruns mouchetés d’émeraudes éclairés d’un sourire. Nez mutin, malice s’esquisse au coin de ses lèvres, les tâches de rousseur éparpillées sur ses joues rappellent de belles embrasées. De petite taille, Dieu a fait d’elle une créature d’une beauté noble et sauvage, avec ses joues rondes, sa poitrine généreuse, son ventre rebondi, ses hanches fertiles. Ses sourcils broussailleux, les bras solides et parcourus de quelques petites plaies, les mains usées par le travail. Eleanor est une femme issue de la basse noblesse, qui a forgé sa fortune à la force de ses mains. Elle félicite Emilien d’une main sur son épaule, avant de récupérer les lapins.
_ Allez donc vous installer ! Je vais préparer le lapin et vous en faire chauffer, qu’en dîtes-vous ?
Ulric se contente d’un grognement, déjà, Eleanor s’en va. L’homme va s’installer à table. Discret comme une ombre, Aimable se contente de longer les convives, se glissant en cuisine pour rejoindre son épouse…
Au même instant, Richard et Isabeau sont occupés à manger leurs pommes de terre. Richard a une dizaine d’années. Assez grand et efflanqué, ses grands yeux bleus gris rappellent ceux d’Aimable et ceux d’un frère qu’Emilien n’a jamais connu. Un garçon calme, posé, curieux et réfléchi, d’une intelligence étrangement intimidante – Richard n’est pas un enfant qui joue ou s’amuse comme le font les autres. Le visage toujours grave, il semble constamment plongé dans des réflexions qu’aucun adulte ne peut comprendre. Isabeau, lui, n’a qu’une poignée d’années. L’enfant est vif, bruyant, plein de vie et d’amour, d’un courage débordant que son frère passe son temps à apaiser. Bouillonnant, voilà qu’Isabeau récupère sa cuillère pour enfourner des pommes de terre dans sa bouche, bien convaincu qu’il peut avaler son assiette d’un coup. C’est avec la bouche pleine qu’il accoste Emilien.
_ Cu veux des p’tates ?
Richard s’arrache de ses pensées et adresse un regard lourd à son frère.
_ Mange avant de parler. Je… Si tu veux t’installer, il y a de la place de notre côté ou du côté des adultes, précise l’aîné à l’adresse d’Emilien. Les De Bayard ont de grandes tables, il est rare que les serviteurs puissent s’y installer. Mais les jours de fête, il arrive que certains privilégiés puissent participer aux festivités.
Des festivités dont les causes n’ont probablement pas encore été précisées à Emilien…
Dim 11 Juil - 23:28
Un sourire étire les lèvres de l’Infant face à la remarque du chevalier et il hoche légèrement la tête sans pour autant se lancer à répondre. S’il était tout à fait d’accord sur l’aspect merveilleux des endroits qu’il évoquait, il préférait ne pas se lancer dans une discussion sur Dieu. Heureusement, le signal du retour est donné et Emilien emboite le pas aux deux hommes après avoir de nouveau encapuchonné son oiseau. C’est totalement silencieux que le jeune homme suit les deux autres, sa concentration s’évaporant progressivement alors qu’il n’a plus à être attentif à la conversation ou au travail du rapace. Ses yeux se mettent en mouvement, observant les alentours, non plus à la recherche de proies sur lesquelles lâcher son partenaire de chasse, mais bien pour observer le vol d’un papillon, la course effrénée d’une grenouille dérangée par le bruit des chevaux… la feuille qui tombe en étant portée par le vent. Emilien n’a besoin que de quelques secondes pour être totalement déconnecté de la réalité et du présent, tout devient plus intéressant que la présence humaine à ses côtés. Tout le rend aussi moins attentif et le trajet passe sans qu’il s’en rende réellement compte.
Une bouffée de fierté le saisit lorsqu’il sent l’homme qui l’embauche le serrer contre lui et plus encore sous le compliment. Le sourire qui s’affiche un instant sur le visage du jeune homme est sans équivoque, en même temps qu’une expression un peu étrange passe dans son regard. Avant que son regard sombre ne se pose sur la jeune femme qui vient le décharger de ses proies. Face aux paroles de cette dernière, son ventre grogne discrètement, faisant apparaitre quelques rougeurs sur le visage d’Emilien et c’est aux deux qu’il s’adresse en même temps.
– Je vous remercie.
L’Infant s’éclipse un instant pour prendre soin de l’oiseau et le reposer sur son perchoir, à l’abri du bruit et des mouvements. Il reste un instant avec lui, glissant un doigt sur les plumes de celui-ci, avant de le laisser en paix pour rejoindre les convives. Une certaine réserve le pousse à s’arrêter sans vraiment se mêler à eux. Même lui est capable de se rendre compte qu’il s’agit là d’une réunion de famille et, même s’il est là depuis un certain temps, il ne fait pas partie de cette famille. Et la sienne de famille est bien loin d’ici. Cette constatation fait naitre une sorte de boule au creux de son estomac, comme un poids désagréable qui chasse un instant le plaisir d’avoir bien travaillé plus tôt. Il est tiré de ses pensées par la prise de parole du petit garçon et, durant un instant, une expression de complète perplexité s’affiche sur son visage. Il tente de traduire les paroles du gamin durant quelques temps, avant que son frère ne prenne la parole. Un sourire mince étire alors les lèvres de l’Infant et il laisse son regard passer d’un bout à l’autre de la tablée.
– A vrai dire, je ne sais pas trop où je peux m’installer. Ca ne vous dérange pas si je reste avec vous ? Vous pourrez me dire pourquoi vous faites ce repas, d’ailleurs.
Parce que oui, même si les odeurs qui emplissent l’air donnent faim à Emilien, il n’a pas la moindre idée de ce qui a pu causer ce repas… Et de la même manière, il n’est pas réellement sûr que sa présence à table soit la bienvenue, après tout, il ne fait pas partie de la famille.
Une bouffée de fierté le saisit lorsqu’il sent l’homme qui l’embauche le serrer contre lui et plus encore sous le compliment. Le sourire qui s’affiche un instant sur le visage du jeune homme est sans équivoque, en même temps qu’une expression un peu étrange passe dans son regard. Avant que son regard sombre ne se pose sur la jeune femme qui vient le décharger de ses proies. Face aux paroles de cette dernière, son ventre grogne discrètement, faisant apparaitre quelques rougeurs sur le visage d’Emilien et c’est aux deux qu’il s’adresse en même temps.
– Je vous remercie.
L’Infant s’éclipse un instant pour prendre soin de l’oiseau et le reposer sur son perchoir, à l’abri du bruit et des mouvements. Il reste un instant avec lui, glissant un doigt sur les plumes de celui-ci, avant de le laisser en paix pour rejoindre les convives. Une certaine réserve le pousse à s’arrêter sans vraiment se mêler à eux. Même lui est capable de se rendre compte qu’il s’agit là d’une réunion de famille et, même s’il est là depuis un certain temps, il ne fait pas partie de cette famille. Et la sienne de famille est bien loin d’ici. Cette constatation fait naitre une sorte de boule au creux de son estomac, comme un poids désagréable qui chasse un instant le plaisir d’avoir bien travaillé plus tôt. Il est tiré de ses pensées par la prise de parole du petit garçon et, durant un instant, une expression de complète perplexité s’affiche sur son visage. Il tente de traduire les paroles du gamin durant quelques temps, avant que son frère ne prenne la parole. Un sourire mince étire alors les lèvres de l’Infant et il laisse son regard passer d’un bout à l’autre de la tablée.
– A vrai dire, je ne sais pas trop où je peux m’installer. Ca ne vous dérange pas si je reste avec vous ? Vous pourrez me dire pourquoi vous faites ce repas, d’ailleurs.
Parce que oui, même si les odeurs qui emplissent l’air donnent faim à Emilien, il n’a pas la moindre idée de ce qui a pu causer ce repas… Et de la même manière, il n’est pas réellement sûr que sa présence à table soit la bienvenue, après tout, il ne fait pas partie de la famille.
Mer 4 Aoû - 13:22
@Emilien Blanchard
Les deux bambins se poussent, avec précipitation et maladresse, laissant bien assez de place pour qu’Emilien puisse s’installer. Richard tourne les yeux vers l’une de ses cousines et lui demande de servir une assiette. Fleur se redresse pour obéir, glissant quelques pommes de terre et un morceau de chevreuil, que Richard récupère pour poser devant Emilien en haussant les épaules.
_ Tu as chassé les lapins que nous mangerons… Tu peux prendre le temps de manger quelques pommes de terre avec nous. Je ne pense pas que nos parents en tiendront rigueur.
Les De Bayard allient une certaine rusticité à une étrange noblesse, une sauvagerie domptée par leur sens de l’honneur et du devoir. Eleanor est différente : bourgeoise, c’est à la sueur de son front et au travail de ses bras qu’elle a su construire sa fortune, tant et si bien que son union avec Aimable ont quelque peu rempli les bourses de leur famille. Isabeau sourit joyeusement à Emilien, ravi de l’avoir près de lui, se penche même pour mieux l’observer.
_ On fête plein de choses ! C’est mon anniversaire, Oncle Ulric a pris sa retraite et Papa, lui, il est Chevalier à Paris maintenant !
Explique-t-il avec entrain.
Pour un garçon si distrait qu’est Emilien, les diversions sont nombreuses. Eleanor revient à table aux côtés d’Aimable, les lapins ont été dépouillés, leur fourrure a été récupérée, leur corps, transpercé d’un pique avant d’être suspendu au dessus du feu de bois. Le couple se tient la main – Eleanor tourne ses yeux vers ses enfants pour s’assurer à ce qu’ils mangent bien. Surprise de voir Emilien, elle lui offre un sourire avant de tourner les yeux vers son mari.
_ Alors ? Que penses-tu de ce jeune garçon qu’Ulric a embauché ? Un fauconnier, ah ! Je n’aurais jamais crû qu’Ulric s’intéressait aux oiseaux de proie ! Glisse-t-elle avec malice.
Le dénommé, l’ayant entendue, lui adresse un de ses regards habituels – si durs qu’il semble l’écraser à la force de ses énormes poings. Pourtant, ceux qui le connaissent sauront y lire un fond de tendresse au fond de ses prunelles. L’ours lui ressemble bien.
_ Les oiseaux sont des animaux magnifiques. Aucun être sur Terre n’égalise la grâce de leur vol et la liberté de leurs ailes.
Côme est à table, lui aussi. Grand frère d’Aimable, l’homme approche de la quarantaine. Ses cheveux bruns bien coiffés, coupés courts, une barbe courte, élégamment taillée, un nez retroussé et un regard malicieux. Quelques tâches de rousseur soulignent le pétillant de son regard lorsqu’il joint les mains sur son ventre bedonnant.
_ Ah ! Tu envies surtout leur légèreté, n’est-ce pas, mon frère ? Pouffe-t-il, A ton âge, on se rapproche bien plus de la terre que du ciel !
Ulric se contente d’un grognement grave et rauque alors qu’Eleanor éclate de rire.
_ Côme ! Ce n’est pas parce que ton frère vieillit que tu peux lui dire qu’il se tasse ! S’il y en a bien un à qui ça arrive, c’est toi, quand on voit ton ventre bedonnant !
Côme s’esclaffe à son tour et son visage s’éclaire d’un grand sourire.
_ Je l’avoue ! Dieu nous a fait proche du sol et des bonnes choses, que voulez-vous ! Mon âme sera probablement bien plus légère que la vôtre lorsqu’elle montera au ciel !
_ Vu ton pêché de gourmandise, j’en doute, bougonne Ulric.
_ Ah ! Je fais seulement honneur aux présents que nous offre Dieu. Et je suis probablement celui qui connaît le mieux nos textes de prière sur toute la fratrie. D’ailleurs, Aimable, Ulric, avez-vous prié avant de commencer le repas ?
Aimable hoche docilement la tête, imité par son frère aîné. Les discussions vont de bon train, les boutades s’échangent dans la fratrie, alors qu’Isabeau tourne les yeux vers Emilien.
_ Comment il s’appelle ton faucon ? Comment tu l’as trouvé ? C’est dur à dresser un faucon ? Tu n’as pas peur qu’il s’envole et qu’il ne revienne plus jamais un jour ? Tu crois qu’un faucon, ça peut attaquer un homme ?
L’enfant est curieux et d’un regard, Aimable surveille son fils. Néanmoins, il s’étonne qu’à force de côtoyer ce jeune loup, une part en lui s’apaise – la haine n’est plus aussi perceptible qu’autrefois. Que se passe-t-il ? L’Ouroboros ronge-t-il son frein, n’attend-t-il qu’un moment d’inattention pour frapper ? Accepte-t-il en fin de compte la présence de ce garou sans plus s’en offusquer ?
Plongé dans ses pensées, Aimable ne prête plus tant attention aux adultes : son attention revient sur les enfants – l’Infant.
_ Tu as chassé les lapins que nous mangerons… Tu peux prendre le temps de manger quelques pommes de terre avec nous. Je ne pense pas que nos parents en tiendront rigueur.
Les De Bayard allient une certaine rusticité à une étrange noblesse, une sauvagerie domptée par leur sens de l’honneur et du devoir. Eleanor est différente : bourgeoise, c’est à la sueur de son front et au travail de ses bras qu’elle a su construire sa fortune, tant et si bien que son union avec Aimable ont quelque peu rempli les bourses de leur famille. Isabeau sourit joyeusement à Emilien, ravi de l’avoir près de lui, se penche même pour mieux l’observer.
_ On fête plein de choses ! C’est mon anniversaire, Oncle Ulric a pris sa retraite et Papa, lui, il est Chevalier à Paris maintenant !
Explique-t-il avec entrain.
Pour un garçon si distrait qu’est Emilien, les diversions sont nombreuses. Eleanor revient à table aux côtés d’Aimable, les lapins ont été dépouillés, leur fourrure a été récupérée, leur corps, transpercé d’un pique avant d’être suspendu au dessus du feu de bois. Le couple se tient la main – Eleanor tourne ses yeux vers ses enfants pour s’assurer à ce qu’ils mangent bien. Surprise de voir Emilien, elle lui offre un sourire avant de tourner les yeux vers son mari.
_ Alors ? Que penses-tu de ce jeune garçon qu’Ulric a embauché ? Un fauconnier, ah ! Je n’aurais jamais crû qu’Ulric s’intéressait aux oiseaux de proie ! Glisse-t-elle avec malice.
Le dénommé, l’ayant entendue, lui adresse un de ses regards habituels – si durs qu’il semble l’écraser à la force de ses énormes poings. Pourtant, ceux qui le connaissent sauront y lire un fond de tendresse au fond de ses prunelles. L’ours lui ressemble bien.
_ Les oiseaux sont des animaux magnifiques. Aucun être sur Terre n’égalise la grâce de leur vol et la liberté de leurs ailes.
Côme est à table, lui aussi. Grand frère d’Aimable, l’homme approche de la quarantaine. Ses cheveux bruns bien coiffés, coupés courts, une barbe courte, élégamment taillée, un nez retroussé et un regard malicieux. Quelques tâches de rousseur soulignent le pétillant de son regard lorsqu’il joint les mains sur son ventre bedonnant.
_ Ah ! Tu envies surtout leur légèreté, n’est-ce pas, mon frère ? Pouffe-t-il, A ton âge, on se rapproche bien plus de la terre que du ciel !
Ulric se contente d’un grognement grave et rauque alors qu’Eleanor éclate de rire.
_ Côme ! Ce n’est pas parce que ton frère vieillit que tu peux lui dire qu’il se tasse ! S’il y en a bien un à qui ça arrive, c’est toi, quand on voit ton ventre bedonnant !
Côme s’esclaffe à son tour et son visage s’éclaire d’un grand sourire.
_ Je l’avoue ! Dieu nous a fait proche du sol et des bonnes choses, que voulez-vous ! Mon âme sera probablement bien plus légère que la vôtre lorsqu’elle montera au ciel !
_ Vu ton pêché de gourmandise, j’en doute, bougonne Ulric.
_ Ah ! Je fais seulement honneur aux présents que nous offre Dieu. Et je suis probablement celui qui connaît le mieux nos textes de prière sur toute la fratrie. D’ailleurs, Aimable, Ulric, avez-vous prié avant de commencer le repas ?
Aimable hoche docilement la tête, imité par son frère aîné. Les discussions vont de bon train, les boutades s’échangent dans la fratrie, alors qu’Isabeau tourne les yeux vers Emilien.
_ Comment il s’appelle ton faucon ? Comment tu l’as trouvé ? C’est dur à dresser un faucon ? Tu n’as pas peur qu’il s’envole et qu’il ne revienne plus jamais un jour ? Tu crois qu’un faucon, ça peut attaquer un homme ?
L’enfant est curieux et d’un regard, Aimable surveille son fils. Néanmoins, il s’étonne qu’à force de côtoyer ce jeune loup, une part en lui s’apaise – la haine n’est plus aussi perceptible qu’autrefois. Que se passe-t-il ? L’Ouroboros ronge-t-il son frein, n’attend-t-il qu’un moment d’inattention pour frapper ? Accepte-t-il en fin de compte la présence de ce garou sans plus s’en offusquer ?
Plongé dans ses pensées, Aimable ne prête plus tant attention aux adultes : son attention revient sur les enfants – l’Infant.
@Emilien Blanchard
Dim 26 Sep - 14:06
@Aimable E. De Bayard
Ca lui fait bizarre à Emilien, d’être là, installé à table avec tout le monde. Il n’est pas sûr que ce soit réellement sa place. Pas sûr non plus qu’avoir refusé l’invitation ait été bien pris. Alors il est assis, juste à côté des enfants. Parce que, pour le coup, les enfants c’est beaucoup moins compliqué à comprendre que les adultes. Il remercie le petit garçon pour l’assiette et prend un instant pour observer ce qu’elle contient, avant de sourire.
– C’est pas vraiment moi qui les ai chassés. C’est l’oiseau. C’est lui qui les a trouvés et les a attrapés.
C’est un peu la même chose pourtant. Si l’oiseau a attrapé le lapin, c’est bien parce qu’Emilien le lui a demandé. Mais pourtant, le jeune homme n’a pas vraiment l’impression que ce soit grâce à lui et ça lui parait important de le dire. Il engloutit une bouchée de patates, avant de tourner les yeux vers le plus jeune des deux enfants, qui l’observe avec tellement de curiosité qu’il finit par pencher la tête.
– J’ai un truc sur la figure ? Machinalement, l’Infant se frotte le visage avant de reprendre la parole, joyeux anniversaire alors.
Un joli sourire orne, juste un instant, le visage d’Emilien, avant qu’il ne laisse son regard filer de l’enfant aux autres personnes présentes. Tellement de monde, tellement de voix différentes qui s’élèvent et parlent d’autant de choses différentes. S’il arrive à capter quelques bribes de conversations, il n’arrive pas à rester focaliser sur l’une ou l’autre d’entre elles. Un instant, juste un instant, son attention se porte sur l’homme qui l’a embauché, puis sur le chevalier et sa femme, au moment même où celle-ci le regarde. Sans réfléchir il répond au sourire qu’elle lui offre, avant de piquer du nez en direction de son assiette. Un peu mal à l’aise. Il tente d’arrêter d’écouter les conversations pour se concentrer de nouveau sur son assiette et sur les personnes un peu plus proches de lui.
Il engloutit plusieurs bouchées, avant de se rendre compte que le plus jeune des enfants s’adresse directement à lui. Il relève alors les yeux vers son visage et avale ce qu’il a dans la bouche, avant de laisser échapper un petit rire.
– Tu poses beaucoup de questions. Une à la fois.
Sans cesser de sourire avec amusement, il porte son gobelet à ses lèvres pour faire passer ce qu’il a mangé, avant de se tourner franchement vers l’enfant pour répondre à ses questions.
– Il s’appelle Ciel. Mais il ne m’appartient pas, il est à ton oncle, moi je m’en occupe juste. Il laissa passer un instant, le temps que l’information s’imprime dans l’esprit de l’enfant, avant de reprendre la parole, il a été récupéré au nid, tout petit et je l’ai nourri. Comme ça il est devenu ami avec moi, et comme ça, il sait que je peux lui donner à manger et il revient quand je le lâche.
Est-ce que c’était dur à dresser ? En réalité, Emilien ne s’est jamais réellement posé la question, parce qu’il aime ce qu’il fait et il se retrouve un peu désemparé alors qu’il continue de regarder le petit garçon.
– Si, j’ai toujours peur qu’il ne revienne pas. Si t’étais à sa place, tu reviendrais toi ? Un peu de curiosité de la part du jeune homme, avant qu’il ne se mette à rire pour de bon en secouant la tête. Non, je ne pense pas. On est beaucoup trop gros pour lui et puis, lui avec ses ailes il peut s’enfuir s’il le veut, il va pas nous attaquer.
Du moins, il l’espère… et ses sourcils s’arquent légèrement en même temps qu’il quitte l’enfant du regard un instant pour regarder autour de lui et se rendre compte que le chevalier les fixe.
– C’est pas vraiment moi qui les ai chassés. C’est l’oiseau. C’est lui qui les a trouvés et les a attrapés.
C’est un peu la même chose pourtant. Si l’oiseau a attrapé le lapin, c’est bien parce qu’Emilien le lui a demandé. Mais pourtant, le jeune homme n’a pas vraiment l’impression que ce soit grâce à lui et ça lui parait important de le dire. Il engloutit une bouchée de patates, avant de tourner les yeux vers le plus jeune des deux enfants, qui l’observe avec tellement de curiosité qu’il finit par pencher la tête.
– J’ai un truc sur la figure ? Machinalement, l’Infant se frotte le visage avant de reprendre la parole, joyeux anniversaire alors.
Un joli sourire orne, juste un instant, le visage d’Emilien, avant qu’il ne laisse son regard filer de l’enfant aux autres personnes présentes. Tellement de monde, tellement de voix différentes qui s’élèvent et parlent d’autant de choses différentes. S’il arrive à capter quelques bribes de conversations, il n’arrive pas à rester focaliser sur l’une ou l’autre d’entre elles. Un instant, juste un instant, son attention se porte sur l’homme qui l’a embauché, puis sur le chevalier et sa femme, au moment même où celle-ci le regarde. Sans réfléchir il répond au sourire qu’elle lui offre, avant de piquer du nez en direction de son assiette. Un peu mal à l’aise. Il tente d’arrêter d’écouter les conversations pour se concentrer de nouveau sur son assiette et sur les personnes un peu plus proches de lui.
Il engloutit plusieurs bouchées, avant de se rendre compte que le plus jeune des enfants s’adresse directement à lui. Il relève alors les yeux vers son visage et avale ce qu’il a dans la bouche, avant de laisser échapper un petit rire.
– Tu poses beaucoup de questions. Une à la fois.
Sans cesser de sourire avec amusement, il porte son gobelet à ses lèvres pour faire passer ce qu’il a mangé, avant de se tourner franchement vers l’enfant pour répondre à ses questions.
– Il s’appelle Ciel. Mais il ne m’appartient pas, il est à ton oncle, moi je m’en occupe juste. Il laissa passer un instant, le temps que l’information s’imprime dans l’esprit de l’enfant, avant de reprendre la parole, il a été récupéré au nid, tout petit et je l’ai nourri. Comme ça il est devenu ami avec moi, et comme ça, il sait que je peux lui donner à manger et il revient quand je le lâche.
Est-ce que c’était dur à dresser ? En réalité, Emilien ne s’est jamais réellement posé la question, parce qu’il aime ce qu’il fait et il se retrouve un peu désemparé alors qu’il continue de regarder le petit garçon.
– Si, j’ai toujours peur qu’il ne revienne pas. Si t’étais à sa place, tu reviendrais toi ? Un peu de curiosité de la part du jeune homme, avant qu’il ne se mette à rire pour de bon en secouant la tête. Non, je ne pense pas. On est beaucoup trop gros pour lui et puis, lui avec ses ailes il peut s’enfuir s’il le veut, il va pas nous attaquer.
Du moins, il l’espère… et ses sourcils s’arquent légèrement en même temps qu’il quitte l’enfant du regard un instant pour regarder autour de lui et se rendre compte que le chevalier les fixe.
Jeu 30 Sep - 11:47
Isabeau s’apaise le temps d’écouter les réponses d’Emilien.
A côtoyer cette famille, Emilien doit avoir déjà connu les longues soirées passées près du feu. L’ensemble de la famille réunie dans une pièce étroite, tous les uns contre les autres – Ulric qui prenait toute la place, Côme et Marie devant le feu, les enfants entre eux, Aimable qui rôdait dans les ombres de la pièce, son épouse apportant à tous des couvertures, des tisanes ou des biscuits à grignoter. Les nuits passées à se conter des histoires : des récits chevaleresques où les dragons s’extirpaient des grottes montagneuses, où d’étranges créatures s’arrachaient des forêts, où quelques guerriers faisaient face à une armée. Ces histoires ont pu alimenter les rêves d’enfants d’Emilien… Bien qu’il arrivait parfois que des loups soient glissés dans ces récits. Les loups étaient peu présents, mais chacune de leur apparition créait une vague d’angoisse chez les plus jeunes enfants. Car il arrivait qu’on entende les loups hurler depuis les grandes maisons de pierre. Une menace qui venait rôder jusqu’à leurs portes – penserait-on.
Car aucun d’entre eux n’approchaient du bétail des De Bayard. Ou des murs de pierre. Ils longeaient l’orée de la forêt et peut-être qu’Emilien a déjà vu les étranges traces parcourir les alentours. C’eut été des arbres griffés en hauteur, par des ours dressés sur deux pattes – seuls eux étaient assez grands pour atteindre les troncs à une telle hauteur. Certaines nuits, une étrange odeur délimitait le domaine – un parfum musqué, mêlant de lointains parfums ensanglantés à des fragrances bestiales. Des empreintes méconnaissables dans la neige – un corps qu’on traîne, des branches ? Du sang sur le linceul immaculé de la montagne, seul témoin d’une attaque – des loups se seraient-ils battus ? Des sangliers ? Les traces sont parfois bien nombreuses à l’orée de la forêt. Et plus profondément dans l’obscurité.
Pourtant, aucun d’entre eux ne parle de cette Bête qui rôde. Ulric ignore simplement les traces, Aimable ne semble pas même les voir, Marie observe les branches, Côme rit du temps qui se gâte. Les enfants jouent. Pour eux, c’est habituel.
Isabeau cligne des yeux à la question d’Emilien. L’enfant, si impulsif d’habitude, prend le temps de réfléchir. Finalement, Isabeau finit par sourire.
_ Moi ? Je reviendrai ! Affirme-t-il, Je reviens toujours aux gens que j’aime ! Encore plus s’ils me donnent à manger !
_ Tu ne vaux pas mieux que Oncle Côme, glisse Richard avec malice.
Suivant le regard d’Emilien, Isabeau tourne les yeux vers son père à qui il sourit.
_ Et toi Papa ? Tu reviendrais ?
Aimable s’arrache de ses pensées.
_ Qu.. Quoi ?
_ Si tu étais à la place du faucon, est-ce que tu reviendrais ?
Revenir. Revenir.
Revenir chez lui. Revenir à lui. Cette question… Elle hante toujours son esprit. Revenir, quand il part loin, loin dans les ombres, loin de sa conscience, quand son corps n’est plus le sien. Quand il n’a plus de place dans son esprit. Quand il ne sait plus où il est, il ne sait plus ce qu’il fait, il ne sait plus ce qu’il est. Revenir.
_ … Je reviendrai, répond Aimable. Malgré lui, sa gorge se broie. Et s’il ne revenait pas ? S’il ne revenait pas ? Que se passerait-il ? Que deviendrait-il ? Ses yeux se baissent et Eleanor, tendrement, noue sa main à la sienne.
_ De toute façon, je ne compte pas te laisser partir. Je viendrai te chercher, assure-t-elle dans un grand sourire malicieux. Et dans ses yeux qui s’unissent aux siens, Aimable lit une promesse… Qui l’apaise. Ses épaules se relâchent. La tension abandonne timidement son visage, alors qu’un sourire éclaire ses traits.
Il ne répond pas : mais sa main se resserre tendrement sur celle de son épouse. Isabeau sourit et la question passe alors de bouche en bouche, la réponse survient tout aussi vite.
_ Moi ? Revenir ! S’esclaffe Côme, Vous plaisantez, j’irai rejoindre Dieu au plus vite plutôt que continuer à vous supporter !
_ Dit celui qui s’invite même quand on ne l’y convient pas ! Réplique Eleanor dans un éclat de rire.
Ulric se contente d’un son rauque, moqueur, alors qu’il porte à ses lèvres son verre. Il le boit d’une traite avant de soupirer.
_ Combien même un oiseau passe son temps à voler, il finit toujours par devoir se poser. Et il préfère les branches capables de le supporter.
Des paroles qui ne sont pas dénuées de sens… Isabeau finit par diriger son attention vers Emilien.
_ Qu’est-ce que tu ferais, toi ?
L’enfant, avec sa naïveté innocente, reprend.
_ Est-ce que Oncle Ulric t’a trouvé et t’a nourri ?
Après tout, sa tante, Marie, possède un orphelinat. Marie, la sœur d’Aimable, est une femme grande, toute en finesse, en os saillants, en sourires rayonnants, une chevelure brune disciplinée, les mains chargées d’enfants. Mère de 3 enfants, elle veille sur un orphelinat et une vingtaine d’autres marmots qu’elle a recueillis dans les différents villages…. Il n’est pas rare qu’ils se mêlent aux fêtes de famille.
_ Elle est où, ta famille ? Elle te manque ? Reprend Isabeau en remuant les jambes.
A côtoyer cette famille, Emilien doit avoir déjà connu les longues soirées passées près du feu. L’ensemble de la famille réunie dans une pièce étroite, tous les uns contre les autres – Ulric qui prenait toute la place, Côme et Marie devant le feu, les enfants entre eux, Aimable qui rôdait dans les ombres de la pièce, son épouse apportant à tous des couvertures, des tisanes ou des biscuits à grignoter. Les nuits passées à se conter des histoires : des récits chevaleresques où les dragons s’extirpaient des grottes montagneuses, où d’étranges créatures s’arrachaient des forêts, où quelques guerriers faisaient face à une armée. Ces histoires ont pu alimenter les rêves d’enfants d’Emilien… Bien qu’il arrivait parfois que des loups soient glissés dans ces récits. Les loups étaient peu présents, mais chacune de leur apparition créait une vague d’angoisse chez les plus jeunes enfants. Car il arrivait qu’on entende les loups hurler depuis les grandes maisons de pierre. Une menace qui venait rôder jusqu’à leurs portes – penserait-on.
Car aucun d’entre eux n’approchaient du bétail des De Bayard. Ou des murs de pierre. Ils longeaient l’orée de la forêt et peut-être qu’Emilien a déjà vu les étranges traces parcourir les alentours. C’eut été des arbres griffés en hauteur, par des ours dressés sur deux pattes – seuls eux étaient assez grands pour atteindre les troncs à une telle hauteur. Certaines nuits, une étrange odeur délimitait le domaine – un parfum musqué, mêlant de lointains parfums ensanglantés à des fragrances bestiales. Des empreintes méconnaissables dans la neige – un corps qu’on traîne, des branches ? Du sang sur le linceul immaculé de la montagne, seul témoin d’une attaque – des loups se seraient-ils battus ? Des sangliers ? Les traces sont parfois bien nombreuses à l’orée de la forêt. Et plus profondément dans l’obscurité.
Pourtant, aucun d’entre eux ne parle de cette Bête qui rôde. Ulric ignore simplement les traces, Aimable ne semble pas même les voir, Marie observe les branches, Côme rit du temps qui se gâte. Les enfants jouent. Pour eux, c’est habituel.
Isabeau cligne des yeux à la question d’Emilien. L’enfant, si impulsif d’habitude, prend le temps de réfléchir. Finalement, Isabeau finit par sourire.
_ Moi ? Je reviendrai ! Affirme-t-il, Je reviens toujours aux gens que j’aime ! Encore plus s’ils me donnent à manger !
_ Tu ne vaux pas mieux que Oncle Côme, glisse Richard avec malice.
Suivant le regard d’Emilien, Isabeau tourne les yeux vers son père à qui il sourit.
_ Et toi Papa ? Tu reviendrais ?
Aimable s’arrache de ses pensées.
_ Qu.. Quoi ?
_ Si tu étais à la place du faucon, est-ce que tu reviendrais ?
Revenir. Revenir.
Revenir chez lui. Revenir à lui. Cette question… Elle hante toujours son esprit. Revenir, quand il part loin, loin dans les ombres, loin de sa conscience, quand son corps n’est plus le sien. Quand il n’a plus de place dans son esprit. Quand il ne sait plus où il est, il ne sait plus ce qu’il fait, il ne sait plus ce qu’il est. Revenir.
_ … Je reviendrai, répond Aimable. Malgré lui, sa gorge se broie. Et s’il ne revenait pas ? S’il ne revenait pas ? Que se passerait-il ? Que deviendrait-il ? Ses yeux se baissent et Eleanor, tendrement, noue sa main à la sienne.
_ De toute façon, je ne compte pas te laisser partir. Je viendrai te chercher, assure-t-elle dans un grand sourire malicieux. Et dans ses yeux qui s’unissent aux siens, Aimable lit une promesse… Qui l’apaise. Ses épaules se relâchent. La tension abandonne timidement son visage, alors qu’un sourire éclaire ses traits.
Il ne répond pas : mais sa main se resserre tendrement sur celle de son épouse. Isabeau sourit et la question passe alors de bouche en bouche, la réponse survient tout aussi vite.
_ Moi ? Revenir ! S’esclaffe Côme, Vous plaisantez, j’irai rejoindre Dieu au plus vite plutôt que continuer à vous supporter !
_ Dit celui qui s’invite même quand on ne l’y convient pas ! Réplique Eleanor dans un éclat de rire.
Ulric se contente d’un son rauque, moqueur, alors qu’il porte à ses lèvres son verre. Il le boit d’une traite avant de soupirer.
_ Combien même un oiseau passe son temps à voler, il finit toujours par devoir se poser. Et il préfère les branches capables de le supporter.
Des paroles qui ne sont pas dénuées de sens… Isabeau finit par diriger son attention vers Emilien.
_ Qu’est-ce que tu ferais, toi ?
L’enfant, avec sa naïveté innocente, reprend.
_ Est-ce que Oncle Ulric t’a trouvé et t’a nourri ?
Après tout, sa tante, Marie, possède un orphelinat. Marie, la sœur d’Aimable, est une femme grande, toute en finesse, en os saillants, en sourires rayonnants, une chevelure brune disciplinée, les mains chargées d’enfants. Mère de 3 enfants, elle veille sur un orphelinat et une vingtaine d’autres marmots qu’elle a recueillis dans les différents villages…. Il n’est pas rare qu’ils se mêlent aux fêtes de famille.
_ Elle est où, ta famille ? Elle te manque ? Reprend Isabeau en remuant les jambes.
Lun 25 Oct - 12:09
C’est un rire clairement amusé qui fuit des lèvres de l’Infant face à la réponse de l’enfant. Amusé, mais pas méchant et qui s’éteint presque aussi rapidement qu’il est arrivé.
– C’est une bonne raison de revenir chez soi, je suis d’accord.
L’espace d’un instant Emilien se perd dans ses propres souvenirs, quelques images mais surtout une multitude d’odeurs et de sensations. Des souvenirs qui font naitre chez lui une certaine mélancolie et qui lui font oublier l’endroit où il se trouve et les personnes qui l’entourent. Assez longtemps pour qu’il semble perdre le fil de la conversation, ce n’est que lorsque le chevalier prend la parole qu’il semble revenir à lui et penche la tête en l’observant avec curiosité. Il ne rate alors rien du micro échange entre Aimable et sa femme et c’est vers lui que son regard reste focalisé alors que les autres reprennent et répondent à la question. Comme s’il cherchait à découvrir le sous-entendu dissimulé.
Il se détourne finalement d’eux lorsqu’Ulric prend la parole et, sans y penser, il hoche légèrement la tête avant de se remettre à grignoter… jusqu’à ce que la question revienne vers lui. Il ne s’y était pas attendu. A vrai dire, il préfère ne pas y penser, pourtant, maintenant les regards sont dirigés vers lui. Alors, il prend le temps de la réflexion, les sourcils légèrement froncés alors qu’il fixe son assiette, puis il finit par relever le regard vers l’enfant.
– Je reviendrai aussi, mais pas pour la nourriture, simplement parce que les gens auxquels je tiens sont importants. La suite de la question le fait rire et il secoue la tête, en quelques sortes, on peut dire ça oui. Je voyageais et il m’a donné du travail.
C’est tout aussi simple que ça. Même s’il lui arrive encore de se demander pourquoi Ulric a accepté, il lui en est reconnaissant. Ce n’est qu’ensuite que, pour lui, la discussion se corse. Son regard se perd alors dans le vide, avant qu’il ne fixe Isabeau, posa sa joue contre sa main.
– Ma mère est restée dans le village où j’ai grandi, elle s’occupe de ses chèvres et fait pousser des plantes pour soigner ceux qui ont besoin d’elle. Bien sûr qu’elle me manque, ta famille ne te manquerait pas à toi, si tu partais loin de chez toi ?
La question lui semble être un juste retour des choses, d’autant que, pour Emilien, être loin de sa famille signifie aussi être loin de sa meute et cela fait naitre, par moment, une sensation manque assez désagréable, sensation qu’il compense le plus souvent par le temps qu’il passe à s’occuper de ses oiseaux. Machinalement, il se remet à manger, comme si ça pouvait l’empêcher de trop penser à sa mère, à savoir si elle est en sécurité, quand bien même il n’a aucun doute sur ses capacités à se défendre si le besoin s’en faisait sentir durant son absence.
– C’est une bonne raison de revenir chez soi, je suis d’accord.
L’espace d’un instant Emilien se perd dans ses propres souvenirs, quelques images mais surtout une multitude d’odeurs et de sensations. Des souvenirs qui font naitre chez lui une certaine mélancolie et qui lui font oublier l’endroit où il se trouve et les personnes qui l’entourent. Assez longtemps pour qu’il semble perdre le fil de la conversation, ce n’est que lorsque le chevalier prend la parole qu’il semble revenir à lui et penche la tête en l’observant avec curiosité. Il ne rate alors rien du micro échange entre Aimable et sa femme et c’est vers lui que son regard reste focalisé alors que les autres reprennent et répondent à la question. Comme s’il cherchait à découvrir le sous-entendu dissimulé.
Il se détourne finalement d’eux lorsqu’Ulric prend la parole et, sans y penser, il hoche légèrement la tête avant de se remettre à grignoter… jusqu’à ce que la question revienne vers lui. Il ne s’y était pas attendu. A vrai dire, il préfère ne pas y penser, pourtant, maintenant les regards sont dirigés vers lui. Alors, il prend le temps de la réflexion, les sourcils légèrement froncés alors qu’il fixe son assiette, puis il finit par relever le regard vers l’enfant.
– Je reviendrai aussi, mais pas pour la nourriture, simplement parce que les gens auxquels je tiens sont importants. La suite de la question le fait rire et il secoue la tête, en quelques sortes, on peut dire ça oui. Je voyageais et il m’a donné du travail.
C’est tout aussi simple que ça. Même s’il lui arrive encore de se demander pourquoi Ulric a accepté, il lui en est reconnaissant. Ce n’est qu’ensuite que, pour lui, la discussion se corse. Son regard se perd alors dans le vide, avant qu’il ne fixe Isabeau, posa sa joue contre sa main.
– Ma mère est restée dans le village où j’ai grandi, elle s’occupe de ses chèvres et fait pousser des plantes pour soigner ceux qui ont besoin d’elle. Bien sûr qu’elle me manque, ta famille ne te manquerait pas à toi, si tu partais loin de chez toi ?
La question lui semble être un juste retour des choses, d’autant que, pour Emilien, être loin de sa famille signifie aussi être loin de sa meute et cela fait naitre, par moment, une sensation manque assez désagréable, sensation qu’il compense le plus souvent par le temps qu’il passe à s’occuper de ses oiseaux. Machinalement, il se remet à manger, comme si ça pouvait l’empêcher de trop penser à sa mère, à savoir si elle est en sécurité, quand bien même il n’a aucun doute sur ses capacités à se défendre si le besoin s’en faisait sentir durant son absence.
Mer 24 Nov - 15:01
Richard et Isabeau ne sont guère farouches.
Leurs journées sont ponctuées des jeux avec les enfants de l’orphelinat de Marie : Emilien la connaît bien. La sœur d’Aimable, une femme que les 3 grossesses successives ont affaibli. Malgré ses pommettes saillantes, ses yeux cernés et ses joues creusées, elle n’en perd pas pour autant son sourire ou sa joie de vivre. Surprenant le regard de son frère, elle tourne les yeux à son tour mais sourit avec tendresse.
Si les enfants commencent à apprécier Emilien, il est sûr que le jeune homme se retrouvera rapidement assailli de toutes parts par les autres orphelins. Emilien reste un jeune homme après tout, qui a toute la vie devant lui. Elle se demande parfois s’il restera au service d’Ulric ou s’il rejoindra la Cour de Paris… Au vu de la réputation militaire des De Bayard, il est évident qu’un fauconnier comme Emilien n’aura pas de difficultés à s’y faire une place ! Enfin, les rumeurs prétendent que la Reine n’apprécie pas la chasse, serait-elle intéressée par la présence d’un fauconnier ?
Bah ! L’important, c’est que ce garçon semble bien ici, non ?
La fin du repas approche et Ulric finit par simplement s’appuyer contre le mur de la maison, une fois son assiette vide. Eleanor se lève pour préparer une tisane alors qu’Aimable, Marie et Côme rassemblent les assiettes. Richard aide, alors qu’Isabeau continue de discuter avec Emilien.
_ Oh elle a des chèvres ? Demande joyeusement Isabeau, Ma maman elle a des vaches !
Comme si Emilien ne savait pas. Quant à la dernière question d’Emilien, Isabeau cligne des paupières et baisse les yeux.
_ Oh si… Quand Papa part, il me manque beaucoup, reconnaît tristement Isabeau dans une petite moue. Aimable hésite, mais se lève de table et soulève doucement Isabeau dans ses bras. L’enfant, surpris, retrouve le sourire et se glisse tendrement dans les bras de son père pour l’enlacer.
_ Tu sais Isabeau, certains sujets peuvent faire de la peine, glisse maladroitement Aimable.
_ Oh… Je suis désolé ! Affirme l’enfant dans une petite moue en baissant les yeux, Je voulais juste savoir !
Aimable repose doucement Isabeau au sol et ébouriffe ses cheveux avant de tourner les yeux vers Emilien.
_ Navré. Il peut se montrer… Curieux.
Mal à l’aise, il frotte sa nuque et adresse un regard à son frère. Ulric semble s’être endormi, ses mains jointes contre son ventre. Alors, Aimable rabaisse les yeux vers Emilien et lui fait signe de le suivre.
_ J’aimerai échanger quelques mots avec toi.
Aimable s’éloigne, attendant à ce que l’infant le rejoigne. Il préfère s’éloigner de la cour et longer les murs de la demeure, pendant que les enfants se rassemblent. Ils sortent pour aller jouer dans les champs, bientôt surveillés par Côme et Marie, pendant que le reste de la famille reste entre les murs de leur bâtisse. Aimable marche encore, jusqu’à approcher de la petite chapelle qu’ils ont construite à proximité de leur domaine. A côté, se trouve un minuscule cimetière, constitué de quelques tombes, moins d’une poignée – Ignace De Bayard, Baptiste De Bayard et une tombe intitulée Gwendoline. Aimable ne s’y arrête pas, préférant rejoindre un arbre à proximité, leur permettant de contempler la vallée qui s’étend sous eux.
Il pense à ce qu’Emilien lui a fait remarquer. Que sa présence semblait le déranger. Il n’a pas tord. Une part en lui est troublée par sa présence et pourtant, l’Ouroboros s’apaise progressivement. Ce garçon est arraché de ses racines. Loin de chez lui. Loin des siens. Et avec la crainte… De ne pas être accueilli dans ce refuge qui s’est offert à lui. Aimable se sent coupable. Il frotte songeusement le coin de sa mâchoire, couverte d’une barbe de quelques jours.
_ Je… Je voyage beaucoup. Il m’arrive d’être loin de ma famille, parfois, quelques mois.
Il essaye, tant bien que mal, de lui dire qu’il comprend l’absence qu’il peut ressentir. La nostalgie d’un chez soi. Ses bras se croisent sur son torse alors qu’il observe l’horizon avec son sérieux habituel.
_ Si jamais un de mes voyages me mène à proximité de ce qui a été tes terres… Que dirais-tu de m’accompagner ? Tu pourras rendre visite à ta famille, si tu le souhaites. Mon frère l’acceptera. Puis nous pourrons rentrer ensemble.
Sa manière de dire qu’il restera toujours le bienvenue. Qu’il l’accepte, enfin, qu’il accepte l’idée que ce garçon puisse à présent vivre sur leur domaine. Bien que sa nature… Le préoccupe.
Un tel voyage pourrait être l’occasion de discuter. D’en savoir plus sur ce qu’il est. Il ne sait pas comment aborder le sujet, mais il sait qu’en discuter à proximité de sa famille… N’est guère la meilleure des idées. Il ne souhaite pas attirer leurs suspicions, ni sur lui, ni sur l’infant. Pas maintenant qu’Emilien, après avoir si longtemps voyagé, ait enfin trouvé quelqu’un pour lui offrir logis, nourritures et protection.
Aimable décroise les bras dans un soupir. Et malgré tout cela, malgré sa méfiance, il s’inquiète pour ce garçon si loin de chez lui. Pour sa mère. Il les connaît à peine. Et voilà qu’il veut l’aider.
Il se demande ce qui a pu pousser Emilien à partir. Il espère qu’aucun drame n’est survenu. A cette pensée, sa main se referme songeusement sur la croix qu’il garde autour du cou. Il repense à leur discussion. A la joie de l’enfant lorsqu’il a mentionné Paris.
_ Je monte aussi souvent sur Paris. Et j’ai compris que tu as pu… apprécier cette ville. De même, si tu en ressens le désir, nous pourrons faire la route ensemble.
Il détourne le regard, gêné. Timide, il préfère s’écarter d’un pas.
_ Je te laisserai réfléchir à ces propositions. Nous pourrons en rediscuter quand l’occasion se présentera. Je m’excuse quant aux regards que j’ai pu t’adresser ainsi que pour ma… hm. Mes inquiétudes. J’ai apprécié nos conversations.
Sur ces mots, Aimable s’éloigne en fin de compte pour descendre la pente du champ.
Leurs journées sont ponctuées des jeux avec les enfants de l’orphelinat de Marie : Emilien la connaît bien. La sœur d’Aimable, une femme que les 3 grossesses successives ont affaibli. Malgré ses pommettes saillantes, ses yeux cernés et ses joues creusées, elle n’en perd pas pour autant son sourire ou sa joie de vivre. Surprenant le regard de son frère, elle tourne les yeux à son tour mais sourit avec tendresse.
Si les enfants commencent à apprécier Emilien, il est sûr que le jeune homme se retrouvera rapidement assailli de toutes parts par les autres orphelins. Emilien reste un jeune homme après tout, qui a toute la vie devant lui. Elle se demande parfois s’il restera au service d’Ulric ou s’il rejoindra la Cour de Paris… Au vu de la réputation militaire des De Bayard, il est évident qu’un fauconnier comme Emilien n’aura pas de difficultés à s’y faire une place ! Enfin, les rumeurs prétendent que la Reine n’apprécie pas la chasse, serait-elle intéressée par la présence d’un fauconnier ?
Bah ! L’important, c’est que ce garçon semble bien ici, non ?
La fin du repas approche et Ulric finit par simplement s’appuyer contre le mur de la maison, une fois son assiette vide. Eleanor se lève pour préparer une tisane alors qu’Aimable, Marie et Côme rassemblent les assiettes. Richard aide, alors qu’Isabeau continue de discuter avec Emilien.
_ Oh elle a des chèvres ? Demande joyeusement Isabeau, Ma maman elle a des vaches !
Comme si Emilien ne savait pas. Quant à la dernière question d’Emilien, Isabeau cligne des paupières et baisse les yeux.
_ Oh si… Quand Papa part, il me manque beaucoup, reconnaît tristement Isabeau dans une petite moue. Aimable hésite, mais se lève de table et soulève doucement Isabeau dans ses bras. L’enfant, surpris, retrouve le sourire et se glisse tendrement dans les bras de son père pour l’enlacer.
_ Tu sais Isabeau, certains sujets peuvent faire de la peine, glisse maladroitement Aimable.
_ Oh… Je suis désolé ! Affirme l’enfant dans une petite moue en baissant les yeux, Je voulais juste savoir !
Aimable repose doucement Isabeau au sol et ébouriffe ses cheveux avant de tourner les yeux vers Emilien.
_ Navré. Il peut se montrer… Curieux.
Mal à l’aise, il frotte sa nuque et adresse un regard à son frère. Ulric semble s’être endormi, ses mains jointes contre son ventre. Alors, Aimable rabaisse les yeux vers Emilien et lui fait signe de le suivre.
_ J’aimerai échanger quelques mots avec toi.
Aimable s’éloigne, attendant à ce que l’infant le rejoigne. Il préfère s’éloigner de la cour et longer les murs de la demeure, pendant que les enfants se rassemblent. Ils sortent pour aller jouer dans les champs, bientôt surveillés par Côme et Marie, pendant que le reste de la famille reste entre les murs de leur bâtisse. Aimable marche encore, jusqu’à approcher de la petite chapelle qu’ils ont construite à proximité de leur domaine. A côté, se trouve un minuscule cimetière, constitué de quelques tombes, moins d’une poignée – Ignace De Bayard, Baptiste De Bayard et une tombe intitulée Gwendoline. Aimable ne s’y arrête pas, préférant rejoindre un arbre à proximité, leur permettant de contempler la vallée qui s’étend sous eux.
Il pense à ce qu’Emilien lui a fait remarquer. Que sa présence semblait le déranger. Il n’a pas tord. Une part en lui est troublée par sa présence et pourtant, l’Ouroboros s’apaise progressivement. Ce garçon est arraché de ses racines. Loin de chez lui. Loin des siens. Et avec la crainte… De ne pas être accueilli dans ce refuge qui s’est offert à lui. Aimable se sent coupable. Il frotte songeusement le coin de sa mâchoire, couverte d’une barbe de quelques jours.
_ Je… Je voyage beaucoup. Il m’arrive d’être loin de ma famille, parfois, quelques mois.
Il essaye, tant bien que mal, de lui dire qu’il comprend l’absence qu’il peut ressentir. La nostalgie d’un chez soi. Ses bras se croisent sur son torse alors qu’il observe l’horizon avec son sérieux habituel.
_ Si jamais un de mes voyages me mène à proximité de ce qui a été tes terres… Que dirais-tu de m’accompagner ? Tu pourras rendre visite à ta famille, si tu le souhaites. Mon frère l’acceptera. Puis nous pourrons rentrer ensemble.
Sa manière de dire qu’il restera toujours le bienvenue. Qu’il l’accepte, enfin, qu’il accepte l’idée que ce garçon puisse à présent vivre sur leur domaine. Bien que sa nature… Le préoccupe.
Un tel voyage pourrait être l’occasion de discuter. D’en savoir plus sur ce qu’il est. Il ne sait pas comment aborder le sujet, mais il sait qu’en discuter à proximité de sa famille… N’est guère la meilleure des idées. Il ne souhaite pas attirer leurs suspicions, ni sur lui, ni sur l’infant. Pas maintenant qu’Emilien, après avoir si longtemps voyagé, ait enfin trouvé quelqu’un pour lui offrir logis, nourritures et protection.
Aimable décroise les bras dans un soupir. Et malgré tout cela, malgré sa méfiance, il s’inquiète pour ce garçon si loin de chez lui. Pour sa mère. Il les connaît à peine. Et voilà qu’il veut l’aider.
Il se demande ce qui a pu pousser Emilien à partir. Il espère qu’aucun drame n’est survenu. A cette pensée, sa main se referme songeusement sur la croix qu’il garde autour du cou. Il repense à leur discussion. A la joie de l’enfant lorsqu’il a mentionné Paris.
_ Je monte aussi souvent sur Paris. Et j’ai compris que tu as pu… apprécier cette ville. De même, si tu en ressens le désir, nous pourrons faire la route ensemble.
Il détourne le regard, gêné. Timide, il préfère s’écarter d’un pas.
_ Je te laisserai réfléchir à ces propositions. Nous pourrons en rediscuter quand l’occasion se présentera. Je m’excuse quant aux regards que j’ai pu t’adresser ainsi que pour ma… hm. Mes inquiétudes. J’ai apprécié nos conversations.
Sur ces mots, Aimable s’éloigne en fin de compte pour descendre la pente du champ.
Sam 15 Jan - 17:50
Emilien reste concentré sur son repas, en même temps qu’il écoute d’une oreille désormais un peu distraite le babillage du jeune garçon. A la mention des vaches un sourire affleure sur ses lèvres, juste un instant, réminiscence de ses transformations où, il faut l’avouer, certaines d’entre elles ont probablement vu leur vie défiler devant leurs yeux. Mais ce n’est pas là le genre de choses à dire à un enfant… pas le genre de chose à dire à qui que ce soit en réalité. Simplement parce que, mine de rien, Emilien tient à la vie. Puis, il ne veut pas non plus choquer l’enfant, même si ça lui permettrait de changer de sujet. Heureusement, la discussion est coupée court lorsque le chevalier vient récupérer son fils. La scène lui tire un léger sourire alors qu’il se contente dans un premier temps d’incliner la tête vers l’homme, tout en finissant son assiette.
– Ne vous en faites pas, il n’y a pas de mal. Et pour appuyer ses paroles, il offre un sourire au garçonnet, avant de relever les yeux vers Aimable, un peu perplexe durant quelques secondes, avant qu’il ne hoche la tête. D’accord.
Il suit le chevalier du regard alors que celui-ci s’éloigne, se demandant bien ce qu’il peut lui vouloir. Est-ce qu’il a commis une erreur à un moment ou un autre ? Peut-être a-t-il quelque chose à lui reprocher. Pourtant, il a beau repasser l’après midi et le repas, rien ne lui vient en tête, alors, plutôt que se poser davantage de questions, il quitte à son tour la table pour le rejoindre. Même s’il n’avait pas suivi sa progression du regard, il n’aurait pas eu de mal à le retrouver, pourtant il ne s’attendait pas à se retrouver dans le petit cimetière de la demeure et, durant un instant, il hésite à entrer. Les secondes qui s’écoulent doivent sembler une éternité au chevalier, alors, finalement, l’Infant rompt la distance qui les sépare encore et vient s’installer à proximité, un air curieux sur le visage.
Il reste parfaitement silencieux, laissant au chevalier le soin de prendre la parole en premier. Après tout, c’est lui qui veut le voir. Lorsque les premiers mots quittent enfin les lèvres de l’homme, Emilien penche la tête d’un air un peu perplexe, sans être sûr de comprendre où il veut en venir. Il en faut un peu plus pour que la lumière se fasse dans son esprit et il écarquille légèrement les yeux.
– Ca me plairait oui !
Oui ça lui plairait et il n’aurait jamais imaginé que cette proposition puisse venir du chevalier lui-même. Alors il ne dit pas non, l’idée qu’il puisse y avoir un piège ou quelque chose de ce genre derrière lui effleure un instant l’esprit mais il la repousse sans s’y attarder. A la place, une nouvelle fois il acquiesce, un sourire étirant un instant son visage.
– Je serai ravi de pouvoir vous accompagner oui. Si l’occasion se présente.
Il s’incline légèrement lorsque le chevalier prend congé et reste un instant sur place à observer les alentours. Il sait clairement que l’occasion se présentera à un moment ou un autre, cela ne fait aucun doute pour lui. Il reste sur place encore quelques instants, avant de finalement retourner à ses oiseaux, tout en jetant un dernier coup d’œil au ciel pour voir quand sera la prochaine pleine lune.
– Ne vous en faites pas, il n’y a pas de mal. Et pour appuyer ses paroles, il offre un sourire au garçonnet, avant de relever les yeux vers Aimable, un peu perplexe durant quelques secondes, avant qu’il ne hoche la tête. D’accord.
Il suit le chevalier du regard alors que celui-ci s’éloigne, se demandant bien ce qu’il peut lui vouloir. Est-ce qu’il a commis une erreur à un moment ou un autre ? Peut-être a-t-il quelque chose à lui reprocher. Pourtant, il a beau repasser l’après midi et le repas, rien ne lui vient en tête, alors, plutôt que se poser davantage de questions, il quitte à son tour la table pour le rejoindre. Même s’il n’avait pas suivi sa progression du regard, il n’aurait pas eu de mal à le retrouver, pourtant il ne s’attendait pas à se retrouver dans le petit cimetière de la demeure et, durant un instant, il hésite à entrer. Les secondes qui s’écoulent doivent sembler une éternité au chevalier, alors, finalement, l’Infant rompt la distance qui les sépare encore et vient s’installer à proximité, un air curieux sur le visage.
Il reste parfaitement silencieux, laissant au chevalier le soin de prendre la parole en premier. Après tout, c’est lui qui veut le voir. Lorsque les premiers mots quittent enfin les lèvres de l’homme, Emilien penche la tête d’un air un peu perplexe, sans être sûr de comprendre où il veut en venir. Il en faut un peu plus pour que la lumière se fasse dans son esprit et il écarquille légèrement les yeux.
– Ca me plairait oui !
Oui ça lui plairait et il n’aurait jamais imaginé que cette proposition puisse venir du chevalier lui-même. Alors il ne dit pas non, l’idée qu’il puisse y avoir un piège ou quelque chose de ce genre derrière lui effleure un instant l’esprit mais il la repousse sans s’y attarder. A la place, une nouvelle fois il acquiesce, un sourire étirant un instant son visage.
– Je serai ravi de pouvoir vous accompagner oui. Si l’occasion se présente.
Il s’incline légèrement lorsque le chevalier prend congé et reste un instant sur place à observer les alentours. Il sait clairement que l’occasion se présentera à un moment ou un autre, cela ne fait aucun doute pour lui. Il reste sur place encore quelques instants, avant de finalement retourner à ses oiseaux, tout en jetant un dernier coup d’œil au ciel pour voir quand sera la prochaine pleine lune.