Stupide créatures incapables de passer outre les différences du sang… Zuicher n’avait pas eu le choix, elle avait été contrainte de se défendre. Ces trois lycans ne lui avaient pas fait de cadeaux au simple prétexte qu’ils avaient vu ses crocs. La vampire aurait dû être plus prudente en tuant ce chevreuil pour boire son sang.

Naïvement, elle avait espéré que ces trois-là passeraient leur chemin. Mais non. « Une vampire n’est une bonne vampire qu’une fois morte, hein ? » répète-t-elle en laissant un rire mourir dans sa gorge.

Elle a mal, Zuicher. Son épaule a été salement amochée et en plus, elle n’a même pas pu boire à la gorge de la bête qu’elle avait abattu, ne serait-ce que pour passer le temps. Elle a soif, Zuicher. Et elle est bien trop vieille pour se perdre en querelle centenaire.

Doucement, elle se glisse derrière le mur de cette propriété et s’appuie contre un arbre. Le sol forestier accueille bientôt son séant. Elle a besoin de faire une pause, même quelques minutes, histoire de rassembler son énergie. Vaincre trois lycans jeunes et en pleine santé, même pour elle ce n’était pas chose aisée. Et plutôt mourir que de boire leurs sangs si c’était pour virer à l’addiction.

« … Yodja… Tu es sûr qu’il est possible que l’on cohabite tous ? » Il en était mort, lui. Pourquoi serait-ce différent avec eux autres ? « … Tu me manques… » A tout jamais.

Elle aurait voulu mourir, quelque part. De toute manière, son clan avait été largement diminué par la guerre qui faisait encore rage et elle sentait que son cœur ne supporterait bientôt plus cette stupidité que les vampires et les lycans partageaient. Cela signifiait-il que seuls les humains arrivaient à passer outre leurs primaires différences ? Certainement pas. Du moins, Zuicher n’en croyait pas un mot, de cette affirmation. Mais elle reconnaissait que les humains savaient composer un bon moment avec ce qui leur déplaisaient. Ils appelaient cela de la politique et même si cela ne l’avait jamais intéressé, elle devait admettre qu’un peu de diplomatie pourrait peut-être aider la situation présente entre les créatures.

Fatiguée et peu sur ses gardes – une erreur -, Zuicher n’entendit pas l’enfant arriver vers elle. Le vent était contraire et même l’odeur n’avait pas trahi la nouvelle arrivante, ce qui tira un geste surprit à la vampire qui, par réflexe, ouvrit grands ses yeux – tous les deux rouges cette fois du fait de sa soif – et montra les crocs en un sifflement semblable à celui d’un serpent ou d’un chat mécontent.

Mais elle comprit vite qu’il n’y avait pas de menace à craindre de cette gamine – pas dans l’immédiat, du moins. Zuicher rentra ses crocs, prit une inspiration et tâcha de ne pas se compromettre davantage – si tant est que cela soit encore possible. « Non, je vais bien, merci… Je vais partir, navrée de vous avoir déranger… » Son danois approximatif ferait l'affaire. Toujours agir de la sorte devant des humains pour éviter d’éveiller trop de soupçons.

Zuicher se remit debout, chancelante, et se tint la tête. Elle avait mal partout. Il lui fallait boire dans les prochaines heures si elle ne voulait obtenir qu’une mort lente et douloureuse.