Dim 11 Juil - 14:33
Elle n’aurait pu être davantage surprise en recevant une lettre du marquis de Sercey l’invitant à boire le thé. Toutefois, Françoise, en bonne Dame de la haute société, elle avait accepté l’invitation et s’était même apprêté d’une bien jolie manière, n’omettant aucun accessoire de mode à sa parure et sa toilette. Qui sait, peut-être avait-il changé d’avis et acceptait de l’épouser ?
Ce serait une bonne nouvelle pour elle, dans ce cas. Ou pour son père, plutôt. Depuis leur dernière entrevue, Françoise, si elle devait être honnête avec elle-même, se fichait un peu de cet homme. Il lui avait bien offert son amitié, mais pour le moment, la jeune rousse ne savait pas vraiment comment se comporter avec lui.
Elle arriva cependant à l’heure au lieu de rendez-vous et congédia ses domestiques qui l’avaient accompagné pour au moins une heure. Ils devraient revenir la chercher après le temps écoulé.
Bon, surtout, ne pas trembler et ne pas montrer qu’il pouvait avoir une emprise sur elle. Faire comme si elle était froide et avec un aplomb de déesse, comme cette Dame Ottomane qu’elle n’avait pas eu l’occasion de revoir depuis sa mésaventure avec Emilien dans les rues de Paris. Oh, tiens, Emilien… Elle aurait bien aimé le revoir, maintenant qu’elle pensait à lui.
Mer 14 Juil - 13:29
Les lieux étaient… Somptueux. Tout ce dont une jeune femme rêveuse aurait pu désirer. Qui ne rêverait pas de se faire inviter par un marquis si séduisant en ces lieux, après tout ? Françoise eut une pointe au cœur en réalisant que Gabriel essayait vraiment, simplement, de faire ami-amie avec elle. En réalité, elle ne savait tout simplement pas comment le prendre ni comment le vivre. Elle n’avait pas vraiment d’amis autour d’elle, la dernière ayant été Béatrice. Depuis le départ au couvent de la jeune femme, Françoise n’avait plus eu aucune nouvelle. Son père refusait même de lui donner le nom du couvent pour qu’elle lui écrive !
Mais le moment était mal venu pour songer à Béatrice. Elle devait penser à elle, avant tout. Alors, essayant de conserver son air inatteignable – mais qui déjà se fendillait -, la rousse s’éclaircit la gorge. « Alors… pourquoi m’avoir fait venir ici, Marquis ? J’imagine que ce n’est pas pour m’écouter diatriber sur ma vie, n’est-ce pas ? »
Ou peut-être que comme les autres, finalement, il avait un intérêt financier ou de réputation à avoir son amitié. Elle ne s’en étonnerait pas. Et dans le fond, elle ne pourrait même pas lui en vouloir. C’était si commun.
Sam 14 Aoû - 21:21
Elle se sentait si faible en face de cet homme, ce fort bel homme à la posture et au charisme qui n’était plus à démontrer. A peine semble-t-il poursuivre son manège que Françoise ne parvient pas à résister à cette vérité. Enfin, ce qu’elle aimerait être une vérité.
« Euh… Je… » Déjà, la voici qui détourne le regard, gênée. Elle ne s’était pas attendu à ce genre de réplique, de répartie très vraie mais qui la laisse sans la moindre idée de quoi répondre pour paraitre un tant soit peu inaccessible.
Pourquoi était-ce si difficile d’incarner une femme forte et indépendante ?! « … Vraiment ? » Ses doigts, fins et graciles, triturent le tissu de sa toilette sans oser regarder Gabriel dans les yeux encore une fois. « Je ne sais quoi vous dire… Ma vie n’est pas des plus attrayantes. »
Une vérité parmi tant d’autres. Pour ses yeux à elle.
Sam 25 Sep - 18:57
Le rouge sur ses joues, Françoise essaya de détourner le regard pour ne pas donner à son confrère noble l’ascendant sur elle. Une fois était déjà bien suffisante. Mais alors qu’il commença à diatriber sur sa propre personne, la rousse se sentit passionnée par cet échange. Il était rare que l’on s’ouvre autant à elle, car il était tout simplement rare qu’elle puisse avoir des discussions tournant autrement qu’autour du mariage à avoir pour être une femme accomplie – supposément.
Alors, lorsque Gabriel eut terminé, c’est avec un sourire aux coins des lèvres que la demoiselle se sentit à même de faire pareil. « Vous jouez du piano, donc ? C’est un instrument noble. Mon père a préféré me faire jouer de la harpe. » Et encore, voici bien longtemps qu’elle n’avait plus pu toucher une corde.
Là commença l’ouverture d’un détachement certain. « Que dire sur moi… Je n’ai aucune arme à faire, contrairement à vous… Mon père essaie simplement de me marier le plus rapidement possible. Je suis la dernière de la famille et la seule de ma fratrie à être encore célibataire à mon âge. J’apporte l’opprobre par mon existence et je sais que je dois faire des efforts pour ne pas ternir l’image de ma famille auprès de la couronne."
Ven 22 Oct - 16:43
Oui, il se trompait. Désarmée par cette question souhaite, Françoise ne sut quoi répondre. Comment imaginait-elle son mari ? Quelle drôle de question. Ce n’est pas comme si on lui avait jamais laissé loisir d’imaginer un quelconque idéal. Alors la réponse est vite donnée, rapidement éjectée d’entre ses lèvres, comme pour oublier la douleur qu’elle pourrait lui occasionner si elle restait trop longtemps fichée à l’intérieur de son crâne. « Je ne sais pas. »
Mais puisqu’il lui faut vraisemblablement argumenter un tel propos – sa mère lui avait toujours dit qu’un refus devait être motivé, expliqué – alors elle revient serrer les pans de sa robe, lesquels protège ses jambes et baisse le regard, encore. « Je ne me suis jamais posé la question car il n’y avait jusqu’à présent aucune raison de me la poser. » Oh bien sûr, Françoise a déjà rêvé bien trop pour son propre bien, mais elle espérait faire taire cette bien vilaine habitude.
« Navrée, Marquis, il semblerait que je ne connaisse que peu de sujets de conversation. Soyez donc rassuré, notre entrevue ne s’éternisera pas bien longtemps. » Il avait sans doute bien des choses d’importance à faire, lui. C’était là le rôle même d’un homme, non ?
Mar 16 Nov - 20:57
Oh, l’avait-elle vexé ? Quelque part, Françoise se sentait désolée pour lui… Mais elle devait admettre qu’une autre part d’elle, dont elle était bien moins fière tout à coup, s’était alors réveillée sans son aval. Elle avait été ravie de le voir ainsi piqué à vif et admettre presque sa défaite. C’était une preuve – s’il en était… - qu’elle avait au moins un peu de pouvoir, un peu d’ascendant sur quelqu’un.
Pour une fois les rôles étaient inversés.
Françoise se détesta d’avoir ainsi pensé. Mais elle sera les dents et essaya de faire quelque chose de plus… Acceptable pour l’entièreté de la société. « Qui était cette personne, Marquis ? ». Oh bien sûr, elle était curieuse, mais il y avait une part d’intérêt feint, histoire de ne pas rendre cette entrevue plus pénible qu’elle ne l’était alors devenue. Il fallait donner le change, c’était aussi en cela qu’une femme digne de ce nom pouvait mener des situations comme elle l’entendait.
Sa mère avait toujours su très bien le faire, Françoise s’en souvenait bien. Quel dommage que cette femme-là ne soit plus en vie pour la guider correctement… Il aura fallu un bébé mort-né et la peste pour lui enlever l’un des seuls soutiens de son existence.