Les choses se déroulent plus rapidement que prévu. Depuis l’intronisation de Victoire de France, les affaires du pays s’étaient en quelques sorte… Emballées. Comme pour se préparer au pire, la reine avait progressivement mis ses pions en avant sur un échiquier où aucune visibilité n’existait encore. D’où viendrait la menace ? La couronne avait-elle seulement été à l’origine directe de cette situation ? Eve n’était persuadée que d’une simple chose : l’Eglise, séculière ou souterraine, devait y être mêlée. L’idée qu’une si jeune souveraine se retrouve ainsi emmêlée aux affaires qui n’avaient en aucun cas lieu d’être portées à sa connaissance laissait le comte de Harcourt aussi désobligé qu’inquiet. Comment protéger l’intégrité d’un monarque et de son pays si elle n’est elle-même pas au fait du réel drame se déroulant sur ses terres ?
Un soupir. Eve repose l’une des dernières missives reçues de la baronnie Normande. Toutes ces informations ne prenaient plus la forme escomptée dans son esprit, et le Capitaine des armées aurait donné son pesant d’or à quiconque lui apporterait lumière à cette situation devenue trop complexe.
Assise à son bureau, cet endroit impersonnel qu’elle n’a investi qu’il y a trop peu de temps, elle finit par enfouir son visage entre ses mains, tentant de revigorer ses sens, de calme la migraine qui pulsait calmement contre sa tempe. Pourtant, elle était encore bien loin d’avoir fini cette journée. Les coups de l’horloge indiquent que la nuit ne tardera pas à pointer le bout de son nez. Et comme pour souligner que ses tâches ne viendraient pas à leur terme de sitôt, l’un des opérateurs administratifs vint frapper à la porte pour lui indiquer l’arrivée de son invité. Le terme n’était pas correct, et Eve ne prit pas la peine de corriger le jeune homme qui n’était qu’un enfant de noble apprenant les rudiments des archives et de la tactique au sein du corps militaire.
« Faites-le entrer. »
Eve se relève de son siège et rajuste distraitement la veste de sa tenue. Pourquoi ressentait-elle le besoin de faire bonne montre devant un homme à une position inférieure dans sa hiérarchie ? Pourquoi simplement convier cet homme à ses côtés ? Les mots manqueraient pour parler d’Aimable de Bayard. Un soldat chevronné qui n’avait jamais manqué de prouver sa loyauté à la couronne. Eux deux avaient été frères d’armes, même pour un bref instant. Un homme qu’elle avait profondément respecté, pour ce qu’un mortel pouvait si rarement présenter un défi aussi colossal pour un vampire de son âge et ayant suivi son entraînement. Mais Aimable était une arme trop aiguisée. Un double tranchant qu’elle admirait mais dont elle se méfiait avant tout. Un danger qui s’était révélé à de rares occasions, comme cette bavure récente qui avait forcé Eve à convoquer Aimable ici-même pour… parler.
Oui, Eve n’était pas satisfaite de cette situation. Et probablement devrait-elle faire certains choix… Certains choix qui ne plairaient pas.
« Monsieur de Bayard. Je vous en prie, installez-vous. »
Une convocation trop conforme, trop carrée. Voilà ce à quoi Eve était contrainte. Une preuve supplémentaire, s’il le fallait, qu’elle était déjà trop personnellement impliquée dans ce bourbier. Et si le nom de Baptiste lui brûle la gorge, elle ne peut rien dire, rien faire. Elle attend patiemment qu’il prenne place avant de se rasseoir, coudes posés sur le bord du bureau, menton à l’appui de ses mains croisées.
« Je ne vous ferai pas perdre votre temps. Pourriez-vous m’expliquer les raisons de cette… bavure, dirais-je, ayant eu lieu en date du 15 Mars. »
--------------------------------------------------------------------------------------------
Le jeune homme referme en douceur la porte du bureau et s’avance prudemment dans les couloirs. Le crépuscule se drape d’une magnifique soie dorée, dont la chaleur emplit les lieux. Mais alors que le soleil se meurt à l’horizon, son sang gicle ! Les rayons ensanglantées s’abandonnent sur la robe d’or, le précieux tissu se noie, la froideur gagne les murs, l’obscurité émerge du plancher. Une brise glacée s’insinue sous les fenêtres, entre les planches, et une désagréable odeur de bois humide, usé, s’arrache des combles.
Tous ces détails, le jeune homme n’y prête plus attention. Il n’a qu’une hâte : terminer sa journée, rentrer auprès de ses amis et s’amuser ! Il oublie la Nuit et cette peur viscérale qui habite les enfants, les personnes âgées, lorsque le soleil disparaît. Lorsque le règne de l’Obscurité s’établit. La Lune est si sournoise, offrant ses rayons d’argent d’une bienveillance glacée ; les crocs des bêtes affamées, de tous ces monstres qui s’abritent en son sein, s’éveillent lorsqu’elle les effleure de ses dagues effilées.
Mais finalement, le froid est tel qu’il vient mordre les chevilles découvertes du jeune homme, il presse le pas.
_ Monsieur De Bayard ! Le Comte est prêt à vous recevoir !
Aimable, à son nom, se redresse et s’avance. A première vue, le jeune homme ne lui trouve rien de particulier – physique un peu rustre, on dit qu’il vient des Montagnes. Et pourtant, quelque chose ravit son attention. Surpris, il s’apprête à l’observer, mais l’on heurte son torse. Déstabilisé, l’opérateur baisse les yeux vers l’épée qu’on lui a confiée.
_ Je…
_ Je viendrai la récupérer après notre entretien.
Le jeune homme a un pas en avant, ses mains s’élèvent pour rendre l’épée et ses lèvres s’entrouvrent pour protester. Le regard qu’il reçoit invite ses lèvres à se sceller ; docilement, sa tête s’incline. Sans qu’il n’en comprenne l’exacte raison, une chair de poule a saisi sa nuque et prudemment, il observe le dos de l’homme lorsqu’il monte l’escalier. La froideur de cet homme l’a surpris et dans son regard, il a crû percevoir comme un mouvement au fond de ses pupilles, de cet puits noir où l’âme disparaît. Comme ces ombres qui rongent la lumière, accompagnent la lente agonie du soleil.
Aimable rejoint la porte du bureau du Chef des Armées. Il hésite. Voir une personne d’une telle responsabilité est une pression énorme, il ne peut nier qu’il a longuement réfléchi à leurs échanges et aux arguments qu’il pourrait avancer. Mais à cela s’ajoute une menace indéniable.
P̸̹̻̥̓̏o̷̢̪̭͓̣͑̐̏u̶̻͂͌ͅr̵̨̰̠̝̊͆̕q̵̧̥̯̻̣͋̈̐̓͛ų̴̢̙̫̉͐̍͠o̵͉̭̘̱͆ͅi̵̩̘̙̪͋̂ ̷̗̅̉͒a̷̢̱̫̤͔͑̈ṡ̶̻̘̋-̸̨̢͙̘̭͋t̵̩̩͕̅̐̕ű̸̝̯̟̍ͅ ̴͓̄̐̌͋l̴̝̣̲̽̄̓ă̶̱̇̈́̓͌ḯ̸͈͇͍͈̌s̵̡͚̩͌̈́͛̃ͅs̷͙̈é̵̱͓̈́͑ ̵̜̏͌͐̚t̶̳͈̑̌̒͝ͅo̴͓̾̀n̷̝̑̂͌ ̶̮͙͛é̷̡̩̫͚͐̕p̵͍̯̀̒̕é̴̫̲͋̐̅ë̴̬́̓͑̚͝,̸̥͈͖̹͌̀͝ ̴̩̃̏A̶̼̗̱̦̦̿̂͝i̴̛̟̹̞̪͗͑̈́ͅm̴̨̩̻̰͛̀́̓̕å̵̹̖̠̃̈́̐b̸̞̣͖̠͌̍l̶͍̪̒ȩ̵̳̳̺̩̃̀͊͑͊ ̵̜̟̖̈͌̃?̶͖͇̥̏̚͠ ̷͇͂̀̔͌
̶͖̅̈́̍̄̈́
̴͔̺͔́̐̈́̐̈́͜m̷̧̩̾õ̸̬͓̻̇͋̒͝u̸͈̙̓r̴̩̘̰͕̲̍̆͒́͋i̴͓̳͈͛̐́͋͝r̷̝͕̻̰͉̀ ̶͇͉̤͉̓͗͂̓ś̴̢̛̙̯̺̒ơ̶͉̯̞u̵̱͗͠s̸̳̫̞̦̗̋͝ ̸̡̻͚͖̰̇̑́̒͝l̸͉͕̗͉͛̿͌ë̷̤́s̸̱̖͎͌ͅ ̷̢̨̡̯̯̈́̾c̷͈͊̃͛͗͜r̵̡̺̈́o̶̯̎̿c̵̟͕̪̩̓s̸̮̰̻̱̀͛̈́͘ ̵̧̯͚̄͌d̷͕͔̝̖͒̂̐͊ẽ̷̬͉s̴̲͍̋͆͐̐͆ ̵̻̲̪̓̒̂̌̕B̷̫̏̈́͌̑͝ê̷͉͈̬̜̓̔̓̈t̸̲̘̭̓͗̕e̸͕̙̾s̵̰͙͙̒͒̽̄͋ ̴̢͎̝̐?̴̧̗̹̹̿͆͂̎
̷̛̈̇̚
̸̻͍͎̂Ş̶͕̬͔͈̏͗̚e̵̢͍̰͆̓͠n̶̝̈́̕s̵̨̲̼͙͍̔̅͋̀̉-̸͓͕̤̂͑t̵̡̳̫̠̾͒̅͠ů̴͚͓̮ ̷̛̫̱̆̓̇l̸̟̫̱̗̝͐͌e̶̢̩͉͐̏̑ ̷̢̮̝̌͗f̵͕̯̪̓r̸̟̖͎̪̗̓o̴̙̫͂̈́̄͜ï̶͙̪̠̪͔̇͌d̸̢̰̝̬̻̃͝ ̶̯̲̣͊̌ͅq̵̡̖̱̘̍̅͂̋u̵̹̎̏͝i̵̢̭͗̿̔́͝ ̵͔́̔̐̾̓ȩ̷̢̨͎̼́̉m̵͎̻̥͑͐̿̑ā̶̢͇̰͋̃̍͝n̶͍͓̔̐̂ẹ̸̛͍͖ ̴̥̽̾̆͛ḏ̸̋̾̐͘͘ě̵̀ͅ ̶̳̕c̷̞̥̿̔̇͝e̴̫̯͇͋͝t̷̩̱̳̘̞̀̕t̴̢͎̘͉̥̂̋͛e̶̝͊̒̆ͅ ̴̛̱͔̉̆p̸͍͂̎o̵̝̳̔r̸̫̳̿̈̐͜ţ̶̛͇͇̓̾͝ȩ̸̮̀͆̃͊̚,̵̳̿̆̄ ̵̖̋̍̎̓L̶̡͆̃a̴̢̧̔͝ ̵͙̞͂̄̏͝B̷̛̞͚̍̅̾̇ê̵͕͕̦̳̅̄̈́͠t̶̢̻̲̙͌͂̓͝ȅ̴̺̰͖͈͕́ ̵̼̹̗͉̮̚g̴̫̜͓͛̔͌̒̃ǘ̶̧̱͔͇̺̆ë̸̱̲͎́́t̸̲̪͚͑t̷̠̖͇̠̹͂e̷̺̿́̈́ ̸̛͔̮̬̱ͅe̸͓͋̎̐̑͝t̷̡̻͎͉̪̃͋͋̌̿ ̷͔͒̍̀͂t̷̉̒̇̂ͅ'̵̢͇̱͔̈̂̀̚á̴̗͇̩͝t̸̛̗̲̞͎͝ͅt̵̞͔̝̞̱͒̉̋́ē̷͍̰̥̱̹̅̌n̷̻̿̿̑ḋ̸͇͙̞͋̉͜.̶̘͇̞͒͐̉͝ ̶̫̜̞̝̈́
- Spoiler:
- Pourquoi as-tu laissé ton épée, Aimable ?
Sens-tu le froid ? Le froid de la mort, le froid des ombres, la nuit est un linceul, combien encore vont-mourir sous les crocs des Bêtes ?
Sens-tu le froid qui émane de cette porte, La Bête guette et t'attend.
Il serre les dents. La Voix éveille cette peur qu’il ressent jusqu’au bout des doigts. Son cœur cogne, contre sa cage thoracique, alors que la sueur mouille sa nuque. Il s’accorde quelques secondes, alors qu’il inspire, souffle avec lenteur. Sa raison s’oppose à l’Instinct viscéral. Il n’y a pas de monstres. Les liches s’arrachant des tombes ne sont qu’un mensonge, un conte que l’on murmure aux enfants pour qu’ils rentrent le soir.
Ç̷̝̦̟̘̓̃e̴̮̟̣͔͙̍̀̕s̸̜͙̖̋̌͛̋̕ͅͅs̸̡̡̲͍̀̔͂́ȩ̵͖͇̜͐̾̀ ̵̺̰̯̞̫̾ḋ̵̥̤ẽ̴̳̖͍͇͛̑̓͜͝ ̷̟̬͚̗̯̐̈̈́̽̓t̶̺̬͓̰̯̉͋̽̍͘e̷̦̖͍̋̄ ̴̣̰̔̔̋̂̒m̶̨̗͈̬̙͑́͘ȇ̵̡̧̦̰̿̆n̷̹̗͒̇̎t̴̢͔͍̋̄̐ĩ̷̛͎͍̺̒͜r̶̺͝
- Spoiler:
- Cesse de te mentir
Le dos de ses doigts toque contre la porte, avant qu’il ne repose sa main pour l’ouvrir. A la vue du chef, ses yeux s’inclinent, son torse, avec respect. Alors que le crissement insupportable s’accroît dans sa tête, c’est une morsure si vive qu’il se redresse avec une certaine rapidité, les yeux traquent autour de lui, bien qu’il sache pertinemment… où se trouve le danger. En face de lui. Non. Dans son esprit ? Le trouble est tel aujourd’hui, les interruptions sont
̸̢̩͇̹͋͊͐͌̂ͅm̴͍̜͈̳̈́̚'̵̭͎͒̀ͅé̸̻̮̠̦̌͗c̸̣̥̊̽̅̂̊o̴͖̻̖̻̔̈̃̚ủ̵̱̖̭͗̂̈́͠ṯ̶̨̡͋ë̸̡͙͎́s̶̲̹̊̓̀̿ ̵̧̘̠͓̓p̸͉̩͎̊ā̴̻͉̯̰͑͆̔ş̶͙̺̼͎̓,̵̠̮̆ ̷̢͕̑̽A̶͔̘͉͙̰̎̓̈̏́I̵̤̰̻̩͖͑̋M̶̧̭͕̏̽̐Ā̶͔̙̆̓B̶͚̬͛̆̀͛L̸͙͒Ĕ̵̖̘̼͈͈
- Spoiler:
- Il est là, le monstre, Il est devant toi et tu n’as aucune arme pour te défendre ! Tu n’as que moi et tu ne m’écoutes pas, AIMABLE
Les interruptions sont incessantes. La Voix s’arme de mots terribles, les syllabes acérées lacèrent son esprit, la migraine vrille dans son crâne mais la douleur descend particulièrement le long de sa nuque, il redoute la raideur de ses muscles et le manque d’air. L’angoisse, alors qu’il s’efforce de retenir son souffle, respirer avec lenteur pour apaiser la Voix. Si peu d’êtres l’ont mise dans cet état d’excitation. La venue de la Nuit ne fait qu’accroître sa puissance, à moins que ce ne soit l’épuisement de l’avoir muselée toute cette journée.
Aimable n’entend pas même l’invitation, il perçoit du coin de l’œil que Monsieur de Harcourt s’assoit et ne sait plus même s’il l’a salué.
_ Monsieur De Harcourt.
Doit-il s’asseoir ? Probablement mais n’ayant pas fait attention à l’invitation, il ne peut se permettre une telle audace. Troublé, il croise finalement les bras dans son dos tout en maintenant son torse droit. Sa tête reste basse, il fixe le sol et les anfractuosités du plancher. Ces discrètes zones d’ombre dans lesquelles il laisse son regard s’égarer, ses pensées, fuir la Voix, la Voix qui crie dans sa tête. Il se sent épuisé.
Le 15 mars ? Que s’est-il passé, déjà, à cette date ? Aucune réponse ne vient dans son esprit embourbé, sa réflexion est ralentie, alourdie par la fatigue, l’inquiétude, par cette pression qu’il ressent, par la présence de son supérieur. Germe alors la peur de la sentence et enfin, le découle des évènements lui revient.
Le 15 mars. Le 15 mars. Une patrouille dans un petit bourg, classique en soit. Une enfant vient vers eux, fille farouche aux joues souillées de terre, les yeux plein de larmes. Elle leur demande de l’aide, à lui et aux autres soldats, ils la suivent et découvrent alors sa petite maisonnée isolée. La tête du chien de la maisonnée écrasée d’un coup de gourdin, la porte enfoncée. La femme en pleurs, effrayée, qui hurle lorsqu’ils entrent, l’odeur du sang, du sexe, de la violence. Cela fait quelques jours qu’ils traquent une bande de voyous, semant la panique dans les rues de ces petites banlieues. Ils attaquent à vue, privilégient les faibles, les familles isolées. Le peu de richesses qu’ils possèdent sont impunément volées, ils s’enfuient et laissent leurs victimes désespérées. Aimable, peu à l’aise, laisse ses collègues interroger la femme, il se contente d’échanger un regard avec la fillette. Oh, la peine dans ses yeux… La peine dans ses yeux marrons, son petit visage tordu par la souffrance, le poitrail encore agité de sanglots. Ses mains si petites, frileusement serrées contre la tunique qui recouvre son corps maigre. La vision est insupportable.
_ Le 15 mars, je patrouillais en compagnie de…
Il cite les
Í̴̘̻͙͖̉͆̕l̴̢̯͚̊͆͐͘s̷̱̐̎͂̾͜ ̶̡͗̈́s̵̝̹̺̥̦̐̆̈́͘ḛ̵͋̈ ̷͙̠͈͙̩̾̃͌́͛s̸͈͖̲̆̽̄͌͛ő̶̢̜͍̥̊̀̕ͅn̷̖̘͒͛͛̓̕t̶̻̣͆̇͠͝͝ ̸͕̋e̵̦̓̓̔̅̕n̴̲̅͐͊͝f̶̤̲̼̓͂͑͛͠u̸̢͚̙̙̙͐į̸͎̮̒̐̀̚s̸̼̈̽̄ ̶͓̝̞́p̸̨͈̰̯̈͌a̵̛̠̝̩̻͂̓̽r̸̯̩̝̃̍ ̵̢̯͗̅l̴̢͈̣͙̎̍̀̓͆e̷̜̿̑̆ ̶͙̾̀̈́ͅc̵̙̘̏̿̏ḩ̸̛̙͓̣̽͊̕ͅe̸̞͇̲̳̎̑͘͘͜ṃ̷̼̂͋́ỉ̶̢n̶̰̲̰̾͌͘͜ ̵̮̗̓̏q̸͔̪̙̖̘͛u̶͖͚̓͐͋̂i̷̛̦̼̐͆̓̊ ̵̢͓͍̑̽̃͝͝ͅr̵̡̘̯̈̽̈͠e̶̖̮̙̪̳̍̌̽̈́̕j̴̫̙͔̟̄ǫ̸̧̲͖̗̀̄͗i̴̛̙͎̽͊̃̄ń̵̛͙t̷̪̮͖͆̈͝͝ ̸͙̣͐͜l̶͉̣̯̦̐ę̵͖̳͎̆̈́͌̀͗ ̴̠͎̩̅b̴͍̭̟͖́͋͋̉́o̴̯̹̗̭͇̎̀̿i̴̹̩̅͋s̵͓̼͐͜,̴̻̰̎̂̚ ̵̨͓͊ĩ̸̩̀́̾ḽ̵̥̲͗̍͝s̶̪͘ ̶̡̗͐̆͠ś̵̟̼͚̮̓͜e̸̥̗͍͓̯͛̈́ ̴̧͍̺́͜ͅc̸̳̰̹̼̙͊á̵̛̩͎̻͔̩̇̕c̷͚̠̈h̸̘̘͂̾̇͒ȩ̷͙͎̟̳͋̆n̵̙̠̾̈́̈́͠t̸͈̣͕̝̘͑́̏̄ ̷͚̈
- Spoiler:
- Ils se sont enfuis par le chemin qui rejoint le bois… Ils se cachent
Cite les noms des personnes avec lesquelles il travaillait ce jour là. Son entente avec le plus haut gradé de leur troupe n’est que cordiale, Aimable ne fait jamais de bruits, Aimable est discret.
_ Alors que nous patrouillions à proximité du Jolibourg, notre attention a été attirée par la venue d’une fillette. Elle nous a conduits jusqu’à sa mère, qui avait été la victime d’une attaque récente d’une poignée d’hommes, tous âgés entre 20 et 30 ans. Ce sont ceux que nous traquions depuis quelques semaines déjà. J’ai conseillé de nous rendre auprès du bois longeant la ville… C’était le seul endroit où ils auraient pu nous échapper. Cependant, mes collègues n’ont pas souhaité donner de leur intérêt à ma proposition. Je ne souhaitais pas laisser…
Ị̷̬̭̦͔͛͌̆͠L̸̠̥͕̹͆͂͌̽S̷̫̠͚̯̥̾ ̶͉̲̪͇̀̉͘S̴̮̠̋O̶͉͔̲͉̕N̸̖̲̒͌̇̍Ț̴̢̤̙͕̆̉ ̷͓̫̆͊Ḑ̵̌Ḁ̴͈̱̹̠̌̋͗̈́N̴̹̭̟̆͛͜͝S̵̜͕͎̟͎̽ ̷͎͉̹͒̂̐͆L̷̮̩͌̀̋Ẽ̸̬͚͕͙͋ ̶̱͍̎́ͅͅB̴̝̞̥̞̰̽͝Ọ̷̜̈́͠͠ͅI̸̧̻͇̓͌̑̅̈͜S̸̗̀̐̌͜
- Spoiler:
- ILS SONT DANS LE BOIS
_ Laisser… laisser cette hypothèse de côté. Je me suis donc rendu sur place.
N̸̟̍̍̋O̸̯̰̥͐Ù̷̘̹̥̮͈̅̒̕S̸̢̢͖̜̯̅͒͝ ̵̑̃͑͜L̷͚̤̖̂E̷͔̙̥͔͠͠Ṣ̵̘͙̫̈́ ̶̗̼̿̍̀͂A̶̲̒͊͝V̸̙̋͝Ò̶̫̹̞́̅N̵̠̬͖̬̐͘S̵͔̃̽͒ ̷͇̲̖̎̀̅̇͝T̴̢͈̦̝̐̄̇R̵̠̄Ǒ̴̝̱̹̫̎̆͝U̷̧̳͙̹̚͘͝͝͝V̵̲̠̙̠͗̉͂͠E̷̜̰͕̻̬̔̀̆Ṣ̵̢̨̼̤̆,̵͖̠̎̎̐͝ ̷̡͇̟̗̔̎̃ͅḶ̷͚͎̻̱̿̃̕͝Ė̷͖͋͝Ṣ̴͙̝͝ ̴̛̤̬̳̬̓͋̄̿͜R̶̜͊̓̍͝A̷̢̮̣͆̇̈́̄͝T̵̨̡̟͐ͅS̷̡̟̣̙̀̀͌͂ ̷̢̝̞͎̊̈́͂̚
- Spoiler:
- NOUS LES AVONS TROUVES, LES RATS
_ Il a fallu attendre… Attendre quelques heures pour qu’ils… arrivent.
N̵̮̣̰̽Ǫ̶̈́̒͊Ǔ̴̞̫͑Š̴͕͉̘̖ ̴̥͗̀̔̂́L̸̥̰̊̉̇̾̕E̴̜̱̯͂ͅS̷̛̀̄͜͜ ̶̧̰̗̙̘̈́̑͘͝Å̶̺̮̒̆̔̑͜V̴̠̖͖̰̌̀͆͝Ơ̴̼̮͇̓̈́̾Ṇ̷͖̰̤̘͂̏͗̽Ş̴̫͍̗͊̅̄ ̵̛̤̱͎̃T̵̛̘̩̫̲̻̅͊̆R̵̤͆̊͊A̵̧͗͋́͜Q̶̗̩̹̂͗U̸͇̠͍̥̝̽̉E̸̡͉͙̩̖̋̅̎̕̕S̶̥̖͂͒̆̓.̸͎̭̪̒͆̿̾͗ ̵̢̛͚̟̣̰̒̚I̷̢̡͉͎͔̓̽́̉͒L̶͉͙͚̈́̌͗͝S̸̢̥͈͓̋̓͑̓ ̶̞͍̘̺̟̀̉̽͐͝S̷͚̯̞̬͉͗̽̃̄̒O̶͕͚̺̱̽͂͝͝Ń̸̡̡̂́̄T̴̰̒̏̿ ̵̤̇͌͐͘̕M̸̨̛͚̱͔͕̿̿̄̈́O̸̜̭͌R̷͍̩̭̯̆̿̉Ṫ̴͍̹̖S̷͓͒̈̈́,̶̧̩̇̈́͠ ̴̯̖̘̫̈͋̕̕M̸̗̳̦̄̐̽O̷͈̭͓͜͝͝R̶̛͕̟̒͗̊Ţ̸̲́̍S̶̺̗̪̰͔̀̃̃͂.̶̮̻͙͍̎̔͛̾ ̴͉͚̎̓͘̚Ṁ̶̢̼̫̬̃̋̑̈́͜Ô̶̟̱͍͓̯̋̑͛R̷̡̧̜̱̣̈̍̍̇Ţ̷̦̙̑͗͆̿͜͝S̸̛̙͋̌̏͌,̸̹̰̖̐ ̸̥̳͔͍̞͗̄̓L̷͎̦̪̿̆̀́͒Ê̵̜͇̱̦̈̃͜U̸͈̓Ŗ̴̖̊̇̄̋ͅͅ ̷̟͂S̸͖̳̰̪͊͐̇ͅÃ̵̮̥͉͈N̵͙̜̰̓͝͝G̵̰̻͜͝ ̶͔̣̐̎̀͊͘S̵̳͕̲̳͚͒̀Ǘ̶̱̥̿̃R̴̛͎̦͎̽͆̚͝ ̷̡̭̩̹̫̈́̇͆̍N̶̤͙̾͑Ǫ̷̖͈̪͎̅́S̵̡͚͖̗̀̔̃̀̄ ̶̫́̉̀͝M̵͖̄̀͝À̵̛̪͓͉͂̔̐Ị̶͑̽̾͜N̶̖̫̗͙̓̆͜S̸̖̥̙̞͚͊͊͂̐̀,̸̲̗̍̅̎ ̶̟̜̭̈́̽̅͊͐ͅḶ̷̞̟͒E̷̘̼̻̙͕͌̎U̴͔͋R̵̟̳͓̺̜̈́͂̀̽Ś̴̪̓͗̐͠ ̴͎̻̽C̸̭̾͛̚͠Ḩ̸̦͋̄̔̚Ȧ̶͈I̶͍̯̱̔R̶͚͎͙̝͕̅̍́S̴͈̳͖̍ ̸̣̬̪̩͍͂̈́̈́̏̎E̸̼͊͛̇N̴̙̬̋́̂͌̌T̵̢̖̾R̸͉̺͕͚̊͊̍Ë̸̳̝͍́̔ ̵̡̼̤͔̹͋N̷͔̝̊͆͆̚Ȯ̸̰̣̮̜́̄̔̐S̶̤͂͝ ̸̰͌̉͘D̶̙͙̺͆E̴͈̭̳̞̎Ņ̶̛̯̩̉͂̓͝T̵̰̩̱̼̖̾́̕S̶̗̝̭͚̮͘͠,̵̡̝̰̝̂̀͜ ̸̧̫͕̤̅D̴͕̪̥̊̈́̃͒̇È̸̦̗̳͖̍͑̄̚C̵̠̱̳̺͉̓Ȟ̷̱̐́̂I̴̧̨͙̓̓̀̄͠Q̶̼͑̆̓Ù̷̧̞̪͖͒̓͘͝Ȩ̶̰̱̽T̵̝̦̤͚̤̈Ḛ̸͔̪̊̀͘ͅS̸̗͑̈́́̉͝ ̷̹́
- Spoiler:
- NOUS LES AVONS TRAQUES ! ILS SONT MORTS. MORTS. MORTS. LEUR SANG SUR NOS MAINS LEURS CHAIRS ENTRE NOS DENTS. DECHIQUETES.
Aimable se tait et le silence dure, la scène du massacre se ravive dans sa mémoire. Le sang qui gicle, dans le froid de ces bois. Les odeurs, humides, de terres, de chairs, la pourriture du bois se mêle à celle des âmes, parfums âcres, entêtants. Le sang qui poisse ses mains, s’agglutine sous ses ongles, le contact poisseux, membranes visqueuses reliant sa peau à celle de ces hommes qu’il a…
Ņ̴̦̺̹̉͆́̇͝Ŏ̷͙͍̲̹̪Ȗ̶̧̖̔̽͑͠S̶̟͇̀ ̴̯̌̂̉͘̚Ȧ̴̹͔͍̦̓V̸̛̛̻͍̻̟̂̉̽O̷͍̎́Ṇ̶̝̘̲̈́̆̽͝S̷̘̪͕̠̓̍̉͝ ̴̨͋̃͐́͝T̶̻͇̟̾̈́͜͝U̴̜̼̜̖̖̐͛̑̓Ĕ̶͙͙,̵̢̳͚̦̱̒͒̈́ ̸̡̼̘͓͂̏̓Ṅ̸̼͛̇̚̚Ỏ̷͓̖̀̌̈́̚Ú̶̧̮͓̾͜ͅS̴̖̖̭̎̀̊ ̶̡̲̺̟́̄͠Ạ̴̡̖̙̓V̷͇̠̌͋̍O̶̢̱̍͒͜N̵͉̣̯̂̓S̴̻̤̞̒͘ ̴̧̡̬̳̥͗Ṭ̷̼̭̃̋̓̂͑U̵̡̦̫̙͝E̷̺̝͈̻̎̈́͒͑͊ ̶̗̰̽̋͆́͊È̵̛̞̾̓T̷̲̝̣́̾̕͠͠ ̴̠̿̈͛͘L̵͇͎̝̻͒̽Ë̴̫͚̬̽Ṣ̵̫͍͑̎ ̸͔̙͎̻́ͅL̴̟̥̰̂A̵̭̱̘͋͒͋̅͝C̷͉̱̰͆̿Ȟ̴̘̣̜̬̏̆͠Ȩ̷̪̼͔̟͗́Ș̵̟̫̞̊̓ ̷͎̀̄̈́ͅS̸̜͍̦̗̜̽Ȩ̷̛̼̭͉̐̂͋͠ͅ ̸̢̯̲̺̜͂̅́͂̊S̵̺̗̋́̒Ǫ̷̯͈̯̈̃̈́͜Ń̶̛̼̚T̸̻̠̹̲̍͑͋ ̵̺̼͍̄̏ͅĚ̸͍̠̗̞͘N̴͔̥̲̺̹͘F̴̠̂͆̊̃͘U̸̼̺̼͝I̷̥͓̎̓S̷͓̿̾̐͜ ̶̧͆͛
̸̧̥̙͇͕̈́̂̋̌̓
̷̞̫̅̕Ḯ̸͇̠̝̠̠́̃L̴͖͙͖̟̳͐̇̆̉̚S̵̨̿ ̴̞̀Ǹ̵̗̋͑̅Ḙ̸͛͌̐̃̕ ̵̰̣̓̐͛̋R̷͔̉̿̈́̄͝E̴̼̳̩̔̓͂͝V̸̨̻́͒I̷̯̱͝E̸̢̗̹̦̩̕N̷͉̟̭͔̎̾̏̆͝D̵͓̍̍R̵̨̛͚̍͝O̶̺̖̖̟̭͒͝N̸̜̗̫̆̉̊͋ͅͅT̵̆͆̎ͅ ̵̪͔̯̮̀̉̀̏P̷̧̒͑̈̀͝L̴̇ͅÚ̵̲̰̬͕͈͑͛̿̐S̶̻̦̏́̆̇̿ ̵̛̛̺̖͚̺̫̅Ḿ̵͎̖̘̈́̆̎͊A̵͙̫̞̯̾̀I̸̡̛S̴̫͙͐͌̀̈́̃ ̶̭̹͕̻̌̀͜͝͠N̷̙̽̎̒̚Ó̶̢͙̾̅́̈ͅÚ̶͔̏̃͊̍S̸͔̬̖͛ ̶̯̖̫̏̃̚̚Ļ̵̤̱͒̓̂̕̚E̷͉̮̒S̶͈̹̙̟͂̀͑̄ ̸̧̯͇̌T̶̗̟̝̤̼̐̆̽Ṙ̵͉̔͂́Å̸̪̥̙̈́̑͘͝Q̸̗̪̂̅̆̆̏Ų̶̱̜̗͕̔̌̎́E̶͙̎R̸̡̧͖͛O̶̢͍͉̬̬̊́̂͝Ň̷̝̄͋Ş̵̲̭̰̓̕͠ ̸̛̝͉̙̜̾̐
- Spoiler:
- NOUS AVONS TUE. NOUS AVONS TUE. LES LACHES SE SONT ENFUIS.
ILS NE REVIENDRONT PLUS MAIS NOUS LES TRAQUERONS
Leurs cris, il les entend encore. Ils transpercent sa tête, éclats d’argent traversant son crâne, la vérité qu’il se refuse à voir lui brûle les yeux, le souffle lui manque alors que l’horreur, l’inconcevable, l’invite à fermer les yeux. .D’habitude, ce ne sont que des cauchemars mais ils sont encore si vivaces, si vrais, si réels, si…
Alors que son corps reste inflexible, dans son dos, ses poings se serrent. Il lutte pour ne pas les écraser contre ses orbites, pour écraser ces yeux qui ont VU, comme si cela pouvait effacer les souvenirs de sa mémoire ! La vérité, il est incapable de la dire et le poids du mensonge est un nouveau péché que son âme se doit de porter. Condamné. Constantin a placé tant d’espoirs en lui… ! Et chaque jour de cette vie maudite le renvoie à sa monstruosité, ce monstre uni à son âme et seul lui parvient à discerner cette dualité. Mais cette différence, existe-t-elle vraiment ? Ou tâche t-il de s’en convaincre ?
N̷̝͚͌̅ͅȍ̷̩̪́̃̇u̸̪̘̮͌̈́̆s̵̢̩͈̭̠͌ ̸̳̐̈́s̴͇̼̥̈̃̋͝o̶͖͛̓́̓m̷̨̍͗̃m̸̠̺͍͓͗̀̚e̷͈̬͕̭̓́ͅș̸̆̓̑̓͝ ̷͚͉̣̅ü̵̘̹̝̽̕n̵̡̥̪̼͇̐̄͂,̶̝̺̑́͊ ̵̤̥͔̖̮̄̅̒Ȁ̵͔̰̮̦͚i̶̖̼͉̇̾̄m̶̛̦̩̅a̷̭͓͆̽̑͝b̸̛̬̠͑l̵̛͖̦̄̈́͂e̴͙͉͙͝
̶̤̹̣́
̵̮́̂͗̚Ǹ̵͍ͅö̵̠͙́̿ṵ̶̙̹͊ͅs̶̢̘͍͍̗̀̆ ̴̪̥͊̂s̸̞̒̀̇̇͘o̴̧̠̚m̸̳̞̑ṃ̵̨̗͠ê̷̡̫͙̱̪s̶̙̝̗̩͎̈́̏ ̶̗̪̋͠u̶̠̤͗͑͆̈́n̶̛͚̪͔̹͙ ̶̗͒̾ͅe̷̡̦͇̐̒̊̈́t̷̘͙͒̓̕͠ ̴̧̛̜̓̀a̵̛͇̖̽̐û̷̜͓͎̗̂͊x̵͙̭͈̞̙̃̾ ̴̮̳̻̙̩͂̒͘͝ỳ̴̢̪͔͇e̶̘̽u̶͈̳̇x̵̨̖̄̍ ̷̬͇̩̠̍̑͝d̵̓̾͜è̵̢͓̫s̸̯̹̫̝̻͝ ̵̢͇͓͋̍̌̽̓ả̸̗̂̚u̷̢͖̻͂͆ṫ̵̺̣̝̠̹̈́̀̆r̵̢̫̀̅͐͝e̴̻̳̤̗̩͑͆̇̔̚s̸̬̤̤̜̯̒̍̃,̵̟͉̗͛ ̴͈̞̮̥̈t̵͚͚̪̳̅̚ͅṳ̴̝̽̀̂ ̸̧̦̟̑̌̌ȩ̸͉̪͕̺́̀̒̎s̶̼̞̅̓͒̂́ ̶̜̰̽͋é̶̢̜̲̻t̵̖͇͌ ̴̧͓̖̄̀̂͝͝s̴̠͊̾͂ȅ̶͙͍̭͘͜r̴̘̩̄a̸̡͕̹͚͕͒̆͗s̷̖̖̻̒̆͑ ̷̥̟̩͗ḻ̸̠̟̕ẹ̵͎̰̊͊̇̓́ ̶̞̱̈́ͅm̸̡̾̍̽͘o̴͍͎̾̏́̔͒n̴̯̪̅̀̊̄͜͝ŝ̷̡͔̮̍͑̈͜t̷̼̦̋̒͠ͅŗ̷̳̗̻̮͒̊ē̸̝̱̫̏̆͛
D̷͈͗͛̊̉a̵͇͝n̷̝̫̆̄̋͘͘s̶͖̊̓͆ ̸̬́͂́͒c̸͉̐͝ẻ̸̫͍͓̑͝ ̴͍̪̰͈̆̆͛͠͠b̷̳̝͆̄ȕ̵̠̖̞̗̞̋͝r̸̲̙̈́̚é̸̦̻͈͎͖á̶͖͈̖̊ư̸̱̥̤̞̭͋,̷̤͉̒̿ ̵͍̔̊̆͋͜c̷͓͠ē̸̢̈́ ̸̖͎͇̏̽n̴͎̈’̴͎̙̘̾e̵̲͈͋͑̀͠s̴̢͔̯͙̎ṫ̴̠̘̣͝ͅ ̵̺͉̝̙̈́͝p̴̡̺̃͊a̶͉͌̊͝s̶͕̝͓̉ ̶̡̭̯͑͆́̒̕l̷̞͖̱͇̥̏a̶͖̲͚̓́̽ ̴̯͓̾͘m̴̺͗͠o̵̠̮̪̙̿̽r̵̠̠̼̟̉̄͋̑t̸̨̧̯̮͘͜ ̷͍̋̎̅̌̚q̴̳͋̾͊̉̂ǘ̷̡͓̪́͑̚͜e̵̳̣̅̚ ̵͉̣̑̎́̀̂t̵̨̘̞̓͜u̸͚͚̯̦̻̎̿͘ ̶̰͙̞͋̊̊́͠v̸̰͋ḯ̷͇̐͐̔͝e̵̙̅̿̾̚n̶̰̲͍̠̟͌̓̒̋͠s̸̢͎͔̩̫̿͛̃̈́͛ ̶̥̿͗̉͌̚t̴͓̘͉̘̿̾͛ṟ̸̨̖̤̀̀ͅo̷̢̖͙̞̘̾̈́̽̌͊u̴̩͂̈́v̷̠̘̟̬͂̈́e̶̛̙̣̽̏r̵̝͚̆̀̏̌͗,̷̛̗͂̈́̕ ̸̣̑͛̈́̒͝C̶̡̠͕͆́̈́ͅ’̶̡̱̖͕̋̓ͅE̶̝̥͗S̷͓̰̰̻̦͋͘͠T̴̫͚̒̒̄ ̵̠̳̜̽͆̄̈́̊L̶͖̽̇͑͋͛A̷̖̒ ̵̛͙͕̩̊͂̋M̵̡͗͑̃͒͒O̸̳͆̽̋͂͝R̷͕̈́ͅT̵̡̛̟̞̮̝͑ ̵̢͆̉̊̇̇Q̶̛̤̥͕̲̫̈͛͘Ű̴̢̹̱́̓̀E̷̙͆̈́ ̴̙̒̑̆̓T̵͔̓̉̅U̸͈̔̓͠ ̵̢̈̇̉V̶̲͇͎̲́́̆̀I̵̡̧̘̙̮̓̍̈Ẽ̸̥̭̠̮̥N̶̡͚͂͘S̵̮̮̖̫̈́̇̊ ̵̝̫̜̈̾͗A̵͕̼̠͋͛͛̔͜͝P̶̢̹͇̎̂̔͝͠P̷̟͓̰̆Ȯ̶̖͍̔̉͊͘ͅR̴̝̩̱̞̔͜T̶̝̝̱͋̽̂̀E̸̛͕͙̳͛͊R̸̠̉̀̀̈
̶̼̻̲́̅̈́̏͘
- Spoiler:
- Nous sommes un, Aimable.
Nous sommes un et aux yeux des autres, tu es et seras le monstre.
Dans ce bureau, ce n’est pas la mort que tu viens trouver, C’EST LA MORT QUE TU VIENS APPORTER
_ … Ces hommes ne nuiront plus. Je puis vous l’assurer. Je suis venu pour assumer les conséquences de mes actes. J’ai désobéi aux ordres qui m’ont été donnés et j’ai…
T̴͕̕Ù̶͎̭̻̲̿̔Ȩ̵̱̲̲̏
- Spoiler:
- TUE
_ J’ai….
T̴͕̕Ù̶͎̭̻̲̿̔Ȩ̵̱̲̲̏ T̴͕̕Ù̶͎̭̻̲̿̔Ȩ̵̱̲̲̏ T̴͕̕Ù̶͎̭̻̲̿̔Ȩ̵̱̲̲̏ Ń̵̖̩̘͊̔̐̀Ö̵̧̧͍̙́Ų̵̞̳͕̥͌Ş̶̧͌ ̸̥͂͛̀Ą̴̫̺̐̌V̵͕̯͓̈́O̵͈̕N̶̢̬̼̘̙̽S̵̨͓̹͛͌ ̶̢̝͎͋̔͗͑̚͜T̷͔̔̆̕Ṳ̴͂̃̕Ë̸͈̩́͛̒͂̒ͅ
- Spoiler:
- TUE TUE TUE NOUS AVONS TUE
_ J’ai…….
E̴͖̳̺͊̄̀̉͛ͅṬ̶̨͇̖̖̋̽͘ ̸̺̔̂̏͋̌Ṉ̸̿̇͐O̸̪̹͇̘͂̐͊͋͝Ư̸̧̱̈͊̍S̵̳͓̱̹͚̍̽͒̉̎ ̵̩͗T̷̝̤̹͚̘̔̓U̶̟̣̒̃̎̓E̶̥̓͌́͘͝R̶̡̰̾͛O̸̱͈͕͖͍͐N̸̨̡̫̋͐̂S̷̠̟̗̮͋ ̵͔͕̉͋̌E̵̜̻̪̜͐̑̆N̵̦͇͔̺͌͝Ç̷̡̛̬̯̟̔͋Õ̵͍̯̻̒̀͠R̵̜͓͖̅̉̔͘Ě̴͇͗̈́͐͝
- Spoiler:
- ET NOUS TUERONS ENCORE
Suivre des yeux la lente progression d’une force insubmersible. Savoir sans que l’hésitation ne soit envisageable, qu’il est des choses que l’on ne peut expliquer. Comme on observe la marche lente et pourtant si emblématique d’un prédateur qui calcule chacun de ses pas. Pourtant quelque chose s’éveille dans l’instinct d’Eve. Oh elle n’a pas conscience de ce qui se trame dans les pensées chaotiques d’Aimable, mais à la façon qu’il a de se perdre dans son propre regard, d’oublier sans oublier, de disparaître et vaciller, à la mode d’une flamme dansant sous un souffle puissant. Eve n’est pas une femme de sciences, pas plus qu’elle ne prétendra jamais comprendre le fonctionnement des mortels. Mais l’alerte qui se presse contre son inconscient la fait se tendre malgré elle. En avait-il toujours été ainsi auprès d’Aimable ? Ses lèvres serrées en une ligne terne et dénuée de la moindre émotion, elle n’est pas ici pour porter sentence fatale à une âme déjà troublée, non. Non…
Aimable ne s’assied pas, droit comme la justice. Raide comme la mort, pense-t-elle malgré elle, dans cette façon que son regard a encore de s’éclipser. Les temps de pause laissent entendre le doute, l’incertitude. Va-t-il mentir ? Eve persiste à le scruter, ne bougeant pas de sa position initiale. Non. Elle ne comprend pas pourquoi June avait ainsi porté son regard sur un homme qu’elle avait appris à connaître comme instable. La puissance n’étaient pas les seules choses requises pour faire un valeureux soldat. Nul besoin d’être mortel pour réaliser ceci. Pourtant c’est une chose qu’elle voit dans les traits creusés de l’homme. Pourquoi la peur est-elle gravée sur sa face ?
Enfin, la langue de ce curieux vis-à-vis se délie. Les mots coulent d’un flot régulier et sûr, son cœur bat fort, mais il ne manque aucun battement, il ne ment pas. Il ne ment pas, non, mais une chose le taraude. Impassible, observer cet homme devient une peine lorsque les mots semblent lui manquer. La situation était pourtant simple. Il n’avait pas désobéi à ses supérieurs, non. Le rapport de mission était clair à ce sujet. Et si l’on ôtait jugements hâtifs de l’équation, le plus grand bien avait été obtenu d’une situation telle. Mais justice n’aura pu être faite.
Le silence s’étire et elle ne fait rien pour l’assister. Ni même l’orienter. Elle ne plisse même pas des yeux à la mention de sa désobéissance. Ici, les faits ne concordaient enfin plus. Et la suite… La suite elle le fait d’une expiration mesurée. Se redressant enfin dans le bruit de son siège râpant le sol, elle contourne son bureau et commence, interrompant l’autre homme d’un ton fort qu’elle espérait suffisant pour l’arracher de cette spirale dans lequel il s’était enfermé.
De l’un des cabinets bordant la pièce, elle tire deux verres et une cruche d’un cognac vieilli. Eve n’en abusait que rarement, et ce, en compagnie seulement de ceux qui devaient être traités d’un égard particulier. Elle remplit un verre puis deux et s’approche à nouveau du côté du bureau, posant un verre devant Aimable, gardant le sien en main.
« Asseyez-vous, je vous prie. »
Son ordre ne laissait place à aucune forme de refus. La pâleur de la face de l’homme est si évidente, à en croire que le monde ne survivrait pas un jour en portant l’âme de cet homme en son sein. Un temps de pause.
« Buvez, Monsieur de Bayard. Je n’ai aucune intention de vous voir perdre connaissance en ces lieux. »
Le stress était tel qu’elle pouvait presque le palper. Quelle était donc cette situation. Cette raison supérieure qui l’avait poussé à agir ainsi ? Eve retourne de son côté du bureau et tire sur le rapport mentionnant l’ensemble des faits, paraphé de la main de June van Heil lui-même. Pourquoi les faits ne concordaient-ils pas ? Chercher le regard d’Aimable se trouve être une tâche plus rude qu’attendu. Alors elle joue de ses sens. Fait volte-face et ouvre la fenêtre d’un mouvement ample, laissant l’air s’engouffrer dans la pièce, certaines feuilles se soulevant, prêtes à s’échapper de leurs piles bien alignées.
Lui tourner le dos est sa seule erreur. Une lampée d’alcool coule contre ses lèvres alors qu’elle reprend.
« Vous êtes un soldat d’une qualité extraordinaire, Monsieur de Bayard. Votre nom seul inspire le respect en cette armée, soit-il du fait d’Ulric votre frère, ou de vos propres mains. Je ne peux laisser tels événements impunis, vous en comprendrez sans peine les raisons. Mais mon jugement ne peut être sans conviction. Alors dites-moi, Aimable. Était-ce de la légitime défense comme l’indique ce rapport ? Ou avez-vous décidé de vous faire justice par vous-même ? »
Et faudrait-il alors en venir à la cour martiale…
--------------------------------------------------------------------------------------------
Les grondements emplissent ses oreilles et son œil est attiré par un mouvement que seul lui Voit. Cette ombre dans son dos, dans sa tête, il ressent la pression de son âme qui emplit la sienne, le corps trop étroit pour ces deux volontés qui se déchirent.
Sa plus grande arme est son souffle ; il doit le garder lent, paisible, pour contrôler les battements de son cœur, l’afflux de sang dans ses veines. Il guette. Il est rare que l’Ouroboros s’anime avec tant de vigueur et il ignore ce qu’il craint le plus : l’être en face de lui ou celui au fond de lui. Il inspire profondément, emplit son torse d’air pour ravaler la rage au fond de son ventre, tente vainement d’expirer cette tension qui contracte ses muscles. Non, il faut les relâcher, et c’est un vrai effort de volonté pour forcer la Voix à lâcher prise. En réponse, elle crache dans son esprit – c’est un brouhaha fait de bruits qu’aucune gorge ne peut produire, déchirements de chairs, gémissements dignes du raclement de l’acier contre la roche, les sons sont indescriptibles mais douloureux.
Cette souffrance n’est que la première parmi tant d’autres ; c’est toujours ainsi que La Voix fait.
L’user, l’user jusqu’à ce que l’épuisement gagne et lorsque l’inconscience l’emporte, elle, elle, elle l’Emporte lui.
A la vue du verre, Aimable hésite longuement mais finit par avancer la main pour s’en saisir. Son poing serré doit alors déplier ses doigts ; le geste est raide, les tendons s’étirent sous la peau abîmée, couverte d’une corne épaisse. Maculée de cicatrices, crevasses obscures où se tapissent d’anciennes blessures. S’asseoir ? Il ignore si s’approcher est une bonne idée mais finalement, Monsieur De Harcourt lui tourne le dos et s’éloigne.
Ṯ̴̢̤̠̲̻̓ͅƯ̶̧͎̫̥͇̿Ǫ̴̡̺̼̣͔̠̯͔̻̬͂̈͂̄̀͘͜N̸͚̝͚͂̉͌̎̈͆̓͆̄S̵̯̰̼̰̱͓̳̼̝̳͐ ̵̢̡̲͔̗̲͔̺͙̫̂͜Ḽ̶̞͚̘͕̋͛̓̍͌̀̔͜ͅE̷̳̞̫͍̊̓̈̌͠ ̸̢͎̲̫̮͉̱̰̙̈́̍̓̐͆͌̚͜M̵̤͖̺̦̣̯̌̊̍̄̓́͝͝ͅƠ̸͎͐̅̾̄́͐͘̕͘͝͠Ṋ̵͉̔̒̆̓͛̃̉̑̈́̒̔̓S̵̜̬͕͍̐̄̈́̑̈̅̓͝T̵̢͖͉̘͖̟̖͚͇̯͙̻̊̍̑̇̔͂̈́R̵̜̞̟͈̥͉̺̭̪͚̄̆̿̽̃̃̽͗́͒͋͜ͅȨ̶̖͇̠̯̱͆
Vertige. Le cœur à l’envers, les battements qui ralentissent, le poids si lourd sur ses épaules, la tension qui chavire.
Sa hanche cogne le bureau.
La douleur le rappelle à son corps ; il a avancé de deux pas sans même en avoir conscience et ce cœur qui bat, qui bat, soudainement très lentement, la conscience au bord du précipice, il faut tenir, il faut se réveiller. Il laisse son corps retomber sur la chaise, le verre entre ses doigts déverse quelque peu son contenu sur ses doigts. Il élève sa main libre vers ses paupières, il sent les picotements familiers le saisir. Il faut rester éveillé.
Eveillé.
Je berce mon petit pour qu’il s’endorme
La voix de sa mère est une menace qui résonne à ses oreilles. Il se souvient de ces fois où elle murmurait cette berceuse, les yeux tournés vers la fenêtre.
Je berce mon petit pour qu’il s’endorme.
La douleur lancinante, familière, monte jusqu’à son nez. Elle grimpe jusqu’à ses yeux. Le souffle lent. Mais ne pas s’endormir. Ne pas s’endormir. Ne pas s’endormir.
Eve ne doit pas se retourner. Eve ne doit pas voir. Pas voir ce qu’il se passe dans son dos, pas voir ce qu’il se passe au fin fond des orbites, ce que l’opérateur a perçu sous les sourcils broussailleux…
Ploc.
Une goutte de sang se dilue au fond de son verre. Le cognac se teint de pourpre, alors qu’Aimable rouvre les yeux. Le goût métallique dans sa bouche, le sang qui englue ses narines. Il récupère son mouchoir, le plaque contre son nez. Le parfum doux. Le parfum de son épouse. Sa main se serre précieusement sur ce bout de tissu alors qu’un calme soudain le saisit, étouffe un instant la VOIX. Ses doigts tiennent si fermement la précieuse étoffe que ses jointures en blanchissent. Enfin, il reprend pied – pour de bon, il l’espère.
Le cœur, de nouveau, reprend sa valse régulière, c’est un battement lent, déterminé. Volonté implacable, dédié à sa lutte éternelle contre cette Moitié qui l’habite, le hante. Prisonnier d’un éternel combat, sans l’espoir d’une victoire totale. Toujours attentif, aux aguets, prêt à prendre les armes contre sa propre âme.
_ Je vous prie de m’excuser. J’ai une terrible migraine.
Il hésite à boire le verre, l’alcool lui ferait du bien, lui donnerait un coup de fouet nécessaire – mais le sang, oh, ça, c’est ce que la Voix attend.
Une feuille s’envole ; c’est sans un effort qu’Aimable la récupère et la plaque contre le bois de la table sans même la regarder. Le claquement vif est une gifle qui l’invite à se ressaisir, à tamponner le sang qui coule de son nez, la douleur se rétracte, il ravale de toutes ses forces la Voix.
Légitime défense ? Qu’a dit June ? Qu’a-t-il signé, sans même l’en avoir informé ?
Il a la vision de ce garçon qui veut si bien faire. De ce garçon et son admiration. De cette affection qui lui offre. Cette jeune pousse plein de vie, à l’avenir brillant, au potentiel évident.
Ce garçon qui ment pour le couvrir et lui, lui, qui a le choix terrible. Dire la vérité et condamner ce garçon. Mentir et alourdir le fardeau de ses péchés sur ses épaules. Pourrait-il supporter ruiner la destinée de June ? Non. Non, il préfère enfoncer son âme déjà condamnée. Mentir devient une habitude dont il ne parvient plus à se débarrasser, l’aisance à omettre la vérité est une passivité effrayante.
Une fois de plus, il oublie ses valeurs, il perd Sa valeur.
Son âme n’est qu’un ramassis de peurs, de violences et de mensonges.
_ Nous les avons débusqués…
Ils nous faisaient dos. Nos mains saisissent la tête d’un de ces hommes et c’est dans un craquement délicieux que nous la tournons, pour voir son visage et voir la terreur sur celui des autres. Te souviens-tu, Aimable ? Te souviens-tu de leurs cris, te souviens-tu ?
Ţ̵̧̢̛͔͖̞̬̭̩̊͒͊̇̓͑͋͋͘͝e̴̢̻̙̓̅̑͝ ̷̧̧̩̠̳̠͙̓̈́̀͛̂̓̐̓ş̴̨̖̩̙̭͕̮̫̹̺̒o̶̹̰̳̻̔͂̀͋u̶̺̩̠͙̲̼̔͗̉̏̏͆̄͂̄̉̇v̶̼̳̜́͒͗͌̈́̇̿͆̐͊͜͝i̴̟̺͇̞͍̫̖͈̾͌̿̄̀͐̇̕͜͝͝͝ͅe̷͔̳̮͋ñ̷̨̘̦͓̪̗̲̜͙̣̼͜s̸̼̿̀͑̽͒̈́-̸̹̲̻̻͒̒̿̽̈́̓́̽̚͠t̷̨̗̞̺͙͙̰̝̃̄͒̓ú̴̬͈̈́͛̆̎̓̆ ̴͖͂͐̊̾̌͂̌̽͐̆̚͘?̶̣̻̜̥̖͎̘͎̞̓͒̽͗̅̈́͗̋͘ͅ ̴̢̨̳̲͔̞̦̅̄
_ La petite m’a accompagné. Lorsqu’ils nous ont vus, ils se sont saisis de leurs armes pour nous attaquer. Je n’ai pas eu le choix.
Pas eu le choix. Pas le choix.
Ses épaules sont lourdes, son souffle est toujours lent, posé. Ses yeux restent fixés sur son verre et le sang qui y a goûté. Son reflet troublé écho aux faciès déformés de ses – leurs NOS victimes.
Ses victoires ne sont que les éclats d’un feu prêt à mourir. Alors qu’il croit s’approcher de la lumière, il y a toujours cette brûlure qui vient le saisir. C’est au fond d’une obscurité de plus en plus profonde qu’il doit s’enfoncer.
Inconsciente du danger se mouvant éhontément dans son dos, le paysage lui semble d’une beauté incomparable. La vue n’est pourtant en rien extraordinaire. Rien qu’elle n’a pas déjà vu. Rien d’aussi délicat que les terres interdites de Grèce ou d’Italie. Eve trempe ses lèvres à son verre et attend patiemment. Tous les hommes sont différents. Que pouvait-il faire si ce n’était pas dire la vérité ? Et pour peu qu’il tente de la tromper, un cœur tourmenté se laisse toujours entendre à l’oreille fine des créatures de son espèce. Mais l’homme semble terriblement paisible. Comme s’il avait trouvé la paix. Comme si rien ne pouvait l’inquiéter.
Mais les mots, comme après un printemps doucereux, sont à Eve une promesse indicible. Elle se tourne lentement en sa direction et l’observe. L’odeur du sang ne lui avait pas échappé, loin de là. Mais elle qui pensait trouver l’homme aux poings ensanglantés, s’étonne de voir le mouchoir maculé de sang pressé contre sa face. Elle avait beau l’avoir invité à s’asseoir à de multiples reprises, il n’en avait eu cure. Alors elle n’insiste pas. Scrute ce visage marqué par une détresse qu’elle ne saurait expliquer, et ce cœur tranquille. Si tranquille.
Cette main rattrapant ses travaux est vive. Celle d’un soldat qu’elle a connu imparable et redoutable. Un homme qui ne manquait en rien de protéger l’intègre réputation de la famille de Bayard. Alors pourquoi ne répondait-il pas simplement ?
Sa langue se délie enfin. Ses propos sont plus cohérents. Il semble avoir repris le dessus sur cette douleur qu’il disait le secouer. Eve revient près de son bureau et pose son verre encore plein. Légitime défense. La petite fille était sauve. Elle pourrait faire mener l’enquête. Demander à ce que l’enfant soit interrogée. A quoi bon. Elle n’avait certainement pas besoin de plus pour ébranler sa jeune âme en fleur.
« Bien. »
Peu importe, au final, que les versions s’opposent. Il vient un moment où son rôle n’est pas celui de juge, mais bien de conducteur. Et si le tempo du palpitant heurtant les côtes d’Aimable était la mesure qu’elle devait battre, elle estimait qu’un homme disant la vérité ne devrait pas être remis en question. Se fier à ses sens ne l’avait que rarement trahie, après tout.
Elle saisit une page rédigée de sa propre plume et la tend lentement à Aimable. Elle ne le lâche pas des yeux alors qu’elle explique, calme et mesurée.
« Vos actions ont ôté la vie à plusieurs de nos concitoyens. Ce document est une décharge à l’issue de laquelle les familles des victimes seront approchées par les personnes concernées pour voir leurs pertes compensées. »
Une modique consolation. Justice ne pouvait être faite de la lame d’un soldat. Elle ne tolérerait pas ce genre d’écarts. Mais June avait approuvé une version qu’Aimable corrobore. Que pouvait-elle faire de plus si elle ne pouvait pas accorder sa confiance à ses hommes ?
Pour autant, elle finit par s’asseoir à nouveau à sa place. L’air soulève ses boucles d’or en une cascade luisant sous les dernières lueurs du soleil. L’éclat carmin du ciel tranche sur les couleurs ternes du bureau. Devançant la course du soleil, elle allume la paire de lampes à huile reposant sur son bureau, refusant de laisser l’obscurité couper cours à leur échange.
« Signez ce document… Et pour ce qui est de la suite – j’apprécierais de discuter de vos- perspectives. »
Trouverait-elle la même faille chez Aimable que celle qu’elle avait aperçue il y avait de cela des années ? Elle osait espérer que non.
Alors que vous parliez, au dehors une voix gronde. "REVIENS ICI, SALE PETITE VOLEUSE !"
Les soldats ont apparemment été en mesure de surprendre quelqu'un rôder dans les locaux. Qu'allez-vous faire ?
Vous avez le choix.
• Sortir du bureau.
• Rester dans le bureau.
--------------------------------------------------------------------------------------------
Les prunelles d’Aimable restent fixées sur le contenu de son verre. La goutte pesante de sang a été retenue par la surface épaisse de l’alcool. Mais au fur et à mesure des secondes, sa surface s’efface ; le sang se dilue en une myriade de perles ensanglantées, l’orangé du cognac se trouble, s’obscurcit. Tel l’horizon, lorsque la nuit le gagne.
Le cœur bat dans ses tempes, ses oreilles, alors qu’il surveille du coin de l’œil une menace que l’homme face à lui ne peut pas voir. Toujours aux aguets. Toujours. Car il existe des dangers bien plus grands que la cour martiale. La Justice Divine est celle qu’il redoute le plus, et il sait qu’il est déjà condamné. Alors pourquoi continue-t-il de lutter ? Murmure la Voix à son oreille. Pourquoi ? Il n’a pas d’espoir. Il n’y a pas d’espoir.
Parce qu’il Croit. Parce qu’il Croit en Dieu, parce qu’il Croit en la valeur de son âme. Tant de personnes y ont semé des graines d’affection. Son épouse, sa famille, Constantin, June… Tant de personnes croient en lui, voient en lui une valeur qu’il ne pensait pas avoir. Il ne peut pas les abandonner. Combien même n’y a-t-il aucune échappatoire pour son âme, il ne peut pas oublier tous les efforts qu’on a faits pour lui, tout l’amour qu’on lui a porté. Pour eux, il se battra. Il continuera à affronter la Voix et tout ce qu’elle éveille.
Alors ses yeux se détournent de ceux de Monsieur de Harcourt, c’est un combat qu’il n’a pas le courage de mener – qui n’a pas d’intérêt. Il est coupable, il le sait. Pourtant, lorsqu’il entend les faits qui lui sont reprochés, ses épaules s’alourdissent. Les mots concrétisent les visions entraperçues. Les cauchemars qu’il essaye d’oublier. Il a tué. Il a tué, et cette phrase, la Voix la répète incessamment à son oreille. Elle rit, hilare, s’amuse de la souffrance que ces quelques syllabes éveillent chez lui. Pour la première fois depuis le début de l’entretien, il lâche son souffle, c’est un soupir las qui franchit ses lèvres. Ses yeux se referment et sa tête s’incline, alors que sa main vient enserrer la croix qu’il garde autour du cou. C’est une prière à laquelle il accorde toute son attention, une prière pour ces âmes qu’il a renvoyées auprès de Dieu bien avant leur heure. Il a tué. Il a tué. Il a commis l’irréparable.
Son bras lui semble très lourd, lorsqu’il lève la main pour se saisir de la plume.
_ Pourrais-je écrire un courrier afin de transmettre mes excuses à leur famille ? S’ils ont des enfants… Je leur confierai quelques ressources financières. Elles n’effaceront ni la peine, ni le crime, mais soulageront peut-être un tant soit peu leur quotidien.
S’excuser est inutile – mais nécessaire. Comme porter le poids de ces vies qu’il a emportées. Les enfants sont innocents et la culpabilité de leur avoir ravi leur père lui déchire le cœur. Comment peut-il même songer au pardon de Dieu après ce mal qu’il inflige ? La Voix lui rappelle à l’oreille leurs cris
Le plaisir que nous avons pris à les tuer, après le mal qu’ils ont fait
La Voix, il ne veut pas l’écouter, non. Il s’accroche à sa peine. Cette blessure qui fait de lui un humain, le distingue d’une bête. Son sens moral est d’une justice implacable et il sait que son sang coulera ce soir. Se blesser, exhorter le mal, après tout, en Enfer, ne va-t-on pas le torturer pour cette vie qu’il a menée ? Alors il se punit à l’avance, s’infligeant des souffrances qui n’égaleront jamais celles qu’il a fait subir à des innocents.
Assumer seul cette responsabilité est l'un de ses devoirs.
Perspectives ? Entendre ces mots le saisissent d’effroi et manquent de l’offusquer ; en réponse, son cœur bat avec plus de force. Comment peut-il déjà parler de perspectives, d’avenir, alors que ce qu’il signe est l’aveu de ses crimes ? Ses pieds sont encore trempés du sang de ses victimes, et c’est sur leurs cadavres qu’on lui parle d’évolution, de projets à établir ? Aimable ne se sent pas prêt, et il sait que personne ne comprendra la peine qu’il ressent.
Dans le corps militaire, on doit s’habituer aux défauts du métier. Tuer est un acte nécessaire, une besogne à laquelle on finit par s’habituer. L’on oublie très vite les cauchemars, les Furies qui les poursuivent, les visions qui reviennent. L’on passe sous silence ces fragilités, considérant que les vies ne sont que des poussières rapidement effacées, et si l’on n’est pas capable d’oublier, c’est qu’on n’est pas faits pour la guerre ! Comme s’il existait en ce monde des êtres capables de tuer sans frémir, sans se sentir coupable d’arracher ainsi des vies. S’il en est, ce ne sont pas des Hommes, Dieu ne leur a pas offert d’âme.
Et c’est alors qu’un cri retentit. La distraction est bienvenue et d’ailleurs, Aimable relâche la plume, il est déjà debout. La Voix n’attend que ça. Le mouvement. La traque ! LA TRAQUE !
Mais Aimable s’est ressaisi, il se contrôle. Ses yeux se tournent vers Monsieur de Harcourt, fixent simplement ses pommettes.
_ Nous en discuterons plus tard. Veuillez m’excuser, Monsieur De Harcourt.
Aimable prend alors la direction de la sortie, d’un mouvement raide, il ouvre la porte du bureau.
Loin est l’Aimable discret, effacé dans les ombres. L’homme craintif, timoré et renfermé.
Le Chevalier De Bayard s’avance. Le pas est sûr, rapide, alors que ses yeux observent autour de lui. Et sans même qu’il n’ait à hausser la voix, elle couvre les cris. Grave, issue du fond de sa cage thoracique, elle roule tel un éboulement, elle en fait vrombir ses côtes lorsqu’il tonne.
_ Que se passe-t-il ici ?
Sous le vêtement de chanvre se dissimule la véritable étoffe du guerrier. Sous ses sourcils broussailleux, ses yeux vifs observent, cherchent. La fougue énergie, celle que le temps avait fait s’éteindre, se ravive et ses muscles se tendent, il sent son corps prêt à réagir.
Aimable est un homme d’action.
Son éducation, c’est auprès de guerriers qu’il l’a reçue. Bien loin de ce monde sophistiqué, fait d’étiquettes, de rangs, de règles ! Non, lui, c’est dans un monde sauvage où il a grandi, un monde où les dangers sont partout, où il faut agir avant même de penser.
Où la vie compte. Où les morts ne se résument pas qu’à quelques noms sur un bout de papier.
Les morts sont le sang sur ses mains et le poids sur ses épaules, les morts sont sa responsabilité et avant même de penser à l’avenir, il s’accordera le temps de les pleurer.
Loin des regards. Loin des regards…
Résumé : Aimable sort du bureau
Inconsciente des méandres de cet esprit troublé, Eve est patiente, ne fait rien pour pousser l’homme à la hâte. L’option existait toujours qu’Aimable change d’avis, décide d’avouer un mal tel qu’il leur était présenté, ou peut-être tout autre. Eve voudrait presque le rassurer, en voyant les cernes alourdissant son regard. Baptiste avait pourtant été une âme si belle. Peinant encore à saisir pourquoi deux frères avaient fini si éloignés dans leur comportement. Oh, Eve voyait sans peine les valeurs attenant à la famille de Bayard, mais quelque chose n’allait pas avec Aimable. Quelque chose qu’elle n’aurait su expliquer. Quelque chose que même les mots de Baptiste ne pouvaient dissimuler.
L’interrogation n’aura guère le temps de faire plus long feu, des cris se font entendre dans le bâtiment et mus par un instinct bestial, Eve se surprend que la réaction d’Aimable eût été aussi rapide que la sienne. Deux bêtes d’un sang incomparable.
Qui donc se trouverait assez sot pour s’en prendre à l’établissement même qui hébergeait les forces de la France ? Eve ne voit pas l’intérêt d’excuser Aimable, contournant elle-même son bureau pour rejoindre la sortie de la pièce, sens aiguisés, elle note sans peine les différents visages du couloir, traquant celui ayant poussé les cris. Du coin de l’œil, il remarque le jeune homme ayant gardé jusque-là l’entrée de son bureau. Celui-là même qui tenait l’épée d’Aimable. Tendant la main pour saisir l’arme qu’il lui tend sans protestation, Eve se flanque aux côtés du grand homme, surveillant la scène, prêt à bondir.
Quel genre de situation avait encore secoué leur armée… Mais les mots se tournent encore dans sa tête. Petite voleuse…
Comme un mauvais pressentiment, Eve ne cherche pas à attirer l’attention d’Aimable lorsqu’elle glisse le fourreau contre la paume rugueuse. Une preuve de confiance. Elle n’aurait pas confié son épée à un meurtrier. Elle le croit. Elle n’a pas besoin de plus. Ses actes prouvaient bien plus que n’importe quelle parole.
Au sortir du bâtiment, vous ne tardez pas à découvrir ce qui agite les troupes. Deux soldats tiennent fermement par les poignets une demoiselle ayant d'apparence moins de douze ans. Ses cheveux bruns, sales, et ses habits de guenilles trahissent sans mal sa condition de mendiante. Elle tâche de se débattre sans pour autant y parvenir.
A votre arrivée, la peur dans ses yeux est palpable. L'un des soldats ne tarde pas à expliquer le pourquoi du comment un tel chambardement. "On l'a surprit en train de se faufiler dans les réserves pour voler du pain et des patates. Elle avait aussi un coutelas prit directement dans la salle d'arme !" Disant cela, il la secoue brutalement, comme s'il cherchait à la faire avouer d'elle-même. Mais rien n'y fait. Une pomme de terre roule depuis sous ce qui lui sert de vêtement, appuyant sa culpabilité dans l'affaire.
"Maréchal, que devons-nous faire d'elle ? Peu probable qu'elle ait des parents à jeter au trou. Le mieux serait encore de lui passer la corde !" En effet, la sentence inscrite dans la loi pour un vol de ce genre est la mort. D'autant plus un vol au sein du corps armé.
Aimable, tu percevras parfaitement, à travers les yeux de l'Ouroboros, une vérité supplémentaire. Cette fillette n'est pas une simple gamine.
C'est une lycan.
C'est à vous qu'il revient de disposer de cette vie. Qu'allez-vous faire ?
• Exécuter la fillette.
• Lui laisser la vie sauve.
[Chaque choix aura des conséquences]
--------------------------------------------------------------------------------------------
Sa beauté l’éblouit. Les majestueuses boucles blondes forment une véritable crinière ; les rayons du soleil mourant s’y abandonnent, l’or et le cuivre s’entremêlent, alliage d’une inhumaine richesse. Sa peau est une porcelaine où aucune imperfection ne s’esquisse, il ne discerne pas même l’emprise du temps, aucune ride, aucune marque, non. Il y a ces pommettes hautes, ce nez droit et fier qui tranchent avec la douceur étrange de ses traits, ses lèvres bien dessinées, ses yeux d’une couleur vive qui tranche avec l’immaculé de son derme. L’image d’un instant, il a la vision de ces masques mortuaires sous lesquels on dissimulait les traits défigurés de certains soldats et un terrible frisson le saisit. Aimable ressent une sensation indéfinissable, mêlant l’admiration, la béatitude face à tant de beauté, à un rejet qu’il ne s’explique pas.
Au contraire de la Voix.
M̸̧̻̘̗̭̮̤̫̗̩͎̮̺̟̀͛͂͋̓̒̀̏̐̾̍̋̈́é̸̢̡̨̯̬̠͎̱̤̜͚͓̙̫̣͗̆̊̇̉f̵̨̭̮̯̰̙̫̬̘͕͌͒̽̒͑͒̃́̆̾̏͝į̷̰̥͎̦̬̞̤̙̫̞̓͑̓͜͠ͅͅe̵̦̩͕̗̗̥͖̩͒͆͑͊͋ͅ ̵͖͓̹͓̟͉̠̓̃̂̋̔̇̀͊̈́̔̉̕͘͘͠ṭ̸̢̢͚̰̪̼̭̗̜͎̱̮̯̉̔o̸̠͔̬̗̝̯͒́̽͆̒̈́̓͛͐̃̕̚ǐ̷̲̣͓̔̿́͜͠ ̶̡̢͕͓͌̀͐̃̈̊̔̅d̷̺̀̋̍̊̒̀́̓̅̂̓̑e̵̹̠̮̹͇̎̈́̃̕s̶̢͉̯̰̠͎̙̠̈͜ͅ ̵̥̒͐͑̒̓̇̀̈́̇c̸̡̨̖͚̲̝̲͈͈̯͇̣̱͌̑͐̍́͜͜ő̷͖̤̜̳̜r̸̢̹̹̥̺͖̯̰̤̱̲̋̋̏̉̂͂̔̋̆̕͜p̷̪͕̈́̇̍́̏̄̔̀͌̄͘s̷̢͓̘̥͍̦̞̖̝̏͋͆͆̋ ̵̢̛̜͓̼̥̩̭͓̲̘̘̬̬͎̿̐͂͂̈́̔̾̉̀̃͘͘ͅf̵̢̢̠̥̮̠̰̱̬̱̰̤͆͠ŗ̶̨̳͚̞̘͉̲̖̟̥̺̫͍̭̍́̿̔̏̽͌̆ǫ̷̧̢̧̻̹̪͇͓̭͍͈̝̰́̆͝ì̷̧͙̰̙͎̄͗̎͛͘d̸̢͈̳̪̤̫͉͕͕͙͗̽̿̈̋̐̎̾͌̈́̈͝s̶͉͍͓̻̳͎̗͑̋̆̄͒̇̇͘
Méfie-toi des corps froids.
La Voix rompt le charme et d’un battement de paupières, Aimable reprend pieds avec la réalité. Jusqu’à présent, il n’a jamais pris la peine de regarder Monsieur de Harcourt et cette vision abandonne sur sa prunelle l’éclat de lumière d’un soleil aveuglant. Il lui faut quelques secondes pour que la vision éthérée s’efface, que sa pupille se réhabitue à la pénombre. L’épée a déjà rejoins sa ceinture. Aimable, depuis longtemps, rechigne à faire couler le sang et les cris l’ont bien tôt averti que la voleuse était à présent prisonnière.
L’homme laisse Eve le précéder et lui engage le pas, en tant que bon petit soldat. Il est un suiveur, c’est ce qu’il préfère, c’est un rôle sans responsabilités. Il se contente d’obéir, et peut concentrer ses forces sur la maîtrise de la Voix. Lorsqu’ils franchissent le seuil de la porte, une bourrasque de vent tiède les saisit et Aimable élève le bras, protégeant ses yeux d’un jeté de poussière.
La crinière d’Eve s’agite au gré du vent, alors que le soleil abandonne ses dernières lueurs au creux de ses courbes, ses boucles se parent de leurs plus beaux reflets.
Aimable détourne les prunelles en direction des deux soldats et quelques secondes lui sont nécessaires pour discerner les traits de leur prisonnière. Une enfant. Sous ses mèches hirsutes et ses guenilles, s’agite le corps malingre d’une pauvre âme. Peur dans les yeux, mais
L̸̡̞̜̝̤̞̘̹̫̻̥̗̊̇̓̑̄͘ͅe̷̗̲̗͓̳̣͉͍̞͓̖̟̥͈̘̿͑͆̇͗̌͋ ̶͓̲̎͑̚̕͜l̷͕̱̠̞͙̽̀́̐̿̔̋͗́͊̆̔̚͠͠ö̵̢̢̪̯̥̹̫̯͎̮́͐̈́̐͐̄̏͒̈̒ứ̵͍͖̝̼̒̈́͌̍͆̚p̵̧̛̭̖̞̜̠̼͌̃̀̀͐́̒́̇́̏͘ ̸̞̞̫̳̩̤͇̓̆̒́͐̕ȑ̵̡̛̫͇̦͇̮̙͉̯͚̠̰̽̑̒̇͘͝ͅǫ̴̢̺̟̻̫̫̹͇͎̂̐͆̉̅̈̌̓̓̋̑͑̐͝d̵̳̬̙͉̼̣̣̙̙̩͙̩̻͖̄̂̒̓̀͊̋̆́̓̈̕ͅę̶̜̞͚͔̭̱̺̞̹̥̗͇́ ̴̢̗̣̮͕̺̭̮̻̗̝̜̪́ͅ!̷͎͌͑͆͊̀͗̋̽̇̓̄͊̕ ̸̡̲̳̱̘̖̯͙̘͉̞̯̗͕́̾
Crocs dans la bouche, folie dans l’œil, la bête gronde. La simple enfant, l’espace de quelques secondes, lui apparaît monstrueuse, le corps difforme, les articulations saillantes, les sons qu’elle produit sont les grondements d’un chien enragé. L’Ouroboros a soif de sang – du sien ou de l’autre ! Qu’importe ! Qu’ils saignent et crèvent
Aimable se ressaisit lorsqu’il entend un claquement sec ; son pouce a pressé l’encoche de sa poignée, la lame a commencé à s’extirper de son fourreau. Peut-être est-il le seul à avoir perçu le glissement de l’acier et en prendre conscience l’invite à s’immobiliser. Son souffle est lent, trop d’ailleurs, alors il l’accélère et chasse sa somnolence d’un petit mouvement de tête. Il doit se ressaisir.
Mais la fatigue pèse sur ses paupières.
Finalement, il élève l’autre main, pour les masser alors qu’un soupir franchit ses lèvres. Tuer une enfant est un crime inenvisageable, qu’Aimable est incapable de faire.
L̴̛̻̭͓͌̍̇́̒̿̋̅̽͑̍͝ę̴̧͚͎̪͇̬̦͈̠̲̜̘̉͗̊̿͆̓̿̉̈́̔̂͜͝ş̷̣̖̠̜̹̤̗̈͒̏͒̾͌ ̴͉̜̯͇̖̈̽̑͐̽̇̇̎̊͠e̵̠̘͕̠͙̜͕̺͒͗̍͜͜ͅņ̷̲͕̪̲͈̣̪̻̺̳̱̖̝́͌͌̎̎͋̅͐̈́̏͑͑̕͠͠ͅf̴̨̩͎̜̤̳̩͈̹̙͛̌́̇͂́̋̇́̀͘a̵̙͉͆́̀̆͆̍̈́͊͛̇̉͌̚n̴̝̗͉͎̲̝͈̹͐͛̀̉̃̈̽̓̆̕t̶̠̗͂͆s̸̲͎̖͍͍͚̳͕͔͒̀̿̂̈́́̒̿͌̃̃ ̸̨͕̬͔̜͍͗̐́̈̇͆̌͒̈́̆̀̂̽̿͂s̶̛̜̳͎̊͛ō̸͕͎̳̤̻̪͇̹̟͍̓͂̈́̒̈̀̄̀͌̔̈́̔ͅn̴̹͙̼͇͚̪͖̯̖̬͔̠͙̐̓̌̄͗̚ț̸̨̡̝̗̫̭͙͍̼̙̩̐̍̈́͛̿̇̀̔͐̂͘͜͝ ̴̢̬̮̬͕̭͓̲͖̯̩̘̬̂́̉̓̆͒̄̊̈́͗͂͘͝͠ḑ̷̡̨̰̜͚̠̜̱̖͍̰̣̄̾̾̔̔͜͜é̷̢̙̗͇̹͉͉̺͙̲͚̍̀̇̀̌̐̄̽̌ļ̶̛̮͕̙͉̼͙̒̓͌̈́͊̓̄̑̔̇̓̄͋͝ï̸̤̦͍͚̥̼̟͕̯̝̔͐̓͘͝c̸̢̦̃̔͋͒̎̈͌͑͐̇̋̆͝i̷̧̡̻̹͖̝̠̺͖̯̥̿͊͋̓̽̇e̷̢̡̺͎̝͚͖̻̩͋́́͊̍̃͛̔̃̈̂͊͜ͅừ̷͈̽̽̓̾ͅx̵̨̢̧̬̼̬̤̫͗̑͐̾͝
Mais l’Ouroboros, lui, ̢͇̗͖̗͜il….
- Spoiler:
- Les enfants sont délicieux
Non. Non. De toute façon, le choix ne leur revient pas. Il repose son bras et ses yeux rejoignent ceux de Sir De Harcourt. L’homme à ses côtés est son supérieur, il se doit de le respecter. Discuter ou ne serait-ce que proposer une réponse pourrait être considéré comme un acte d’impudence à son encontre. Et dans sa tête, règne le chaos ; l’homme tente de raisonner le monstre. Et pour une des rares fois, la Voix rejoint la Loi. Tuer le criminel. Tuer le loup. Se débarrasser de cet être misérable.
Que dirait Constantin ? Oh il sait bien ce qu’il dirait. Et toute son humanité – ou le peu qu’il possède – se dédie à ses mots. A ses sages paroles. A celles qui l’écartent du monstre, le dissocient d’une part de lui.
Aucune Voix ne l’emporte, ses lèvres se broient l’une contre l’autre – La Voix mord sa langue et lui mord ses lèvres pour se contenir. Il ressent la douleur familière dans ses narines et le sang qui en découle, il l’essuie de nouveau à l’aide de son mouchoir. Le mouvement est raide, son souffle est, malgré lui, bien peu régulier alors que ses yeux reviennent songeusement se poser sur la fillette.
Au sein de ses pupilles, peut-être discerne-t-elle ce qui a fait frémir tant d’hommes.
Aimable se reprend de nouveau, il ferme les paupières avec force, une main toujours sur son épée, l’autre épongeant le sang qui coule de ses narines.
_ C’est une enfant…
Dans ces quelques mots, l'on sent la tension de l'homme. Sa voix est rauque, grondante, alors que ses sourcils se sont froncés, son nez aussi. Ses yeux sont fixés sur le sol, alors que les épaules se sont contractées, la main sur l'épée reste si fermement crispée que ses jointures ont blanchi. Pour autant, le soupir qu'il laisse échapper trahit une certaine tristesse, lorsqu'il préfère s'intéresser aux genoux cagneux qui se tortillent...
C̷͓̥͙̜̫̲͖̻̟̲̑̊́͒͌̀͒̀̇͛͊̄̈́͘͠'̵̟̲͙̬̩̉̿ȩ̵̫͉̟̻̺̍͌̌̓̓ŝ̷͇͇̝͉̬̎̔ͅţ̵̞̠͙̻͈͓̹͔̱̪̔̒̈̃͊̈́̅̑̂̽̎̐͝ ̶͉̌̉̇͐̂̏͒͑͊̏͐̒̃̕ü̵̞̆̔͑̂̾̔̊̓́̆̿͝n̴̛̛͇̹̘͈̮̞͈̹͎͕̞̪̫͔̾ ̸̨͙͉̲̦̥͔̒̐̐̂̐͆̋͂͊̒͛̅̊̉̂m̸̛̲͚̤̾̐̍͂̉͗̅̄̊́ò̴͔͉̲͙͉͍̭̳͕̘͖̩̯̳̅́̈́̀͛̂̈́͋̃̂͜ṅ̷̛̮̯̻͉͉̥̞̦͖̦͉̝̹͙̄̎̾͒̆̃͆͊̈́̂̕͜s̸̬̲͈͇̳̻̄̅̓̽͒͒̀̏́̊̐̓́̒͝ṭ̸̺̰̞̽r̸̙̞͇̥͙̝̪̗̿̈̾̽̽̑̿̏̾̕̕͘͘͠͠ĕ̵̘̩͍̤̦̪̍̌͂̆͘͠
- Spoiler:
- C'est un monstre
La situation était des plus délicates. Là, dans cette cour sombre, une scène à laquelle Eve aurait souhaité ne jamais être partie se déroule. Ici-bas, les choses se sont toujours montrées les plus abjectes pour tout ce qui n’appartient pas au royaume des chanceux. L’aubaine envolée, la naissance persiste, et voilà les âmes égarées rendues victimes de leur propre condition. Que fallait-il de plus pour comprendre que cette situation était le théâtre d’une sombre injustice ? Que fallait-il de plus pour qu’Eve soit affligée du titre de bourreau ? Rien. Rien de plus que la loi et le dégoût viscérale qui ronge lentement le vampire.
Aimable semble tout aussi tendu qu’elle. Que ce soit dans la façon qu’il a de récupérer son épée, ou simplement de manquer de dégainer lorsque les autres gardes annoncent leur sentence. Le cœur au bord des lèvres, Eve fusillerait presque son compagnon du regard. Mais celui-ci se ravise. Bleu observe encre ténébreuse, et Eve ne sait pas si elle doit se rassurer de l’ouragan qui rugit au fond de cet homme. N’était-elle donc entourée que d’assassins ? L’idée l’indigne, elle qui pourtant a déjà ôté bon nombre de vies.
Mais le vent souffle à nouveau et l’odeur de lycanthropie mordant l’air la ferait presque se tendre. Pupilles étrécis, les prunelles azures se fixent sur l’enfant, son butin, et sa condition déplorable. La raison vient de cette voix graveleuse à ses côtés et c’est d’un pas assuré qu’Eve avance jusqu’aux hommes face à eux d’un mouvement d’une aisance évidente Eve ôte la lame que l’un de soldats porte à sa ceinture de son fourreau, le chuintement sinistre du métal contre le fil de la lame un supplice. Froide et composée, Eve inspecte le tranchant de l’arme, comme si elle n’avait pas entendu la question. Elle est pourtant directement face à l’un des soldats. L’un de ses soldats qui pense justifié ou justifiable de lui indiquer la marche à suivre.
« Êtes-vous père, soldat ? »
Sa voix claque contre l’air de la cour, électrique, pesant. Non, Eve n’est pas le genre de personne à se faire bourreau de la justice. Le limier de la cour a ce rôle. Elle tourne son regard perçant vers l’autre homme, ignorant l’enfant, ramenant fermement la lame à ses côtés. Elle ne fait pas pour autant confiance à la créature devant elle, aussi chétive paraisse-t-elle.
« Qu’en est-il de vous ? »
La réponse la laisse impassible. Elle sait qu’Aimable est un père. Un homme qui nourrit l’espoir de voir ses enfants devenir de grands individus, peu importe la voie empruntée pour obtenir gain de cause. Eve n’est pas un parent. Mais elle sait que la justice, aussi sévère soit-elle, n’était pas du ressort de l’armée.
« Voudriez-vous voir vos enfants abattus sans que vous n’en ayez connaissance ? Votre argument est-il celui-ci, soldats ? Dura lex, sed lex ? »
Une pause, marquée, appuyée. Elle épingle les deux hommes du regard, non par réprobation mais par autorité simple. Eve de Harcourt n’appréciera jamais d’être prise de haut.
Plus jamais.
« Êtes-vous des hommes de l’armée, ou des bourreaux ? »
Relevant le menton d’un air régal, elle toise enfin l’enfant et lorsque sa sentence tombe, elle n’aura jamais été plus prête à abattre sa lame si les circonstances le réclamaient.
« Justice sera faite. Dépouillez cette enfant de l’objet de son larcin. Elle répondra de l’ordre des geôles jusqu’à ce que son crime soit expié. »
--------------------------------------------------------------------------------------------
C’est dans ses prunelles que s’affrontent ciel et mer, la roche et l’acier transpercent l’Eden. Quelques perles argentées s’en échappent ; sang, larmes et rosées d’un azur blessé. Mais cette bataille dantesque n’est qu’une escarmouche. Sa pupille obscure est un puits sans fonds, une obscurité mouvante, qui ronge l’iris et se rétracte, le mouvement est à peine perceptible, suit-il son souffle ou sont-ce simplement les ombres qui jouent ? L’ouragan qu’Eve discerne affronte une menace plus grande, si grande que son corps ne suffit plus à la contenir. Les traits de son visage, par leurs reliefs, le plongent toujours dans une semi-pénombre, comme si sa propre chair luttait pour dissimuler la vérité.
Ses yeux se détournent.
Malgré ses combats, c’est un semblant d’humanité qui s’arrache de sa voix – un masque pour mieux se dissimuler.
Lorsqu’elle sera emprisonnée, nous attendrons. Et lorsqu’ils viendront la chercher, nous les traquerons
Alors qu’Eve récupère la lame, Aimable trouve la force de lâcher la sienne. Ses mains, il ne leur adresse qu’un regard. Réfugiées sous ses mitaines usées, comme son corps qu’il prend toujours soin de couvrir. Finalement, il croise les mains dans son dos, c’est avec dignité qu’il se redresse. Et pourtant, ses yeux restent baissées, les épaules, écrasées. La pression des regards – Eve, La Voix, les Autres. Quelques secondes, il pense à cette jeune fille acculée et si certains viennent la menacer de leurs mots ou de leurs épées acérées, lui n’a pas le courage de la regarder.
La misère est un mal pour lequel personne ne mériterait d’être puni.
On croit pardonner, mais ce n’est que faiblesse.
La Voix est celle de son frère. Il le Voit, assis près du feu, les coudes reposées sur ses cuisses. Elevant ses yeux vers lui. Ses yeux emplis d’une telle souffrance qu’il sent son âme se déchirer sous l’assaut de crocs imperceptibles et pourtant, il les sent plantés en lui, lacérant sa chair, son esprit. La douleur, est-elle réelle ou est-ce au fond de sa tête qu’elle se tapit ? Ses sens se brouillent et il lutte pour revenir, il ignore la Voix, il ignore ses pièges – a-t-il giflé l’enfant ?
Non. Non… Ses mains ont arraché les maigres possessions qu’elle a récupérées, sous ordre d’Eve. Entre ses grandes mains, les quelques pommes de terre qu’il lui a volées lui paraissent minuscules, si minuscules face aux risques qu’elle a pris, face à la peur dans ses yeux, face à son désespoir. Entre ses grandes mains, les deux pommes de terre pèsent le poids d’un mort, c’est la mort de cet enfant qu’il tient dans ses bras.
La révolte s’éveille dans ses veines et Oh ! Oh pour la première fois depuis leur rencontre, Eve doit percevoir le cœur du Chevalier gagner en puissance. L’organe résonne, c’est un tambour de guerre qui cogne contre ses côtes. La Justice ! Quelle Justice ! La Justice des Hommes se moque de celle de Dieu, répondant à la Misère par le Sang, le Fouet,
L̴̛͔̘̤̈́̂̉̕A̷̮̙̝͍̞̘̺͎̬̪̅̌̓̈́ͅ ̴̪̍͒͌͑͋͂̽̌̀͌̏̔̾̚͠M̵̥̱̝̞̭̀͌͆͐̂̀̓̓͊̍Ơ̶̱̣̱̗̜̋͌̓̋͊̓̑͝ͅR̴̖̤͖̣̬̮̘̓̾̋̐̄̇̂̉̕͠T̶̡̘͙͖̲̖̲̙̬͋̓̈́̌̄̐͘͝
Les pommes de terre, il les serre entre ses doigts. D'un mouvement vif, soudain, il les jette au sol. Le mouvement est violent, bien différent de ses gestes habituellement lents. Et pourtant, seul le silence justifie de cet acte – le silence - C̴̩̩̮͎̦̼͂̃̽͐͆͒̈̃̇̐̔͘͜A̶̲̪̜̥͊͋̀ ̸̜̱͔̜̑͜Ḩ̶̡̜̹̩̱̗̤͎̱̲̲̓̉̈͠Ư̶̠̣̼̇̋̍͆́͌̌̓̈̓͘͘̚R̵̛̺͙͙̳̱̋̃̿̋̀͋Ļ̸̫̤̩͈̝̜͎͕͓̻͇̓͐̀̋̓̏̑͛̈́͊̾̎̚È̶̫̼̮̬́̂̈́̉ DANS SA TETE.
Ses habits la recouvrent à peine. Ses genoux sont blessés, son petit corps perdu dans ce vêtement trop grand, soulevé par deux hommes énormes comparés à elle. Eve a éveillé bien plus dangereux que La Bête.
Elle a donné vie à son pire adversaire. Son Nemesis. Dans cette bataille interne, seul un Homme tient face au Monstre, il est Seul à le tenir au fond de lui. Et en cet instant, le combat tourne en sa faveur. Sa volonté écrase celle de la Voix, il ne l’entend plus, il la renverse. Sa carrure, son allure, sont d’une soudaine prestance et entre l’intervention d’Eve et l’acte soudain de l’homme, les plus téméraires sauraient frémir.
D’un geste du bras, il écarte sans douceur l’un des soldats. De l’autre, il arrache son vêtement et en entoure maladroitement les épaules de l’enfant, ses deux mains rejoignent les siennes pour les lui serrer. Pour une fois, il a conscience de sa force ; il la maîtrise. Assez, pour qu’elle soit ferme. Assez, pour la réconforter.
Le Chevalier s’agenouille.
Sous son genou, la Voix gémit et gronde. Il resserre son emprise. Non. Non, il ne lâchera pas prise.
C’est la force et la volonté d’un Père qui l’animent. Et c’est d’ailleurs en tant que Père qu’il s’exprime.
_ Aujourd’hui, jeune fille, tu as commis une faute. Tu as volé. Tu as volé et c’est une faute grave. Tu as peur… Je le vois bien. Tu as peur et crois moi, ça ne nous fait pas plaisir de t’avoir effrayés. Qui sont tes parents ? Y a-t-il moyen de les contacter ? La nuit est bientôt là… Nous ne pouvons pas te laisser partir, pas tant qu’ils ne sont pas là pour te ramener.
Il ignore si elle va répondre. Lui la regarde. Il la regarde comme il n’a pas regardé Eve, comme il n’a pas regardé les autres. Il plante ses yeux dans les siens et cette fois, La Voix est absente.
C’est Aimable qui l’observe. Il a enfin gagné son combat ; la victoire n’est qu’éphémère, il sait que la Voix reviendra l’assaillir avec plus de rage encore.
Mais ces minutes sont précieuses ; il se sent libéré d’un poids.
Le ciel de son regard s’éclaircit. La justice ? Lui ne se fie qu’à celle de Dieu. Qu’à celle de ses valeurs. C’est son devoir de défendre le faible et l’opprimé. Pas de le condamner.
Les soldats vous lancent des regards sidérés. Visiblement, vous n'avez pas répondu à ce qu'ils attendaient, l'un, comme l'autre. Un attroupement commence à se faire voir autour de vous.
La seule remarque que vous obtiendrez de l'un deux sera. "Je suis père. Et j’apprends à mes enfants à ne pas voler. Sinon il deviendrait comme..." Il désigne l'enfant d'un geste du menton, plein de dédain. "Cette chose-là."
Ils n'interviendront plus par la suite mais à leurs yeux, vous êtes clairement désavoués.
La petite, elle, lorsqu'Aimable la couvre de son vêtement, se recroqueville comme si elle craignait d'être battue. Mais finalement, c'est d'une toute petite voix qu'elle s'exprime. "Mes parents sont morts... Je voulais juste un peu à manger pour mon p'tit frère, on est plus qu'tous les deux dans le quartiers.."
La réponse du soldat aura le mérite de ne pas faire changer la stature d’Eve, non. Aussi simple soit le geste, elle rendra son épée au soldat, ne lui accordant pas plus de mots. Après tout, il n’était pas ici question d’un débat d’opinion. Et si le comportement d’Aimable pourrait réchauffer le cœur de n’importe quelle famille, Eve ne pouvait se permettre d’agir en toute impunité. Leur rôle n’est pas celui de bourreau, non. Mais il n’est pas non plus celui de fermer les yeux face à un affront fait à la couronne. Et à cet instant, l’idée que peut-être, Aimable n’était pas digne de confiance effleura Eve sans qu’elle ne puisse stopper cette petite graine de germer au fond de ses pensées.
Un homme perdant le contrôle et mettant un terme à la vie de ceux qui devraient avoir été mis face à la justice. Et cette fois encore, ne pas se plier aux lois pour venir en aide à une enfant. A deux reprises, une enfant était en cause. Un cœur de bon samaritain se cachait sans artifice derrière ces gestes bourrus et ces paroles rassurantes, et si la peine de l’enfant n’est en rien une corde insensible au vampire, pour avoir connu la douleur de n’avoir rien, elle ne peut y plier de la sorte.
Sa réaction ne sera certainement pas celle attendue, alors qu’elle pose enfin sa main sur l’épaule d’Aimable.
« Relevez-vous. »
Un grand cœur, il n’en doutait pas. Il l’avait connu contre l’amitié de Baptiste. Contre le fer vertueux de l’épée d’Ulric. Eve avait lu que cette famille était bonne. A l’image de Marie de Bayard. Oui… L’idée ne lui échappe pas alors qu’elle porte enfin son regard sur la créature, bleu perçant contre la souillure de ce visage abîmé par la négligence d’un monde ignorant éhontément les maux de la vie. Pour autant, les actes de la fillette ne pouvaient rester impunis. Et la morale n’était pas nécessairement la solution à tout.
« Qu’est-il advenu de tes parents ? Et ton frère… Est-il comme toi ? »
Le sous-entendu ne serait pas nécessairement remarquable, non. Et peut-être l’enfant elle-même n’y verrai que du feu. Eve soupire doucement, non pas par agacement mais par fatigue. Ces choses ne pouvaient être faites en dehors des règles. Et la loi était claire.
« Monsieur de Bayard, veuillez passer les fers à cette enfant… »
Quelle ironie, des fers qui ne tiendraient pas sur ces poignets frêles. Des fers qu’elle n’avait pas le cœur de lui infliger. Mais l’attroupement autour d’eux ne leur donnait pas le droit de faillir à leur devoir, non. Trop consciente de cette réalité, son regard darde Aimable, ne laissant pas de place à la moindre discussion. L’insubordination ne serait pas tolérée. Non.
Et si cet homme était juste, il se plierait à ses ordres. Il répondrait à l’évidente démonstration de force, à ce qu’elle ne dit pas, elle voudrait le lui souffler. Lui dire que tout ceci ne pourrait être que poudre aux yeux, s’il respectait les règles. Que peut-être, ils pourraient trouver une solution meilleure pour cette enfant. Mais tout ça se ferait dans le dos du reste de ces militaires.
Une dernière fois, Eve observe l’enfant, mains croisées dans son dos, droite comme la justice alors qu’elle énonce.
« Votre âge ne vous soustrait pas à la rédemption de vos crimes. Coopérez et il ne vous sera fait aucun mal. »
--------------------------------------------------------------------------------------------
Déjà, son corps s’est redressé, non pas pour obéir, mais pour se dégager.
N̸̢͈̣̣̰̞̱̎̎͜ͅͅȇ̷͖͉̹͔̹̠͎̣͎̜͈̠̊̉̑̑̕͜ ̸̢͈̻̞̲̪̣̯̹͆̄̾̽͛͂̈́t̵̮̹̎͂͘'̵͙̺̣̏̆͊̊̈́à̸̡͙͕̳͊̒̿̽̏̔͝ṽ̵̝̪͕͚̪̪̗̝͍̯̅̔́ȋ̵̡̡̠̻̤̺̻̪̹̠̻̰̭̠̓͒͋̇̑̃̆͛̚s̷͕̘̅̿́̒̋͠͠͝͝e̸̡͓̜̤̫̲̍͊̊̓̌̃̕͜͠͝ ̶̝̐̌̐̈́ṗ̷̼̞͉̳̮̦͈͉͍́͆̊͂̃̒̄̊̎̓̒̀ȁ̴̞̝̮̬͍͕͇̻̲̣̈̆̑̿̉́̓̽̊͂̿̓s̶̡̨̠̬̻̙̠͍̬̠̳̯̅͒̾̀͐̍̓͆̃̇̏̒͝͝͝ ̸̢̲̠̜̻̻̜̥̰̈́͌̀̓̅́̍̚̕d̷̺͉͙̣͉̕e̴̛̦̫̟̣͍͉̱̙̩̬͋͒͛̏̾͊̊͋̈́̒̚̚͜ͅ ̷̢͈̣̥̹̼̐̏̕n̵̡̨̧̞͕̝̣̼̬̬̜̙̈́̾̈́͂̍̎͌̈́̐͆́̓̀̿ǫ̷̡̙̎̆͜ų̸̦̘̈͊̃̈́̅̄͗̓̈́̏͜͝͝s̴̡͓͈̰͙̱̲̑͂̾̀̋̕͠͝ ̷̨̢̧͓̣̳͔͇̪̬͚̻̣̄̊̒̅̈́̊̐̀̓̕͘͜͝ͅţ̸̢̛̦̱̤̺̫͕͓̹͙̜̞̳̘͌͐̒͆̍͊̉͒́ǒ̸̡̢̠͎̲̼̱̩̘͇͖̲̲̏̚ų̵̺̬̻͈̾͊̇̓̈́͂͛c̵̢͎͍̫̳͎̣̠̗͖̱͓̣̱̔̌̽͆̂̀́̃̚͝h̸̨̲̭͔̙͕͇̜̮̥̥̮̘̭̋͜é̸̢͍̯̞̫̤̂ŕ̶̻̳̱̩̂̉, m̶̧̡̧̼̬̦͉̯̥̺̥̲̊͘͠ö̶̱͙͖͎̬͈̻͍̩́̆̈́͆͒̂̈́̇͊͝ͅr̷̢̗̩̳̓́̌͜͠ͅť̸̹̌̉̋̕-̶̢̺͇̥̬̠̞͚̦͎͈̺̲̽́̆͛̈́͆́ņ̸̯̫̽̂é̸̩͍͎̦̟̰̬̱͇̜͈̻̗̳̈̍̑̑͛͘͘
Les yeux d’Aimable se sont refermés. Les paupières sont la prison de chair d’où il est le plus facile de s’arracher. La victoire du Chevalier n’eut été que passagère, voilà qu’il sent l’Ouroboros mordre son bras pour se dégager. Il faut tenir. Tenir malgré la douleur qui remonte dans son crâne, malgré son poing qui ne demande qu’à se fermer.
C̶̛̤̦̺̓̆͋̅͒̂̑̒̀̏͠'̵̪͇̲̯̱̯̻̱̮̮̌͘̕͘͜͜ͅȩ̵̛͉̲̤̯͓̟̮̟͚̈́̈́͌̐s̵̨̨̰͇͔͉̳̞͔̼͉̽͜ͅt̴̡̡̛̲̩̥̘̹͕̩͓͔͌̌̀͋̀͒̋̅̄̂͐̄̏ͅ ̷̞̗͙͚̤͕̖̮̰͕̣̎̏̌̍͆͒̈̎̄̓̕̚͝͝͝t̶̡̢͇͉̠̓́̈́̄̾̉̽͛̿̌á̴̛̖͇̬̙̥̙̠̟̦̝̐̌̍̀̋̒̊̎́̓̎̓ ̷͈͇̮͎̱̱͎̜̘̩̩̹̼͗̉̆̆͋͆̍̊̅̒͛̚͝͠ͅg̴̱̭̘̻̱̝͉̀̆̐̒̑̾̈́͑͊̍̋͝ų̶̩̫̠̙̞̹̺͍͉̣̠̥́́̉̌̑̇̿̐̑̄̕͝e̸̡̗̰͇̼̣̗͇̠̯͎̙̩̣̔͊́̏͐͋ͅu̴̢͓͈͇͈͚͎͇̣̒͆̒̑̉̅̚͝l̸̛͚̥̩̮͖̯̪̫̆̈́̇̄̓͊̓̈́͊̿̐͝͝e̶̟̓̃́́̾̃̅͒̎̕̚̕͠ ̸̢͔̹͚̯̠̭̣͕̬̲̬͈̩͒͊̽́̈́͒̕͘͝͠q̵̛͎̹́̈́̋̾͋ú̸̜̙͛̈́̉͋́̔͒͠͝͠ͅe̷̫̰̺̮̩̪̫͙͔͈̳̓͒̈́̆̔́̐̑̏͠ ̷̡̙̠̬̤̞͔͎̞̬̫͍̻̓͒̋̿͋̎͋͂̈́̑̀͝n̴̛̬̖̥̤̱̫̟͎͔͕̅̓̽̇̀̅͌͜͜o̵̢̱͍̯̦̪̻̦̳͋͑̅͋̓͑͐́̑̏̅̀̑ȕ̷̢͙͇͛̇̀̄͂̀̈̎͘͝͠s̶̡̼̬̭̰̭̞̺͔͉̰̋̆̈́̿̊̆͌̎ ̸͕̾̓ȁ̸̱̳̱͖͓̑̂̎̈̓͛͆̑͗̕ḷ̶͓̇l̴̪͙̳̣̠̰̣̗͊̃̈́̃o̸̟̰̊͊̀̀̃̒̒̿n̵̛̮̣͚͈̈́̑̄̈́̾̋̔́̎̈́̚̚͝s̵̡͖̠͈͎̐̑͒̎̐͌͋̈́̅̑̽̾ ̵̖͔̪̲͓̣̙̘̮̦̳͙̥̹͊̌̔̓̉̄͑̊̚f̵̛̥̰̞̹̎̾̅͐̓͒̌̄͛͜é̴̡̡̛͕͙͉̙̫̳̭͔̱̗̹̋͆̈͐͌͆͑̒͆̕r̷̢̻͍͈̠͔͚̯̘͖͔̙͎̾̾̓̎̔͆̈́́͝m̶̯̼̪͎͉͔̪̠̮̾̅͆͐̎͝é̵̜̦̱̜̋̽͂͂̂̍̔͋̈͋̚ȑ̴͖̱͇̗͍̆̈
Les Lois sont une Justice qu’il refuse de servir. Justice ! Quelle Justice y-a-t-il quand la Loi frappe aveuglément ? Quand des criminels comme lui ou même l’homme à ses côtés sont encore debout et qu’ils passent les fers à une enfant qui voulait survivre. Quand l’on fait saigner la misère alors que des meurtriers foulent encore la terre en toute liberté. La Loi tue et ces morts sont censés soulager la conscience de ses serviteurs. Ne vous sentez pas coupables, vous avez appliqué la LOI, vous avez fait régner la JUSTICE ! Laissez lui endurer le fardeau de cette responsabilité, libérez vous de tout semblant de moralité, dissimulez vous derrière ces règles stupides, rigides et éhontés. Cette morale sans humanité. Il vaut mieux condamner le voleur plutôt que la société qui refuse de l’aider.
L’on préfère tuer cet enfant que le condamner lui pour toutes les morts qu’il vient de causer.
La révolte bouille dans ses veines. Un Chevalier se doit d’être Juste, et non pas servir la Justice. Il n’a fait aucune promesse. Dans son serment, il n’a accordé sa loyauté qu’à Dieu. Qu’à la protection de la Veuve et de l’Orphelin. Il n’a accepté aucun contrat le contraignant à obéir à l’armée ou un quelconque représentant, leur autorité ne le concerne pas. Il n’a pas à les respecter.
De ce qu’il a vu du monde, de ce qu’il vit au quotidien, ce n’est pas Paris et ses grands pontes qui le dirigent, qui le protègent ou l’aident. Ce ne sont pas ces personnes aux titres abstraits, aux positions de pouvoir dont il n’a rien à faire, qui l’accompagnent. Ils ne sont que des obstacles, les murs d’une prison qu’il aimerait écrouler.
Lorsqu’il se redresse, ses épaules ne sont pas droites comme celles de Monsieur de Harcourt. Il n’a pas sa majesté. Il n’a pas son charisme, sa puissance, son pouvoir, son autorité.
Ce n’est qu’un homme. Un homme aux épaules voûtées. Humilité. Humilié. Les valeurs piétinées dans la boue, la Justice lui crache au visage, le méprise de son regard froid et lui tend les fers.
C’est sa promesse qu’on enfonce au fond de sa gorge, c’est l’acier de ces mots qui déchiquètent ses chairs, c’est une plaie béante où son cœur saigne. La rage n’est qu’une de plus qu’il ravale au fond de son ventre. Il sait que la Voix va s’y faire les dents, s’en nourrir, s’en gaver. Qu’elle ne sera que plus violente lorsqu’Elle parviendra à briser sa volonté. Son cœur ralentit, ses paupières scellent ses prunelles, son souffle s’efface.
Sa sérénité est un leurre auquel ils sont nombreux à mordre.
Il récupère les fers. Ses mouvements sont lents, fluides, sa tête baissée, il n’est plus qu’une ombre derrière l’aura charismatique d’Eve de Harcourt. C’est à Eve qu’on dédie toutes les attentions, à lui et ses décisions. C’est lui qu’on voit comme l’incarnation de la Justice, cruelle et si ferme.
Cette Justice, il se refuse à la servir. Mais il croit voir l'Homme qu'elle dissimule. Et c'est à lui qu'il accepte d'obéir.
A-t-il conscience de son sacrifice ? De l’effort, de la confiance qu’il accepte de lui accorder lorsqu’il referme les fers sur les poignets de l’orpheline. La Justice jubile et sourit, carnassière, face au Chevalier qu’elle a agenouillé. Mais son épée, il la garde à ses côtés. Jamais il ne la confiera à ses mains ensanglantées.
Si du sang doit couler, ce sera de sa propre main et non pas celle de cette machine impitoyable. Ses fautes, il les accepte et les assume, sa culpabilité, il l’assumera sans qu’un juge n’ait besoin de la lui accorder. La peine, tant qu’il vivra, il continuera à la purger.
Jusqu'à ce que Dieu considère qu'il a assez donné.
_ Tout va bien se passer. Fais-moi confiance.
Il l’a murmuré, l’a à peine articulé, de sorte à ce que seule l’enfant l’entende. D’ailleurs, ses yeux clairs reviennent enlacer les siens et restent quelques longues secondes unies à ses prunelles. Il est assuré.
Le Chevalier s’est de nouveau agenouillé pour refermer les mâchoires d’acier sur les poignets osseux. Il veille à ne pas les serrer et lorsqu’il se redresse, il fait mine de la maintenir. En réalité, il cherche à la soulager du poids des menottes ; deux doigts glissés sous la chaine, il la laisse peser de tout son poids sur ses phalanges, ses traits restent scellés.
Les observateurs auront de quoi se satisfaire : la criminelle est attachée, ses maigres bras levés vers le puissant chevalier, on croirait presque qu’elle le supplie. En réalité, lui cherche à la soulager du poids de ses fers, lui permettant de se dissimuler derrière lui si elle le souhaitait. Si certains y verront la figure d’un bourreau, il est prêt à endurer le poids de leurs regards pour la protéger. Il espère qu’elle ne va pas chercher à se dégager. Qu’elle va accepter de le suivre lorsqu’il va devoir l’emmener.
Ses yeux se fixent sur le col joliment bien fait d’Eve de Harcourt. Trouvent la force d’effleurer ses cils, avant que ses prunelles ne se confient brièvement aux siennes. Dans son regard, il y a cet acte de courage désespéré.
Comme l’enfant qui s’apprête à sauter d’un arbre alors que son père tend les bras pour le rattraper.
C’est une épreuve. Une épreuve où Aimable a décidé de placer sa confiance en l’homme. En Eve de Harcourt, pas en la justice et encore moins à son titre, non. C’est à l’homme qu’il se réfère, c’est cet homme qu’il a accepté de respecter, de suivre, bien qu’il le conduise sur un chemin si différent du sien. Non pas par contrainte, non pas par soumission pour son titre, mais parce qu’Aimable a choisi de le faire.
Aimable espère que Dieu ne l’a pas trompé. Qu’il a fait le bon choix. Que ce sacrifice et que cet acte de confiance seront récompensés.
Tout ce qu’il demande, tout ce qu’il désire, c’est que cette enfant soit épargnée. Combien même doit-il s’agenouiller face à la Justice et lui baiser les mains.
Les militaires semblent au moins satisfaits de voir que l'enfant sera menée vers la justice. Les regards se font supports du Maréchal mais certains doute des agissements du de Bayard. Des paroles glissent ça et là dans les rangs "Peut-on lui faire confiance ?" semblent-ils tous murmurer derrière leurs regards troubles.
Et subitement, un nouveau cri.
"ATTENTI-"
Et une explosion. Rien de particulièrement spectaculaire en soit mais une déflagration qui vient raser deux bâtiments contenant la poudre et une partie des armes anciennes.
Le choc vous couche à terre, sans trop de dégâts, fort heureusement.
Mais la colonne de fumée noire qui monte vers le ciel et les sifflements assourdissants dans vos oreilles accapare toute votre attention. Dans la cohue, la petite glisse de votre entrave et.... brise ses chaines comme si ce n'était que de la paille. Elle court ensuite pour s'enfuir, non sans vous adresser quelques mots fort méprisants. "Tous stupides, les militaires ! Tous !". Elle ne laissera qu'un rire derrière elle avant d'être attrapée par un individu adulte qui, couvert de poudre, ne laisse que peu d'options quant à une potentielle innocence.
C'était un coup monté.
Le duo disparait alors derrière le mur d'enceinte qui rejoint les quartiers défavorisés.
De votre côté, les flammes d'un incendie commence à poindre. Il vous faudrait évaluer les dégâts rapidement et contenir l'incendie.
Qu'allez-vous faire ?
• Poursuivre le duo.
• Contenir l'incendie.
Quelle imbécile avait-elle été. Sa méfiance aurait dû être piquée. Rien de toute cette scène n’aurait dû passer sous le radar d’Eve. Avait-elle été trop négligente ? Était-ce sa faute d’avoir voulu croire à l’innocence d’une enfant ? La culpabilité pourrait lui serrer la gorge à la simple idée que son désir de ne pas prôner l’injustice envers une enfant humaine s’était si ouvertement retourné contre elle, non. Contre eux tous.
Comme ces nuits où les cauchemars sont si prenants qu’au réveil, les sens sont encore enfermés entre les mains de Morphée. Comme si rien ne pouvait effacer une erreur passée qui les poursuivra jusqu’à la tombe. Eve veut préserver sa liberté. Préserver ce pour quoi elle a tant sacrifié. Non, le jour n’est pas venu où elle cèdera face à l’adversité. Tout est un plan minutieusement établi. Les coïncidences n’existent pas. Les doutes doivent être balayés. Et lorsque tout présage le pire, il y a toujours une solution. Toujours. Eve avait tout prévu. Tout prévu.
Mais ses espoirs sont comme les flammes éclatant au crépuscule. La fumée noire et étouffante un rappel à l’ordre de l’enfer dont elle avait trouvé la sortie à la force de ses propres mains. Le sang sur ses doigts n’est pas le sien. Ne sera jamais le sien. Il n’est pas là. Ce n’est qu’un cauchemar.
Sauf que certains cauchemars deviennent réalité.
Eve aurait dû remettre en question le comportement d’Aimable. Envisager que peut-être, dans son élan de bon cœur, il ne ferait pas le nécessaire. Mais le cliquetis des fers étreignant des poignets trop fins ne pouvait qu’être le signe d’une subordination qu’eux deux devaient respecter. Leurs pas sont un écho contre les pavés, ceux qui les entourent auront remis en question les valeurs d’Aimable. Remis en question leurs considération. Elle devrait être comme eux. Considérer cet écart comme étant un manquement.
Mais June avait estimé Aimable digne de confiance. Eve ne pouvait que se conformer aux paroles qu’elle avait soufflé à Victoire, puis au jeune duc. Leur devoir était celui de recréer la confiance en la puissance militaire française. Et cela commencerait par croire en chacun des hommes qui composait ce pouvoir. Eve avait œuvré en silence, perdue tant d’heures au fond des archives qu’elle pourrait aujourd’hui nommer chaque homme qu’elle croisant dans les couloirs de ces quartiers d’armes à la seule vue de leurs visages.
Les ombres s’étirent dans le couloir. Elle devrait veiller à ce qu’Aimable ne devienne pas une gêne. A ce que ces murmures trouvent à cesser. Mais l’écho des voit est bien vite soufflé par celui d’une explosion. Projetés au sol, tous autant que vous êtes, ses réflexes de créature lui permettent seulement d’amortir efficacement sa chute… et de percevoir du coin de l’œil que l’enfant est déjà levée, et brise ses fers. Pupilles étrécies, Eve manquerait presque de montrer ses crocs sous la fureur.
Mais les cris de surprise et de peur enveloppent le fiel craché par l’enfant. Oh, il n’est plus un doute désormais. Peu importe sa race et ses origines, la justice frapperait. Se redressant rapidement, elle perçoit les deux individus fuir et siffle de colère. Mais elle ne les poursuit pas, non. Elle attrape Aimable par le bras, et d’une force qu’un humain n’aurait pas forcément eu, elle le force sur ses deux jambes, capte son regard et gronde.
« Vous. Vous allez les rattraper. Et justice sera faite. »
L’autorité dans ses mots n’est pas celle d’un ordre. Elle est celle d’une dernière chance. Table rase du passé. Baptiste croyait en Aimable. Ulric croit en Aimable. June croit en Aimable.
Alors Eve croira ce qu’elle verra.
Ses doigts se referment sur le bras d’Aimable, une pression solide et furieuse. Dans ses yeux bleus, la colère gronde. Personne n’attentait à l’armée en sa présence. Elle détourne déjà les yeux, mais son dernier murmure ne pourra échapper au chevalier de Bayard.
« Prouvez-moi votre valeur. »
Mais déjà, Eve s’est détournée. Elle ne peut pas abandonner l’ensemble de ses hommes. Pas maintenant. Un regard à l’ensemble de ceux proches d’elle et ses ordres claquent contre les murs, plus forts que la cohue.
« Sonnez l’alerte ! Que les hommes en pleine santé aillent contenir les flammes. Agissez avec prudence, les munitions pourraient encore produire de nouvelles explosions ! Qu’un groupe parte quérir de l’aide aux infirmeries, les blessés seront mis en sécurité ! Aux jeunes recrues, faite la ronde des bâtiments alentours et attestez de la situation, revenez immédiatement me faire votre rapport ! En action soldats ! »
Elle attrapera pourtant le bras d’un garde, un homme de confiance, et hélera deux autres hommes pour former un petit groupe.
« Vous trois, dispersez-vous autour du quartier général. Veillez à ce que la population soit contenue, emmenez les hommes nécessaires à cela. Et si vous apercevez la moindre présence suspecte, ferrez-les immédiatement. Nous aviserons de leur situation plus tard. »
Non, Eve n’était pas devenue chef des armées pour rien. Et un attentat à ce bâtiment était un attentat contre la couronne.
Et personne ne toucherait à l’intégrité de Victoire de France sous sa garde.
--------------------------------------------------------------------------------------------
Le sifflement dans ses oreilles, pensées éparpillées, les sens bouleversés.
Terre et sang dans le nez, l’Ouroboros hurle bien plus fort que les hommes, il a mal dans tout le corps, ses muscles se contractent, résistent tant bien que mal à la pression interne de cet être au fond de sa chair.
Mais son corps lui échappe. C’est sur ses jambes qu’il se tient, qu’une main le maintient.
Son cœur bat si lentement. Si lentement et chaque coup qui s’assène sonne comme un glas à ses oreilles. Le temps s’est figé, comme s’il retenait lui-même son souffle. Aimable ne reconnaît pas la main qui s’est refermée sur son bras – et à dire vrai, il ne reconnaît même pas le bras qu’elle tient. Eve, sous ses doigts, perçoit peut-être un mouvement étrange sous le vêtement, sous la peau.
Eve, dans ses yeux, perçoit peut-être l’œil qui s’est levé vers elle.
Tapie dans l’œil d’Aimable, au fond de sa pupille, un autre œil la regarde. Un éclat de lumière étrange trahit la présence intruse, elle cligne alors que la paupière d’Aimable ne bouge pas. Elle VOIT. La pupille prend de l’ampleur, au point que l’œil humain se gorge de sang lorsqu’elle écarte la pupille, lorsque l’obscurité ronge le céleste de sa prunelle. Elle veut sortir. Sortir de son écorce de chair.
Aimable referme les paupières, son cœur est saisi d’un battement plus vif, un battement qui s’accélère. La douleur dans son œil vrille son crâne, alors que l’assourdissant son cesse dans ses oreilles, il halète, toutes ses forces menées contre le maintien de l’Ouroboros. Le capharnaüm de la Voix recouvre totalement le chaos qui l’entoure ; il entend les claquements d’os, les raclements de crocs, les sons gutturaux qu’il enferme encore au fond de sa gorge. Ses mâchoires se serrent, les traits de son visage se contractent, le nez se fronce et cette fois, ce sont ses yeux bleus qui effleurent prudemment le regard d’Eve.
La pression s’accentue sur son bras, la douleur traverse son épaule, ses muscles se tétanisent
N̴̙̣̰̮̼̮͍̤͍̦̝̣̰̙̿̀̽͆̇̓͌̓͘͘̕o̶̡͙͚̩̬͍̮̟̥̠̩̰̻͈̓͘u̵̲͉̻͓̮̗͎̬̩̳͗͗̓̾̊͋̑͛́̍̄́̐͘͜͠ș̶̡̧͍͚̫̳̠̣̥̦̠̜̖̉̿̿͂͂͗͌̕ ̶̛͔̖̟̿̅̓̌͆̿̐͘͜N̴̡̠̼͙̮̹̖͍͉̲̣͍͈͋̃̂̀̑ͅ'̷̢̭̯̈̇̀̆́͒̎̐͐̀̚͝Ǫ̶̡̘̮͈̱̑̌̈́̈̋̈́̓̈́̕B̸̡̺̬̗̈́̎̂́̇̐͊̈̄̽͂͌̕͝͝Ȩ̴̳̞̯̟̯̙͙̗̉͜͝I̶͎̘̬̦͍͋̿̎ͅͅs̴̨͖̞͖̩͓̫̬̖̗̱̗͔̄̓̇͘̚͘s̵̙̜̺̱̘̱͓̦̝̯̣͉͒͌͊͛̉̍͑̐̓̕͜͝͝ș̷̩͓̙͙̪̩̖̱͉̗̙̾͒͆̾̆͌̾̑̄̈͊͂̚ͅǪ̵̡̛̣͈̕Ò̶̥̥̭̜̭̺̗̯͈͈̈́̄̀̃̌́͜͠n̸̨̛͔̟̫͙͖̥͚̪͗̄̾̓̎͗ș̸͙̼̦̜̥̹͎̩̳̱̻̮̖́̍̓̌̈͜͠͝ ̸̡̜̙̞̺̱̥̲͕̯̝̖̤̘͛͗͒̉̍͑̿͆͊̊̓̚͜Q̶̗̰̎̃͂̑̓̌̽̃̈́̓͌u̶̜͙̰̔̉̍̓̿͗̈́̾̚'̷̲̗̙̎a̸͚͝ ̵̧̛̥̣̪̳̯̜̥͕̊̋̉́́̀̈́́͑͂̕͘L̴͇̱̭͚̼̮̳͈͌̃̈́͗͝ã̷̜̠̰̻̠̲̩̲̥͙̫͔̝͘ ̸͙̗̰͓͙͉͈͇̹̹̩̙̿̒̈́͋͋͗̀̈́̍̽̂̓̕ͅL̵̘̎̽̽̎̄͝ͅÓ̵͎͖͈̻͚̠͙̯̯̈́I̷̯͓̖͚͈̅̊͋̿͛͒ ̴̧̼̫̱̮̹͎͈͉͙̝̤͎̟͌͋̾̈̓͘̕͝d̸̙̞̳̮̤̗̓͊͛̌̍̊̚͜͠u̶̼̘̔͌͒̈͌̊̒̒́͊̕͠͝ ̷̡̘͉̜̳͔͇̦̽̀̈̇̀̇͗̈͋̎́̇̕F̷̖̠͈̗̙͉̮̣̰̼̱͇͍̩́͌͌͜Ỡ̸̧̧̧̠͈͍̜͓̼͔͕͔͈̗̿͝r̷̡̛̛̬̙͕͉͇̫͕̾̉͌̓̒̓̐͘̕R̵̤̹͙̲̹͌̌̑͐̈́̅͛͂̿́̓̏̄̕̚r̸͓͓̓̉͘͜T̶̨̧̟͚͕̬͔̝̥́͊̑̈́́͝͝
_ Prouvez-moi votre C̶̡̛̯̳͕̪̙͉̅͑́̑̈̓͐͜͝͝U̴͖̦̣̝̬̜̒́̊͆̀͝ͅL̸̡̳̹̘̣̱͚̭̋̓̓͝P̸͚̠͍͈̄̉̈́̈́̚A̶͓̥̣̅̄͊͂B̶̞̣̫̿͌̊̈́̑I̷̡̡̡͔͎͍͓̺͓̻̹̳̣̅͆̃̑͛͗͗̽̚͜͝͠L̴͇̺͈̱̬̥̞̫͖͓͐̽̿͐̏́̾̉̌͆̚̕͜͝ͅͅȈ̸͓̙̲͍̫̳͂͘T̵̨̛̙̪̖̲̱͉͓̹̏E̶̦̘̫̓́ valeur
S̷̛̞̃̊̂̃̉͐͗̅͆̂̌̊̕A̵͍̣̞̗̪̔́̆͐͛̌̐̉͐̓̋̈́̚͘͠N̶͓̄̉̈́͗ǵ̷̱̺̺͔̲͙͓͑͛̽́,̷̡͎̥͍͍̀͌͗̚ ̸͚̼͔̲͔͖̺͆̉̂̃̄́̉͆͋̇͂̾́̂͘S̸̨̧̧̛͇̙̹̼͖̰̙̖̟̪̰̬͛̓́͒̑A̷̧̢̖̣̞̙̠͇͇̝̝͇͇͛͆̽̈̀̀́͛̋͗̎̑̈̕͜Ṉ̸̢̛̳̲͙̩̥̉̉̄͐̽̏͆͒̌͛̍͑̕͘G̴̫̭̰͉͚̹̓̀̒̓̅̀̒͑͘̕ ̵͚̒͑̒̉̅̑̔̌̽̌̓Ȩ̸͔̖̲̖̮̮̖̂̽̀̈͝T̵̢̧̨̡̜̣̦͖̟͖̥̐̏͆̉͋͐͊̎̒̂͘͠͝͠ ̴̛̤̦̪͖̌̇͐̂̂̎͜͝͠M̴̢͖̳̝̝̥̪̯͕̣̟͕̩͔̩̒Ǫ̷̡̮̦͕̺̮́̉̎̀́́͂͗͋͆̈̒̑̕͝R̵̢̧̥̰͚̫̼͍̰̘̙̊͐͜ͅͅṪ̵̡̲̜̖̬̙̗̭̹͚̖̰̹̤͗̉̔̕ͅ
L’ivresse dans les veines, la Voix le pousse en avant, mais Aimable réunit péniblement ses pensées, ses souvenirs, ses lèvres s’entrouvrent.
_ Ilrr… Il reste… De la poudre…Dans ce bâtiment. Quatre barils.
Aimable désigne du regard un des bâtiments voisins… Au vu des flammes, il y a des risques à ce qu’une nouvelle explosion retentisse. Il veut rester. Aider. Aider… Sauver…
C̶̡͙̞̥̥͚̯̣̳̼̑̐̒͌͐̏̈́̐̐̋̽̕͝͝H̸̨̛̛̆͂͐̓͐̃̒̈́̀̚͝Ǎ̶̡̡̭̩̞̳̤͍̫̦̌̍̊̌̑̄̀̿͗͒̄̎͒͜Ş̵̢̛͈͕̤̖̙̹̗͚͛̎̊͋̏S̴̳̣̳͍͈͉̘͍̼̍͌̃̌́͆̍̎͜͝͝È̶̢̛̗̺̱̫͍̻̞̳̘̲͍̠̦̀̉̾̅̑̿̂̚Ŗ̶̡͉̹̦͎̟̖͕̟̐͑͑́̔ ̸̱͐̔̔̂̀̎͒̓̑̓̀̿̀̕C̴̡̜̜͎̟̗͔̽̇͋̈́͗̈́͌͋͆̓Ḣ̷̛̻͕̫̜̟̹̉͆͑͂̔̂̃̓̾̕͘A̵̢̡̫͇̥̮̖̯̤̩̗̔̄̄̇̽̀͛̑̕̚͝S̵̼̣̲̣͇̪̣̹͎͖͇̺̯̖̈́͑́̒́́̽̓͘͜͠͝͝S̷̲̓̔͗̅̃E̶̢̲̦̭̿̈́̎̏̄͑̐̉̃͗̍͌́͝R̴̨̠̹̰̹̙̦͉̯̰͔̫͚̾̌̒̈͆̆͛̋̿̒́͗͌ ̴̨̛̜̲͉͔͆͊́̈̔͐̍C̷̹̙̭̝̮̾̿̽̌͊̄͛̾H̶̢̼̟̗̬̪̯̼͇̳͎̀̄̔͂̇͐́̕A̵̗͛͛Ą̵͚̫͙̰̰̺̅͆̄̉̆̄̽̀̓̕͜͝͝ͅA̴̡̩̘̟̱͕̍͋͆̽͋̌̆̆͑̑͜͝A̸͕̿͛̃̉̍̒͘͘Š̴͓̦̈́͘S̴͙̤͙͕̯͙̦̭̹̩͛͐̐͑̓͛̒̚Š̵̙͉̃̈̔́͋͋̆́̆̊̅̔̚E̸̖̲̾̆̀̽͜͠͝Ȩ̷̧̝̇̆̉E̶̩̍͊̈́̇̍̏̉̑̋̓̇̚͝Ë̴̢̪̺͙̳͔̪̲̞̹̳̖́͛̿͛̈́E̸̠̟̯͍̼̪͚̜͕͕̓̑̊̽̈́͛̃̾̂͑̚͠È̴͉͇̲̙̲̰̽ͅẺ̶͉̻̩͖̔̆͝Ẽ̴̫̱̫̲͔̰̦͇̳̘̗̗̠͕̪̏̊͑͗͋͛̽̄̂̃͌̉͌Ḛ̶̣̤̣̤̱̊̄͆̈́̅͂̆̈́͋̓̽̕͝E̵̘͈̮̥̾̈́͋͂͒̋̏́̄͘Ŕ̵̨͎̘̺̐̐͂͘
Son corps s’est déjà élancé. Ses lèvres se sont entrouvertes ; c’est sur ses papilles qu’il sent les fragrances animales de ces loups garous. Au travers de toute la poussière, la sueur, les fragrances de fumée, de cuir, de terre, des écuries, il discerne le parfum aigre de ces M̷̢̢̘̜̘͕̙̻̜̭̿̔̆̋̋͒͑͊̋͠͠͝Ơ̵̖̟̲͇̟̎̌̾̉̄͗͌̊͋̈́̀̕͝͝N̵̨̛͎̜̝̬̣̺̄̈̏̽͜͜͠S̸̢͈̻̪͖͓̗̲̏̈́͆̊̽̉͋̂̔̏͠͝͝T̶̢̟̝͇̭̺̱̱̞̃̔́̀͑R̷̛̜͙̜̻͎̀̐͂̊̌̀̓̾̍̆̾̎͝E̷̢̻̮͓̖̝̳̪̖͓͚̝̤̾̀̀͑͐͌̾́̊̿͜͝S̴̙͔̬̪̰̠͛͛̈́͋͊̓͠
Sa course est lente, mais s’accélère au fur et à mesure des secondes, il sent la douleur partout dans son corps alors que l’Ouroboros s’enrage
C̸̡̠͈͎̣̎̓̌̂͋̑̑͑̒͆Ẹ̸̤̯͎͔̗̮̼̌̈́̀͊̓͌̐ͅS̵̢̺̘͑͛̾͗̇̅̀̽̃̓̒̕͝͠S̷̻̠͚̫͈͖̓͛̐̓̇̉̂̈́͊͠Ĕ̴̘̙̜͇͖͝.̴̡̣̫̜̞̗̤̽͆̀ ̷̡̢̢̙͙̲͎̤̯̠̖̙̈́̉̈́̇̍̄̓̔̓͠͠͝͠D̸̨̛̟͖̪͈̭̜̣̣̈̌̉̎̊̃̎̈̃̉͠͝Ȩ̶͍̠̖̙̰̪̻̻̩͉͔̯͚͒̄̍̍̃͒̉̌.̷̳̜͌͛̑̈̿͛̈͠ ̴̡̢̞̫̞̠͕̭̯͙͐̿̇N̷͓̩̐̆͊̂̅̒͐̋͑͒̒̽̽̆Õ̵̡̧̢͔̮̳̮͎͈̘͈̍͗́͘͜͜͝ͅU̵̻̪͇͎͉͚͐̑̊́͌͐S̷͓̤̱͎̗̯̏͛̐͑͊̐̓̐̀̿̃͗͋̕͝.̴̢̼͙͖͕̣̻̰̘͉̤̤̉̉͂͒̒̍̇̓̏̕͠ͅ ̵̥̾̑͐̆̽̈́̆̑̃̔̅̂͘͝R̴̙̝̱͙̙̥̭̜̦̲̤͗̍̿Ŗ̶̭̫̘̖͉͕̱̫͓̯̎͑͛̽̏̉͆̈́̊̐͘Ȑ̸̨͇̳͎̤̳͇̭̺̮̯̯̩͎͊͒̀̎͋͋͂͂͊̅͝͝ͅA̵̧̛̛͍͖̭͈͙̥̣̮̭̻̒̈̉̾͆̄̕L̸̢͈̯̬̠̺̂͒̍͒͐͝͠Ẹ̶̦͖̤̝̻̈́̅̒̎̂̍̒̕ͅŅ̴̛̺̱̤̫͖̼̹͇͎̑̈́͑̒͒̈́͌̈́͒͊̒̕͘͜T̸̡̡̧̢̲̩̤̹̲͔̯̱̻̉͌̎͝Ĩ̷̢̮̳͍͍̈́͒̈́́͐̆̌͝R̸̡̤̲͓͕̈̎͑̃͛͜Ŗ̶̛̼̪̮̝̯̺̌̑̋͋͌͊͘͝R̸̡̡̦̳̩̓̀̒͜
Aimable ressent, avec horreur, ses côtes… Non. Non, il s’efforce de contracter ses muscles, serrer les poings, il doit – NOUS DEVONS – rester humains ! L’Ouroboros n’insiste pas davantage mais le pousse à accélérer sa course, il voit à peine ce qui se passe autour de lui, il suit la piste des cou L̷̳͕̱͙̻͌̔̓́̌Ő̷̡͉̞̻̩̤̳̼̳̦͍̝̳̽͐͊̈́̇̑̂͐͂́̑̚͝Ȕ̴̟̫̟̟̙̞̺̳͖͎͎̽̽́̏̐̑̕͜P̴̟̮̭̝̃́͘͠S̸̜̓͛̓̉̃̒̍͑͝
_ Raccourci…
Aimable murmure à l’adresse de l’Ouroboros… alors, sa course se fige et le voilà déjà en train de remonter l’allée. Quelques poules s’enfuient devant lui et un vieux chien aboie sur son passage, sans pour autant oser s’interposer entre lui E̵̝̰̘͚̹̞̼͑̎͒̈́͑̈́͜U̸̺̫̝̼̮̩͈̾̍̊̇ͅX̴̡̡̖̝͕͕̲̲̖̰͘͜ ̵̧͖̼̖͇̤̭͕͙̊͒ et leurs P̴̲͐͌̍͑̚͘R̷̠͍̫̱̝̺̳͙̬̺͇̥̩͓͐̉̈́̒͊̈́Ơ̵̧̛̛̹͕̱̲̰̻̥̬̹͋͗̂̂̽͋͊̍͝Í̶̢̡̺̳͙̻̤̝̦Ḛ̵̢̨̢̛̙͕̝̣͓̲̼̾̏̇̓̇̄͗̈S̶̢̐̇̀͑̉́̍̍̊̚
L’Ouroboros est si présent dans son esprit. Ses sens sont troublés ; les odeurs lui sautent au nez, nauséabondes et écoeurantes, il ne parvient plus même à les identifier. La lumière ne lui paraît que plus forte, il perçoit le froid de l’air, la chaleur de son propre corps, de son haleine. Les sons sont si nombreux, il entend le battement de son cœur, le sang qui afflue dans sa tête, son pas rapide, plus rapide que d’habitude, les articulations qui craquent sous l’assaut des tensions, mais il résiste, l’on ne voit qu’un chevalier qui court, pas l’homme qui tient péniblement le collet d’un animal enragé. Et il ressent. Oh, ce qu’il ressent est indescriptible. Ce sont ses muscles qui tirent, se gonflent, luttent contre deux volontés. Les articulations subissent péniblement ces assauts, elles gémissent, craquent et Aimable craint d’entendre leurs claquements lugubres. Sa peau l’irrite, comme si la vermine la rongeait de l’intérieur, il a envie de se l’arracher mais il sait qu’il ne faut pas, il ne faut PAS. Ses os lui font mal et ses côtes, ses côtes sont comme deux mains dont les doigts enserrent ses poumons CRAC
Aimable trébuche et ralentit le pas, jusqu'à s’arrêter pour reprendre son souffle. Le trentenaire essuie l’humidité sur son front et, d’une main tremblante, vérifie. Ce n’est que de la sueur.
Un bras nerveusement refermé autour de sa cage thoracique. Son physique n’a pas changé. Mais l’intérieur, lui, n’est plus le même. Tremblant, sang et salive au bord des lèvres, sa main explore nerveusement sa cage thoracique ; il a eu peur que ses côtes se soient brisées… Elles se sont comme… écartées…entre elles, ce sont deux doigts qu’il peut glisser… L’horreur le saisit alors que la nausée monte dans sa gorge, par chance, son vêtement dissimule tout à fait le changement… Il ne paraît qu’un peu plus grand…
N̶̫̤͉̭̱͍͕͔̻͉̗̈́̇̇̊̽̐͑̄̐̌͑̈͝͝ͅo̶̖̖̭͋͆͂̑̔͌̉̑̽̈́͌̕ͅu̷̠͕̥̗̠͊̀͌̄͒̿͂s̸̡̱̟̤̲̖̤̖͍̭̅̇͜ ̸̨̛̳̺̖̥̳̗̘̜͇̫̪̲̙̒̓̄̈̎̈̇̿͐͑R̸̡̗͍̩̺̳͈̯̒͂̒̐̉̈́̆̊͒̔͘͝͝e̸̡̜̲͖̩͕̬͚̙͂̈́̽͆͘͜s̷̨̨̤̣͙̞̉͛͂͆́̇́͗p̶̡̝̭͇͕̝̙͍̻̯̽̎̀̄̉́i̷̧̱̫̗͕̳͉͘R̴̡̮͎̰̺͎̤̻͌̅̐̎͊̈́͂̏̍͠͠͝ŗ̵͔̲̻̈́ẹ̶̝̞́̐͐̈́̍͝Ŕ̴̢̺̗͔̖̣͙̪͚̭̩̪̫͍̲ǫ̴̛̝̳̻̼͓͖̓ṇ̸̣̝͚̞̘̠̮̩́͌̐s̴͖̜̮̖̳̮̰̪̯̠͎̟̹̬̩̉̏̀̓̿̕͠͝ ̷̧̨̨̥̣̖̩̫̞̝̪͚̥͇͆̔͌͑̈́̆̀̃͗̈́̑̇̒͝͝ͅM̵̛͚͎̮̟͍̼̱̓̊̅̒̈́̓͛̈́͐͌̓̈́͌͜͝İ̴̙͕͈͕̲̈͂̌͂͜Ẹ̴̢̠͕̭̺͙̻̪̻̏̆U̷̲͍̠͛̑̌̓͗͑̈́̉͘͘X̷̨̫̺͇̥͕͍̞̗̓͑̆ͅ.̶̡̢̨̛̟͇̞̱̠̠͇͈̄͐͐̆͐̀̑̚ ̸̬̘͚͔͍̥͎̯̮̣̲̗̾C̸̲̮͗̾̀̎̀̈́̋͆͐O̷͔̦͒̈́͆̂̐̏̾̾̿̅̚̚͝Ů̵̢̻͚͍͚̫̤͖͈̦͖̤̺̙͚̌͂͂̓̓̄R̶̜̘̩͉̯̹̊̔͠Ṣ̶̖͈̩̲̖͚̞͈̜̝̐̀͆͋̏̒̋̔̈́̐̀̚
On le bouscule, de l’intérieur, ça cogne contre ses côtes alors que ça semble s’y accrocher comme davantage les écarter. Aimable, face à la menace, s’élance de nouveau ; il sait que courir défoulera l’Ouroboros. Les retrouver… Retrouver ces coupables… Par devoir
Ṕ̵̪̖̝̦̐́̈́́̌̿̈̌̊̈́͌͑̚͠A̵̢͈̪̖̦͕̙͉͐́R̵̢̭̮̝͙͕̪̥͓̄̓̔͑͆̾͗͌ ̷̡̨̰̥̥̺̮̻̙̤̓P̸̡͉̱̹̦̫͕̬͇̍͛̆̒̔̂̎͒̈́͑̉̓Ļ̵̧̣̘̮̖̜͍͚̗̠́ͅÀ̸̺͇̥͇̞̝̹̻̥͍͇̳̰͝͝Í̴̢̛͍̳̱̇̋͛̔̈́̂͒̃̈́̕Ŝ̶̰̘̹͘Ḯ̵̡͕̳̦̲̼̰̮̫̲̺̯̞͈̒̃̉͌́̓̑̓̐͜͝͝͝͝͠R̵̖͓̞̬͖͕̥̖̙̜̻̦̗͔̫̉̍͊͒͑̆̈́̈̿
Ils devront les arrêL̸̛̯̃̈́͋̀̍̃̍̀́̂͒̂̈͘E̵̤͗̂S̵̢̡̡̪̫͉̣̦̝͓̈́͋̄̈́̃̕ ̵̮͇͚̞̖̽̂Ţ̴̢̪̱̭̤̘̰͎̗̳̝͔̀̎̋̇̾̓̊̿̑͒̋Ų̶̲̙͔̬̠͚̣̘̘̲̩̯́̄̌̇̇͛͊͘̕E̷͇̥̯̪̯͖̞̘̊̾ͅŖ̵̡̨̰̟͗͒͋̈́͘
L’enfant, l’enfant, l’enfant et son regard innocent, lorsqu’il y pense, l’Ouroboros mord à pleines dents les joues, il ne reste que des lambeaux de chairs. La raison d’Aimable vacille, est-ce qu’il imagine tout ce qu’il se passe ? La main plaquée sur ses côtes, il n’a plus le courage de les étudier. Il respire mieux, c’est une vérité, est-ce simplement le regain d’adrénaline ? La douleur commence à passer, alors qu’il monte dans sa gorge une excitation terrible, au point qu’il se surprend à sourire.
Qu’ils courent encore et que la chasse dure
Qu’ils résistent, que le sang coule et la douleur éclate comme les fleurs naissent au printemps, que la vie gicle en tous sens
La leur, les leurs, personne n’échappe aux crocs de la M̸̛̪͔̖Ǫ̸͎̭̯̻̜̞͈̳̞̝͔̠̈́̀͝R̵̮̐͌̀̓T̶̡͚̖̺̣̥̮̱͕͔̱̟̋͑͗̅
Aimable se sent submergé par l’impatience de l’Ouroboros, où sont ses pensées parmi les siennes ? Où est la réalité, est-ce celle que la Voix lui offre ou celle qu’il s’efforce de voir, par ses sens minimisés, emprisonné dans ce corps si frêle, si fragile, qu’est-il, homme ou bête ? A quelles lois obéit-il, celle de la Nature ou de la Société ?
Son humanité s’accroche de toutes ses forces à des valeurs morales ; et la réalité s’efforce d’arracher le sens à chacun de ses devoirs. Protéger l’orphelin et pourtant, c’est l’orphelin qu’il est en train de chasser, c’est l’orphelin qu’il devra condamner. Il se doit d’obéir à ses supérieurs et à la Loi, à laquelle il ne croit pas.
La Voix, elle, suit des lois d’une simplicité effrayante. Elle ne s’encombre guère de l’éthique ou d’un semblant de moralité, non, elle ne voit que S̵̡̪̹͓͈̻̤̞͈̪̻̯̟̩̰͆̃͑͌̀̿̒́̚͠͠͝ͅA̶̛̫̮̭̓̿̃̉̃́̓̓̉̑̆̌̊̕͘͜ ̴̳̖̌̓͗̎́͌̈͆͘͝F̵̫̬̭͉̖̤̝̗̜̊̊̉̀̏́͒̉͊̎͜͝A̷̧̡̛̦̥̭̯̖͚̥͖͉̤̻̦̣͈͍͕͔͊͂̿̎͑́̾́͌̃̔̏́͐̎́͠͝͠ͅI̴̢̼̹̦̭̟͇̠̣̱͖̳̬̜͍̗̳̖̱̺̽̒͑̎̃̓͑̉͊̾̅̈́̈́̾̐̌̚͘͝M̶̡̢̤̳̳̤̳͍̫̙̒̔̀̅́̋́̇̎̇̐̂̀̅͘̚͜͝
Leurs fins à tous
Eve, vous verrez que les soldats s’exécutent parfaitement selon vos ordres. Leur discipline est tout à leur honneur mais la situation est tout de même critique. Toutefois, il semblerait que vous parveniez à prendre le pas sur l'incendie. Les barils encore contacts sont rapidement déplacés et vous n'avez plus qu'à éteindre les foyers et faire le bilan pour voir si des victimes sont à dénombrer.
Espérons que non.
Ce sera à voir.
Aimable, l’Ouroboros vous aura mené jusqu'à une ruelle sombre, presque à la fin de la ville. Et là, vous trouverez vos proies, oui.
Mais elles sont mortes.
Leurs cous forment des angles tout sauf naturels. Quelqu'un les a abattu. Quelqu'un vous a devancé. Mais qui ?
Et dire qu’il était simplement parti faire quelques courses pour son maître… Céline soupira. Une colonne de fumée noire montait d’un peu plus loin, dans le centre-ville. Son regard se marbra de la contrariété alors qu’il prit un instant pour respirer correctement et ne pas céder à la panique qu’il pouvait sentir comme étant ambiante, parmi les innocents.
Il ne devait pas faire de même.
Et, alors qu’il allait repartir, la silhouette d’un homme, visiblement mal à l’aise, attira son attention. Doucement et avec une lenteur bienveillante, Céline vint poser sa main sur l’épaule de l’homme. « Monsieur ? Vous allez bien ? Souhaitez-vous que je vous accompagne voir un praticien ? »
Dos à la ruelle qu’il venait de dépasser, le roux essaie de capter le regard de son vis-à-vis. Il n’y a plus que cela, qui compte, désormais.
@Aimable E. De Bayard
La scène est un chaos insensé. Le temps n’est pas aux réflexions. Chaque fibre de son être est tournée vers l’idée de protéger les siens, son armée, les intérêts de la France. Non, les intérêts de Victoire. Eve n’a pas le luxe de s’interroger. Guide les groupes d’hommes pour les garder le plus en sécurité possible. Les barils de poudre son éloignés avec succès, et si tout semble se dérouler selon ses commandements, il est des choses qu’Eve, malgré toute sa concentration ne peut ignorer.
Les gants sous ses doigts lui semblent poisseux alors que rien d’autre que suie, poudre et charbon ne les salit. Non, sous la pulpe de ses doigts, c’est la sensation aliène qu’avait laissé Aimable qui continue de réveiller frisson sur frisson contre son derme. Dans des prunelles sombres, une chose obscure se mouvant dans l’obscurité d’une pupille dilatée.
Eve n’avait peur que de peu de choses. Mais jamais auparavant n’avait-elle ressenti son cœur de tordre de la sorte sous le regard d’un simple humain. Inconsciemment, elle avait pensé que l’homme pourrait être l’un des siens. Non. Un lycan. Mais rien ne coïncidait. Non. Eve savait. Savait par Baptiste qu’une chose étrange possédait son frère. Folie, damnation ou péché. Eve n’avait jamais obtenu le fin mot de cette affaire. Mais Aimable était aussi humain que les enfants royaux. Aussi humain que les innocents de ce monde.
Et pourtant…
Ses hommes lui reviennent, l’informant que l’incendie serait contenu. Eve malgré ses pensées fugaces, n’a cessé de prêter main forte à ses hommes. Les gardes ne sauvaient pas des vies. Seuls les actes étaient capables de ce genre de miracles. Mettre la main à la patte n’était pas une option. Et ce n’est qu’une fois assurée que l’ensemble des blessés repérés avait été pris en charge qu’elle réclame à un groupe d’homme de commencer le comptage des soldats. Chacun devrait rapporter que tous les hommes de la caserne répondaient présent.
Se hâtant jusqu’au plus près de l’incendie, Eve inspire longuement, faisant abstraction des odeurs de brûlé et de poudre. Non, elle veut entendre. Entendre par-dessus le rugissement des flammes et le crépitement des structures se courbant sous les langues de feu, quelqu’un pourrait avoir été pris au piège. Sens en alerte, l’effervescence est suffisante pour donner le tournis, le claquement des seaux, la chaleur bouillante des vapeurs d’eau.
Et au fond de ses pensées, l’espoir qu’Aimable ne l’aura pas trahie.
Notre pas se ralentit. Nous humons l’air ; terre, poussière, misère. La mort alourdit l’atmosphère. Les deux cadavres gisent. La nuque est brisée. Un son rauque s’arrache de nos lèvres. Résonne dans notre cage thoracique ; l’orage s’éloigne et pourtant, nos os sont son écho.
Déception. Frustration. Satisfaction. Emotions complexes, pour l’âme si primaire, et pourtant, une part en nous parvient à les identifier, à les expliquer. La traque s’est finie ; aucun sang n’a apaisé notre soif. Aucun carnage n’a apaisé notre faim. Encore une fois, nos crocs ne peuvent se refermer que sur nos propres os ; les dents raclent contre les chairs, les côtes se rétractent dans un craquement lugubre.
La présence étrangère, nous la remarquons et face à elle, nous sentons notre cœur s’accélérer. Notre rage se rétracte, et nous nous reculons dans une obscurité qu’aucune clarté ne pourra éclairer ; c’est au fond de nos prunelles que nous allons nous réfugier.
Aimable s’éveille. Le craquement lugubre de ses côtes témoigne du retrait de l’Ouroboros, et progressivement, leurs âmes s’écartent, leurs raisons se dissocient. Ses pensées, son corps, sa fatigue, tout lui revient, son souffle éreinté, le cœur qui bat à vive allure, la tension qui chavire. Il serre un poing, se ressaisit, ses yeux clairs vont des deux corps puis reviennent vers l’inconnu à la chevelure ensanglantée. Son sourire… Son sourire plein de crocs lui arrache un frisson de dégoût.
Il lui paraît affreusement familier.
Ses paupières se scellent, il enferme ses cauchemars au fond de sa tête. Ce n’est pas le moment d’y penser. D’un revers de manche, il essuie son front en sueur et c’est alors que la main se repose sur son épaule. Pour une fois, l’Ouroboros se tait. Mais le chevalier se dégage d’un mouvement instinctif, sans même y réfléchir, jusqu’à réaliser son geste. Penaud, ses yeux s’abaissent ; pourtant, par instant, c’est un regard suspicieux qu’il lui adresse.
Sa présence est étrange. Face à ces deux cadavres… C’est de lui qu’il s’inquiète. Et l’Ouroboros… Que s’est il passé, avec l’Ouroboros ? En temps normal, il se serait enragé. Il aurait grondé, de voir ses proies lui être arrachées. Et au lieu de cela, il répond par ce silence inhabituel. Ce silence… Aimable ne le supporte pas. C’est son absence. C’est un vide. C’est une solitude que son âme n’a jamais connue – en réponse, la Voix gronde. Soulagé, ses épaules se relâchent et à contrecœur, il détourne son regard de l’homme pour s’approcher des corps.
_ Tout va bien. Ne vous inquiétez pas. Comment était la scène à votre arrivée ? Avez-vous vu quoi que ce soit ?
Il étudie les blessures. Sont-elles sanglantes ? Les os sont-ils seulement brisés ? Y’a-t-il de quelconques traces sur leur gorge, leur nuque, l’étreinte de doigts, d’une mâchoire ? Les corps ont-ils été déplacés ? Et leur visage ? Ont-ils été surpris de l’attaque, ont-ils eut le temps de souffrir ?
La traque n’est pas terminée. Leur mort a probablement été causée par un complice. Il reste… quelqu’un à trouver. Alors, l’Ouroboros sourit et Aimable se contente d’un battement de paupières comme l’on tapoterait la tête d’un chien. Il y a… Il y a pourtant cette horreur qu’il ne peut pas nommer. L’horreur de voir cet enfant aux yeux vides. La mort d’un enfant éveille une souffrance étrange, une froideur, la morsure aigre, glacée, d’un désespoir qui écrase ses épaules. Ses yeux clairs s’obscurcissent, mais ce n’est pas sous l’assaut de l’Ouroboros ; son cœur se voile. Un deuil que ses valeurs ont l’habitude d’afficher et finalement, Aimable se signe avant d’accorder une rapide prière. Il observe ensuite la bave sur leurs lèvres qui pourrait témoigner d’un étouffement ou d’une brisure rapide de la nuque, ou encore, de l’écrasement de leur trachée artère. Il s’intéresse à leurs yeux, leurs traits de visage, il cherche d’autres signes d’étouffement ou ceux témoignant d’une mort rapide, comme les yeux injectés de sang, les lèvres bleuies. Leur nuque, leur gorge et bien sûr, leurs mains, leurs vêtements. Sont-ils abîmés par les traces d’une bagarre ? Les a-t-on tués en même temps ?
Aimable se redresse : la position de leur corps peut probablement indiquer si l’un s’est jeté sur l’autre, s’ils ont été attaqués de dos ou de face… Il cherche à comprendre et la Voix le conseille. L’Ouroboros est un prédateur. Il sait comment on ChASse. CommeEnt Sont Les CORps qui SaiGNent et MEUrent. La Nuque, les OS brisEs, CAssES. Les LouUps Sont en Meute et c’est en MeuTE qu’il FAUT les TUER.
_ Qui êtes-vous ? Et quelles sont les raisons de votre présence ici ?
Tout occupé à observer les lieux, Aimable interroge l’étrange personnage. Et pour l’une des très rares fois, ses yeux clairs se plantent dans les yeux de l’inconnu.e. Lui. Si craintif. Lui qui baisse toujours les yeux. Lui qui dissimule sans cesse son secret, le monstre au fond de ses prunelles. Il affronte le regard de l’inconnu sans frémir.
Il n’a pas peur.
L’Ouroboros est si calme. Trop calme.
Aimable, lui, est méfiant.
Céline haussa les épaules. Visiblement, l’homme avait l’air d’aller au mieux. Ce n’est que lorsque ce dernier l’interrogea qu’il tiqua, penchant sa tête sur le côté. « La scène ? De quoi parler v- ». Il vit les cadavres non loin. « Oh, pas tous les saints… » ajouta-t-il avant de se signer et d’ajouter une prière muette.
Toutefois, lorsque l’étrange homme reprit la parole, le roux fronça les sourcils et croisa les bras sur son torse. En voilà des manières ! « Dites voir, vous ! Je vous trouve particulièrement grossier. Je suis le Majordome du Duc de Bourgogne et je rentrais de faire quelques emplettes lorsque je vous ai croisé, hagard. La moindre des choses, avant de m’accuser d’un meurtre que je n’ai pas commis, ce serait quand même de me remercier pour vous avoir accosté ! »
Il passe une main dans sa chevelure, contrarié. « Si vous me le permettez, mon maître m’attend très certainement. Bonne chance dans l’élucidation de votre affaire, que Dieu vous garde ! ». Non mais vraiment, quel rustre !
Eve, vous trouverez finalement un homme blessé sous un pan de bois enflammé. En essayant de le tirer de là, un morceau du bâtiment, derrière vous, s’effondrera non loin de vous et vous lacérera une partie de l'épaule gauche. De plus, les flammes lécheront vos bras et vos jambes en essayant de sortir du brasier.
Malheureusement, celui que vous avez essayé de sauver mourra quelques instant plus tard en hoquetant, dans vos bras. Il s'agit d'Ignace Berthile Solomon de Bellevallée.
Il y aura trois autres blessés supplémentaires dont deux légers.
Aimable, l'étrange individu est parti. Vous pouvez donc revenir à la caserne pour faire état de vos découvertes, si vous le souhaitez.
Tout. Elle avait pourtant tout essayé. Tout sans exception. Le poids d’une perte évitable l’étouffe sans qu’elle ne puisse rien y faire. Elle sait. Sait mieux que quiconque qu’il est une ironie singulière à ce qu’elle, qui avait déjà tant sali ses propres mains du sang des autres, puisse en arriver là. Non, elle ne pleurerait pas un défunt… Mais elle ne pouvait se réjouir d’une mort. Pas dans le bâtiment qu’elle devait représenter, diriger et défendre. Si l’armée elle-même devenait une cible facile, quelle était donc l’image qu’Eve poussait à donner de la France en général ?
Eve l’avait entendu. Entendu les appels à l’aide d’un homme. Un dont elle connaît le nom. L’un de ceux qui répondaient honorablement à leur charge. Oh, que le reste des troupes avaient hurlé quand elle s’est engouffrée dans la moindre interruption dans une salle léchée par les flammes. Coincé sur un imposant linteau de bois, saignant abondamment et les gravas du mur ayant pris partie de la déflagration des stocks d’armement. L’odeur de chair brûlée, de poudre à canon, de sang, elle sent sa gorge se serrer, force le pas, refuse de céder et parvient à le libérer. Qu’importe qu’elle ne soit pas sensée disposer de la force nécessaire. Lui ne s’en souviendrait pas. Elle jurerait que l’adrénaline avait tout fait.
Mais un craquement sinistre au-dessus d’eux ébranle le plafond, une poutre transversale se dérobe et Eve, voulant protéger l’homme sous elle, préfère risque sa sécurité contre celle de l’homme. La plaie est profonde. Le sang macule déjà ses vêtements. Elle s’en moque. Se moque des flammes qui essayent de la ravager vivante. Elles ne sont rien contre la brûlure du soleil. Rien.
Lorsqu’enfin, leurs deux silhouettes sortent de ce lieu d’enfer, un groupe d’hommes vient leur porter secours. Eve ne lâche pas Bellevallée. On n’abandonne pas un homme qui… Les cris et les inquiétudes, elle n’entend pas les appels aux physiciens de la caserne. Elle n’entend pas qu’on lui somme de relâcher l’homme. Mais elle entend. Entend le murmure contre le cœur ravagé de celui qui git entre ses bras. Entend le sang qui lutte pour remplir ses poumons. Entend son souffle se fendre d’incohérence, et une dernière fois, les paupières battent, dans un hoquet sinistre.
Bellevallée meurt entre ses bras.
Les secondes, les minutes, puis les premières heures passent. Bandages contre son bras et autres soins, elle rejette l’idée d’être touchée davantage. Apprend, la mort dans l’âme, qu’il n’y a qu’une seule perte, et trois hommes blessés dont un grièvement. Eve refusera d’être traitée. De perdre du temps sur sa seule personne. Il faut reformer les groupes. Lancer les rondes, faire parvenir un messager au Palais Royal. Quelqu’un – non, quelque chose a fait le choix de s’en prendre à la France. A Victoire de France, Eve rendra des comptes en personne. A ses hommes, elle offre un signe de tête et des encouragements. Ils avaient su gérer la catastrophe. A ses blessés, elle offre un sourire bienveillant et des prières de rétablissement.
Au marquis de Bellevallée, elle fait mander un messager lui annonçant la triste nouvelle, ainsi qu’une main tendue à venir discuter des circonstances lorsque le cœur et la peine le lui permettraient.
Les minutes passent et tout semble s’emmêler. Tout sauf cette colère sourde. Contre elle. Contre ces créatures qui croyaient pouvoir éhontément attaquer la France sans que justice ne soit faite.
Les brûlures commencent déjà à perdre de leur tendre couleur rouge, elle enfile ses gants. Dissimule ses travers et ses torts. Personne ne doit savoir. Et Eve, dans un instant de faiblesse, passe ses mains sur son visage. Elle n’avait pas été à la hauteur.
Et tout au fond d’elle, elle espérait qu’Aimable ait tenu sa promesse.