Dim 10 Jan - 14:26
Fight it or accept it, Fear it or control it
Lorem ipsum dolor sit amet, consectetur adipiscing elit. Praesent eleifend sapien at ante tempus malesuada. Aliquam et urna vitae mi mattis vehicula id at sem. Quisque nulla nunc, dictum non commodo id, dapibus quis metus. Aliquam ullamcorper vel sem quis efficitur. Aenean vel urna sed erat congue lacinia. Class aptent taciti sociosqu ad litora torquent per conubia nostra, per inceptos himenaeos. Vestibulum eu posuere orci. Etiam ornare eros a metus tincidunt, non facilisis mi porta. Proin dolor ipsum, ornare eu nisl sit amet, mattis scelerisque magna. Fusce vel mattis ante, vel egestas dui.
Praesent in pellentesque urna. Mauris lorem dolor, ornare ut sem id, suscipit tincidunt risus. Sed purus massa, facilisis quis aliquam sed, semper sed risus. Aenean condimentum, odio sit amet hendrerit maximus, felis erat finibus diam, non porta ante justo vitae dui. Phasellus malesuada dapibus neque eu porttitor. Cras ut porta leo, sed ultricies sem. In varius diam vitae fermentum placerat. Aliquam commodo ornare leo, sit amet porttitor odio varius vel. Aliquam blandit eros a nulla dictum, ut malesuada purus ultricies. Pellentesque molestie turpis vel lectus convallis, eu posuere dolor dapibus. Fusce ex turpis, molestie eu condimentum at, mattis quis nisi. Nulla placerat erat eget nibh dictum pretium. « Père Nostre, qui es es cieulx,
Bien en somme certiffiez,
Or nous fai de nos maulx eschieulx,
Et ton nom soit sainctiffiez »
Sa main signe et scelle la fin de sa prière. Ses yeux se sont clos, et il laisse le silence prendre ses aises. Le silence ? Non, cette illusion ne dure que quelques secondes, avant que la sensation familière ne l’invite à presser davantage les paupières. Elle s’éveille, dans ses chairs, c’est un étrange tiraillement, une tension qui monte dans son être. Telle la Bête qui s’arrache de sa caverne, il la sent monter dans son torse, elle prend de l’ampleur, c’est par sa gorge qu’elle respire, c’est dans sa tête qu’elle s’exprime. Cette voix. Cette voix désincarnée, il n’y a aucune tête à couper, à part la sienne peut-être ? Il l’entend, elle l’invite au sang et en réponse, sa propre voix s’élève. La prière gagne en puissance, alors qu’il gonfle son torse de son souffle, alors qu’il repousse la possession, alors qu’il chasse le démon. Sa main se referme sur son chapelet, se referme sur la croix d’argent, ses yeux s’ouvrent et c’est avec dévotion qu’il élève les yeux vers la lumière céleste. Que Dieu et la Sainte Vierge soient les témoins de son combat contre le mal. Qu’Ils le soutiennent lors de ses combats. Qu’ils guident sa lame. C’est à eux qu’il offre toute son âme. Malgré cet être démoniaque qui partage sa tête, sa chair. C’est à Eux qu’il offre sa vie.
Lorsqu’il se redresse, l’armure cliquète. Chevalier. Sa main se referme sur la poignée de son épée, qu’il élève devant ses yeux. Son regard se reflète dans son tranchant, mais au travers de son reflet, il n’observe aucune ombre. Il sait qu’aucun lieu n’est sûr, le Mal se tapit partout, au fond même de son propre crâne. Il s’est déjà percé un tympan, sans pour autant réussir à faire taire la Voix. Elle éveille en lui l’incertitude, des doutes qu’il ne cesse de nourrir, prenant garde à ses mots, ses actes, aux personnes qui l’entourent. Sa confiance est un don précieux, qu’il rechigne à offrir. Il y a tant d’ennemis, dissimulés sous des robes de soie, des masques rieurs, tapis au fond des prunelles sombres, logés au fin fond de leurs pupilles. Cachent-ils, eux aussi, des Monstres ? Ce diktat l’invite à planifier la moindre de ses rencontres, à surveiller ses domestiques, ses alliés, à se méfier des bonnes intentions. Il préfère la compagnie d’adversaire que de ses rares amis, craignant sans cesse la manipulation ou la trahison.
Son esprit droit, fait de valeurs qu’il s’efforce de suivre, fait de lui un être rigide, aisé à manipuler. Ainsi, c’est au plus faible qu’il offre sa protection, âpre défenseur de la veuve et de l’orphelin. Combien de fois l’a-t-on trompé ? La main agile d’un bambin ravit sa bourse, et c’est à peine s’il le remarque, préférant accuser un quelconque lutin, une ombre qu’il a crue apercevoir. Oh les ombres, il les connaît si bien. Il garde précieusement ce savoir obscur, cette connaissance hérétique, celle des créatures que le Diable a craché sur Terre pour nuire aux Brebis de Dieu. Les Vampires, les Lycans, sont des dangers face auxquels il a appris à ne plus reculer. Ne vous fiez pas à l’assurance qu’il affiche lorsqu’il se dresse de toute sa hauteur, sa main refermée sur la poignée de son épée ! C’est précieusement renfermé dans son gantelet que sa chair tremble, saisit d’une peur qu’il n’a cesse d’affronter. Les murmures désincarnés sont une compagnie dont il aimerait se passer, les scènes qu’ils esquissent dans son esprit peinent à s’effacer. Elles hantent ses nuits. Les chairs déchiquetées, le sang qui souille sa peau, la fragrance métallique jusqu’à ses papilles, l’horreur dans les yeux. Le cœur qui explose dans sa cage thoracique, les viscères déversées, les membres déchiquetés, lacérés, est-ce sa lame qui les a causés ? Les graines sont germées et combien même tente-t-il de les trancher, les pousses ne cessent d’éclore, dévoilant dans son esprit des pétales de carne ensanglantée. Ainsi, il n’est pas rare d’enfiler des gants ou de nettoyer ses mains, régulièrement, comme si l’eau pouvait chasser le mal qu’il a causé. Oh, Aimable ! Il ne reculera point devant l’ennemi, mais c’est face à son propre visage qu’il détourne les yeux, incapable de soutenir son regard. Ses pensées sont sans cesse emprisonnées dans des ruminations, des soucis insolubles, des suspicions, parfois, les fantasmes de son imagination.
Les règles, les devoirs, sont des bienfaits pour sa pensée égarée. Il s’y accroche, par toute la force de son désespoir. Les Infidèles et les Suppôts de Satan sont des ennemis qu’il doit éliminer. Son rang de Haute Noblesse, il l’épouse de tout son être, il se dédie à son petit domaine. Il veille sur sa populace et est le premier à prendre les armes pour assurer sa protection, on l’apprécie, son nom est chéri. Aimable est un nom si bien choisi. Aimable, le Chevalier au cœur de Lion et à la bonté digne du Printemps, ses grâces sont nombreuses, son sourire éclaire parfois les plus sombres des ruelles, quand son armure ne renvoie pas la torche qu’il dresse lorsqu’il patrouille. Il repousse sans cesse le coucher et les rêves éveillés. C’est dans les marchés que l’on complimente sa générosité – lorsque sa bourse ne s’est pas fait dérober.
La vérité ? L’omission est une astuce qu’il préfère emprunter, combien de fois se contente-t-il de serrer les lèvres, de ravaler la terrible réalité. Gardien, il l’est tout autant de ses secrets et ne dit on pas qu’il en faut le moins pour assurer leurs protections ? Alors il partage ses peines, ses inquiétudes, toutes ces faiblesses qu’il cache sous son plastron, sous ce corps haut et droit. Certains diront que les cicatrices qui s’affichent sur sa peau ne sont que les traces d’un ancien combat, ignorant les séances de flagellation qu’il s’inflige pour expier le mal qui grouille sous ses veines. Cache-t-il, lui aussi, des monstres ?
Etranglés par leurs muselières de fer, par sa main qui serre leurs rênes, il ne parvient pas à les tuer. Ils sont toujours là, ils s’esclaffent et se réjouissent, ils attendent d’être nourris de carnage, ils l’emportent et le laissent épuisé, l’esprit vaincu, désespéré, le cœur broyé. Leurs attaques sont de plus en plus régulières et récurrentes, l’angoisse tire ses traits, parfois, une barbe de quelques jours percent ses mâchoires et il arrive qu’il arrache les poils un à un, craignant l’apparition d’un faciès lupin.
Le calme. C’est ce qu’il recherche, lors de ses prières. Sa main fait doucement glisser les perles de bois entre ses doigts. Il s’efforce de penser à toutes les éventualités, de se préparer à la moindre difficulté, aux dépends de ses capacités d’adaptabilité. Et c’est lorsqu’il est pris par surprise qu’il perd le contrôle de ce Monstre, l’Ouroboros se déchaîne, dévore, détruit. Qui sera sa dernière victime ? Peut-être serait-ce lui.
Qualités : Accessible, Courtois, Brave, Conciliant, Humble, Maître de lui, Discipliné, Planificateur, Vif, Pieux
Défauts : Secret, Haine envers les Hérétiques, Autoritaire, Distrait, Lunatique, Orgueilleux inavoué, Solitaire (mais en souffre), Exigeant, Rigide, Prévisible, Pieux
Le soleil est bien haut, dans le ciel, lorsque la femme crie. C’est le septième enfant, qu’elle attend ; pliée en deux par la fatigue, la douleur, ses jambes sont trempées alors que son ventre est saisi de spasmes. Elle ne parvient pas à s’y habituer. L’on s’empresse, autour d’elle, et c’est après de longues heures qu’Aimable pousse son premier cri. Sa naissance est une réjouissance. L’enfant est fort, et vif ! Ses sœurs, ses frères, tous ont offert à cette créature vagissante un sourire, une caresse, son père l’a porté dans ses bras et a même glissé entre ses lèvres son doigt mouillé d’un peu de vin. C’est avec enthousiasme qu’il a tété, et c’est avec puissance qu’il a hurlé. C’est aux nourrices qu’on finit par le confier.
Quelques semaines plus tard, c’est son père que Dieu rappelle à ses côtés. La mise en terre est une bien triste fête, où l’on entend les palabres du prêtre, les pleurs de l’épouse et ceux du jeune orphelin. Ses aînés, eux, s’arment d’un silence et entourent, protègent, les plus vulnérables de leur famille. Lors de ces adieux, les promesses de soutien et d’alliance des familles environnantes sont insuffisantes. Il persiste, malgré leur discours mielleux, l’aigreur d’une méfiance. Dans les couloirs obscurs du domaine, l’on accuse certains noms, l’on parle de poison, les plus audacieux, les moins respectueux, mentionnent même la possibilité d’un suicide… Ces rumeurs sont un danger, que Baptiste, l’aîné de la fratrie, a tôt fait d’évincer. C’est à lui de reprendre la direction du domaine. Du haut de ses vingt ans, c’est d’une main de fer qu’il se décide à reprendre le domaine. En effet, depuis quelques années, le laxisme de son père n’a fait qu’accroître les vices dans leurs rues plus ou moins salubres, les vols sont nombreux, la mort rôde dans les ombres, sur les terres alentours. L’aide qu’il devait apporter à ses voisins pour assurer la sécurité… n’a pas été assumée pendant des années. Baptiste se décide à dorer le blason de leur famille, de dresser leur fanion, de chasser la poussière qui étouffe les tombeaux. Il ravive les histoires d’antan, celles d’un nom dédié à la chevalerie. Les De Bayard ont participé aux Croisades, ont aidé à bouter les Anglais bien loin des frontières de la France… Alors Baptiste reprend les armes. En quelques années, le nom De Bayard n’est plus murmuré, avec crainte ou mépris, c’est un nom que l’on respecte. On oublie les histoires plus sordides, celles de sorcellerie, celles de rituels étranges dans les caves des bâtisses, il faut dire que depuis de nombreuses années maintenant, on ne rapporte plus de drames inexpliqués, plus de bétails ou de bergers déchiquetés.
6 ans
____________________________________________________________________
_ En garde, Chevalier !
L’épée de bois heurte sa jumelle dans un claquement sévère, qui résonne dans l’arrière cour. Tignasse brune, yeux saphirs logés sous des sourcils froncés, la moue boudeuse d’un enfant concentré, Aimable repousse avec maladresse la lame de son frère ainé.
Côme s’esclaffe ; le quatrième enfant de la fratrie, âgé d’une quinzaine d’années, repose un poing sur sa hanche.
_ Eh bien Aimable, avec cette tête, je peux t’assurer que tu feras fuir le plus courageux des guerriers !
Côme est un jeune homme valeureux, connu pour ses rires tonitruants, mais aussi, pour son charme indécent. A ses mots, Aimable sourit, avec timidité et c’est avec une fierté naissante qu’il se dandine sur ses pieds, roule des épaules, imitant son grand frère. Il est comique de voir son corps de bambin, au ventre rond et aux bras potelés, s’improviser guerrier, imitant les postures d’un adolescent vigoureux. D’ailleurs, Côme taquine son bedon de la pointe de son épée, mais c’est avec sérieux qu’Aimable repousse sa lame.
_ Allons, Côme, cesse donc de le taquiner…
Gwendoline est la cinquième de la fratrie. Elle profite de quelques semaines de liberté, avant son union au vieux Duc de Comté. Malgré son jeune âge, ses traits portent déjà la maturité d’une mère ; ses yeux clairs sont cernés, leur vitrail protégé par un écrin d’obscurité. Ses traits sont tirés, les joues sont creusées, les sourcils retombent lourdement sur ses paupières, assomment son regard. Et pourtant, tendrement dessinées, s’ouvrent des lèvres pleines d’amour. Gwendoline n’est pas belle, elle ne présente pas de formes particulières, ses mains sont déjà veinées. Mais le Duc de Comté a succombé à la mélancolie de son regard, la langueur de ses mouvements. Assise, maladive, sa tête dodeline, bercée et ballotée par l’air qu’elle fredonne. Comme par crainte qu’une brise ne la brise, le moindre de ses mouvements est prudent, délicat. Gwendoline offre alors un de ses rares sourires à ses frères et finalement, Aimable abandonne son épée, c’est auprès d’elle qu’elle vient se réfugier. Avec tendresse, elle plonge ses doigts dans ses mèches éparses, c’est avec tout son amour qu’elle le contemple. Après Aimable, leur mère s’est progressivement affaiblie, et c’est auprès de ses frères et sœurs qu’Aimable a grandi.
_ Qu’est ce que tu fais, Gwendoline ?
_ Je brode.
_ Je peux voir ?
L’adolescente consent, d’un signe de la tête. Côme, surpris que son frère abandonne si tôt les armes, ramasse alors son épée en bois. Il offre un clin d’œil à une servante, qui lui échange un regard complice, avant d’adresser un signe à sa sœur – « Je reviens ! » scande-t-il, mais Gwendoline l’ignore. Ambroise, lui, grimpe sur le banc et se penche. Sur le canevas de sa sœur, une scène champêtre s’esquisse. Une biche ensanglantée s’enfuit, face à la horde de chiens affamés. Le dessin si précis de leurs crocs aiguisés fait frémir de peur l’enfant et Gwendoline préfère alors reposer le canevas à ses côtés. Ses bras fragiles entourent précieusement la silhouette potelée de l’enfant, ses lèvres tendres se reposent sur son front. Aimable sourit, en réponse, caresse la joue si creuse de sa sœur.
_ Est-ce que la biche va réussir à s’enfuir ?
_ Je ne pense pas, Aimable.
La réponse laisse planer un silence, l’enfant baisse les yeux. Gwendoline caresse sa joue, son pouce longe le coin de sa paupière alors qu’elle l’observe, avec inquiétude.
_ Ne t’inquiète pas pour elle, Aimable. Certains doivent se sacrifier pour permettre aux autres de survivre. Si la biche ne mourait pas sous les crocs des chiens, nous ne pourrions pas en manger.
_ Je préfère la biche aux chiens. Les chiens font peur.
_ Les chiens sont bien plus loyaux qu’une biche. Une biche ne pense qu’à s’enfuir, pour sa propre survie. La biche est lâche, égoïste, elle est fragile, elle ne mérite que de mourir pour agir ainsi.
La réponse de sa sœur, bien qu’elle soit prononcée d’une voix si douce, est d’une telle dureté qu’Aimable cligne des yeux. Décontenancé, Aimable dévisage sa sœur – a-t-elle parlé ? Ou est-ce encore cette voix, dans sa tête ? Oh, cette voix, ses frères et sœurs la connaissent, sa mère aussi. Parfois, il peine à l’identifier, lorsqu’il l’entend, elle semble issue de ses propres pensées, ou des lèvres de ses proches aimés. Ses yeux se troublent et Gwendoline semble percevoir les hésitations dans son regard. Elle glisse ses mains autour de ses joues.
_ Et si nous allions prier dans la chapelle, Aimable ?
Aimable hoche la tête. La prière lui offre le calme. La Voix se tait, lorsqu’il récite les textes sacrés. Sa main se noue à celle de sa sœur et tous deux se lèvent pour s’éloigner. Ce jour est l’un des derniers qu’il passera avec Gwendoline, avant qu’elle ne soit usée d’une union qu’elle n’a pas désirée. Condamnée à s’offrir à un homme qui la saisit sans douceur ni amour, bien déterminé à la briser. C’est quelques années plus tard, lorsqu’elle accouche d’un troisième enfant, qu’elle perd la vie.
10 ans
____________________________________________________________________
« Aimable, méfie toi de cet homme. Il rôde près de ta chambre. C’est lui qui as tué la chèvre hier soir, c’est lui, tu le sais, nous l’avons vu depuis la fenêtre. Lorsque la lune était haute ! Il a pris ses rênes, il l’a conduit dehors, loin, loin des murs mais nous l’avons vu sous l’éclat de la lune. Le Loup est dans la bergerie, Aimable ! Il faut le tuer, il faut l’éliminer, Dieu seul sait ce qu’il pourrait faire… »
Les mains plaquées contre ses oreilles et les prières qu’il récite sont insuffisantes. La peur est dans ses viscères, il en a eu la diarrhée toute la journée, les herbes et les infusions ne l’apaisent pas, tous craignent une maladie, le petit frère est-il donc malade ? Aimable ne parvient pas à avouer ce terrible secret qui ne cesse de le hanter, la Voix l’encourage pourtant à parler. A agir ! A se saisir de l’épée, aller transpercer la créature dans son sommeil, la vision est atroce, son esprit se tétanise lorsque le fantasme se concrétise, son estomac se renverse et il vomit. La migraine tape à ses tempes, alors qu’un gémissement plaintif franchit ses lèvres. Combien de temps reste-t-il dans sa propre bile, à tenter d’apaiser la Voix et tout ce qu’elle éveille ? Finalement, un pas familier s’approche et la porte s’entrouvre.
Ulric reste quelques secondes surpris.
_ Aimable, tu ne dors toujours pas ?
Le deuxième de la fratrie pousse un soupir exaspéré. L’homme s’approche d’un pas lent ; il est grand, massif, c’est de leur père qu’il a pris la forme. Le front est haut, le cheveu est brun, bien discipliné, la barbe naissante est taillée avec élégance. Les mêmes yeux clairs, éclats de glace logés au creux de ses traits taillés à la serpe, les pommettes saillantes, le nez grand et courbé comme un bec, les lèvres si serrées qu’elles ne laissent rien s’en échapper. Une cicatrice barre sa joue, descend jusqu’au coin de sa mâchoire carrée. Le jeune Chevalier fronce le nez à l’odeur, écoeuré. Agacé, il arrache les draps et d’un mouvement de l’index, ordonne à Aimable de descendre. Ulric arrache les draps, qu’il prend soin de replier, avant de tendre la main. Ambroise se déshabille et confie alors ses vêtements à son frère aîné.
« LE LOUP EST DANS LE COULOIR. IL VA MONTER JUSQU’A TA CHAMBRE ET NOUS DEVORER. IL TE DEVORERA COMME IL A DEVORE LA CHEVRE. IL A FAIM ! IL SAIT QUE TU SAIS ! IL VA TE TUER, AIMABLE ! IL EST LA, IL OBSERVE, IL SAIT ! »
Dans le couloir, s’avance une ombre. Aimable, nu dans l’obscurité, tremble de tout son corps. La fièvre ? Ulric, inquiet, pose bourrument une main sur le front de l’enfant, qui s’accroche de toutes ses forces à lui, et seulement alors, Ulric voit la peur dans les yeux de son frère. Le guerrier pose un genou à terre et alors qu’il va pour enlacer son petit frère, Aimable lève le doigt dans le couloir. Ulric se retourne à moitié, une main rejoint instinctivement la dague accrochée à sa hanche. Mais il n’y a rien, dans son dos. Rien. Les yeux d’Ulric se redéposent sur son frère, alors qu’Aimable croit entendre la voix s’esclaffer. Pourtant, elle ne lui a pas menti, il le sait. Il le sait.
Ulric le fixe quelques secondes, avant de glisser un bras sous son fessier et le soulever. Cette nuit, c’est dans la chambre de son frère qu’il a dormi.
Quelques mois après, un serviteur prend la porte. Ulric l’a accusé d’avoir volé de l’argenterie et Baptiste a pris sa décision sans même hésiter. La réalité est différente. Bien différente.
« Le loup est parti, Aimable. Nous sommes en sécurité. »
16 ans
____________________________________________________________________
Son mariage se décide lors de nombreuses discussions entre Baptiste, son frère aîné, et le père de sa prochaine épouse. Elle lui sourit. La blondeur de ses cheveux irradie en boucles soyeuses autour de son visage aux joues claires, roses et pleines. Ses yeux marrons sont une caresse qui le fait frémir, ses hormones en éveil s’agitent à la vue de sa poitrine généreuse, son ventre délicatement arrondi, ses hanches larges.
Aimable porte la main à son col, il l’ouvre légèrement alors qu’il inspire profondément.
« N’est-elle pas délicieuse ? Oh quel plaisir ce sera de mordre à pleines dents ses chairs, d’apposer ta marque. Elle sera à toi, que feras-tu d’elle ? »
La Voix est toujours là, incessante. Alors qu’il grandit, elle prend de plus en plus d’ampleur. Elle s’amuse à prendre les voix de ses proches pour mieux le tromper, et pour autant, au fur et à mesure des années, c’est sa propre personnalité qu’elle semble développer. Sournoise, provocatrice, elle susurre à son âme des pensées qu’il s’interdit de formuler. Elle est joueuse ! Taquine, curieuse, elle est l’un de ces chiens affamés aux crocs effilés. Mais lui n’est pas une biche effrayée, non. Il est ce chevalier, au grand bouclier, à l’épée dressée, et face aux attaques de la bête, quelques prières suffisent à l’apaiser. Les mâchoires serrées, le jeune homme se tient à table, écoute à peine les échanges, ses yeux se perdent dans son combat interne. Va-t-elle donc se taire ? Quand va-t-elle apprendre le respect ?
Soudain, Côme tapote son épaule, Aimable lève les yeux. Qui aurait crû que son frère se consacrerait à sa Foi ? Devenu récemment prêtre, il a abandonné ses entraînements, la douceur gagne ses traits, ainsi qu’un ventre plus prononcé. Il n’en reste pas moins l’être jovial qu’il a toujours été !
_ Acceptes-tu ?
_ Hm ? Je vous demande pardon, mon esprit s’est un instant égaré.
Baptiste fronce les sourcils, Côme éclate de rire, alors qu’Ulric toussote dans son poing fermé. Côme reprend.
_ Il est temps de montrer ce que tu as appris. Ulric souhaite t’affronter.
Côme se penche à son oreille.
_ Il est temps d’impressionner ta dulcinée.
Aimable fronce le nez et ne tarde pas à se redresser. Ulric le devance. Avec les années, il s’est endurci. Son pas n’en est que plus raide ; une mauvaise chute fragilise son genou droit.
« Il faudra le frapper là ! Le mettre à genou devant toi ! »
Ils se retrouvent dans la cour arrière. Naturellement, Aimable se saisit d’une épée en bois, mais Ulric, vexé, fronce les sourcils. Peu bavard, l’homme saisit l’épée en fer et repose son pommeau dans la main libre de son petit frère. Après une hésitation, Aimable se met en garde alors que son frère en fait de même devant lui. Baptiste s’approche et croise les bras sur son torse, le port droit.
_ Le combat s’arrêtera lorsque le premier sang sera versé.
Ulric, alors, se jette en avant. Aimable pare le coup, mais son frère frappe son ventre de son poing libre, Aimable se plie en deux et un autre coup de poing le met à terre. Côme s’esclaffe. Aimable se redresse. Déjà, du sang perle de sa lèvre, le gantelet a entaillé sa chair. L’issue n’a été que de quelques secondes.
De longues minutes où la Voix hurlait dans sa tête.
20 ans
____________________________________________________________________
Les festivités sont grandioses. C’est son premier fils qu’il tient dans ses bras. L’enfant blotti contre son torse, Aimable sent une nouvelle pression broyer ses épaules. La Voix elle-même semble satisfaite de contempler le bambin et pour la première fois de sa vie, Aimable se sent en osmose avec elle. Protéger ce qui lui est cher. Ses lèvres se reposent sur le front du bébé, comme sa sœur l’a tant de fois embrassé. Le regard tendre, il esquisse un sourire paisible ; enfin, son visage se déride.
Baptise sourit avec tant de joie que ses yeux s’en plissent. Ulric élève une choppe pleine d’alcool pour le féliciter, imité par Côme qui a profité du vin de messe. Hildegard elle-même est présente, cette sœur qu’il n’a que trop peu vue, s'étant consacrée aux ordres religieux et quitté le foyer à peine adulte… Mais elle est là. Fière, austère, d’une bienveillance semblable à celle d’un corbeau carnassier. Elle se contente d’un sourire, avant qu’elle ne détourne les yeux en direction de Marie. La sixième. La jeune femme est mariée, heureuse, et s’approche d’Aimable pour délicatement récupérer son neveu dans ses bras. Cette réunion est l’une de leurs dernières.
28 ans
____________________________________________________________________
Baptiste s’affaiblit. Depuis quelques hivers déjà, il est contraint de s’aliter. Ulric et Aimable ont décidé de patrouiller dans les rues de leur domaine. Ces instants d’échange sont particuliers ; l’un comme l’autre ne s’adressent pas un mot. Et pourtant, la Voix s’exprime à peine. Ils n’écoutent que le bruit des sabots contre le sol ou la terre dallée, parfois, Ulric soupire. Son silence est rassurant, réconfortant, et finalement, Aimable esquisse un sourire. Son frère lui jette une œillade.
_ Rien.
Aimable se fourvoie. En effet, un sifflement se fait percevoir, bientôt suivi d’un grognement de douleur. Une flèche plantée dans son épaule, Ulric serre les dents, se penche en avant. Les brigands surgissent des fourrés. Les armes sortent de leurs fourreaux.
« L’heure est venue, Aimable ! »
La peur le saisit. Cette peur familière, celle de cette nuit au fin fond de son lit, lorsque la lune l’éclairait, lorsque le Loup rôdait.
_ AIMABLE !
Le hurlement de son frère le rappelle à la réalité. Aimable est saisi d’un frisson ; il a si chaud, si froid. Il halète. Les yeux hagards, il fixe Ulric. Son frère est assis au sol, l’épée levée, tenue d’une main tremblante. Les yeux écarquillés. Autour d’eux, gisent des corps déchiquetés, démembrés, ensanglantés. Le sang macule sa peau. Il sent le liquide poisseux s’agglutiner sous ses ongles, entre les jointures de ses doigts, son épée est plantée dans les restes d’un corps, a-t-il fini le travail à la main ? Le sang monte jusqu’à son visage, l’odeur métallique le saisit, un haut le cœur aussi. Il faut se ressaisir. Alors il prie. Il prie, alors qu’il s’agenouille près de son frère et qu’Ulric abaisse son arme. Ulric porte la main à ses yeux. Son frère pleure. De longues minutes, avant que sa main ne se rabaisse et qu’il soupire.
_ Je priais Dieu pour que Père soit le Dernier….
30 ans
____________________________________________________________________
Est-il possédé ? Cette malédiction apparaît inhérente à leur sang, d’une génération à l’autre, elle se transmet. Son père a-t-il donc fui ce danger ? A-t-il succombé à ce Démon ? La Voix ne répond pas à toutes ses questions. Elle ne s’amuse plus tant à revêtir les voix des autres, non, à présent, elle a la sienne, sa réflexion. Certains instants, il passe des heures à échanger avec elle, à écrire ses réponses. Est-il fou ? Ce secret, il le scelle bien au fond de son être alors qu’il parcourt les terres pour comprendre ce qui le possède, y trouver des solutions. Les prières ne suffisent pas. Il se refuse à se laisser mener par elle, il n’est pas la Biche qu’elle dévorera. Il se rend régulièrement au confessionnal et depuis quelques semaines, c’est à un autre rituel qu’il s’abandonne. Les flagellations laissent sur son dos des plaies béantes et ensanglantées, que Côme s’efforce de soigner.
Expier le mal. Purger le mal. L’arracher de sa chair, le laisser couler, comme les larmes de toutes ses victimes parfois oubliées. Les épaules sont lourdes d’un fardeau qu’il ne peut pas partager, l’esprit toujours hanté, constamment harcelé par cette Voix insatiable, inlassable, inépuisable. Et pourtant, elle a nourri son pire adversaire, cette volonté inflexible qu’il dresse comme un rempart face à ses attaques. Son corps s’est depuis longtemps endurci, comme son esprit s’est effilé. L’enfant n’est plus qu’un souvenir et pourtant, la peur est toujours présente, elle s’étend, elle cible les autres. Où sont les Loups, les Chiens ? Tapis sous des traits civilisés. Un danger qu’il devra chasser. Les biches s’armeront de sabots effilés. Elles écraseront les canidés.
32 ans
____________________________________________________________________
Baptiste est mort une nuit d’hiver. Depuis de longues semaines, son souffle est incertain, les remèdes n’y font rien. La mort l’a finalement emporté.
On murmure que de nombreuses personnes lui ont rendu visite. Aimable a croisé l’une d’elle. Une ombre fugace, « MEfIie Toi, LE LOUP RODE » a crié la Voix. Ses yeux n’ont guère eu le temps d’apercevoir le faciès de l’être et lorsqu’il a accéléré l’allure, il a disparu dans les Ombres.
Ulric a pris la tête du domaine, secondé par ses frères. Aimable sait qu’un jour, son heure viendra. Ulric se fatigue, ses mouvements perdent en rapidité, ses articulations rouillent, protestent face à l’effort. Parfois, il souffle, usé, et lui qui dormait à peine sommeille à présent des heures… Le temps fait son œuvre.
« L’heure viendra, Aimable. L’heure où les biches dévoreront les chiens. »
Informations complémentaires :
Fratrie : Baptiste (décédé, ce jour), Ulric (dirige à présent le domaine), Hildegard (absente), Côme (prêtre), Gwendoline (mariée au Duc du Comté, décédée), Marie (mariée) . Il a un dernier petit frère, bâtard, dissimulé et dont il connaît à peine le nom...Sa mère a fauté et ce secret est précieusement gardé au sein de la famille.
Pouvoir : Le père d'Aimable était en réalité atteint de schizophrénie : il percevait des hallucinations visuelles et auditives. La fratrie d’Aimable est informée qu’Aimable a ce « pouvoir », veille à le protéger lui et son secret et l’ont aidé dans la gestion de ses émotions, celles de son pouvoir comme au travers de la prière. Aimable croit que son pouvoir est une malédiction due aux tentatives de possessions d’un démon. Il ignore d'ailleurs quels changements physiques sont entraînés par son pouvoir.
Tâches d’Aimable : Aimable a obéi aux ordres de Baptiste et à présent, d’Ulric. Sa famille est en alliance avec d’autres Chevaliers ou d’autres personnes issues de la Haute Noblesse, dans les terres environnantes ; ces différentes familles se sont alliées notamment pour assurer la sécurité de leurs propres terres. Aimable patrouille donc régulièrement avec des soldats de toutes horizons et est habitué à voyager sur un territoire déterminé.
Au sujet de la famille d’Aimable : L’épouse d’Aimable est aujourd’hui, volontairement, peu détaillée afin d’en faire un possible prédéfini. Aimable a 2 enfants, 2 fils pour lesquels il éprouve une affection sincère.
Aimable Eleuthère Séraphin De Bayard
You collect scars because you want proof that you are paying for whatever sins you have commited
Genre : Masculin
Date & lieu de naissance : 15 mai 1558 au Gresivaudan
Âge : 32 ans
Âge apparent : Quarantaine
Race : Humain (Ouroboros)
Groupe : Haute Noblesse
Métier / fonction : Chevalier / Militaire
Condition sociale : Aisée
Feat : Cor Leonis, de Final Fantasy XV
Date & lieu de naissance : 15 mai 1558 au Gresivaudan
Âge : 32 ans
Âge apparent : Quarantaine
Race : Humain (Ouroboros)
Groupe : Haute Noblesse
Métier / fonction : Chevalier / Militaire
Condition sociale : Aisée
Feat : Cor Leonis, de Final Fantasy XV
Caractère
Fight it or accept it, Fear it or control it
Lorem ipsum dolor sit amet, consectetur adipiscing elit. Praesent eleifend sapien at ante tempus malesuada. Aliquam et urna vitae mi mattis vehicula id at sem. Quisque nulla nunc, dictum non commodo id, dapibus quis metus. Aliquam ullamcorper vel sem quis efficitur. Aenean vel urna sed erat congue lacinia. Class aptent taciti sociosqu ad litora torquent per conubia nostra, per inceptos himenaeos. Vestibulum eu posuere orci. Etiam ornare eros a metus tincidunt, non facilisis mi porta. Proin dolor ipsum, ornare eu nisl sit amet, mattis scelerisque magna. Fusce vel mattis ante, vel egestas dui.
Praesent in pellentesque urna. Mauris lorem dolor, ornare ut sem id, suscipit tincidunt risus. Sed purus massa, facilisis quis aliquam sed, semper sed risus. Aenean condimentum, odio sit amet hendrerit maximus, felis erat finibus diam, non porta ante justo vitae dui. Phasellus malesuada dapibus neque eu porttitor. Cras ut porta leo, sed ultricies sem. In varius diam vitae fermentum placerat. Aliquam commodo ornare leo, sit amet porttitor odio varius vel. Aliquam blandit eros a nulla dictum, ut malesuada purus ultricies. Pellentesque molestie turpis vel lectus convallis, eu posuere dolor dapibus. Fusce ex turpis, molestie eu condimentum at, mattis quis nisi. Nulla placerat erat eget nibh dictum pretium. « Père Nostre, qui es es cieulx,
Bien en somme certiffiez,
Or nous fai de nos maulx eschieulx,
Et ton nom soit sainctiffiez »
Sa main signe et scelle la fin de sa prière. Ses yeux se sont clos, et il laisse le silence prendre ses aises. Le silence ? Non, cette illusion ne dure que quelques secondes, avant que la sensation familière ne l’invite à presser davantage les paupières. Elle s’éveille, dans ses chairs, c’est un étrange tiraillement, une tension qui monte dans son être. Telle la Bête qui s’arrache de sa caverne, il la sent monter dans son torse, elle prend de l’ampleur, c’est par sa gorge qu’elle respire, c’est dans sa tête qu’elle s’exprime. Cette voix. Cette voix désincarnée, il n’y a aucune tête à couper, à part la sienne peut-être ? Il l’entend, elle l’invite au sang et en réponse, sa propre voix s’élève. La prière gagne en puissance, alors qu’il gonfle son torse de son souffle, alors qu’il repousse la possession, alors qu’il chasse le démon. Sa main se referme sur son chapelet, se referme sur la croix d’argent, ses yeux s’ouvrent et c’est avec dévotion qu’il élève les yeux vers la lumière céleste. Que Dieu et la Sainte Vierge soient les témoins de son combat contre le mal. Qu’Ils le soutiennent lors de ses combats. Qu’ils guident sa lame. C’est à eux qu’il offre toute son âme. Malgré cet être démoniaque qui partage sa tête, sa chair. C’est à Eux qu’il offre sa vie.
Lorsqu’il se redresse, l’armure cliquète. Chevalier. Sa main se referme sur la poignée de son épée, qu’il élève devant ses yeux. Son regard se reflète dans son tranchant, mais au travers de son reflet, il n’observe aucune ombre. Il sait qu’aucun lieu n’est sûr, le Mal se tapit partout, au fond même de son propre crâne. Il s’est déjà percé un tympan, sans pour autant réussir à faire taire la Voix. Elle éveille en lui l’incertitude, des doutes qu’il ne cesse de nourrir, prenant garde à ses mots, ses actes, aux personnes qui l’entourent. Sa confiance est un don précieux, qu’il rechigne à offrir. Il y a tant d’ennemis, dissimulés sous des robes de soie, des masques rieurs, tapis au fond des prunelles sombres, logés au fin fond de leurs pupilles. Cachent-ils, eux aussi, des Monstres ? Ce diktat l’invite à planifier la moindre de ses rencontres, à surveiller ses domestiques, ses alliés, à se méfier des bonnes intentions. Il préfère la compagnie d’adversaire que de ses rares amis, craignant sans cesse la manipulation ou la trahison.
Son esprit droit, fait de valeurs qu’il s’efforce de suivre, fait de lui un être rigide, aisé à manipuler. Ainsi, c’est au plus faible qu’il offre sa protection, âpre défenseur de la veuve et de l’orphelin. Combien de fois l’a-t-on trompé ? La main agile d’un bambin ravit sa bourse, et c’est à peine s’il le remarque, préférant accuser un quelconque lutin, une ombre qu’il a crue apercevoir. Oh les ombres, il les connaît si bien. Il garde précieusement ce savoir obscur, cette connaissance hérétique, celle des créatures que le Diable a craché sur Terre pour nuire aux Brebis de Dieu. Les Vampires, les Lycans, sont des dangers face auxquels il a appris à ne plus reculer. Ne vous fiez pas à l’assurance qu’il affiche lorsqu’il se dresse de toute sa hauteur, sa main refermée sur la poignée de son épée ! C’est précieusement renfermé dans son gantelet que sa chair tremble, saisit d’une peur qu’il n’a cesse d’affronter. Les murmures désincarnés sont une compagnie dont il aimerait se passer, les scènes qu’ils esquissent dans son esprit peinent à s’effacer. Elles hantent ses nuits. Les chairs déchiquetées, le sang qui souille sa peau, la fragrance métallique jusqu’à ses papilles, l’horreur dans les yeux. Le cœur qui explose dans sa cage thoracique, les viscères déversées, les membres déchiquetés, lacérés, est-ce sa lame qui les a causés ? Les graines sont germées et combien même tente-t-il de les trancher, les pousses ne cessent d’éclore, dévoilant dans son esprit des pétales de carne ensanglantée. Ainsi, il n’est pas rare d’enfiler des gants ou de nettoyer ses mains, régulièrement, comme si l’eau pouvait chasser le mal qu’il a causé. Oh, Aimable ! Il ne reculera point devant l’ennemi, mais c’est face à son propre visage qu’il détourne les yeux, incapable de soutenir son regard. Ses pensées sont sans cesse emprisonnées dans des ruminations, des soucis insolubles, des suspicions, parfois, les fantasmes de son imagination.
Les règles, les devoirs, sont des bienfaits pour sa pensée égarée. Il s’y accroche, par toute la force de son désespoir. Les Infidèles et les Suppôts de Satan sont des ennemis qu’il doit éliminer. Son rang de Haute Noblesse, il l’épouse de tout son être, il se dédie à son petit domaine. Il veille sur sa populace et est le premier à prendre les armes pour assurer sa protection, on l’apprécie, son nom est chéri. Aimable est un nom si bien choisi. Aimable, le Chevalier au cœur de Lion et à la bonté digne du Printemps, ses grâces sont nombreuses, son sourire éclaire parfois les plus sombres des ruelles, quand son armure ne renvoie pas la torche qu’il dresse lorsqu’il patrouille. Il repousse sans cesse le coucher et les rêves éveillés. C’est dans les marchés que l’on complimente sa générosité – lorsque sa bourse ne s’est pas fait dérober.
La vérité ? L’omission est une astuce qu’il préfère emprunter, combien de fois se contente-t-il de serrer les lèvres, de ravaler la terrible réalité. Gardien, il l’est tout autant de ses secrets et ne dit on pas qu’il en faut le moins pour assurer leurs protections ? Alors il partage ses peines, ses inquiétudes, toutes ces faiblesses qu’il cache sous son plastron, sous ce corps haut et droit. Certains diront que les cicatrices qui s’affichent sur sa peau ne sont que les traces d’un ancien combat, ignorant les séances de flagellation qu’il s’inflige pour expier le mal qui grouille sous ses veines. Cache-t-il, lui aussi, des monstres ?
Etranglés par leurs muselières de fer, par sa main qui serre leurs rênes, il ne parvient pas à les tuer. Ils sont toujours là, ils s’esclaffent et se réjouissent, ils attendent d’être nourris de carnage, ils l’emportent et le laissent épuisé, l’esprit vaincu, désespéré, le cœur broyé. Leurs attaques sont de plus en plus régulières et récurrentes, l’angoisse tire ses traits, parfois, une barbe de quelques jours percent ses mâchoires et il arrive qu’il arrache les poils un à un, craignant l’apparition d’un faciès lupin.
Le calme. C’est ce qu’il recherche, lors de ses prières. Sa main fait doucement glisser les perles de bois entre ses doigts. Il s’efforce de penser à toutes les éventualités, de se préparer à la moindre difficulté, aux dépends de ses capacités d’adaptabilité. Et c’est lorsqu’il est pris par surprise qu’il perd le contrôle de ce Monstre, l’Ouroboros se déchaîne, dévore, détruit. Qui sera sa dernière victime ? Peut-être serait-ce lui.
Qualités : Accessible, Courtois, Brave, Conciliant, Humble, Maître de lui, Discipliné, Planificateur, Vif, Pieux
Défauts : Secret, Haine envers les Hérétiques, Autoritaire, Distrait, Lunatique, Orgueilleux inavoué, Solitaire (mais en souffre), Exigeant, Rigide, Prévisible, Pieux
Family, Duty, Honor
Le soleil est bien haut, dans le ciel, lorsque la femme crie. C’est le septième enfant, qu’elle attend ; pliée en deux par la fatigue, la douleur, ses jambes sont trempées alors que son ventre est saisi de spasmes. Elle ne parvient pas à s’y habituer. L’on s’empresse, autour d’elle, et c’est après de longues heures qu’Aimable pousse son premier cri. Sa naissance est une réjouissance. L’enfant est fort, et vif ! Ses sœurs, ses frères, tous ont offert à cette créature vagissante un sourire, une caresse, son père l’a porté dans ses bras et a même glissé entre ses lèvres son doigt mouillé d’un peu de vin. C’est avec enthousiasme qu’il a tété, et c’est avec puissance qu’il a hurlé. C’est aux nourrices qu’on finit par le confier.
Quelques semaines plus tard, c’est son père que Dieu rappelle à ses côtés. La mise en terre est une bien triste fête, où l’on entend les palabres du prêtre, les pleurs de l’épouse et ceux du jeune orphelin. Ses aînés, eux, s’arment d’un silence et entourent, protègent, les plus vulnérables de leur famille. Lors de ces adieux, les promesses de soutien et d’alliance des familles environnantes sont insuffisantes. Il persiste, malgré leur discours mielleux, l’aigreur d’une méfiance. Dans les couloirs obscurs du domaine, l’on accuse certains noms, l’on parle de poison, les plus audacieux, les moins respectueux, mentionnent même la possibilité d’un suicide… Ces rumeurs sont un danger, que Baptiste, l’aîné de la fratrie, a tôt fait d’évincer. C’est à lui de reprendre la direction du domaine. Du haut de ses vingt ans, c’est d’une main de fer qu’il se décide à reprendre le domaine. En effet, depuis quelques années, le laxisme de son père n’a fait qu’accroître les vices dans leurs rues plus ou moins salubres, les vols sont nombreux, la mort rôde dans les ombres, sur les terres alentours. L’aide qu’il devait apporter à ses voisins pour assurer la sécurité… n’a pas été assumée pendant des années. Baptiste se décide à dorer le blason de leur famille, de dresser leur fanion, de chasser la poussière qui étouffe les tombeaux. Il ravive les histoires d’antan, celles d’un nom dédié à la chevalerie. Les De Bayard ont participé aux Croisades, ont aidé à bouter les Anglais bien loin des frontières de la France… Alors Baptiste reprend les armes. En quelques années, le nom De Bayard n’est plus murmuré, avec crainte ou mépris, c’est un nom que l’on respecte. On oublie les histoires plus sordides, celles de sorcellerie, celles de rituels étranges dans les caves des bâtisses, il faut dire que depuis de nombreuses années maintenant, on ne rapporte plus de drames inexpliqués, plus de bétails ou de bergers déchiquetés.
φ
6 ans
____________________________________________________________________
_ En garde, Chevalier !
L’épée de bois heurte sa jumelle dans un claquement sévère, qui résonne dans l’arrière cour. Tignasse brune, yeux saphirs logés sous des sourcils froncés, la moue boudeuse d’un enfant concentré, Aimable repousse avec maladresse la lame de son frère ainé.
Côme s’esclaffe ; le quatrième enfant de la fratrie, âgé d’une quinzaine d’années, repose un poing sur sa hanche.
_ Eh bien Aimable, avec cette tête, je peux t’assurer que tu feras fuir le plus courageux des guerriers !
Côme est un jeune homme valeureux, connu pour ses rires tonitruants, mais aussi, pour son charme indécent. A ses mots, Aimable sourit, avec timidité et c’est avec une fierté naissante qu’il se dandine sur ses pieds, roule des épaules, imitant son grand frère. Il est comique de voir son corps de bambin, au ventre rond et aux bras potelés, s’improviser guerrier, imitant les postures d’un adolescent vigoureux. D’ailleurs, Côme taquine son bedon de la pointe de son épée, mais c’est avec sérieux qu’Aimable repousse sa lame.
_ Allons, Côme, cesse donc de le taquiner…
Gwendoline est la cinquième de la fratrie. Elle profite de quelques semaines de liberté, avant son union au vieux Duc de Comté. Malgré son jeune âge, ses traits portent déjà la maturité d’une mère ; ses yeux clairs sont cernés, leur vitrail protégé par un écrin d’obscurité. Ses traits sont tirés, les joues sont creusées, les sourcils retombent lourdement sur ses paupières, assomment son regard. Et pourtant, tendrement dessinées, s’ouvrent des lèvres pleines d’amour. Gwendoline n’est pas belle, elle ne présente pas de formes particulières, ses mains sont déjà veinées. Mais le Duc de Comté a succombé à la mélancolie de son regard, la langueur de ses mouvements. Assise, maladive, sa tête dodeline, bercée et ballotée par l’air qu’elle fredonne. Comme par crainte qu’une brise ne la brise, le moindre de ses mouvements est prudent, délicat. Gwendoline offre alors un de ses rares sourires à ses frères et finalement, Aimable abandonne son épée, c’est auprès d’elle qu’elle vient se réfugier. Avec tendresse, elle plonge ses doigts dans ses mèches éparses, c’est avec tout son amour qu’elle le contemple. Après Aimable, leur mère s’est progressivement affaiblie, et c’est auprès de ses frères et sœurs qu’Aimable a grandi.
_ Qu’est ce que tu fais, Gwendoline ?
_ Je brode.
_ Je peux voir ?
L’adolescente consent, d’un signe de la tête. Côme, surpris que son frère abandonne si tôt les armes, ramasse alors son épée en bois. Il offre un clin d’œil à une servante, qui lui échange un regard complice, avant d’adresser un signe à sa sœur – « Je reviens ! » scande-t-il, mais Gwendoline l’ignore. Ambroise, lui, grimpe sur le banc et se penche. Sur le canevas de sa sœur, une scène champêtre s’esquisse. Une biche ensanglantée s’enfuit, face à la horde de chiens affamés. Le dessin si précis de leurs crocs aiguisés fait frémir de peur l’enfant et Gwendoline préfère alors reposer le canevas à ses côtés. Ses bras fragiles entourent précieusement la silhouette potelée de l’enfant, ses lèvres tendres se reposent sur son front. Aimable sourit, en réponse, caresse la joue si creuse de sa sœur.
_ Est-ce que la biche va réussir à s’enfuir ?
_ Je ne pense pas, Aimable.
La réponse laisse planer un silence, l’enfant baisse les yeux. Gwendoline caresse sa joue, son pouce longe le coin de sa paupière alors qu’elle l’observe, avec inquiétude.
_ Ne t’inquiète pas pour elle, Aimable. Certains doivent se sacrifier pour permettre aux autres de survivre. Si la biche ne mourait pas sous les crocs des chiens, nous ne pourrions pas en manger.
_ Je préfère la biche aux chiens. Les chiens font peur.
_ Les chiens sont bien plus loyaux qu’une biche. Une biche ne pense qu’à s’enfuir, pour sa propre survie. La biche est lâche, égoïste, elle est fragile, elle ne mérite que de mourir pour agir ainsi.
La réponse de sa sœur, bien qu’elle soit prononcée d’une voix si douce, est d’une telle dureté qu’Aimable cligne des yeux. Décontenancé, Aimable dévisage sa sœur – a-t-elle parlé ? Ou est-ce encore cette voix, dans sa tête ? Oh, cette voix, ses frères et sœurs la connaissent, sa mère aussi. Parfois, il peine à l’identifier, lorsqu’il l’entend, elle semble issue de ses propres pensées, ou des lèvres de ses proches aimés. Ses yeux se troublent et Gwendoline semble percevoir les hésitations dans son regard. Elle glisse ses mains autour de ses joues.
_ Et si nous allions prier dans la chapelle, Aimable ?
Aimable hoche la tête. La prière lui offre le calme. La Voix se tait, lorsqu’il récite les textes sacrés. Sa main se noue à celle de sa sœur et tous deux se lèvent pour s’éloigner. Ce jour est l’un des derniers qu’il passera avec Gwendoline, avant qu’elle ne soit usée d’une union qu’elle n’a pas désirée. Condamnée à s’offrir à un homme qui la saisit sans douceur ni amour, bien déterminé à la briser. C’est quelques années plus tard, lorsqu’elle accouche d’un troisième enfant, qu’elle perd la vie.
φ
10 ans
____________________________________________________________________
« Aimable, méfie toi de cet homme. Il rôde près de ta chambre. C’est lui qui as tué la chèvre hier soir, c’est lui, tu le sais, nous l’avons vu depuis la fenêtre. Lorsque la lune était haute ! Il a pris ses rênes, il l’a conduit dehors, loin, loin des murs mais nous l’avons vu sous l’éclat de la lune. Le Loup est dans la bergerie, Aimable ! Il faut le tuer, il faut l’éliminer, Dieu seul sait ce qu’il pourrait faire… »
Les mains plaquées contre ses oreilles et les prières qu’il récite sont insuffisantes. La peur est dans ses viscères, il en a eu la diarrhée toute la journée, les herbes et les infusions ne l’apaisent pas, tous craignent une maladie, le petit frère est-il donc malade ? Aimable ne parvient pas à avouer ce terrible secret qui ne cesse de le hanter, la Voix l’encourage pourtant à parler. A agir ! A se saisir de l’épée, aller transpercer la créature dans son sommeil, la vision est atroce, son esprit se tétanise lorsque le fantasme se concrétise, son estomac se renverse et il vomit. La migraine tape à ses tempes, alors qu’un gémissement plaintif franchit ses lèvres. Combien de temps reste-t-il dans sa propre bile, à tenter d’apaiser la Voix et tout ce qu’elle éveille ? Finalement, un pas familier s’approche et la porte s’entrouvre.
Ulric reste quelques secondes surpris.
_ Aimable, tu ne dors toujours pas ?
Le deuxième de la fratrie pousse un soupir exaspéré. L’homme s’approche d’un pas lent ; il est grand, massif, c’est de leur père qu’il a pris la forme. Le front est haut, le cheveu est brun, bien discipliné, la barbe naissante est taillée avec élégance. Les mêmes yeux clairs, éclats de glace logés au creux de ses traits taillés à la serpe, les pommettes saillantes, le nez grand et courbé comme un bec, les lèvres si serrées qu’elles ne laissent rien s’en échapper. Une cicatrice barre sa joue, descend jusqu’au coin de sa mâchoire carrée. Le jeune Chevalier fronce le nez à l’odeur, écoeuré. Agacé, il arrache les draps et d’un mouvement de l’index, ordonne à Aimable de descendre. Ulric arrache les draps, qu’il prend soin de replier, avant de tendre la main. Ambroise se déshabille et confie alors ses vêtements à son frère aîné.
« LE LOUP EST DANS LE COULOIR. IL VA MONTER JUSQU’A TA CHAMBRE ET NOUS DEVORER. IL TE DEVORERA COMME IL A DEVORE LA CHEVRE. IL A FAIM ! IL SAIT QUE TU SAIS ! IL VA TE TUER, AIMABLE ! IL EST LA, IL OBSERVE, IL SAIT ! »
Dans le couloir, s’avance une ombre. Aimable, nu dans l’obscurité, tremble de tout son corps. La fièvre ? Ulric, inquiet, pose bourrument une main sur le front de l’enfant, qui s’accroche de toutes ses forces à lui, et seulement alors, Ulric voit la peur dans les yeux de son frère. Le guerrier pose un genou à terre et alors qu’il va pour enlacer son petit frère, Aimable lève le doigt dans le couloir. Ulric se retourne à moitié, une main rejoint instinctivement la dague accrochée à sa hanche. Mais il n’y a rien, dans son dos. Rien. Les yeux d’Ulric se redéposent sur son frère, alors qu’Aimable croit entendre la voix s’esclaffer. Pourtant, elle ne lui a pas menti, il le sait. Il le sait.
Ulric le fixe quelques secondes, avant de glisser un bras sous son fessier et le soulever. Cette nuit, c’est dans la chambre de son frère qu’il a dormi.
Quelques mois après, un serviteur prend la porte. Ulric l’a accusé d’avoir volé de l’argenterie et Baptiste a pris sa décision sans même hésiter. La réalité est différente. Bien différente.
« Le loup est parti, Aimable. Nous sommes en sécurité. »
φ
16 ans
____________________________________________________________________
Son mariage se décide lors de nombreuses discussions entre Baptiste, son frère aîné, et le père de sa prochaine épouse. Elle lui sourit. La blondeur de ses cheveux irradie en boucles soyeuses autour de son visage aux joues claires, roses et pleines. Ses yeux marrons sont une caresse qui le fait frémir, ses hormones en éveil s’agitent à la vue de sa poitrine généreuse, son ventre délicatement arrondi, ses hanches larges.
Aimable porte la main à son col, il l’ouvre légèrement alors qu’il inspire profondément.
« N’est-elle pas délicieuse ? Oh quel plaisir ce sera de mordre à pleines dents ses chairs, d’apposer ta marque. Elle sera à toi, que feras-tu d’elle ? »
La Voix est toujours là, incessante. Alors qu’il grandit, elle prend de plus en plus d’ampleur. Elle s’amuse à prendre les voix de ses proches pour mieux le tromper, et pour autant, au fur et à mesure des années, c’est sa propre personnalité qu’elle semble développer. Sournoise, provocatrice, elle susurre à son âme des pensées qu’il s’interdit de formuler. Elle est joueuse ! Taquine, curieuse, elle est l’un de ces chiens affamés aux crocs effilés. Mais lui n’est pas une biche effrayée, non. Il est ce chevalier, au grand bouclier, à l’épée dressée, et face aux attaques de la bête, quelques prières suffisent à l’apaiser. Les mâchoires serrées, le jeune homme se tient à table, écoute à peine les échanges, ses yeux se perdent dans son combat interne. Va-t-elle donc se taire ? Quand va-t-elle apprendre le respect ?
Soudain, Côme tapote son épaule, Aimable lève les yeux. Qui aurait crû que son frère se consacrerait à sa Foi ? Devenu récemment prêtre, il a abandonné ses entraînements, la douceur gagne ses traits, ainsi qu’un ventre plus prononcé. Il n’en reste pas moins l’être jovial qu’il a toujours été !
_ Acceptes-tu ?
_ Hm ? Je vous demande pardon, mon esprit s’est un instant égaré.
Baptiste fronce les sourcils, Côme éclate de rire, alors qu’Ulric toussote dans son poing fermé. Côme reprend.
_ Il est temps de montrer ce que tu as appris. Ulric souhaite t’affronter.
Côme se penche à son oreille.
_ Il est temps d’impressionner ta dulcinée.
Aimable fronce le nez et ne tarde pas à se redresser. Ulric le devance. Avec les années, il s’est endurci. Son pas n’en est que plus raide ; une mauvaise chute fragilise son genou droit.
« Il faudra le frapper là ! Le mettre à genou devant toi ! »
Ils se retrouvent dans la cour arrière. Naturellement, Aimable se saisit d’une épée en bois, mais Ulric, vexé, fronce les sourcils. Peu bavard, l’homme saisit l’épée en fer et repose son pommeau dans la main libre de son petit frère. Après une hésitation, Aimable se met en garde alors que son frère en fait de même devant lui. Baptiste s’approche et croise les bras sur son torse, le port droit.
_ Le combat s’arrêtera lorsque le premier sang sera versé.
Ulric, alors, se jette en avant. Aimable pare le coup, mais son frère frappe son ventre de son poing libre, Aimable se plie en deux et un autre coup de poing le met à terre. Côme s’esclaffe. Aimable se redresse. Déjà, du sang perle de sa lèvre, le gantelet a entaillé sa chair. L’issue n’a été que de quelques secondes.
De longues minutes où la Voix hurlait dans sa tête.
φ
20 ans
____________________________________________________________________
Les festivités sont grandioses. C’est son premier fils qu’il tient dans ses bras. L’enfant blotti contre son torse, Aimable sent une nouvelle pression broyer ses épaules. La Voix elle-même semble satisfaite de contempler le bambin et pour la première fois de sa vie, Aimable se sent en osmose avec elle. Protéger ce qui lui est cher. Ses lèvres se reposent sur le front du bébé, comme sa sœur l’a tant de fois embrassé. Le regard tendre, il esquisse un sourire paisible ; enfin, son visage se déride.
Baptise sourit avec tant de joie que ses yeux s’en plissent. Ulric élève une choppe pleine d’alcool pour le féliciter, imité par Côme qui a profité du vin de messe. Hildegard elle-même est présente, cette sœur qu’il n’a que trop peu vue, s'étant consacrée aux ordres religieux et quitté le foyer à peine adulte… Mais elle est là. Fière, austère, d’une bienveillance semblable à celle d’un corbeau carnassier. Elle se contente d’un sourire, avant qu’elle ne détourne les yeux en direction de Marie. La sixième. La jeune femme est mariée, heureuse, et s’approche d’Aimable pour délicatement récupérer son neveu dans ses bras. Cette réunion est l’une de leurs dernières.
φ
28 ans
____________________________________________________________________
Baptiste s’affaiblit. Depuis quelques hivers déjà, il est contraint de s’aliter. Ulric et Aimable ont décidé de patrouiller dans les rues de leur domaine. Ces instants d’échange sont particuliers ; l’un comme l’autre ne s’adressent pas un mot. Et pourtant, la Voix s’exprime à peine. Ils n’écoutent que le bruit des sabots contre le sol ou la terre dallée, parfois, Ulric soupire. Son silence est rassurant, réconfortant, et finalement, Aimable esquisse un sourire. Son frère lui jette une œillade.
_ Rien.
Aimable se fourvoie. En effet, un sifflement se fait percevoir, bientôt suivi d’un grognement de douleur. Une flèche plantée dans son épaule, Ulric serre les dents, se penche en avant. Les brigands surgissent des fourrés. Les armes sortent de leurs fourreaux.
« L’heure est venue, Aimable ! »
La peur le saisit. Cette peur familière, celle de cette nuit au fin fond de son lit, lorsque la lune l’éclairait, lorsque le Loup rôdait.
« L’heure est venue !
Noyons les terres de leur sang, arrachons leurs viscères et recouvrons en donc la terre !
Il est l’heure de tuer, de déchirer, d’écraser, de broyer !
Réjouis toi, Aimable, Réjouis toi de notre puissance, de cette mort que nous semons, de toutes ces vies que nous fauchons !
Nous N’Aurons Plus PeuUr Nous sOmmEs la VenGeance de touUutes Ces ÂaÂmes SacrifiéEes les Bêtes, les HérétiiquUes Seront Tous, TOUS, TOUS EXTERMINES !
A BAS LES CHIENS AUX CROCS EFFILES, A MORT TOUS CES MONSTRES,
L’HEURE EST VENUE,
L’ORDRE SERA BOULEVERSE,
LA BICHE TUERAAAA LES CHIEEEEEENS ENRAAAAAAAAAAGEEEEEEES »
Noyons les terres de leur sang, arrachons leurs viscères et recouvrons en donc la terre !
Il est l’heure de tuer, de déchirer, d’écraser, de broyer !
Réjouis toi, Aimable, Réjouis toi de notre puissance, de cette mort que nous semons, de toutes ces vies que nous fauchons !
Nous N’Aurons Plus PeuUr Nous sOmmEs la VenGeance de touUutes Ces ÂaÂmes SacrifiéEes les Bêtes, les HérétiiquUes Seront Tous, TOUS, TOUS EXTERMINES !
A BAS LES CHIENS AUX CROCS EFFILES, A MORT TOUS CES MONSTRES,
L’HEURE EST VENUE,
L’ORDRE SERA BOULEVERSE,
LA BICHE TUERAAAA LES CHIEEEEEENS ENRAAAAAAAAAAGEEEEEEES »
_ AIMABLE !
Le hurlement de son frère le rappelle à la réalité. Aimable est saisi d’un frisson ; il a si chaud, si froid. Il halète. Les yeux hagards, il fixe Ulric. Son frère est assis au sol, l’épée levée, tenue d’une main tremblante. Les yeux écarquillés. Autour d’eux, gisent des corps déchiquetés, démembrés, ensanglantés. Le sang macule sa peau. Il sent le liquide poisseux s’agglutiner sous ses ongles, entre les jointures de ses doigts, son épée est plantée dans les restes d’un corps, a-t-il fini le travail à la main ? Le sang monte jusqu’à son visage, l’odeur métallique le saisit, un haut le cœur aussi. Il faut se ressaisir. Alors il prie. Il prie, alors qu’il s’agenouille près de son frère et qu’Ulric abaisse son arme. Ulric porte la main à ses yeux. Son frère pleure. De longues minutes, avant que sa main ne se rabaisse et qu’il soupire.
_ Je priais Dieu pour que Père soit le Dernier….
φ
30 ans
____________________________________________________________________
Est-il possédé ? Cette malédiction apparaît inhérente à leur sang, d’une génération à l’autre, elle se transmet. Son père a-t-il donc fui ce danger ? A-t-il succombé à ce Démon ? La Voix ne répond pas à toutes ses questions. Elle ne s’amuse plus tant à revêtir les voix des autres, non, à présent, elle a la sienne, sa réflexion. Certains instants, il passe des heures à échanger avec elle, à écrire ses réponses. Est-il fou ? Ce secret, il le scelle bien au fond de son être alors qu’il parcourt les terres pour comprendre ce qui le possède, y trouver des solutions. Les prières ne suffisent pas. Il se refuse à se laisser mener par elle, il n’est pas la Biche qu’elle dévorera. Il se rend régulièrement au confessionnal et depuis quelques semaines, c’est à un autre rituel qu’il s’abandonne. Les flagellations laissent sur son dos des plaies béantes et ensanglantées, que Côme s’efforce de soigner.
Expier le mal. Purger le mal. L’arracher de sa chair, le laisser couler, comme les larmes de toutes ses victimes parfois oubliées. Les épaules sont lourdes d’un fardeau qu’il ne peut pas partager, l’esprit toujours hanté, constamment harcelé par cette Voix insatiable, inlassable, inépuisable. Et pourtant, elle a nourri son pire adversaire, cette volonté inflexible qu’il dresse comme un rempart face à ses attaques. Son corps s’est depuis longtemps endurci, comme son esprit s’est effilé. L’enfant n’est plus qu’un souvenir et pourtant, la peur est toujours présente, elle s’étend, elle cible les autres. Où sont les Loups, les Chiens ? Tapis sous des traits civilisés. Un danger qu’il devra chasser. Les biches s’armeront de sabots effilés. Elles écraseront les canidés.
φ
32 ans
____________________________________________________________________
Baptiste est mort une nuit d’hiver. Depuis de longues semaines, son souffle est incertain, les remèdes n’y font rien. La mort l’a finalement emporté.
On murmure que de nombreuses personnes lui ont rendu visite. Aimable a croisé l’une d’elle. Une ombre fugace, « MEfIie Toi, LE LOUP RODE » a crié la Voix. Ses yeux n’ont guère eu le temps d’apercevoir le faciès de l’être et lorsqu’il a accéléré l’allure, il a disparu dans les Ombres.
Ulric a pris la tête du domaine, secondé par ses frères. Aimable sait qu’un jour, son heure viendra. Ulric se fatigue, ses mouvements perdent en rapidité, ses articulations rouillent, protestent face à l’effort. Parfois, il souffle, usé, et lui qui dormait à peine sommeille à présent des heures… Le temps fait son œuvre.
« L’heure viendra, Aimable. L’heure où les biches dévoreront les chiens. »
φ
Informations complémentaires :
Fratrie : Baptiste (décédé, ce jour), Ulric (dirige à présent le domaine), Hildegard (absente), Côme (prêtre), Gwendoline (mariée au Duc du Comté, décédée), Marie (mariée) . Il a un dernier petit frère, bâtard, dissimulé et dont il connaît à peine le nom...Sa mère a fauté et ce secret est précieusement gardé au sein de la famille.
Pouvoir : Le père d'Aimable était en réalité atteint de schizophrénie : il percevait des hallucinations visuelles et auditives. La fratrie d’Aimable est informée qu’Aimable a ce « pouvoir », veille à le protéger lui et son secret et l’ont aidé dans la gestion de ses émotions, celles de son pouvoir comme au travers de la prière. Aimable croit que son pouvoir est une malédiction due aux tentatives de possessions d’un démon. Il ignore d'ailleurs quels changements physiques sont entraînés par son pouvoir.
Tâches d’Aimable : Aimable a obéi aux ordres de Baptiste et à présent, d’Ulric. Sa famille est en alliance avec d’autres Chevaliers ou d’autres personnes issues de la Haute Noblesse, dans les terres environnantes ; ces différentes familles se sont alliées notamment pour assurer la sécurité de leurs propres terres. Aimable patrouille donc régulièrement avec des soldats de toutes horizons et est habitué à voyager sur un territoire déterminé.
Au sujet de la famille d’Aimable : L’épouse d’Aimable est aujourd’hui, volontairement, peu détaillée afin d’en faire un possible prédéfini. Aimable a 2 enfants, 2 fils pour lesquels il éprouve une affection sincère.
Derrière l'écran
Pseudo : Maryel
Âge : 28 ans
Comment as-tu trouvé le forum ? Les admins (COCO VICTOIRE)
Un petit mot ?
Pseudo : Maryel
Âge : 28 ans
Comment as-tu trouvé le forum ? Les admins (COCO VICTOIRE)
Un petit mot ?
Dim 10 Jan - 15:14
Bonjour et bienvenue !
Je pensais avoir une longue fiche, mais alors là, je m'incline XD
Je pensais avoir une longue fiche, mais alors là, je m'incline XD
Dim 10 Jan - 15:33
Cor Leonis, déjà, ça commençait particulièrement bien.
Mais en plus d'une face appréciée, la plume est au rendez-vous. Les détails sont apportés avec quelque chose de presque révérencieux, j'ai beaucoup aimé ! Puis on ne va pas se mentir, l'Ouroboros est un plus presque terrifiant à un personnage déjà plein de dualité. Hâte de te découvrir en rp !
Bienvenue dans la fine équipe !
Mais en plus d'une face appréciée, la plume est au rendez-vous. Les détails sont apportés avec quelque chose de presque révérencieux, j'ai beaucoup aimé ! Puis on ne va pas se mentir, l'Ouroboros est un plus presque terrifiant à un personnage déjà plein de dualité. Hâte de te découvrir en rp !
Bienvenue dans la fine équipe !
Dim 10 Jan - 15:46
Bienvenuuuue!! *retiens un long cri de fangirl devant Cor*
Cette fiche.... Si longue mais si bien écrite ** ce fut un plaisir du début à la fin !
Cette fiche.... Si longue mais si bien écrite ** ce fut un plaisir du début à la fin !
Dim 10 Jan - 17:16
Bravo tu es validé !
Le grand moment est enfin arrivé