L'adrénaline lui permettait encore de ne pas souffrir de ses blessures, mais les mots de la baronne eurent le don de toute de même raviver les douleurs. Avec un sourire en demi-teinte, elle tenta de la rassurer.

- Oui, cela semble vilain, mais ce n'est pas si grave. Du repos et quelques soins et je n'en garderai pas de grosses séquelles, je suppose... Elle se permis de poser une main sur le bras de la baronne, pour l'encourager à rentrer dans sa demeure. Rester plus longtemps dehors ne lui paraissait pas être brillante idée. La menace pouvait très bien rôder, les épier...

- Permettez Madame que je vous raccompagne jusqu'à votre lit. Vous devez vous reposer et moi... faire de même.

La baronne n'opposa pas de résistance, ce qui permis à Athénaïs de souffler un coup. Elle ne se voyait pas devenir trop ferme avec celle qui était en quelques sortes devenue sa patronne pour cette mission. Et puis la dame lui faisait de la peine à être ainsi tourmentée par les différents entre ses fils. A son rythme, elle la ramena jusqu'à son lit. Elle se permit même de la border, parce qu'elle avait toujours rêvé de faire ça à sa propre mère, mais n'en avait pas eu l'occasion. Elle s'assura d'un dernier regard que la baronne était prête à se rendormir puis elle ferma la porte derrière elle. Soudain, elle retomba sur la dernière domestique au service de la baronne.

- Vous... Elle cligna à plusieurs reprises des paupières, sceptique de la voir ici. Messire le baron ne vous avait-il pas congédié pour la nuit ? Mais cela ne la regardait pas vraiment, elle, l'étrangère de cette famille, n'est-ce pas ?

La sorcière secoua les mains pour la rassurer, ne souhaitant pas embarrassée la domestique qui n'avait rien demandé.

- Oh non, non. Faites donc ce que vous avez à faire, je ne suis personne pour vous renvoyer chez vous !

Elle songea tout de même qu'il était assez incongru qu'elle revienne à la nuit tombée pour sa bourse. Certes, l'argent ne se laisse pas traîner, mais Naïs avait comme un doute sur le fait qu'elle puisse craindre que la baronne ou son fils ne soit intéressés par ses sous...

- C'est tout de même curieux de revenir à la nuit tombée, alors que vous auriez pu faire confiance à vos maîtres pour ne pas toucher à vos affaires et les récupérer demain en reprenant votre service.

Elle n'était personne pour l'empêcher de faire ce qu'elle voulait, mais elle avait surtout la langue bien pendue et la manie de dire à voix haute la moindre de ses pensées.

Pauvre petite, se retrouver à la rue n'était vraiment pas une idée séduisante. D'autant plus que par les temps qui courent, être une femme est un grand danger. Et puis, Athénaïs venait littéralement de se battre avec une chose non identifiée, alors imaginez qu'elle rôde plus près de la ville et s'attaque aux sans abris...

- Misère, allez donc vite chercher votre bourse et pardonnez-moi de vous avoir retenu.

Le sifflement dans ses oreilles semblait décidé à élire domicile pour un bon moment, mais il fallait qu'elle nettoie le sang. Et puis sa blessure à l'épaule, loin d'être gravissime certes, nécessitait d'être nettoyée. Elle faisait bien assez d'infections en extrayant son venin pour l'Eglise souterraine, elle se passerait d'une supplémentaire ! Ainsi, elle interrogea la jeune domestique.

- Avant de repartir, auriez-vous la gentillesse de me donner de quoi me laver et nettoyer ma blessure ?

Est-ce que cela arrivait comme un cheveu sur la soupe ? Oui. Naturellement, on pouvait s'attendre à ce que la domestique remarque les blessures et s'interroge sur la sage-femme...

- Disons que j'ai été attaquée par un gros chien errant et... D'ailleurs, vous n'avez rien vu en venant ?

Elle n'avait miraculeusement rien vu sur le chemin... Athénaïs préférait savoir cette domestique chez son maître, en sécurité, plutôt que sur le chemin de la taverne. Ainsi, elle tenta de lui demander son aide pour la pousser à rester auprès d'elle.

Malgré sa demande, la domestique ne resta pas à ses côtés pour l'aider. Peut-être que son règlement auprès du dirigeant de l'auberge pressait vraiment. En tout cas, elle ne sembla pas davantage perturbée d'apprendre qu'un soit disant gros chien errant avait attaqué Athénaïs et rôdait dans les parages... Un peu dépitée, la sorcière nettoya ses oreilles du sang qui avait déjà séché. Le bourdonnement ne cesserait pas de sitôt. Quand à sa blessure elle se déshabilla en partie, une fois montée dans la chambre à sa disposition, afin de nettoyer les plaies. Ses pensées allaient vers la domestique, seule dans la nuit et potentiellement en danger. Elle hésitait fortement à la rejoindre pour l'escorter, mais sa place était également ici pour veiller la baronne.

L'adrénaline avait disparu et... elle s'était écroulée de sommeil. Si vite, qu'elle n'avait même pas eu le temps de défaire le lit. Aucun bruit dans la nuit ne l'avait réveillée, pas même une complainte de Madame la baronne. Néanmoins, un bruit qui se répétait l'avait tirée du sommeil. A son réveil, ses oreilles bourdonnaient toujours et elle ressentit un mal de tête. Mais au moins, elle n'avait pas contracté d'infection ni de fièvre.

En se redressant, elle comprit que le bruit provenait de la petite fenêtre de la chambre. Elle s'en approcha et sans l'ouvrir, elle constata qu'on tentait d'attirer son attention en jetant des gravillons. Lorsqu'Elliot remarqua sa présence, il s'arrêta. Encore heureux, elle n'avait pas envie de se retrouver borgne... Interloquée, elle se pencha à la fenêtre qu'elle venait d'ouvrir.

- Messire que me vaut le plaisir ?

Allait-il de nouveau la prendre pour une fille de joie ? Une renarde ? Ou venait-il présenter ses excuses ?

Un marché ? La brune arqua un sourcil, sceptique. De bon matin, que pouvait-il vouloir d'elle et que pouvait-elle lui apporter au juste ? La curiosité la poussa néanmoins à quitter sa chambre sur la pointe des pieds afin de le rejoindre.

- Je ne vois pas ce que je peux vous apporter, Messire ?

Eliott ne manquait pas de culot et sa proposition surprit la sorcière qui posa ses mains sur ses hanches.

- Et bien, vous n'y allez pas par quatre chemins. Cela me serait bien utile, oui. Néanmoins, je ne suis pas ici pour le prendre le parti d'un des enfants de la baronne votre mère. C'est pour elle que je suis ici. Je suis une saleté de renarde qui ne comprend pas les raisons d'un tel revirement Messire, excusez-moi mais il faudra m'en dire un peu plus pour me convaincre.

Est-elle rancunière ? Un tout petit peu...

Le compliment glissa sur la sorcière. Il lui en faudrait plus pour être convaincue. Elle adopta la même attitude qu'Elliot, sûre d'elle et pas prête à se laisser déstabiliser. Puisqu'il prétendait aimer les femmes de sa trempe, il allait être servi.

- Sobre vous appréciez mon caractère, alcoolisé comme un banal garçon d'écurie, votre langue est bien plus tranchante. Pourquoi ne pas travailler en accord avec votre frère plutôt que contre lui, par amour pour votre pauvre mère ? Auparavant vous ne sembliez pas avoir le moindre intérêt pour le titre de baron.