Votre copine, Amaury secoue la tête en retenant un sourire ironique. Il n’est pas certain de pouvoir catégoriser Hildegarde ainsi. Il la connait peu mais elle ne lui semble pas des plus amicales. Il n’empêche que oui, il aimerait tout de même la recroiser et savoir où elle est. Si elle s’est rendue dans les bois c’est qu’elle a dû trouver une piste pertinente.

En pénétrant dans la forêt alors que le jour décline progressivement, Amaury observe autour d’eux. Charles appelle et le Chevalier presse le pas. Ils ne savent pas depuis combien de temps la milicienne est passée par ici.

« Hâtons-nous. » fait-il en avançant tout droit.

L’exclamation puissante de la milicienne est le meilleur moyen de la retrouver. Le Duc et le Chevalier s’avancent donc dans la direction du bruit jusqu’à découvrir une intrigante maison au milieu de nulle part et d’un côté, deux silhouettes. Hildegarde et… ah. Le neveu en question est donc un enfant débraillé.

Le duo arrive à leur rencontre. « Hildegarde ? Il faut bien que cette sorcellerie soit puissante pour qu’une simple porte vous résiste. » Il dit cela avec un ton un peu ironique mais ne s’essaie pas plus à défoncer la porte. Il salue ensuite l’enfant : « Enchanté. » Charles se charge de questionner à propos du « démon » qui leur a été évoqué et Amaury observe la maison.

« Vous pensez réellement que de la magie est à l’œuvre ici ? » De prime abord, rien de visible. « N’y a-t-il pas un autre endroit par lequel on pourrait entrer ? »

Il a bien toujours l’étrange objet dans la poche de son veston mais après l’échec auprès de la tenancière, il s’abstient de le sortir pour rien. Il ne voit pas en quoi cela pourrait les aider présentement, d’ailleurs.

Bon, bon, si le de Bray n’apprécie pas le ton du gamin, Hildegarde semble en effet s’être pris un mauvais coup, plus qu’il ne l’aurait cru de prime abord. L’ironie n’est finalement pas de mise et Amaury s’abstient d’en rajouter. Son examen de la porte et de ce qui se présente à eux ne lui apporte rien de plus.

L’enfant a probablement raison. Entre la nuit qui s’installe et le fait qu’ils sont clairement dans une impasse, un retour au village s’impose. Hildegarde pourra se remettre sur pied – il l’espère – et cela leur permettra sans doute de trouver d’autres perspectives, ou des outils, comme leur souffle le dénommé Marc.

Il acquiesce aux propos de Charles, toujours teintés de raison. « Oui, c’est le mieux à faire. » Il se tourne vers la milicienne, n’osant pas trop l’approcher. Il demande quand même : « Hildegarde, vous avez besoin d’aide ? »

Qu’elle lui réponde « oui » serait plus que surprenant mais il ne perd rien à essayer.

C’est d’un œil surpris qu’Amaury écouta Hildegarde insister pour que le gamin dorme avec elle, plutôt que le ramener là où elle l’avait trouvé. Ne sachant guère l’histoire derrière ça, il préféra hausser les épaules. La milicienne a visiblement bien des facettes et il lui faudra du temps pour les appréhender. S’il vit suffisamment longtemps pour cela.

De son côté, la nuit n’a pas été pas particulièrement agréable. Il n’est pas particulièrement à l’aise dans ce village où des secrets se cachent dans toutes les maisons. S’il a rêvé de bêtes sauvages, de chats sanguinaires et de malédictions lancées par de vieux fous, il n’en dira rien.

C’est donc la tête maussade qu’il se réveille en entendant du bruit dans la pièce à côté et se lève prestement. « Bonjour. » Il n’a pas la positive attitude de Charles capable de faire de belles et longues phrases en se levant.

Une fois équipés d’outils prêtés par les deux frères, l’équipée s’apprête à partir en direction de la maison en question. Ils approchent à peine de la sortie du village qu’Amaury rebondit sur les mots du Duc un peu plus tôt.

« Hier j’ai croisé un vieux fou qui s’est rapidement volatilisé dans la nature et j’ai trouvé ceci dans une maison vide. » Nul besoin d’entrer dans les détails. Il dévoile au creux de sa main gantée l’étrange boule lumineuse qui n’a pas quitté son veston de la nuit. « Aucune idée de ce que ça peut être mais ça m’a semblé… étrange. » Son regard navigue sur les visages des deux autres miliciens, afin qu’on lui confirme qu’il n’est pas le seul à songer ainsi.

Ils sont au même endroit que la veille, Amaury est formel. Il reconnait les arbres sur le côté et la forme du sentier parcouru. C’est tout simplement incompréhensible. Vus les regards visibles sur les deux visages des autres miliciens, ils s’accordent tous là-dessus. Comment expliquer une telle disparition ? On ne parle pas d’une petite cabane de rien du tout que le vent aurait pu souffler mais bien d’une maison de pierres qu’ils ont vu de leurs yeux et dont Hildegarde a même pu tester la robustesse de la porte d’entrée.

« Si c’est de la magie, c’est de la magie noire… » Il souffle entre ses dents avec un air de mépris en balayant du regard ce qui se trouve autour d’eux. L’œuvre du démon, certainement, comme tout ce qu’ils ont pu entendre jusque-là dans ce village.

En plus du chemin emprunté pour arriver jusque-là, deux autres s’offrent à eux. Ils se doivent d’enquêter. « Il doit y avoir des traces, oui. » On ne peut pas faire disparaitre une bâtisse d’un simple claquement de doigt.

Hildegarde propose de commencer par fouiller le chemin le plus proche. Amaury acquiesce de la tête, il faut bien commencer quelque part. Il est toutefois plus surpris quand Charles l’invite à sortir l’étrange objet trouvé la veille. « Si vous y tenez. » Il n’y avait pas songé. Tandis qu’ils progressent sur le sentier il récupère la sphère dans sa poche et s’avance vers les deux miliciens, l’objet dans la paume de sa main.

« On peut essayer… mais je n’ai eu de cesse de chercher à en percer le mystère avant de m’endormir, en vain. »

Rapidement le groupe débouche sur un lac dont personne ne leur a parlé jusque-là, si sa mémoire ne lui fait pas défaut. Sans doute qu’il n’y a rien de particulier en ce lieu ? C’est en tout cas ce sur quoi le trio semble s’accorder avant qu’un bruit ne les mettent tous trois sur leurs gardes.

Comme des radars leurs yeux se portent maintenant par-delà le lac où ils reconnaissent le jeune Marc qui s’agite auprès d’une jeune fille aux cheveux rouges. Probablement celle que le garçon a évoquée, la veille.

« Comment… ?! » … est-il venu si rapidement ?

Tout va très vite, l’inconnue pousse Marc et s’enfuit. Hildegarde s’est déjà élancée vers ce dernier qui se relève est court à son tour, ne laissant guère d’autres choix à Charles et Amaury que d’en faire de même. La main crispée autour de l’orbe, Amaury suit ses collègues jusqu’à l’étrange maison. Sans trop de réflexion, il s’engouffre lui aussi à l’intérieur, à deux pas derrière Charles.